La lettre juridique n°189 du 10 novembre 2005

La lettre juridique - Édition n°189

Éditorial

Préavis ou discussion ? : les vertus du dialogue social permanent

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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la rédaction

Le 27 Mars 2014


Albert Camus n'avait-il pas tort, lorsqu'il clamait : "Nous sommes lucides. Nous avons remplacé le dialogue par le communiqué". Et d'aucuns d'apprendre leur licenciement, au mieux sur le perron de leur entreprise, mais parfois dans les colonnes d'un quotidien de presse, par le truchement d'un communiqué lapidaire, avant que tout dialogue social n'ait été préalablement engagé. Heureusement, le fait n'est pas commun, mais il est le symbole empirique du peu de dialogue social qui caractérise notre pays. Pourtant, "le dialogue paraît en lui-même constituer une renonciation à l'agressivité" (Jacques Lacan). Les entreprises comme leurs salariés ont tout intérêt à favoriser ce dialogue social, afin qu'il devienne permanent, comme en Allemagne, en Suède ou en Espagne, et non la carte des seules sorties de "crise". Au contraire, la France est dotée d'un dispositif reposant sur une procédure d'information et de consultation, avec tout le rituel qui en découle, laissant une place de moindre importance à la négociation collective : "Plus on légifère, moins il y a de dialogue social" (Bertrand Collomb, président du conseil d'administration de Lafarge, in Le Figaro), CQFD. C'est toute la problématique relevée lors d'une table ronde organisée par l'IRES, le 27 octobre dernier, dans l'hémicycle du Conseil économique et social. Pourtant, les salariés ont tout à gagner dans une négociation permanente. En témoigne un arrêt rendu par la Chambre sociale de la Cour de cassation rendu le 25 octobre dernier, selon lequel le licenciement fondé sur une cause autre que celles énumérées par la convention collective applicable est dépourvu de cause réelle et sérieuse. Maintenant, chacun jugera du pouvoir de négociation contractuel ou conventionnel des salariés et de leurs représentants syndicaux à la lumière de la volonté des entreprises d'apaiser un climat social assombri par les récentes "restructurations"... En effet, l'un des moyens de garantir raisonnablement l'emploi et d'écarter toute peur sociale ne serait-il pas de prévoir, à l'occasion de ces restructurations, une négociation sur les causes conventionnelles acceptables de licenciement ? "Se trop ériger en négociateur n'est pas toujours la meilleure qualité pour la négociation" écrivit le Cardinal de Retz, mais si "[nous ne devons] jamais [négocier] avec nos peurs. [...] n'ayons jamais peur de négocier" (John Fitzgerald Kennedy). Les éditions juridiques Lexbase vous invitent à lire le commentaire de Gilles Auzero, Professeur à l'Université Montesquieu Bordeaux IV, De la nécessité de respecter les dispositions limitant le droit de licencier de l'employeur, ainsi que le compte-rendu réalisé par Charlotte Figerou, Rédactrice en chef de Lexbase Hebdo - édition sociale, Les restructurations, nouveaux enjeux.

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Social général

[Jurisprudence] Conclusion dolosive d'une convention AS-FNE

Réf. : Cass. soc., 12 octobre 2005, n° 03-41.762, Société Ingenierie financière et immobilière de la Réunion (IFIRUN), venant aux droits de la société Novha c/ M. André Auceil, F-P+B (N° Lexbase : A8316DK9)

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Le 07 Octobre 2010

Il existe plusieurs dispositifs de préretraite : l'allocation de remplacement pour l'emploi (ARPE), dispositif propre à l'Unédic et en voie d'extinction ; la cessation d'activité de certains travailleurs salariés (CATS) ; la cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (CAATA) ; l'allocation spéciale du fonds national de l'emploi (AS-FNE) ; les préretraites privées (également appelées préretraites d'entreprise) ; enfin, la préretraite progressive, dispositif en voie d'extinction (la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites N° Lexbase : L9595CAM a abrogé la préretraite progressive depuis le 1er janvier 2005). Les préretraités bénéficiant de dispositifs publics sont de moins en moins nombreux (1). Les départs anticipés sont souvent perçus comme un facteur de solidarité entre les générations et comme un outil efficace pour rétablir un équilibre dans les pyramides des âges d'établissements vieillissants. Ce double aspect a conduit au développement, en France, d'une véritable culture de la préretraite (2). Ce consensus a pourtant été remis en cause par la loi du 21 août 2003, laquelle a recentré les dispositifs de préretraite autour de deux dispositifs : CATS (pénibilité) et AS-FNE. La loi a assujetti les avantages de préretraites "maison" à une contribution spécifique, à la charge exclusive des employeurs.
Décision

Cass. soc., 12 octobre 2005, n° 03-41.762, Société Ingenierie financière et immobilière de la Réunion (IFIRUN), venant aux droits de la société Novha c/ M. André Auceil, F-P+B (N° Lexbase : A8316DK9)

Rejet (CA de Saint-Denis-de-la-Réunion, chambre sociale, 17 décembre 2002)

Textes applicables : C. trav., art. L. 322-2 (N° Lexbase : L8933G7Y) ; C. trav., art. L. 322-4 (N° Lexbase : L6519DIB) ; C. trav., art. R. 322-1 (N° Lexbase : L0069ADW) ; C. trav., art. R. 322-7 (N° Lexbase : L0086ADK) ; C. civ., art. 1108 et s. (N° Lexbase : L1014AB8).

Mots-clefs : convention AS-FNE ; préretraite ; vice du consentement (dol) ; fraude

Lien bases :

Résumé

C'est à la date à laquelle l'adhésion à la convention AS-FNE a été frauduleusement obtenue qu'il y a lieu d'apprécier l'existence du préjudice du salarié né de la perte de sa rémunération antérieure.

Faits

1. M. Auceil, salarié de la société Novha, a été licencié pour motif économique le 25 octobre 1996. La lettre de licenciement fait état de la décision de la société Réunion habitat, qui détenait l'intégralité des parts de la société Novha, de la suppression de l'activité de celle-ci.

2. Le salarié a adhéré le 12 février 1997 à la convention d'allocations spéciales du Fonds national de l'emploi (AS-FNE). Ayant appris la poursuite de l'activité de la société Novha sous une autre dénomination, le salarié a saisi la juridiction prud'homale.

3. L'arrêt confirmatif rendu par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion le 17 décembre 2002 alloue au salarié une somme à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

4. Pourvoi formé par l'ancien employeur, la Société Novha, rejeté.

Solution

La cour d'appel, dans l'exercice de son pouvoir souverain et sans inverser la charge de la preuve, a constaté l'existence d'une fraude de l'employeur ayant conduit le salarié à adhérer à la convention AS-FNE. C'est à la date à laquelle l'adhésion à la convention AS-FNE a été frauduleusement obtenue qu'il y a lieu d'apprécier l'existence du préjudice du salarié né de la perte de sa rémunération antérieure

Observations

La conclusion d'une convention AS-FNE présente des avantages indéniables pour les employeurs, qui y ont recours très largement ; pour les salariés, l'avantage financier est certain, puisqu'ils trouvent là un dispositif efficace pour assurer une transition vers la retraite. Mais, en contrepartie, la jurisprudence leur retire le droit de contester le motif économique du licenciement, sauf fraude ou vice du consentement (I). Lorsque le salarié a été victime d'un comportement dolosif de l'employeur l'ayant conduit, malgré lui, à conclure une telle convention AS-FNE, il peut obtenir réparation, comme le montre l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 12 octobre 2005 (II).

I. Eléments constitutifs de la fraude d'un employeur dans la conclusion d'une convention AS-FNE

A. Modes de contestation du licenciement dans l'hypothèse d'une convention AS-FNE

La situation du salarié adhérant d'une convention AS-FNE déroge au droit commun de la contestation du licenciement économique collectif, portant sur la cause réelle et sérieuse ou sur le motif économique du licenciement. En effet, selon la jurisprudence, lorsqu'un salarié licencié pour motif économique, qui a adhéré à la convention AS-FNE, entend remettre en cause la légitimité de la rupture de son contrat de travail, il doit établir une fraude de l'employeur ou un vice du consentement.

Les salariés ordinaires ne peuvent plus contester la régularité (la légitimité) du licenciement en cas d'adhésion à un dispositif tel que l'AS-FNE (Cass. soc., 27 janvier 1994, n° 90-46.034, Société Pomona c/ M. Leclerc et autres, publié N° Lexbase : A0469ABY ; Cass. soc., 14 oct.obre 1997, n° 95-40.599, Mme Nicole Pruvost c/ Association Fontainebleau Loisirs et Culture (FLC), inédit N° Lexbase : A8367AYK ; Cass. soc., 24 septembre 2002, n° 00-42.636, Société Raynier et Marchetti c/ M. Belaïd Amoura, FS-P+B N° Lexbase : A4890AZ7 : à moins d'établir une fraude de leur employeur ou l'existence d'un vice du consentement, les salariés licenciés pour motif économique, qui ont personnellement adhéré à la convention passée entre leur employeur et l'Etat, laquelle, compte tenu de leur classement dans la catégorie des salariés non susceptibles d'un reclassement, leur assure le versement d'une allocation spéciale jusqu'au jour de leur retraite, ne peuvent remettre en discussion la régularité et la légitimité de la rupture de leur contrat de travail même dans le cas où la convention leur a été proposée dans le cadre d'un plan social dont ils entendent contester la validité ; Cass. soc., 30 avril 2003, n° 01-41.171, M. Gérard Vallois c/ Société Compaq Computer, FS-D N° Lexbase : A7572BSA).

La jurisprudence n'a pas toujours été aussi déterminée dans cette solution, puisqu'elle a admis, au contraire, dans certaines décisions, que le salarié puisse contester la cause réelle et sérieuse de son licenciement, même en cas d'adhésion à une convention AS-FNE (Cass. soc., 8 juin 1999, n° 97-41.498, Société IBM France c/ M. Ravel et autre, publié N° Lexbase : A4740AGN : reconnaissant au salarié protégé, adhérant d'une convention AS-FNE, le droit de contester la rupture du contrat de travail pour défaut d'autorisation de l'inspection du travail, car le salarié protégé jouit d'un statut protecteur ; Cass. soc., 5 octobre 1999, n° 97-41.826, M. Daniel Vigneron c/ Société Seco tools France, société anonyme, inédit N° Lexbase : A1546CNL : admettant que le salarié conteste la rupture de son contrat de travail consécutive à l'adhésion d'une convention AS-FNE qui avait pour objet de transformer son emploi à temps plein en emploi à temps partiel).

En revanche, l'adhésion d'un salarié licencié pour motif économique à une convention de préretraite FNE, lorsqu'elle est postérieure au licenciement, n'a pas pour effet d'annuler celui-ci, en sorte que le contrat de travail a bien été résilié par l'employeur : il appartient alors aux juges d'examiner le bien-fondé du licenciement. La Cour de cassation refuse le principe selon lequel, quel que soit le moment auquel intervient l'adhésion à la convention AS-FNE, celle-ci rend impossible toute contestation du motif économique du licenciement (Cass. soc., 20 novembre 2002, n° 00-46.758, F-D N° Lexbase : A0602A43).

B. Régime de la fraude d'un employeur dans la conclusion d'une convention AS-FNE

  • Charge de la preuve

Selon l'employeur, il appartient au salarié licencié pour motif économique, qui a adhéré à la convention AS-FNE, s'il désire remettre en cause la légitimité de la rupture de son contrat de travail, d'établir une fraude de l'employeur ou un vice du consentement.

En reprochant à la société Ifirun de ne pas justifier la décision du conseil d'administration de la société Habitat réunion relative à l'arrêt de l'activité de la société Novha, ni de la teneur de sa nouvelle activité et de sa différence avec celle de la société Novha, ainsi que de ne pas rapporter la preuve de l'absence d'embauche d'un salarié aux mêmes fonctions que M. Auceil, la cour d'appel aurait inversé la charge de la preuve.

Mais, pour la Cour de cassation, les juges du fond exercent en la matière un pouvoir souverain. En l'espèce, sans inverser la charge de la preuve, la cour d'appel a constaté l'existence d'une fraude de l'employeur ayant conduit le salarié à adhérer à la convention AS-FNE.

  • Eléments constitutifs de la fraude

La jurisprudence retient la formule de "fraude de l'employeur ou existence d'un vice du consentement" pour autoriser le salarié à contester le motif économique du licenciement ou à demander réparation pour absence de cause réelle et sérieuse. En réalité, l'expression "fraude de l'employeur ou existence d'un vice du consentement" recouvre la fraude, au sens du droit pénal, d'une part, et le vice du consentement, au sens du droit des obligations (C. civ., art. 1108 s. N° Lexbase : L1014AB8), d'autre part.

Mais, le droit pénal n'a pas sa place, ici, puisque la fraude n'est pas, en tant que telle, visée par le Code pénal, l'incrimination d'escroquerie (C. pén. art. 313-3 N° Lexbase : L1902AME) étant la plus proche. Cette incrimination, en matière de convention de préretraite, n'a pas de sens.

Aussi, l'application pure et simple du droit civil (vices du consentement) semble la plus adaptée à la conclusion d'une convention AS-FNE, car l'employeur peut poursuivre des intérêts propres à ce qu'une convention AS-FNE soit conclue, notamment pour réduire le coût d'une opération de restructuration (donnant lieu à la mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi), sans que cet intérêt rencontre celui du salarié.

L'objet de la convention AS-FNE (C. civ., art. 1126 N° Lexbase : L1226ABZ) et sa cause (C. civ., art. 1131 N° Lexbase : L1231AB9) ne posent aucune difficulté, car les dispositions légales et surtout réglementaires, fixent le régime juridique de la convention AS-FNE. Le débat est ouvert, au final, au regard des vices du consentement (C. civ., art. 1109 N° Lexbase : L1197ABX) : erreur, violence, dol.

L'employeur peut inciter un salarié à conclure une convention AS-FNE et vicier son consentement, sur la base de l'erreur et du dol : la violence, sauf psychologique peut-être, ne paraît pas très pertinente. En l'espèce, le comportement de l'employeur a conduit le salarié, malgré lui, à conclure une convention AS-FNE. La cour d'appel se réfère à la notion de fraude, improprement, la qualification de dol (C. civ., art. 1116 N° Lexbase : L1204AB9) convenant mieux.

  • Elément matériel de la fraude

En l'espèce, selon l'employeur, l'existence d'une "fraude de l'employeur ou d'un vice du consentement" ne peut se déduire de la seule inexactitude de la raison économique mentionnée dans la lettre de licenciement. La cour d'appel avait pourtant relevé que la société Ifirun avait continué son activité antérieure contrairement à ce qui était indiqué dans la lettre de licenciement, cet élément constituant l'élément matériel de la fraude. La Cour de cassation n'est pas revenue sur cette analyse.

  • Elément moral de la fraude

L'obstruction de l'employeur à justifier de son activité réelle suffisait, selon les juges du fond, à en caractériser l'élément moral. Mais la convention d'allocation spéciale du FNE a fait l'objet d'une adhésion par erreur qui, selon l'employeur, ne caractérise pas l'existence ni d'une fraude de l'employeur, ni d'un vice du consentement. L'argument n'a pas convaincu les juges du fond.

II. Réparation du préjudice né la fraude d'un employeur dans la conclusion d'une convention AS-FNE

A. Arbitrage entre conclusion d'une convention AS-FNE et poursuite du contrat de travail

Il faut rappeler que le préretraité, au titre de l'AS-FNE, perçoit une allocation qui s'élève à 65 % du salaire journalier de référence pour la part de celui-ci comprise dans la limite du plafond retenu pour le calcul des cotisations de sécurité sociale (29 712 euros par an, en 2004). A cela, peut s'ajouter 50 % du salaire de référence, pour la part de ce salaire comprise entre une et deux fois le plafond retenu par la Sécurité sociale (entre 29 712 euros et 59 424 euros par an, en 2004). L'allocation minimale journalière est de 27,35 euros au 1er janvier 2004.

Le préretraité perçoit cette allocation jusqu'à 60 ans ou, au-delà, jusqu'à l'obtention du nombre de trimestres de cotisations requis afin de bénéficier de la retraite à taux plein, mais au plus tard jusqu'à 65 ans.

L'employeur qui propose une convention AS-FNE (le plus souvent, dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi) voit dans ce dispositif de nombreux avantages : pas de procédure de licenciement à mettre en place, parce que la conclusion d'une convention AS-FNE vaut, en elle-même, rupture sui generis du contrat de travail ; l'employeur satisfait à son obligation de reclassement, auquel il est tenu s'il doit mettre en place un plan de sauvegarde de l'emploi.

Le salarié doit, de son côté, calculer les avantages financiers à la conclusion d'une convention AS-FNE, ou apprécier les avantages conférés par le bénéfice d'autres dispositifs de reclassement que l'employeur pourrait lui proposer dans le cadre d'un plan de reclassement (reclassement interne, mutation...).

B. Calcul du préjudice d'une convention AS-FNE conclue en présence d'un vice du consentement

En l'espèce, la cour d'appel avait caractérisé l'existence d'une "fraude de l'employeur ou d'un vice du consentement du salarié". La question qui s'est alors posée était la suivante : la perte de revenus résultant de l'adhésion à la convention FNE constitue-t-elle un préjudice ? Ce préjudice est-il en relation de causalité avec la "fraude ou le vice du consentement" ?

Selon l'employeur, le préjudice subi par le salarié n'est en relation de causalité que s'il est établi que le salarié, s'il n'avait pas adhéré à la convention FNE, aurait continué à travailler dans l'entreprise avec un niveau de salaire supérieur à l'allocation perçue du FNE.

En l'espèce, la société Ifirun indiquait qu'il n'existait aucun poste pour M. Auceil après son licenciement, le seul salarié embauché après cette date ayant des fonctions d'ingénieur gestionnaire de patrimoine, radicalement différentes de celles de conducteur d'opération pouvant être assumées par M. Auceil. Pourtant, les juges du fond ont accordé au salarié une somme équivalente à la différence entre son salaire moyen net mensuel sur l'année 1996 et les sommes perçues au titre de la convention AS-FNE.

Selon l'employeur, la cour d'appel, en l'espèce, aurait dû constater que M. Auceil aurait pu continuer à travailler pour la société Ifirun, s'il n'avait pas adhéré à la convention AS-FNE ; la cour d'appel aurait dû a fortiori relever qu'il aurait ainsi perçu un salaire supérieur aux allocations FNE.

La Cour de cassation rejette le moyen du pourvoi : c'est à la date à laquelle l'adhésion à la convention AS-FNE a été frauduleusement obtenue qu'il y a lieu d'apprécier l'existence du préjudice du salarié né de la perte de sa rémunération antérieure, si bien que la cour d'appel n'était pas tenue de répondre à des conclusions inopérantes.

Christophe Willmann
Professeur à l'Université de Haute Alsace


(1) D. Anglaret, Les dispositifs de cessation anticipée d'activité publics ou conventionnels, Dares, 1ère information, 1ère synthèse, janv. 2003, n° 03.1.
(2) D. Anglaret et M. Massin, Dares, Premières informations et Premières synthèses, Novembre 2002 - N° 45.1

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Social général

[Evénement] Les restructurations, nouveaux enjeux

Réf. : Les entretiens de l'IRES, "Les restructurations, nouveaux enjeux", jeudi 27 octobre 2005

Lecture: 6 min

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par Propos recueillis par Charlotte Figerou, Rédactrice en chef de Lexbase Hebdo - édition sociale

Le 07 Octobre 2010

S'il est un sujet social d'actualité et d'inquiétude en ce moment, c'est bien celui des restructurations et de ses multiples enjeux. La multitude d'opérations de fusions-absorptions, de concentrations, d'externalisations... avec, souvent, à la clef, des plans de sauvegarde de l'emploi, en témoigne. Or, le phénomène ne se cantonne pas à un niveau national ou européen, mais se retrouve à l'échelle internationale : le BIT a récemment publié une étude sur les restructurations et la Commission européenne a, quant à elle, diffusé une communication relative aux restructurations et à l'emploi. Les restructurations prennent, aujourd'hui, une forme plus diffuse et durable que par le passé. On assiste certes à une succession d'épisodes de crises récurrentes, mais les effets des déstabilisations sont plus profonds. Ces effets se manifestent toujours par des suppressions d'emploi et des licenciements économiques, mais pas seulement. Le phénomène plus profond de remaniement de l'emploi conduit à la précarisation de l'emploi via la banalisation des contrats précaires, qui finissent par prendre le dessus sur le contrat à durée indéterminée. Dans l'entreprise, le CDI n'est plus la norme ! En outre, il ne faut pas négliger les effets des restructurations sur les salariés qui restent dans l'entreprise. Pour ces derniers, les reconfigurations entraînent immanquablement une intensification du travail, voir une pénibilité pour le salarié à s'adapter aux nouveaux enjeux.

Pour aborder un sujet aussi sensible que celui des restructurations, l'IRES a organisé deux tables rondes, l'une axée sur le dialogue social et l'autre sur le reclassement, lors des entretiens qui se sont déroulés le 27 octobre dernier à l'hémicycle du Conseil économique et social. Faisant intervenir des acteurs provenant d'horizons divers, ce rendez-vous a été l'occasion de faire le point sur les travaux qui ont été menés par l'IRES depuis plusieurs mois sur ce thème.

  • Première table ronde : Les restructurations, objet de dialogue social

Selon Marie Raveyre, chercheuse à l'IRES, avant de se poser la question des restructurations comme un objet de dialogue social, il convient de s'interroger sur la nature des restructurations elles-mêmes. Or, ces restructurations auraient changé de nature, adoptant une forme désormais plus diffuse, plus continue, plus multiforme. Même si les restructurations se manifestent toujours sous forme de "crises", on assisterait davantage, aujourd'hui, à des restructurations de type offensives de la part d'entreprises en bonne santé. La course au changement et la recherche permanente de flexibilité conduisent à des remaniements permanents au sein de l'entreprise. Aussi, pourrait-on avancer que les licenciements collectifs et la fermeture d'établissements ne constituent que la face visible d'un mouvement plus diffus et constant de la structure des entreprises.

Les formes de restructurations sont, quant à elles, également diversifiées et varient suivant les entreprises et les secteurs d'activité.

Il est, à l'heure actuelle, difficile d'analyser ces restructurations, ce qui n'est pas sans conséquences sur la conduite du dialogue social.

Où, quand et comment conduire ce dialogue social ? Choisir le niveau le plus pertinent de négociation n'est pas chose aisée, tant on assiste aujourd'hui à une multiplication des niveaux de prise de décision. D'un côté, il faut prendre en considération le niveau local, "micro" ; de l'autre, on ne peut occulter un déplacement plus global au niveau national et international. Face à ce constat, quel niveau de négociation privilégier ? Comment doit s'opérer l'articulation entre ces différents niveaux ? La question est ouverte..

En outre, comment faire en pratique pour anticiper sur les restructurations, le dialogue social s'engageant généralement plus volontiers en période de crise ?

Cette extension du dialogue social à la fois dans le temps et dans l'espace doit conduire à davantage de réactivité ainsi qu'à une action inscrite dans la durée, qui prendrait en compte la diversité des cas concrets, particuliers.

Danielle Kaisergruber, consultante et Directeur de DKRC a, pour sa part, analysé les spécificités du dialogue social français à la lumière d'autres pays de l'Union européenne. Si le bilan de cette étude comparative fait apparaître de nombreuses différences entre pays d'Europe, en ressort également la faiblesse de la place laissée au dialogue social en France par rapport à l'Allemagne (où le PSE doit être négocié), la Suède (90 % des restructurations sont négociées), l'Espagne (les autorisations administratives de licenciements sont négociées)... Au contraire, la France, estime Danielle Kaisergruber, est dotée d'un dispositif reposant sur une procédure d'information et de consultation, avec tout le rituel qui en découle, laissant une place de moindre importance à la négociation collective.

En France, sont discutées et négociées les mesures alternatives au licenciement, telles que la réduction du temps de travail, les différentes formes d'organisation du travail ou encore le jeu sur les rémunérations. Or, dans les autres pays d'Europe, c'est en permanence que le dialogue social porte sur ces sujets, tout au long de la vie des entreprises.

Par contre, la France a une "longueur d'avance" sur les autres pays d'Europe en matière de reclassement, faisant intervenir dans le suivi de ces mesures de reclassement les organisations syndicales. Au contraire, en Allemagne, c'est l'enveloppe financière qui sera négociée et non le reclassement du salarié.

  • Deuxième table ronde : Quel partage des responsabilités de reclassement ?

Selon Carole Tuchszirer, chercheuse à l'IRES, les résultats du reclassement en France sont très médiocres. Tout d'abord parce que moins d'un salarié sur deux intègre la cellule de reclassement mise à sa disposition. La désaffection pour ce dispositif proviendrait, selon Carole Tuchszirer, du manque d'information dont souffre le salarié sur de telles mesures et sur la nature de ce dispositif, ainsi que de l'absence de coordination entre les différents acteurs de ces cellules de reclassement. Second constat : moins d'un salarié sur deux renoue avec un emploi stable au sein de cette cellule. Pourquoi un tel constat d'échec ?

Et surtout, qui anime ces cellules ? Si elles relèvent, en principe, de la responsabilité de l'entreprise, force est de constater qu'en pratique, elles ne font plus partie de l'entreprise...

De plus, on se trouve face à un manque cruel de coopération, au sein de ces cellules de reclassement, entre la cellule elle-même, l'entreprise et le service public de l'emploi (SPE).

Cette absence de coopération entre les différents acteurs de la procédure de licenciement et de reclassement se retrouve également au stade du plan de sauvegarde de l'emploi, puisque son élaboration relève du seul pouvoir de l'employeur (le PSE reste un acte unilatéral de l'employeur), l'inspection du travail n'ayant qu'un rôle cantonné à la vérification du nombre et de la variété de ses mesures et le comité d'entreprise n'ayant, de son côté, aucun lien avec les cabinets de reclassement.

De plus, soulève Carole Tuchszirer, la responsabilité des acteurs, selon les époques et les gouvernements, oscille du "tout entreprise" au "tout collectivité publique" (c'est, par exemple, aujourd'hui le cas avec la mise en oeuvre des conventions de reclassement personnalisé). Cette représentation polaire laisserait trop peu, voire pas du tout, de place pour une coopération des différents acteurs qui, tous, disposent d'un certain nombre de ressources.

De tels propos doivent toutefois, estime le Professeur Antoine Lyon-Caen, être tempérés. Il convient, en effet, de relativiser l'analyse de l'efficacité des cellules de reclassement, qui ne représentent au final qu'un petit aspect de la question du reclassement. Le reclassement apparaît, avant tout, comme un objet de négociation dans l'entreprise ou comme le fruit de mesures unilatérales de l'employeur. La cellule apparaît donc assez tardivement dans la procédure de reclassement et ne constitue pas un bon indicateur pour mesurer l'efficacité du reclassement. Autrement dit, les cellules de reclassement ne sont pas le seul point d'entrée qui s'offre au salarié menacé de licenciement !

Même si les entreprises sont responsabilisées dans la procédure de reclassement, elles ne sont pas les seules en scène. Il faut ici garder à l'esprit l'idée que le reclassement n'est pas, pour l'entreprise, une obligation de résultat, celle-ci pouvant montrer son impossibilité à s'acquitter d'une telle tâche. Le poids de la responsabilité du reclassement est alors reporté sur la collectivité. D'ailleurs, le concept de proportionnalité, permettant aux entreprises d'agir dans la mesure de leurs moyens, confirme bien cette idée.

L'obligation de reclassement n'a d'ailleurs été inventée ni par les partenaires sociaux, ni par le législateur, mais par le juge. L'entreprise doit ainsi, rappelle celui-ci, étudier les possibilités de reclassement avant même que ne soit élaboré le plan de sauvegarde de l'emploi. Le juge a donc inventé l'obligation de reclassement et l'a généralisée en l'imposant à toutes les entreprises, petites et grandes. Aussi, si l'intervention du juge dans le débat sur les restructurations a été critiquée, c'est à tort, selon le Professeur Lyon Caen, pour qui le juge contribue à un débat et au pluralisme des évaluations.

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Fiscalité des entreprises

[Jurisprudence] Subvention d'équipement et TVA

Réf. : CJCE, 6 octobre 2005, aff. C-243/03, Commission des Communautés européennes c/ République française (N° Lexbase : A6729DKG)

Lecture: 17 min

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par Yolande Sérandour, Professeur à la Faculté de droit de Rennes, Directrice du Master de Droit Fiscal des Affaires de Rennes et du département Droit fiscal du CDA

Le 07 Octobre 2010

Une subvention peut-elle diminuer la TVA déductible de l'assujetti redevable de la TVA sur toutes ses activités dans le champ d'application de la TVA ? En cas d'exercice d'activités exonérées, un Etat membre peut-il prévoir un régime de limitation de la TVA déductible plus favorable que celui prévu par la sixième directive-TVA (N° Lexbase : L9279AU9) ? Telles étaient les questions auxquelles devait répondre la CJCE le 6 octobre 2005, la Commission ayant décidé d'engager une procédure en manquement aux obligations découlant de la sixième directive-TVA contre la France et l'Espagne (CJCE, 6 octobre 2005, aff. C-204/03, Commission des Communautés européennes c/ Royaume d'Espagne N° Lexbase : A6728DKE). A ces deux questions, la CJCE apporte les réponses suivantes :

"En prévoyant un prorata de déduction de la taxe sur la valeur ajoutée supportée par les assujettis n'effectuant que des opérations taxées et en instaurant une règle particulière limitant la déductibilité de la TVA afférente à l'achat de biens ou de services financés au moyen de subventions, le Royaume d'Espagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du droit communautaire et, notamment, des articles 17, paragraphes 2 et 5, et 19 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme, telle que modifiée par la directive 95/7/CE du Conseil, du 10 avril 1995 ;

En instaurant une règle particulière limitant la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à l'achat de biens d'équipement en raison du fait qu'ils ont été financés au moyen de subventions, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du droit communautaire et, notamment, des articles 17 et 19 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme, telle que modifiée par la directive 95/7/CE du Conseil, du 10 avril 1995".

Les subventions d'équipement n'influencent pas l'étendue du droit à déduction de l'assujetti dont toutes les activités dans le champ d'application de la TVA sont imposables. Le prorata ne concerne pas l'assujetti-redevable total. Il ne s'applique qu'aux assujettis-redevables partiels. Etant soumis au système du prorata, ces redevables partiels ne peuvent se voir opposer aucune autre limitation de leur droit à déduction.

1. Les subventions d'équipement perçues par le redevable total

L'article 17, paragraphe 2, a, de la sixième directive-TVA dispose que "dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de ses opérations taxées, l'assujetti est autorisé à déduire de la taxe dont il est redevable [...] la taxe sur la valeur ajoutée due ou acquittée à l'intérieur du pays pour les biens qui lui sont ou lui seront livrés et pour les services qui lui sont ou lui seront rendus par un autre assujetti". La déduction de la TVA ayant grevé un prix de revient ne dépend que de l'existence d'une TVA d'aval. En cela, l'article 271 du CGI suit la sixième directive-TVA lorsqu'il dispose : "I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. [...]. II. 1. Dans la mesure où les biens et services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est [notamment] : a) Celle qui figure sur les factures d'achat qui leur sont délivrées par leurs vendeurs, dans la mesure où ces derniers étaient légalement autorisés à la faire figurer sur lesdites factures ; [...]".

Le paragraphe 5 de l'article 17 de la sixième directive-TVA complète, à propos des redevables partiels, le paragraphe 2 précité : "En ce qui concerne les biens et les services qui sont utilisés par un assujetti pour effectuer à la fois des opérations ouvrant droit à déduction visées aux paragraphes 2 et 3 et des opérations n'ouvrant pas droit à déduction, la déduction n'est admise que pour la partie de la taxe sur la valeur ajoutée qui est proportionnelle au montant afférent aux premières opérations. Ce prorata est déterminé pour l'ensemble des opérations effectuées par l'assujetti conformément à l'article 19 [...]". La transposition française de ce texte résulte de l'article 2 du décret n° 94-452, du 3 juin 1994, relatif au droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée et modifiant l'annexe II au CGI (N° Lexbase : L4161GUN) codifié sous l'article 212 de l'annexe II au CGI . Ce dernier, en son paragraphe 1er alinéa 1er, prévoit que : "Les redevables qui, dans le cadre de leurs activités situées dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, ne réalisent pas exclusivement des opérations ouvrant droit à déduction sont autorisés à déduire une fraction de la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les biens constituant des immobilisations utilisées pour effectuer ces activités".

A la lettre, la transposition française paraît envisager l'application du prorata à toutes les immobilisations, nonobstant l'éventuelle affectation totale à la réalisation d'opérations ouvrant droit à déduction. Une telle interprétation heurterait le droit communautaire car l'article 17-5 précité n'évoque la déduction partielle qu'à propos des dépenses à usage mixte. La jurisprudence communautaire nous enseigne que seule l'affectation réelle de chaque dépense détermine le principe et l'étendue du droit à déduction (CJCE, 11 juillet 1991, aff. C-97/90, Hansgeorg Lennartz c/ Finanzamt München III, § 15 N° Lexbase : A7275AHW ; CJCE, 6 avril 1995, aff. C-4/94, BLP Group plc c/ Commissioners of Customs & Excise, § 25 et 27 N° Lexbase : A9796AUD  ; CJCE, 15 janvier 1998, aff. C-37/95, Belgische Staat c/ Ghent Coal Terminal NV,  § 18 N° Lexbase : A9657AU9 ; CJCE, 8 juin 2000, aff. C-400/98, Finanzamt Goslar c/ Brigitte Breitsohl, § 35 N° Lexbase : A1912AWQ ; CJCE, 8 juin 2000, aff. C -98/98, Commissioners of Customs and Excise c/ Midland Bank plc., § 32 N° Lexbase : A2016AII  ; CJCE, 22 février 2001, aff. C-408/98, Abbey National plc c/ Commissioners of Customs & Excise, § 37 à 40 N° Lexbase : A1648AWX). Le droit de déduire toute la TVA ayant grevé le prix de revient d'une opération taxée a été expressément rappelé par monsieur l'Avocat général Philippe Léger, au point 5 de ses conclusions à propos de l'affaire EDM (CJCE, 29 avril 2004, aff. C-77/01, Empresa de Desenvolvimento Mineir o SGPS SA (EDM), anciennement Empresa de Desenvolvimento Mineiro SA (EDM) c/ FazendaPública N° Lexbase : A9953DBA ; lire Yolande Sérandour, Les produits financiers accessoires exclus du calcul du droit à déduction de la TVA, Lexbase Hebdo n° 123, du 3 juin 2004 - édition fiscale N° Lexbase : N1766ABZ). Ledit arrêt "EDM", au point 53, précise que "en vertu de l'article 17, paragraphe 5, de la sixième directive-TVA, si l'assujetti utilise des biens et/ou des services, sur lesquels il a acquitté la TVA en amont, pour effectuer à la fois des opérations ouvrant droit à déduction et des opérations n'ouvrant pas droit à déduction, il est nécessaire de calculer, conformément à l'article 19 de cette directive, le prorata de déduction à appliquer au montant de la TVA acquittée en amont".

Le Conseil d'Etat respecte le droit communautaire en excluant toute déduction en cas d'affectation de biens ou services à des opérations exonérées de TVA (CE, Contentieux, 21 février 1979, n° 08070, Société anonyme Socofrein N° Lexbase : A9549AII ; CE,  26 juillet 1985, n° 34907). L'administration fiscale ne peut, donc, pas, contrairement à ses prétentions, imposer l'application du prorata à toutes les dépenses immobilisées (instruction du 8 septembre 1994, BOI n° 3 CA-94, n° 127 N° Lexbase : X0377AA9  ; Doc. adm., 3 D-17, 2 novembre 1996, n° 3). Cette position n'aurait aucune conséquence fâcheuse si les activités non soumises à la TVA pouvaient être sectorisées sans obstacle. En effet, en vue de permettre une récupération complète de la TVA sur les immobilisations affectées aux opérations imposables, il suffirait de distinguer comptablement entre les activités imposables ouvrant droit à déduction totale et les activités exonérées excluant l'exercice d'un tel droit. Malheureusement, l'administration fiscale n'entend pas faciliter la sectorisation.

Aux associations exerçant des activités commerciales, l'administration suggère la sectorisation des activités lucratives en vue de conserver l'exonération si l 'activité lucrative diffère de l'activité non lucrative (instruction du 15 septembre 1998, BOI n° 4 H-5-98, n° 67 et 68 N° Lexbase : X0387AAL ; instruction du 16 février 1999, BOI n° 4 H-1-99, n° 15 et s. N° Lexbase : X0433AAB). Selon l'administration, la sectorisation supposerait des activités différentes par nature, par les moyens employés, par la comptabilisation et par des règles différentes de TVA. Cette condition ne respecte pas le droit communautaire, lequel propose la sectorisation de l'activité imposable pour partie et exonérée pour l'autre. L'article 17, paragraphe 5, de la sixième directive-TVA permet aux Etats membres d'offrir la sectorisation en cas d'utilisation des dépenses "pour effectuer à la fois des opérations ouvrant droit à déduction visées aux paragraphes 2 et 3 et des opérations n'ouvrant pas droit à déduction [...]". Pour le calcul du prorata prévu à l'article 17, l'article 19 reprend la même distinction. Or, selon la Cour de Luxembourg, la notion d'opérations n'ouvrant pas droit à déduction s'entend des opérations exonérées.

En effet, elle exclut du calcul du prorata les dividendes, au motif qu'ils sont hors du champ d'application de la TVA au regard des articles 2 et 4 de la sixième directive-TVA (CJCE, 22 juin 1993, aff. C-333/91, Sofitam SA (anciennement Satam SA) c/ Ministre chargé du Budget N° Lexbase : A7257AHA ; CJCE, 14 novembre 2000, aff. C-142/99, Floridienne SA et Berginvest SA c/ Etat belge N° Lexbase : A2001AIX). Elle considère que la simple acquisition et la seule détention de droits sociaux ne constituent pas des activités économiques conférant la qualité d'assujetti (CJCE, 20 juin 1991, aff. C-60/90, Polysar Investments Netherlands BV c/ Inspecteur der Invoerrechten en Accijnzen, n° 13 N° Lexbase : A7267AHM ; CJCE, 27 septembre 2001, aff. C-16/00, Cibo Participations SA c/ Directeur régional des impôts du Nord-Pas-de-Calais N° Lexbase : A5734AWB). Les fruits d'une participation ne sont pas la contrepartie d'une activité économique (CJCE, 6 février 1997, aff. C-80/95, Harnas & Helm CV c/ Staatssecretaris van Financiën N° Lexbase : A2997AUK ; CJCE, 26 juin 2003, aff. C-442/01, KapHag Renditefonds 35 Spreecenter Berli n-H ellersdorf 3. Tranche GbR c/ Finanzamt Charlottenburg, § 38 N° Lexbase : A0203C9E). Il en va de même de la cession de participations hors du champ d'application de la TVA (CJCE, 20 juin 1996, aff. C-155/94, Wellcome Trust Ltd c/ Commissioners of Customs and Excise, n° 32 et 33 N° Lexbase : A7243AHQ ; CJCE, 26 juin 2003 , aff. C-442/01, KapHag Renditefonds 35 Spreecenter Berli n- H ellersdorf 3. Tranche GbR c/ Finanzamt Charlottenburg, précité, § 40) ou de la simple acquisition et vente d'autres titres négociables (CJCE, 29 avril 2004, aff. C-77/01, Empresa de Desenvolvimento Mineir o SGPS SA (EDM), anciennement Empresa de Desenvolvimento Mineiro SA (EDM) c/ FazendaPública, précité, § 58 ; lire Yolande Sérandour, Les produits financiers accessoires exclus du calcul du droit à déduction de la TVA, Lexbase Hebdo n° 123, du 3 juin 2004 - édition fiscale N° Lexbase : N1766ABZ).

Si des produits financiers peuvent être hors champ et hors prorata, les opérations n'ouvrant pas droit à déduction à distinguer des opérations ouvrant droit à déduction, au sens des articles 17 et 19 de la sixième directive-TVA se résument aux opérations exonérées. La seule opposition entre opérations dans le champ d'application de la TVA formellement exprimée par la sixième directive-TVA n'existe qu'entre les opérations effectivement imposables et les opérations exonérées. Sauf jurisprudence communautaire contraire, l'administration fiscale ne peut suspendre la sectorisation à une différence absolue entre les activités. Rappelons que l'article 17 propose la sectorisation de l'activité et non des activités.

Un arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 14 janvier 2005 (CE, 8° s-s., 14 janvier 2005, n° 251332, SA ING Bank (France) c/ Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie N° Lexbase : A0333DGG) conduit à se demander si l'administration n'aurait pas implicitement admis la sectorisation d'activités liées. La SA ING Bank (France) demandait au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 10 juillet 2002 par lequel la cour administrative d'appel de Paris (CAA Paris, 2ème ch., 10 juillet 2002, n° 98PA03135, Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie c/ Banque Bruxelles Lambert N° Lexbase : A5845AZI) avait, sur appel du ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie formé à l'encontre du jugement du 23 février 1998 du tribunal administratif de Paris, qui a partiellement réformé ce jugement en remettant à la charge de la banque Bruxelles Lambert France des rappels de TVA, des droits et pénalités. La cour administrative d'appel de Paris avait jugé que la location de matériels informatiques et de terminaux par une banque destinée à améliorer la qualité des services bancaires et financiers fournis aux clients ne constituait pas une activité distincte susceptible de sectorisation. Le Conseil d'Etat constate que la requête est devenue sans objet car "par une décision en date du 26 novembre 2004, postérieure à l'introduction du pourvoi, le délégué interrégional des impôts a accordé à la SA ING Bank (France) la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée contestés et des pénalités y afférentes".

L'arrêt rendu par la CJCE contre la France le 6 octobre 2005 constitue une décision juridictionnelle révélant la non-conformité du droit français à la règle de droit supérieure au sens de l'article L. 190, alinéa 3, du LPF (N° Lexbase : L5561GUI). Ses paragraphes 12 et 36 évoque expressément l'application du système du prorata aux seuls assujettis mixtes. De plus, l'arrêt C-204/03 "Commission/Espagne" précité condamne l'application du prorata aux redevables totaux. En conséquence, les assujettis-redevables totaux qui auraient été soumis au régime des redevables partiels, du seul fait de la perception de subvention(s) peuvent réclamer restitution du montant de la TVA non récupérée par la suite de l'application illégale du mécanisme du prorata (LPF, art. L. 190, alinéa 2 et 3 et R. 196-1-c N° Lexbase : L6486AEX). Les redevables totaux disposent jusqu'au 31 décembre 2007 pour réclamer exécution de leurs droits nés à compter du 1er janvier 2001. La même prérogative s'offre-t-elle aux redevables partiels ayant reçu des subventions d'équipement ?

2. Les subventions d'équipement perçues par le redevable partiel

L'article 212 de l'annexe II au CGI reprend sensiblement l'article 19, paragraphe 1, de la sixième directive-TVA en matière de calcul du prorata. Néanmoins, selon la CJCE, l'interprétation administrative ne respecte pas ce texte. L'instruction du 8 septembre 1994 précitée définit les subventions d'équipement, puis en indique les conséquences sur le droit à déduction. Citons en les numéros 150 et 151 : "La notion de subvention d'équipement. Il s'agit de subventions non imposables qui sont, au moment de leur versement, allouées pour le financement d'un bien d'investissement déterminé. [...]. La taxe afférente aux investissements financés par la subvention peut être en effet déduite dans les conditions habituelles lorsque le redevable intègre dans le prix de ses opérations les dotations aux amortissements des biens financés en totalité ou partiellement par cette subvention. S'il s'avère que la condition de répercussion des amortissements de ces biens dans les prix n'est pas respectée, la TVA afférente à ces mêmes biens ne pourrait pas être déduite pour la quote-part du montant financée par la subvention d'équipement [...] Le redevable applique, le cas échéant et dans les conditions habituelles le pourcentage de déduction de l'entreprise à la taxe, ainsi, calculée".

Saisie d'une plainte relative à un litige concernant un assujetti français ayant bénéficié d'un abandon de créances, la Commission a estimé que la France enfreignait, en matière de subventions d'équipement, les articles 17, paragraphe 2 et 5, ainsi que 19 de la sixième directive-TVA. Cela, dans la mesure où le système mis en place par l'administration fiscale française limitait le droit à déduction dans des conditions non prévues par la sixième directive-TVA. Une lettre de mise en demeure a été communiquée au gouvernement français le 23 avril 2001. N'ayant pas obtenu de réponse à cette mise en demeure dans le délai prévu, la Commission a émis un avis motivé le 21 décembre 2001. La réponse du gouvernement français à la lettre de mise en demeure, datée du 7 janvier 2002, est parvenue à la Commission le 14 janvier 2002, c'est-à-dire postérieurement à l'envoi de l'avis motivé. Cette réponse précisait que le prorata de déduction s'appliquait uniquement aux assujettis effectuant à la fois des opérations taxées et des opérations exonérées de la TVA et non pas aux assujettis redevables de la TVA sur toutes leurs activités dans le champ d'application de la TVA. Afin de tenir compte des observations de la France, la Commission a émis un avis motivé complémentaire le 26 juin 2002. Le gouvernement français a répondu à cet avis motivé complémentaire par une lettre, datée du 21 août 2002, par laquelle il a contesté le fondement du grief de la Commission et a soutenu qu'aucun manquement aux articles 17 et 19 de la sixième directive-TVA ne pouvait lui être reproché. Ne partageant pas cette analyse, la Commission a décidé de saisir la CJCE.

Aucun article de la sixième directive-TVA ne fait dépendre l'étendue du droit à déduction de la provenance des fonds ayant servi à acquérir une immobilisation ou des éléments de calcul des prix de vente. A plusieurs reprises, la CJCE a affirmé que "en l'absence de toute disposition permettant aux Etats membres de limiter le droit à déduction conféré aux assujettis, ce droit doit s'exercer immédiatement pour la totalité des taxes ayant grevé les opérations effectuées en amont. Dès lors que de telles limitations doivent s'appliquer de manière similaire dans tous les Etats membres, des dérogations ne sont permises que dans les cas expressément prévus par la directive" (CJCE, 21 septembre 1988, aff. C-50/87, Commission des Communautés européennes c/ République française, § 15 à 17 N° Lexbase : A7265AHK ; CJCE, 11 juillet 1991, aff. C-97/90, Hansgeorg Lennartz c/ Finanzamt München III, § 18, précité ; CJCE, 6 juillet 1995, aff. C-62/93, BP Soupergaz Anonimos Etairia Geniki Emporiki-Viomichaniki kai Antiprossopeion c/ Etat hellénique, § 18 N° Lexbase : A1750AWQ ; CJCE, 15 janvier 1998, aff. C-37/95, Belgische Staat c/ Ghent Coal Terminal NV, § 16 N° Lexbase : A9657AU9 ; CJCE, 8 janvier 2002, aff. C-409/99, Metropol Treuhand WirtschaftstreuhandgmbH c/ Finanzlandesdirektion für Steiermark, § 42 N° Lexbase : A8481AXE).

Certes, la sixième directive-TVA n'ignore pas les subventions. Son article 11 A, paragraphe 1, a), permet d'inclure les subventions dans l'assiette de la TVA applicable à une livraison de bien corporel ou à une prestation de services. Encore faut-il qu'il s'agisse du paiement, par un tiers, de la totalité ou d'une fraction du prix d'un bien ou d'un service précis. La CJCE n'entend retenir que les véritables compléments de prix (CJCE, 22 novembre 2001, aff. C-184/00, Office des produits wallons ASBL c/ Etat belge N° Lexbase : A5858AXA ; CJCE, 13 juin 2002, aff. C-353/00, Keeping Newcastle Warm Limited c/ Commissioners of Customs & Excise N° Lexbase : A8770AYH ; lire Yolande Sérandour, obs. in L'Année fiscale 2003, p. 335 et, Les critères d'identification de la subvention à inclure dans l'assiette de la TVA, DF 2003, n° 3, p. 84).

Par ailleurs, l'article 19 de la sixième directive-TVA autorise chaque Etat membre à inclure au dénominateur du rapport servant au calcul du prorata les subventions autres que celles déjà prises en considération en tant que complément de prix d'une opération imposable. Sont visées, en premier lieu, les subventions constitutives du prix ou d'une fraction du prix des opérations exonérées. Cette solution ne tient pas à la nature de la somme en cause mais à sa qualité de contrepartie d'opérations exonérées. Ces dernières étant à inclure au dénominateur, le montant correspond à la contrepartie exactement reçue, dont une éventuelle subvention. En second lieu, la lettre de l'article 19 permet, aussi, d'augmenter le dénominateur du montant de toutes les autres subventions non perçues dans le cadre d'une activité hors champ. S'agissant des activités hors champ, dans la mesure où la jurisprudence communautaire les exclut du calcul du prorata (voir arrêts précités), il en va de même des subventions les finançant. L'administration fiscale française cite, à juste titre, les subventions finançant une activité de service public non assujettie (instruction du 8 septembre 1994, précitée, n° 143).

A priori, le texte français suit la sixième directive-TVA quant à la définition des subventions exclues du numérateur mais à inclure au dénominateur du prorata, celles représentant le prix d'opérations exonérées ou ne finançant pas des activités hors champ. L'administration fiscale française vise explicitement les subventions finançant les activités dans le champ sans se rattacher à des opérations précises. Néanmoins, en raison de leur caractère exceptionnel, elle exclut expressément certaines subventions qu'elle énumère. Cette solution présente l'avantage d'éviter une diminution brutale du pourcentage de droit à déduction liée à la perception ponctuelle d'aides financières.

Après avoir dressé la liste des subventions exceptionnelles exclues du calcul du prorata, l'instruction du 8 septembre 1994 précitée en vient aux subventions d'équipement pour les soumettre au régime susmentionné, non prévu par la sixième directive-TVA. Quoique plus intéressante économiquement que la solution proposée par l'article 19 de la sixième directive-TVA, elle est illégale. Si l'on se souvient que le prorata peut s'appliquer à toutes les dépenses affectées aux opérations imposables et aux opérations exonérées, la solution administrative présente l'avantage d'éviter une diminution généralisée du pourcentage de droit à déduction de l'entreprise ayant perçu une subvention d'équipement. Le droit communautaire permet de l'inclure au dénominateur du rapport servant au calcul du prorata. En renonçant à cette faculté, l'administration fiscale française favorise les assujettis, lesquels préfèrent souvent limiter la récupération de la TVA ayant frappé l'acquisition du bien financé par une subvention plutôt que de pâtir de cette subvention pour toutes leurs dépenses à usage mixte. Il n'en demeure pas moins que la limitation du droit à déduction pour le seul bien d'équipement acquis au moyen d'une subvention ne résulte pas de la sixième directive-TVA.

La Cour de Luxembourg a, déjà, affirmé que "s'il est vrai que la solution, ainsi, dictée par le libellé de l'article 17, paragraphe 2, sous a), de la sixième directive-TVA peut ne pas paraître pleinement conforme à l'objet de cette disposition, ainsi qu'à certaines finalités poursuivies par la sixième directive-TVA, telles que la neutralité de la taxe et l'évitement des doubles impositions, il demeure néanmoins que, en l'absence d'intervention du législateur communautaire, le régime de déductibilité de la TVA institué par ce dernier, tel qu'il se trouve défini par la sixième directive-TVA, n'offre aucun fondement à un droit pour l'assujetti de déduire la TVA [...] ni ne permet de déterminer les modalités d'application éventuelles d'un tel droit" (CJCE, 8 novembre 2001, aff. C-338/98, Commission des Communautés européennes c/ Royaume des Pays-Bas, § 55 et 56 N° Lexbase : A5831AXA). L'arrêt commenté réitère ce refus d'autonomie (§ 35).

A propos des règles du droit à déduction, la CJCE a, précédemment, affirmé qu'"elles ne laissent aux Etats membres aucune marge d'appréciation quant à leur mise en oeuvre" (CJCE, 6 juillet 1995, aff. C-62/93, BP Soupergaz Anonimos Etairia Geniki Emporiki-Viomichaniki kai Antiprossopeion c/ Etat hellénique, § 35, précité). Afin de respecter l'objectif d'harmonisation des droits nationaux visé par la sixième directive-TVA, les limitations du droit à déduction doivent faire l'objet d'une interprétation stricte. Aucun Etat membre ne doit pouvoir ajouter des exceptions ou des justifications non prévues par la sixième directive-TVA. La France ne semble pas avoir tiré toutes les conséquences d'une précédente condamnation d'une limitation du droit à déduction sur les immeubles donnés en location non prévue par la sixième directive-TVA (CJCE, 21 septembre 1988, aff. C-50/87, Commission des Communautés européennes c/ République française N° Lexbase : A7265AHK).

L'administration fiscale française doit, maintenant, cesser de lier la déduction de la TVA ayant grevé l'acquisition d'un bien au moyen d'une subvention à la répercussion des amortissements dans le prix de vente. Notons, néanmoins, que le gain des redevables concernés risque d'être largement dépassé par les effets de l'éventuelle inclusion des subventions d'équipement dans le calcul du prorata général. Toutefois, la sectorisation permettrait peut-être d'isoler la subvention en cause dans un prorata particulier à un secteur. Selon le contexte, il reste à chaque redevable partiel à apprécier s'il doit invoquer l'article L. 190, alinéa 3, du LPF. Manifestement, l'arrêt n° 243/03 de la CJCE constitue une décision juridictionnelle révélant la non-conformité du droit français à la règle de droit supérieure.

Les redevables partiels qui ont subi les effets des numéros 150 et 151 de l'instruction du 8 septembre 1994 sanctionnée par la CJCE peuvent prétendre à la restitution de la TVA illégalement interdite de récupération. Il serait, cependant, prudent d'attendre de savoir si l'administration renonce définitivement ou non à inclure les subventions d'équipement au dénominateur du prorata. Il n'y a aucune urgence car les redevables concernés disposent jusqu'au 31 décembre 2007 pour faire valoir leurs droits à déduction que l'arrêt commenté leur restitue en remontant jusqu'au 1er janvier 2001.

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Fiscalité des entreprises

[Jurisprudence] Intégration fiscale : "face à face" entre le principe de cohérence du système fiscal et la liberté d'établissement

Réf. : CAA Paris, 2ème ch., 24 juin 2005, n° 04PA01300, Société Papillon c/ Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie ( N° Lexbase : A3180DKY)

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par Valérie Le Quintrec, Université de Bourgogne

Le 07 Octobre 2010

Par un arrêt du 24 juin 2005, la cour administrative d'appel de Paris a jugé que la différence de traitement entre les détentions de sociétés intégrées par des filiales françaises ou par des filiales communautaires était justifiée par la cohérence du régime de l'intégration fiscale. Dès lors, il ne saurait être question d'atteinte au principe de liberté d'établissement des sociétés intégrées posé par l'article 43 du Traité CE . En l'espèce, la société Papillon détenait, par l'intermédiaire d'une société néerlandaise, la société Artist Performance and Communication (APC BV) non établie sur le territoire français, plus de 95 % d'une filiale française, la SARL Kiron. La société Papillon contrôlait 99 % du capital de la société de droit hollandais qui elle-même contrôlait 99,9 % du capital de la société Kiron. Cette dernière détenait plus de 95 % d'autres filiales françaises.

La société Papillon avait opté pour le régime de l'intégration fiscale prévu par l'article 223 A du CGI , afin de se constituer seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû par elle-même, la SARL Kiron, ainsi que des sociétés françaises détenues par cette dernière.

L'administration fiscale avait, toutefois, refusé l'application de l'article 223 A du CGI, au motif que les conditions de cette présente disposition ne se trouvaient pas en l'espèce remplies, puisque la société Papillon ne détenait pas la SARL Kiron par l'intermédiaire d'une société entrant dans le périmètre du groupe fiscalement intégré.

Contestant la position de l'administration, la société Papillon avait, alors, argué que le régime français de l'intégration fiscale générait une restriction injustifiée à l'exercice de sa liberté d'établissement garantie par l'article 43, ex-52 du Traité CE, en ce qu'il excluait l'interposition, dans les chaînes de participation de filiales intégrées, de sociétés établies dans d'autres Etats membres.

La cour administrative d'appel de Paris a, néanmoins, rejeté les prétentions de la société appelante et a considéré, à l'instar de l'administration fiscale, que "la société Papillon ne détenait pas le capital de la société Kiron, par l'intermédiaire d'une société entrant dans le périmètre du groupe fiscalement intégré, ainsi que l'exige l'article 223 A du CGI".

Cet arrêt vient se placer à contre-courant de la jurisprudence traditionnelle en la matière.

En effet, il convient de rappeler aux lecteurs qu'il est de plus en plus difficile pour un Etat membre de justifier de ses régimes fiscaux par la nécessité de garantir la cohérence fiscale.

Les diverses décisions tant nationales qu'européennes, dont certaines seront évoquées ci-après, en attestent (1).

Toutefois, la cour administrative d'appel de Paris, dans l'arrêt ici commenté, a estimé que le principe de cohérence du système fiscal pouvait venir atténuer l'une des libertés fondamentales, à savoir la liberté d'établissement (2).

1. La restriction actuelle des particularités fiscales nationales au nom du respect des libertés fondamentales prévues par le Traité CE

A titre liminaire, il est nécessaire de préciser qu'en matière fiscale, les Etats restent souverains et demeurent libres de définir l'organisation et la conception de leur système fiscal. Toutefois, comme le souligne l'arrêt "Schumacker" du 14 février 1995, les Etats membres doivent exercer leurs compétences retenues dans le respect du droit communautaire (CJCE, 14 février 1995, aff. C-279/93, Finanzamt Köln-Altstadt c/ Roland Schumacker N° Lexbase : A1803AWP).

Dès lors, les régimes fiscaux nationaux peuvent être considérés comme contraires à certaines libertés fondamentales prévues par le Traité CE telles que la liberté de circulation des capitaux ou bien la liberté d'établissement.

Les justifications nationales invoquées aux fins de maintenir les particularités fiscales de chaque Etat membre telles que le principe de cohérence du système fiscal n'emportent à l'heure actuelle pas un franc succès, comme le prouvent de récentes décisions des juridictions françaises et européennes.

Ainsi, par un arrêt du 28 mai 2004, le Conseil d'Etat a jugé que l'application de l'article 167 du CGI à un contribuable ayant demandé le report d'imposition des plus-values réalisées à l'occasion d'un échange de titres, conformément à l'article 92, B-II du CGI , alors applicable, était contraire au principe de liberté d'établissement posé par l'article 43 du Traité CE (CE, 3° et 8° s-s., 28 mai 2004, n° 261289, Lassus c/ Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie N° Lexbase : A2997DCY).

A l'instar de la Cour de Luxembourg, les hauts juges de l'ordre administratif ont considéré que le système de l'"exit tax", mis en place pour lutter contre l'évasion fiscale et auquel est assujetti tout contribuable français qui quitte le territoire, revient à faire supporter à ce dernier une charge fiscale plus lourde que celle à laquelle il aurait été soumis s'il avait conservé son domicile fiscal en France.

En effet, le contribuable domicilié en France qui transfère son domicile à l'étranger est passible de l'impôt sur le revenu à raison des revenus dont il a disposé pendant l'année de son départ jusqu'à la date de celui-ci, des bénéfices industriels et commerciaux qu'il a réalisés depuis la fin du dernier exercice taxé, et de tous revenus qu'il a acquis sans en avoir la disposition antérieurement à son départ (lire, sur ce point, Jean-Marc Priol, Liberté d'établissement : transfert du domicile fiscal et modalités d'impositions de plus-values mobilières, Lexbase Hebdo n° 101, du 31 décembre 2003 - édition fiscale N° Lexbase : N9979AAT).

Dans la décision du 28 mai 2004 susvisée, le contribuable en cause avait été soumis à l'impôt sur le revenu au titre de la plus-value en report d'imposition. Or, selon le Conseil d'Etat, une telle discrimination est contraire au principe de liberté d'établissement.

Il convient, également, de rappeler que la loi de finances pour 2004 a supprimé l'avoir fiscal et ce, à compter du 1er janvier 2005.

La raison de cette suppression était la suivante : l'article 158 bis du CGI était contraire au principe de la liberté de circulation des capitaux et de la liberté d'établissement dans la mesure où une société qui recevait des dividendes de sociétés françaises bénéficiait de l'avoir fiscal ou du crédit d'impôt, alors qu'une société française qui recevait des dividendes de sociétés étrangères ne bénéficiait pas de ce cadeau fiscal.

La Cour de Justice des Communautés Européennes, partant du principe qu'une société doit pouvoir s'implanter où elle veut, a, également, considéré que l'avoir fiscal était contraire à la liberté d'établissement (CJCE, 7 septembre 2004, aff. C-319/02, Petri Manninen N° Lexbase : A2692DD3 ; lire Jean-Marc Priol, Avoir fiscal et libre circulation des capitaux, Lexbase Hebdo n° 137, du 7 octobre 2004 - édition fiscale N° Lexbase : N3048ABI ; Valérie Le Quintrec, L'avoir fiscal et le précompte : une suppression controversée, Lexbase Hebdo n° 103, du 15 janvier 2004 - édition fiscale [LXB=N0119ABZ ]).

Enfin, on ne peut faire abstraction de l'affaire "Marks & Spencer" actuellement pendante devant la Cour de Justice des Communautés Européennes dans laquelle l'Avocat général Poiares Maduro a rendu ses conclusions le 7 avril 2005.

Dans ses écritures, il précise que le refus de prendre en compte au niveau de la société mère britannique les pertes réalisées par ses filiales résidentes dans d'autres Etats membres de l'UE est contraire aux articles 43 et 48 du Traité UE, c'est-à-dire à la liberté d'établissement et à la libre circulation des capitaux.

Si la Cour de Justice de Communautés Européennes venait à entériner la position de l'Avocat général, alors la tendance traditionnelle, selon laquelle les particularités fiscales nationales doivent être en conformité avec les libertés fondamentales prévues par le Traité UE, serait confirmée (lire Jean-Marc Priol, Les transferts de pertes communautaires à l'épreuve de l'examen du principe de la cohérence fiscale et du traitement fiscal équivalent, Lexbase Hebdo n° 165, du 28 avril 2005 - édition fiscale N° Lexbase : N3516AI3).

Toutefois, en dépit de ces décisions et de la tendance jurisprudentielle actuelle, toute mesure restrictive à une liberté fondamentale du Traité n'est pas automatiquement interdite si elle poursuit un objectif légitime d'intérêt général compatible avec le Traité et si cette mesure est proportionnée au but à atteindre.

Ainsi, la nécessité de garantir la cohérence du régime fiscal, afin de garantir toute soustraction abusive aux législations nationales ou toute exploitation artificielle des différences entre législations, peut justifier une réglementation de nature à restreindre les libertés fondamentales.

L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris en date du 24 juin 2005 en constitue un bel exemple.

2. L'intégration fiscale et liberté d'établissement : justification au nom du principe de cohérence du système fiscal

Lorsqu'une disposition de droit interne n'est pas contraire au droit communautaire, cette disposition a plein effet.

Tel est le cas de l'article 223 A du CGI dans l'affaire commentée.

Dans l'arrêt du 24 juin 2005, la cour administrative d'appel de Paris, aux visas des articles 223 A du CGI et de l'article 52 du Traité, nouvellement 43, a statué comme suit :

"Considérant qu'en application des dispositions de l'article 223 A du CGI, [...] la société Papillon ne détenait pas le capital de la société Kiron, par l'intermédiaire d'une société entrant dans le périmètre du groupe fiscalement intégré, ainsi que l'exige l'article 223 A précité du code général des impôts ; que s'agissant de l'application de l'article 52 du Traité instituant la Communauté économique européenne, devenu l'article 43, [...] la constitution d'un groupe fiscalement intégré permettant à une société-mère de se constituer redevable de l'impôt sur les sociétés dû par l'ensemble des membres du groupe suppose que ces derniers soient soumis à des règles identiques de détermination de leurs résultats imposables et que lesdits résultats puissent effectivement être agrégés dans leur totalité au niveau de la société-mère ; que tel ne pourrait être le cas si était admise dans le périmètre du groupe, une filiale dont le capital est détenu par l'intermédiaire d'une société qui n'est pas établie sur le territoire français et dont les bénéfices ne sont pas soumis, par voie de conséquence, à l'impôt sur les sociétés français ; qu'en effet, l'interposition d 'une telle société dans la chaîne des participations, comme de toute société qui, pour quelque raison que ce soit, n'est pas soumise à l'impôt sur les sociétés, ne permettrait pas d'agréger l'ensemble des résultats réalisés par les sociétés économiquement et juridiquement intégrées au groupe ; que cette exigence procède de la cohérence même de l'intégration fiscale ; que, par suite et sans qu'il soit besoin de faire droit à ses conclusions tendant à ce que la Cour de justice des Communautés européennes soit saisie d'une question préjudicielle, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les dispositions de l'article 223 A comportent une restriction injustifiée au principe de la liberté d'établissement consacré par l'article 52 précité du Traité instituant la Communauté économique européenne, au motif qu'elles interdisent de comprendre dans un groupe fiscalement intégré une société française dont le capital est détenu par l'intermédiaire d'une société d'un Etat membre non établie sur le territoire français [...]".

En d'autres termes, les juges du second degré ont clairement considéré que la différence de traitement entre les détentions de sociétés intégrées par des filiales françaises ou par des filiales communautaires était justifiée par la cohérence de l'intégration fiscale, ce régime permettant d'agréger arithmétiquement les résultats soumis à l'impôt sur les sociétés français des sociétés incluses dans le périmètre d'intégration. Or, l'interposition de la filiale hollandaise, en ce qu'elle n'était par nature pas soumise à l'impôt sur les sociétés français, faisait échec à une telle addition des résultats. Partant, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté les prétentions de la société Papillon selon lesquelles, notamment, il était porté atteinte à la liberté d'établissement.

Cet arrêt se fait l'écho d'une jurisprudence communautaire minoritaire qui précise qu'une mesure entravant une des libertés consacrées par le Traité CE peut être admise à la condition qu'elle poursuive un objectif légitime compatible avec le Traité, qu'elle soit justifiée par des raisons impérieuses d'intérêt général et pour autant que son application soit propre à garantir la réalisation de l'objectif, ainsi, poursuivi et n'aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre celui-ci.

La nécessité de préserver la cohérence d'un régime fiscal constitue l'une de ces justifications (CJCE, 28 janvier 1992, aff. C-204/90, Hanns-Martin Bachmann c/ Etat belge N° Lexbase : A9890AUT ; CJCE, 28 janvier 1992, aff. C-300/90, Commission des Communautés européennes c/ Royaume de Belgique N° Lexbase : A9599AU3).

La cour administrative d'appel de Paris reprend, ainsi, la jurisprudence "Schumacker" précédemment citée, selon laquelle "le fait pour un Etat membre de ne pas faire bénéficier un non-résident de certains avantages fiscaux qu'il accorde aux résidents n'est, en règle générale, pas discriminatoire puisque ces deux catégories de contribuables ne se trouvent pas dans une situation comparable".

Appliquée aux filiales d'un groupe fiscalement intégré, cette jurisprudence permet, ainsi, d'expliquer la décision des juges d'appel.

En effet, selon la cour administrative d'appel de Paris, il ne saurait y avoir de discrimination entre une filiale française et une filiale hollandaise, ces dernières ne se trouvant pas dans une situation juridique comparable, et partant, il ne saurait y avoir atteinte à la liberté d'établissement.

Dès lors, au nom du principe de la cohérence de l'intégration fiscale, le régime de l'intégration fiscale de l'article 223 A du CGI pour lequel avait opté la société Papillon pouvait être remis en cause puisque les conditions de détention requise pour bénéficier de ce régime faisaient défaut en raison de la présence de la société hollandaise.

Ce qui revient à considérer que ce régime n'aurait jamais été contesté en présence d'une société française intermédiaire et non hollandaise.

Cet arrêt surprendra très certainement plus d'un lecteur qui s'attendait à voir le principe de la liberté d'établissement l'emporter sur le principe de la cohérence du système fiscal.

Toutefois, un pourvoi en cassation est parfaitement envisageable, ainsi qu'une éventuelle question préjudicielle du Conseil d'Etat à la Cour concernant la comptabilité de l'article 223 A du CGI avec les dispositions du droit communautaire.

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Fiscalité des entreprises

[Manifestations à venir] Formation EFE : intégration fiscale

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N0599AKE

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Le 07 Octobre 2010

Les éditions EFE (Edition Formation Entreprise) organisent, les 16 et 17 novembre 2005, une formation ayant pour thème l"Intégration fiscale : de l'option pour le régime aux opérations de structure affectant le groupe".
  • Thèmes abordés :

- Module 1 : comment réussir l'entrée dans l'intégration ?

  • Choisissez au mieux la société tête du groupe intégré compte tenu des nouvelles dispositions
  • L'amendement Charasse
  • Comment opter en toute sécurité ?
  • Développements illustrés par des exemples

- Module 2 : comment établir et optimiser la déclaration du groupe ?

  • Comment appréhender et déterminer au mieux la formation des résultats des sociétés du groupe ?
  • Applications pratiques : comment remplir vos liasses fiscales ?
  • Maîtrisez les difficultés de détermination de votre résultat d'ensemble
  • Les conséquences des jurisprudences récentes
  • Ce qu'il faut savoir lors des contrôles fiscaux des groupes intégrés

- Module 3 : comment réaliser sereinement des restructurations ?

  • Les restructurations n'entraînant pas la sortie du groupe
  • Le rachat ou l'absorption de la société mère intégrante

- Module 4 : comment établir les déclarations en cas de distributions en 2005 ?

  • Les distributions des filiales intégrées et de la mère intégrante en 2005

- Module 5 : comment comptabiliser l'impôt sur les sociétés dans les groupes intégrés ?

  • Quelles écritures adopter dans les comptes sociaux ?
  • La rédaction des conventions d'intégration fiscale : conseils pour éviter certains pièges
  • Que faire lors des sorties d'intégration ?
  • Exemples de comptabilisation de la charge d'impôt chez les filiales et chez la société mère
  • Intervenant

- Patrick Morgenstern, Expert-comptable, Commissaire aux comptes MORGENSTERN & ASSOCIES, chargé d'enseignement fiscal à l'Université de Bourgogne, auteur des ouvrages : L'intégration fiscale et Initiation à l'intégration fiscale, Editions Groupe Revue Fiduciaire

  • Date et heures

- Mercredi 16 et jeudi 17 novembre 2005
- de 8 h 45 à 17 H 30

  • Tarifs

- 1 700 euros HT

  • Informations

Renseignements programme

- Laetitia Bonnissant
- Tél. : 01 44 09 24 18
- e-mail : Ibonnissant@efe.fr

Renseignements inscriptions

- EFE - Département formation
- 50, avenue de la Grande-Armée - 75848 Paris cedex 17
- Tél. : 01 44 09 24 23 - Fax : 01 44 09 22 22
- e-mail : inscriptions@efe.fr

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Droit financier

[Textes] Transposition de la directive OPA : des incertitudes entourant le recours à la "clause de réciprocité"

Réf. : Projet de loi relatif aux offres publiques d'acquisition

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N0521AKI

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Le 07 Octobre 2010

A l'heure de la discussion devant le Parlement français de la directive communautaire n° 2004/25 du 21 avril 2004, concernant les offres publiques d'acquisition (OPA) (1), on peut se demander si l'on ne serait pas en train, sinon de se fourvoyer sur l'interprétation, du moins de solliciter abusivement l'une de ses dispositions phares, celle qui ouvre le recours à la "clause de réciprocité". Compte tenu des enjeux, la question nous semble, assurément, mériter d'être posée. Résultat d'une négociation longue et tumultueuse, la directive communautaire doit son salut, on le sait, au compromis trouvé sur la délicate question des défenses anti-OPA. Tenant compte de l'hostilité de nombreux Etats membres au "désarmement" de leurs entreprises, programmé par les articles 9 et 11 du projet de directive et du risque, notamment, de son unilatéralité face à des entreprises extra-communautaires jugées mieux dotées, ce compromis, proposé en juin 2003 par la délégation portugaise et adopté en octobre suivant par la présidence italienne, aboutit au système de "double option" inscrit à l'article 12 du texte final, baptisé "arrangements facultatifs". Appauvrissant la portée obligatoire et donc, l'ambition harmonisatrice de la directive sur ce sujet capital, un dispositif "à la carte" ou à "géométrie variable", innovant et complexe, est institué, qui renvoie largement à l'appréciation des Etats membres et, subsidiairement, à celle de leurs sociétés ressortissantes. Ainsi, aux termes dudit article 12, les Etats membres se trouvent-ils autorisés à ne pas imposer aux entreprises concernées, dont le siège est situé sur leur territoire, "l'article 9, paragraphe 2 et 3 et/ou l'article 11". Autrement dit, la possibilité leur est offerte, soit de n'imposer aucun de ces textes, soit d'imposer, à la fois, l'article 9 et l'article 11 ou de n'en imposer qu'un seul. C'est le choix fait par le gouvernement français, sur la recommandation du "rapport Lepetit" remis en juin dernier (2) et, conformément semble-t-il, à une tendance actuellement majoritaire en Europe (3), de contraindre à la seule application de l'article 9.

Rappelons que l'article 9 de la directive s'intéresse aux défenses réactives (post-OPA) et définit un régime européen de gouvernance d'entreprise en période d'offre. Consacrant l'obligation de passivité des dirigeants de la société cible, en raison de la sévérité du conflit d'intérêts dans lequel ils se trouvent plongés à cette occasion et, soucieux de faire respecter la primauté politique de l'assemblée générale des actionnaires, le texte fait obligation à l'organe d'administration et de direction (expression qui inclut le conseil de surveillance), dès l'offre publique connue, d'obtenir "une autorisation préalable de l'assemblée générale des actionnaires à cet effet avant d'entreprendre toute action susceptible de faire échouer l'offre [...], et en particulier avant d'entreprendre toute émission d'actions de nature à empêcher durablement l'offrant de prendre le contrôle de la société visée" (dir. n° 2004/25, art. 9 § 2). Lorsqu'il s'agit de décisions prises avant l'offre et qui ne sont pas encore partiellement ou totalement mises en oeuvre, les mêmes organes doivent alors recueillir l'approbation ou la confirmation de l'assemblée générale des actionnaires pour toute mesure ne s'inscrivant pas "dans le cours normal des activités de la société et dont la mise en oeuvre est susceptible de faire échouer l'offre" (dir. n° 2004/25, art. 9 § 3). La directive n'évoque, pour tout rôle actif de ces dirigeants, que la recherche d'autres offres (dir. n° 2004/25, art. 9 § 2), ce qui, toutefois, est facultatif. Ces dispositions, qui érigent l'assemblée générale en unique arbitre légitime de la bataille qui se noue, rendent à l'évidence bien difficile, pratiquement, la mise en place d'un dispositif anti-OPA en cours d'offre, plus encore que ne le fait le droit français actuel (4).

L'article 11, quant à lui centré davantage sur les défenses préventives (pré-OPA), entend neutraliser les restrictions statutaires et contractuelles au transfert de titres et au droit de vote, et institue la fameuse "break-through rule", dont l'objet consiste à désamorcer automatiquement ces défenses, ainsi que celles concernant la nomination ou la révocation de membres de l'organe d'administration ou de direction, lorsque l'offrant vient à détenir un nombre de titres lui permettant de modifier les statuts de la société cible. Il a été décidé de ne pas procéder à une transposition complète de ce texte pour la raison que l'alliance, consacrée en droit français, de la flexibilité contractuelle et de la transparence des pactes d'actionnaires, constituait un équilibre préférable (5).

La liberté de choix des Etats membres, prévue à l'article 12 § 1, se trouve, néanmoins, bornée. S'ils peuvent se réserver le droit de ne pas imposer l'application des articles 9 et 11, interdiction leur est faite, en revanche, d'empêcher les sociétés concernées d'opter pour l'application desdits articles. Cette prohibition minimale figure au deuxième paragraphe de l'article 12, qui oblige les Etats membres, faisant usage de la faculté de ne pas transposer certaines de ces dispositions, de donner aux sociétés situées sur leur territoire, le choix, réversible, d'appliquer l'article 9, paragraphe 2 et 3 et/ou l'article 11. Habile, le procédé, introduit par un législateur communautaire conscient de la relative faillite de l'harmonisation verticale forcée, vise, on le comprend, à préserver les chances d'une harmonisation horizontale engendrée par les forces du marché (6). On peut penser, en effet, qu'il ne sera pas indifférent pour le positionnement d'une entreprise sur le marché du contrôle, en tant que cible ou initiatrice potentielle, d'appartenir ou non au "breakthrough club", et autres "clubs 9 et/ou 11".

Enfin, ajoutant à la complexité et donc à l'éventail des choix stratégiques des Etats et entreprises qui "tangentent", ici, la théorie des jeux, le troisième paragraphe du même article 12 dispose que les Etats membres peuvent, dans les conditions fixées par le droit national, exempter les sociétés qui appliquent l'article 9 et l'article 11, de les appliquer si elles deviennent l'objet d'une offre lancée par une société qui, elle, n'applique pas ces mêmes articles. Dans le prolongement de l'esprit qui préside au paragraphe 2, l'idée consiste, en l'occurrence, à encourager les entreprises à exercer les options qui leur sont offertes, et qui s'inscrivent dans le projet d'harmonisation communautaire, sans craindre de se retrouver en situation de désavantage compétitif sur le marché du contrôle. Cette clause de réciprocité représente l'instrument juridique de la fameuse "égalisation des conditions de jeu" ("level playing field"), dont l'absence prétendue avait fait échouer, en juillet 2001, l'adoption du projet de directive par le Parlement européen et qui participe, essentiellement, à l'équilibre du compromis final (7). Une sorte de pénalisation juridique frappant les prédateurs, qu'elle que soit leur nationalité, artificiellement isolés du risque d'être proies à leur tour, une consécration subreptice, dans les relations inter-personnelles et toutes choses égales par ailleurs, du droit subjectif à la défense "pac-man".

Relativement original (8) et astucieux, le mécanisme, que la France s'apprête à retenir, s'il peut susciter des réserves au plan de son opportunité (9) et en raison de ses difficultés juridiques d'application, qui expliquent son rejet dans d'autres Etats (10), laisse, en tous cas, saisir sa logique dans un système à options. Mais, à l'évidence, les rares commentateurs à s'être penchés sur ses ressorts, lui confèrent, souvent implicitement d'ailleurs, une autre portée, en estimant ouvert le recours à la clause de réciprocité, alors même que les Etats membres auraient décidé d'imposer l'application des articles 9 et/ou 11 (11). C'est aussi le raisonnement qui s'induit de la recommandation issue du rapport "Lepetit" et de la solution préconisée par le gouvernement français, consistant à assortir la transposition de l'article 9 d'une clause de réciprocité au bénéfice des entreprises françaises. Cela signifie qu'alors même que le texte serait rendu obligatoire, une entreprise française cible d'une OPA, initiée par une entreprise n'appliquant pas cet article, pourrait se dispenser en retour de son application en faisant usage de la clause (12). Le bien-fondé juridique de cette lecture est, pour le moins, sujet à caution et semble, à vrai dire, contredit par les documents communautaires.

Le premier d'entre eux n'est autre que la directive elle-même. L'enchaînement des paragraphes de l'article 12, tout d'abord : le paragraphe 3, qui consacre la clause de réciprocité et en règle l'usage, s'inscrit nettement et directement dans le prolongement du paragraphe 2, autorisant les Etats membres à ne pas transposer les articles 9 et/ou 11. Cela se lit, selon nous, comme une suite logique d'hypothèses optionnelles. Interprétation confortée par la lettre du texte, qui réserve l'exemption aux sociétés "qui appliquent" les articles 9 et/ou 11 ; formulation qui devrait être impropre à caractériser une application obligatoire de la loi nationale, même si l'emploi de l'expression "ailleurs" dans l'article n'est pas des plus univoque (13). Ad litteram, d'aucuns pourront, à cet égard, contester la distinction opérée entre l'application optionnelle des articles de la directive et la soumission obligatoire à la loi nationale, en s'appuyant sur le paragraphe 3 lui-même qui, lorsqu'il évoque les sociétés initiatrices, utilisent, également, le terme "appliquer". Or, il serait naturellement absurde d'admettre le recours à la clause de réciprocité à l'encontre de sociétés soumises, par leur loi nationale, aux articles 9 et/ou 11. Mais l'argument est de peu de poids si l'on veut bien se rappeler que l'article 12, paragraphe 3, ne déploie ses effets que dans le seul champ des "arrangements facultatifs". Au reste, si le doute subsistait quant au sens du texte, le considérant 21 de la directive, consacré à la clause de réciprocité, devrait suffire à le dissiper : "sans préjudice des accords internationaux auxquels la Communauté européenne est partie, les Etats membres devraient être autorisés à ne pas exiger des sociétés qui appliquent ces dispositions conformément aux arrangement facultatifs qu'elles les appliquent lorsqu'elles font l'objet d'offres lancées par des sociétés qui n'appliquent pas lesdites dispositions du fait de l'utilisation de ces arrangements facultatifs". La directive semble donc bien limiter le jeu de la clause de réciprocité au cas spécifique où les entreprises ont décidé d'appliquer l'article 9 sur la base du volontariat, ce qui exclut le cas où l'Etat a imposé la mesure sur son territoire.

Il est intéressant de noter que l'Association nationale des sociétés par actions (ANSA) avait soulevé la question dans une position datée du 6 avril 2005 (14). L'ANSA a considéré que, "selon une lecture stricte du texte de la directive, une telle obligation d'appliquer l'article 9 exclut la faculté de recourir à la clause de réciprocité. L'exemption ne peut être octroyée qu'à la société cible qui applique volontairement l'article 9". Selon ce texte, peuvent bénéficier de cette exemption les sociétés qui appliquent l'article 9, paragraphes 2 et 3, et "elles ne peuvent le faire que par choix" (art. 12-2) ; en effet, si l'Etat membre, en transposant l'article 9, le rendait obligatoire, la société cible ne se trouverait pas dans la situation de pouvoir ne pas l'appliquer. Un tel choix n'existe que lorsque l'Etat membre s'est réservé le droit de ne pas imposer l'application de l'article 9 (art. 12-1) et qu'il a, cependant, donné aux sociétés le choix (réversible) de pouvoir l'appliquer en vertu d'une clause de leurs statuts (art. 12-2 et 3). Curieusement, cette position n'a pas été reprise par le rapport "Lepetit" ne serait-ce que pour la contester, pas plus, d'ailleurs, que par la doctrine ou les travaux parlementaires en cours.

On pourrait objecter que cette lecture du texte aboutit à une situation paradoxale puisque les entreprises des Etats membres qui transposeront les articles 9 et/ou 11 seront moins protégées en cas d'offre hostile que les entreprises des Etats qui auront décidé de ne pas transposer. Ce serait, toutefois, faire abstraction de l'esprit profondément libéral qui a présidé à la rédaction de la directive. L'objectif final des auteurs du projet de directive était, en effet, "la suppression de tous obstacles aux OPA transfrontalières dans l'Union européenne [...] et l'élimination progressive de tous les moyens de défense" (15). Dans ces conditions, il est compréhensible qu'il n'ait pas été jugé utile de prévoir un maintien des armes anti-OPA, lorsque l'Etat membre a transposé la directive, même sous réserve de réciprocité. En revanche, la réciprocité se justifie lorsque les entreprises ont été plus vertueuses que les Etats en choisissant d'appliquer le droit communautaire en l'absence de transposition nationale.

Cette lecture du texte ressort, d'ailleurs, sans l'ombre d'une ambiguïté, de la note de la délégation portugaise expliquant, de façon très détaillée, sa proposition de système optionnel, qui a rassemblé les suffrages étatiques et permis de sortir le projet communautaire de l'impasse politique dans laquelle il était engagé. Le document précise qu'il existe, clairement, deux possibilités : ou bien "l'Etat membre impose l'application des articles 9 et/ou 11. Dans ce cas, les articles imposés aux sociétés continuent d'être applicables lors de toutes les offres publiques d'acquisition et sont opposables à tous les offrants, y compris à ceux (installés dans un pays européen ou un pays tiers) qui n'appliquent pas ces articles" ; ou bien "l'Etat membre n'impose pas l'application des articles 9 et/ou 11. Dans ce cas, le principe de base est celui de la réciprocité". En toute hypothèse, le modèle réserve "la règle de réciprocité pour les régimes résultant de choix effectués par les sociétés", ceci, afin de créer pour ces dernières une "incitation" à l'application volontaire des dispositions concernées.

Or, à notre connaissance, cet équilibre initial n'a jamais été rompu ni même substantiellement révisé au cours des travaux et discussions ayant conduit à l'adoption de la directive. Tout au contraire, les rapports successifs établis par Klaus-Heiner Lehne au nom de la Commission juridique et du marché intérieur du Parlement européen, ainsi que les explications qui en sont données, tendent à souligner une certaine permanence de pensée. L'amendement 413, qui proposait d'introduire les "dispositions régissant l'option d'entrée et l'option de sortie", laissait, à cet égard, peu de doute sur le champ de la réciprocité : "lorsque les Etats membres ne prescrivent pas l'applicabilité obligatoire de l'article 9 ou de l'article 11, mais que les deux sociétés impliquées dans une procédure d'OPA ont décidé de se soumettre aux dispositions des articles 9 et 11, ces dernières sont applicables d'office. Dans tous les autres cas, les articles 9 et 11 ne sont pas applicables, à moins qu'une société ait décidé que, dans tous les cas où une offre a été présentée, la société doit être soumise aux dispositions de l'un de ces articles ou de l'un et l'autre article" (17). Et si, dans le rapport final, l'amendement 21 consacré aux "arrangements facultatifs" recourt à une formulation différente, devenue définitive (18), la présentation officielle qui en est faite ne marque aucune rupture par rapport au compromis portugais : "le Parlement a adopté un amendement pour permettre aux Etats membres de rendre cette disposition facultative, c'est-à-dire de se réserver le droit de ne pas demander aux sociétés nationales d'appliquer les dispositions sur les mesures de défense. Mais les sociétés auront la possibilité, dans ces Etats membres, d'appliquer ces dispositions, c'est-à-dire de ne pas entreprendre de mesures de défense sans l'aval des actionnaires. Autre exception, une société qui aurait choisi d'appliquer cette règle mais qui serait l'objet d'une OPA hostile d'une société ne l'appliquant pas, a toujours la possibilité de ne pas s'y soumettre à ce moment" (19). Jusqu'au fameux considérant 21, inséré par ledit rapport, qui vient éclairer sur le périmètre naturel de la clause de réciprocité, conformément à l'esprit du dispositif originel.

Une lecture, juridiquement exigeante et fidèle à l'intention communautaire, conduirait, par conséquent, à interdire de considérer que l'imposition par une loi nationale, des articles 9 et/ou 11, pourrait être assortie de la clause de réciprocité figurant à l'article 12. Et le constat que certains Etats s'apprêteraient, comme la France, à procéder de la sorte ne présume pas nécessairement de la solidité juridique de la solution au regard du droit communautaire. A tout le moins, se doit-on de signaler aux destinataires ultimes de la directive le risque juridique qui plane, à cet égard, sur la mise en oeuvre de la clause de réciprocité. Il y a de fortes chances, en effet, qu'un attaquant, confronté à une clause de réciprocité invoquée dans le cadre de dispositions transposées, soit tenté de contester judiciairement (ou d'en brandir la menace) sa conformité au texte communautaire, non sans quelque chance de succès, nous semble-t-il. Le pouvoir de négociation de la société cible, confiante en la vertu dissuasive de la défense dont elle croyait avoir été gratifiée par l'Etat dont elle ressortit, s'en trouverait, alors, passablement émoussé. En raison des enjeux pour les entreprises et de l'attachement du législateur français à la mise en place du dispositif de réciprocité (20), on peut s'étonner, et regretter, que le test juridique de cette "pilule empoisonnée" à l'européenne n'ait pas été plus sérieusement conduit.

Alain Pietrancosta
Professeur à l'Université Paris I (Panthéon-Sorbonne)
Anne Maréchal
Avocat associée, ancienne élève de l'ENA
DLA Piper Rudnick Gray Cary US LLP


(1) Directive n° 2004/25 du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004, concernant les offres publiques d'acquisition (N° Lexbase : L2413DYZ). Sur ce texte, à transposer au plus tard le 20 mai 2006, et pour lequel n'est prévue à l'heure actuelle aucune mesure communautaire d'application, v. A. Pietrancosta, La directive européenne sur les offres publiques d'acquisition enfin adoptée !, RD bancaire et financier sept.-oct. 2004, p. 338 ; M. Haschke-Dournaux, L'adoption de la directive européenne relative aux offres publiques d'acquisition, PA, 26 avril 2004, n° 83, p. 7 ; F. Peltier et F. Martin-Laprade, Directive 2004/25/CE du 21 avril 2004 relative aux OPA ou l'encadrement par le droit communautaire du changement de contrôle d'une société cotée, Bull. Joly Bourse et produits financiers, 2004/5, p. 610-626 ; A. Couret, La fin d'une trop longue saga : l'adoption de la 13e directive en matière de droit des sociétés concernant les offres publiques d'acquisition, Mélanges Béguin, Litec, 2005, p. 195 ; P. Servan-Schreiber et W. Grumberg, Défenses anti-OPA, Adoption de la directive européenne sur les OPA et enjeux pour les entreprises françaises, JCP éd. E, 2005, n° 44, p. 1774 ; T. Granier, La directive concernant les offres publiques d'acquisition", Europe, n° 11, novembre 2004 ; D. Muffat-Jeandet, OPA: l'adoption d'une directive européenne, Revue du Marché commun et de l'Union européenne, n° 480, juillet-août 2004, p. 455.
(2) Rapport du groupe de travail sur la transposition de la directive concernant les offres publiques d'acquisition, rédigé à la demande du ministre de l'Economie, Jean-François Lepetit, 27 juin 2005.
(3) V. Ph. Marini, Sénat, 1ère lecture, Rapport n° 20 fait au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation, Annexe au procès-verbal de la séance du 13 octobre 2005.
(4) V. A. Pietrancosta, in Lamy Droit du Financement, 2006, n° 1606 et in Ingénierie financière, juridique et fiscale, Dalloz (à paraître), n° 72-09 et s.
(5) Le projet de loi actuel envisage, néanmoins, l'application obligatoire de deux dispositions inspirées de l'article 11 : l'inopposabilité à l'auteur d'une offre publique des clauses des statuts d'une société cotée prévoyant des restrictions au transfert des titres (transposition d'une partie de l'article 11 § 2) ; et la suspension des effets de la limitation statutaire du nombre de voix dont dispose chaque actionnaire lors de la première assemblée générale qui suit la clôture de l'offre, lorsque l'auteur de l'offre vient à détenir une fraction du capital supérieure à une quotité qui sera déterminée par le règlement général de l'AMF (N° Lexbase : L0744HCK) (transposition d'une partie de l'article 11 § 3).
(6) V. A. Pietrancosta, La modernisation des voies de l'harmonisation européenne du droit boursier, PA, 6 octobre 2004, n° 200, p. 3.
(7) Sur le "level playing field", v. le Rapport du Groupe d'experts de haut niveau en droit des sociétés sur des questions liées aux offres publiques d'acquisition, Bruxelles, 10 janvier 2002, spéc. p. 39 et s. ; B. Dauner Lieb et M. Lamandini, La nouvelle proposition de directive en matière de droit des sociétés concernant les offres publiques d'acquisition et l'instauration de l'égalité des conditions de jeu faisant référence particulière aux recommandations du Groupe de haut niveau d'experts en droit des sociétés créé par la Commission, Parlement européen, Direction générale des Études, Document de travail, Série Affaires juridiques, décembre 2002 ; J. McCahery, L. Renneboog, P. Ritter and S. Haller, The economics of takeover regulation, in Reforming Company and Takeover Law in Europe, Oxford University Press, 2004, spéc. p. 644 et M. Becht, Reciprocity in Takeovers, ibid. p. 647 et s.
(8) V. e.g. J. Simon, OPA : divine surprise ou faux semblant ?, Revue européenne de droit bancaire et financier, 3e trimestre 2003.
(9) V. spéc. J. Elofson, Lie Back and Think of Europe: American Reflections on The EU Takeover Directive, 22 Wisconsin International Law Journal, 523, Fall 2004 ; G. Hertig, J. A. McCahery, Company and Takeover Law Reforms in Europe : Misguided Harmonization Efforts or Regulatory Competition ?, Law Working Paper n° 12/2003, August 2003 ; J. McCahery, L. Renneboog, P. Ritter, S. Haller, précité.
(10) V. la position exprimée dans le "Consultative document" établi en janvier 2005 par le Department of Trade and Industry britannique.
(11) V. not. S. Maul & A. Kouloridas, The Takeover bids Directive, German Law Journal, n° 4, 1 April 2004 - Private Law ; J. Elofson, Lie Back and Think of Europe : American Reflections on The EU Takeover Directive, précité ; A. Johnston, The European Takeover Directive: Ruined by Protectionism or Respecting Diversity, Company Lawyer, 2004, 25, (9), 270-276.
(12) Etant précisé que toute mesure prise en vertu du régime de réciprocité est soumise à l'autorisation de l'assemblée générale des actionnaires de la société visée, dix-huit mois au plus tôt avant que l'offre ait été rendue publique (art. 12 § 5).
(13) V. not. au § 1er.
(14) ANSA, Transposition de la directive sur les OPA. Mesures anti-OPA, n° 05-023, 6 avril 2005.
(15) Extrait de l'avis du CESE du 14 mai 2003.
(16) Conseil de l'Union européenne, 2 juin 2003, CODEC 750, note de la délégation portugaise relative à la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant les offres publiques d'acquisition.
(17) K.-H. Lehne, Rapport fait au nom de la Commission juridique et du marché intérieur, Provisoire, 2000/0240(COD), 3 septembre 2003, sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant les offres publiques d'acquisition (COM (2002) 534-C5 0481/2002 -2000/0240 (COD)).
(18) K.-H. Lehne, Rapport fait au nom de la Commission juridique et du marché intérieur, Final, A5-0469/2003, 8 décembre 2003, sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant les offres publiques d'acquisition sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant les offres publiques d'acquisition (COM(2002) 534 - C5 0481/2002 - 2000/0240(COD)).
(19) K.-H. Lehne, Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant les offres publiques d'acquisition, Doc. A5-0469/2003, Procédure : codécision, première lecture, Débat : 15 décembre 2003, Vote : 16 novembre 2003.
(20) V. les propos du sénateur Ph. Marini lors de la séance du 20 octobre 2005 : "pour le reste, nous estimons, monsieur le Ministre, que le principe de réciprocité constitue l'une des clés de ce texte. Il tend à protéger les entreprises cibles d'une offre publique, des initiatives prises par d'autres entreprises, le cas échéant non européennes, qui ne s'astreindraient pas à la même transparence. Si donc il existait des offres compétitives sur une même cible, émanant de différentes compagnies dont une seule bénéficierait de règles de protection de son capital plus dissuasives que ce n'est le cas de la cible, celle-ci devrait pouvoir rétablir l'intégralité des défenses dont la directive, par le jeu des options, risque de la priver. Notre souci est de voir la notion de réciprocité aussi étendue que possible, et de faire prévaloir l'équité des règles du jeu, ce qui constitue l'un des apports importants de la directive".

newsid:80521

Concurrence

[Jurisprudence] Lorsque la Commission inflige des amendes, elle doit respecter ses propres lignes directrices

Réf. : TPICE, 25 octobre 2005, aff. T-38/02, Groupe Danone c/ Commission des Communautés européennes (N° Lexbase : A0737DLU)

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Le 07 Octobre 2010

Le 25 octobre dernier, le TPICE a rejeté la demande d'annulation de la décision de la Commission, du 5 décembre 2001 introduite par le groupe Danone (la requérante) dans le cadre de l'affaire "Interbrew et Alken-Maes". Il s'agit donc d'une affaire classique, sauf qu'au cas d'espèce, le tribunal a fait droit à la demande de réduction de l'amende de 44,043 millions d'euros infligée à la requérante par la Commission. La décision attaquée analyse clairement le mécanisme de l'entente [notamment point 265]. Il ressort de l'instruction qu'entre janvier 1993 et janvier 1998, dans un premier temps par le biais d'un pacte général de non-agression, puis dans un second temps depuis 1994, par la mise en oeuvre d'accords de répartition des marchés et de fixation de prix, les sociétés Interbrew et Alken-Maes (filiale à l'époque du groupe Danone SA) ont constitué un cartel sur le marché brassicole belge. C'est donc à juste titre que la Commission a considéré [article premier] qu'"Interbrew NV, Brouwerijen Alken-Maes NV et le Groupe Danone SA ont enfreint l'article 81, paragraphe 1, du traité , en participant à un ensemble complexe d'accords et/ou de pratiques concertées, portant sur un pacte général de non agression, les prix et les promotions dans le commerce de détail, le partage de la clientèle dans le secteur horeca (comprenant l'horeca "classique" et les clients nationaux), la limitation des investissements et de la publicité sur le marché horeca, une nouvelle structure tarifaire applicable au secteur horeca et au commerce de détail et l'échange d'informations sur les ventes dans le secteur horeca et le commerce de détail, et cela pendant la période allant du 28 janvier 1993 au 28 janvier 1998".

Le 22 février 2002, la requérante a introduit le présent recours dans lequel elle soulève pas moins de huit moyens [point 25]. Deux moyens, introduits à titre principal, visent l'annulation de la décision attaquée (violation des droits de la défense et du principe de bonne administration, d'une part, et violation de l'obligation de motivation, d'autre part). Les six autres moyens soulevés à titre subsidiaire ont, principalement, pour objet la réduction du montant de l'amende.

Le Tribunal a écarté cinq de ces moyens relatifs à l'évaluation erronée de la gravité de l'infraction, à l'appréciation erronée de la durée de l'infraction, à la récidive de la requérante en la matière, à la prise en compte insuffisante des circonstances atténuantes applicables, à une appréciation incorrecte de l'ampleur de la coopération de la requérante en violation du principe d'égalité de traitement et de la "communication sur la coopération" (1) de la Commission.

Finalement [points 248 à 313], le Tribunal n'a pas écarté le moyen reposant sur le caractère infondé de la circonstance aggravante retenue au titre de la contrainte exercée sur Interbrew (cinquième moyen). Le point 313 de l'arrêt est sans équivoque : "Dans ces circonstances, le Tribunal estime qu'il convient d'exercer le pouvoir de pleine juridiction qui lui est conféré en vertu de l'article 17 du règlement n° 17 en fixant l'augmentation globale du montant de base de l'amende retenue au titre des circonstances aggravantes à 40 %".

Examinons comment le Tribunal est parvenu à cette conclusion. Le considérant 315 de la décision contestée est ainsi rédigé : "Danone a en outre menacé de détruire Interbrew sur le marché français si celle-ci ne transférait pas 500 000 hectolitres de bières à Alken-Maes. Cela a conduit à une extension de la coopération entre Interbrew et Alken-Maes (voir les considérants 232 à 234 et 236). Il convient dès lors de conclure, en ce qui concerne le rôle de Danone, que celle-ci a forcé Interbrew à étendre leur coopération en la menaçant de représailles au cas où elle refuserait". C'est en s'appuyant sue cette conclusion que la Commission [point 316] a majoré de 50 % le montant de base de l'amende de Danone, le portant ainsi à 44,043 millions d'euros.

Dans un premier temps, le Tribunal constate, comme l'avait formulé précédemment la Commission, qu'une menace a bien été formulée à l'encontre d'Interbrew par Danone mais que dans le même temps il y a eu un développement du pacte de non-agression entre les protagonistes à l'entente. En conséquence [point 309], pour la juridiction : "Il résulte de ce qui précède que, sur l'ensemble de la période infractionnelle, les parties à l'entente ont chacune pris des initiatives dont l'objet était anticoncurrentiel et, en particulier, que l'on ne saurait conclure, sur le fondement des éléments du dossier, que c'est sous le seul effet d'une contrainte qu'Interbrew a consenti à l'extension de l'entente à un pacte de non-agression. Nonobstant le fait que la Commission précise, dans ses écritures, que la circonstance aggravante retenue à l'encontre de la requérante n'exonère pas Interbrew de sa responsabilité dans l'entente, l'attitude dont témoigne cette dernière tout au long de la période infractionnelle ne permet pas de conclure à l'existence d'un lien de causalité direct entre la menace formulée par la requérante le 11 mai 1994 et l'extension de l'entente".

C'est pour cette raison que la réduction de l'augmentation globale du montant de base de l'amende retenue par le Tribunal, au titre des circonstances aggravantes, passe de 50 à 40 %, en ne laissant, il est vrai, subsister que l'augmentation due à la circonstance aggravante tenant aux éléments de récidive dans le comportement de la requérante, qui a joué ici incontestablement un rôle prépondérant.

De sa propre initiative, alors que ce moyen n'a évidemment pas été abordé par la requérante, le Tribunal [points 519 à 525] remet en cause la méthode de calcul du montant final de l'amende à la suite de cette modification. Pour la juridiction, il n'y a pas d'ambiguïté : "en procédant au calcul de l'amende infligée à la requérante, la Commission s'est écartée de la méthodologie indiquée dans les lignes directrices".

Reprenons le cadre légal dans lequel le Tribunal inscrit son raisonnement. Le règlement nº 17 du Conseil, du 6 février 1962 (2), dispose en son article 15, paragraphe 2, que : "La Commission peut, par voie de décision, infliger aux entreprises et associations d'entreprises des amendes de mille [euros] au moins et d'un million d'[euros] au plus, ce dernier montant pouvant être porté à dix pour cent du chiffre d'affaires réalisé au cours de l'exercice social précédent par chacune des entreprises ayant participé à l'infraction, lorsque, de propos délibéré ou par négligence :
a) elles commettent une infraction aux dispositions de l'article
[81], paragraphe 1, ou de l'article [82] du traité, ou
b) elles contreviennent à une charge imposée en vertu de l'article 8, paragraphe 1
[du règlement].
Pour déterminer le montant de l'amende, il y a lieu de prendre en considération, outre la gravité de l'infraction, la durée de celle-ci
".

Ce premier règlement a été complété par une communication de la Commission (3) concernant la non-imposition des amendes ou la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes, c'est cette communication qui définit, notamment, "les conditions dans lesquelles les entreprises coopérant avec la Commission au cours de son enquête sur une entente pourront être exemptées d'amende ou bénéficier d'une réduction de l'amende qu'elles auraient autrement dû acquitter". Par ailleurs, depuis 1998, les lignes directrices (4) de la Commission fournissent la méthodologie applicable au calcul du montant des éventuelles amendes, "qui repose sur la fixation d'un montant de base auquel s'appliquent des majorations pour tenir compte de circonstances aggravantes et des diminutions pour tenir compte des circonstances atténuantes". Toujours, selon ces mêmes lignes directrices, "ce montant de base est déterminé en fonction de la gravité et de la durée de l'infraction, seuls critères retenus à l'article 15, paragraphe 2, du règlement nº 17". Or, comme le rappelle la jurisprudence "Cheil Jedang" (5), "eu égard au libellé des lignes directrices, le Tribunal estime que les pourcentages correspondant aux augmentations ou aux réductions, retenus au titre des circonstances aggravantes ou atténuantes, doivent être appliqués au montant de base de l'amende, déterminé en fonction de la gravité et de la durée de l'infraction, et non au montant d'une majoration précédemment appliquée au titre de la durée de l'infraction ou au résultat de la mise en oeuvre d'une première majoration ou réduction au titre d'une circonstance aggravante ou atténuante. Ainsi que la Commission l'a souligné à juste titre dans sa réponse à la question écrite du Tribunal, la méthode de calcul du montant des amendes décrite ci-dessus se déduit du libellé des lignes directrices et permet de garantir une égalité de traitement entre différentes entreprises participant à un même cartel".

En conséquence, les pourcentages correspondant aux augmentations ou aux réductions, retenus au titre des circonstances aggravantes ou atténuantes, auraient du être appliqués au montant de base de l'amende, et non au résultat de la mise en oeuvre d'une première majoration ou réduction au titre d'une circonstance aggravante ou atténuante. Ce qui, comme nous l'avons vu précédemment, n'a pas été mis en oeuvre par la Commission. C'est pour cette raison que le tribunal affirme [point 523] que, "si la méthode de calcul du montant des amendes contenue dans les lignes directrices n'est certes pas la seule méthode envisageable, elle est de nature à assurer une pratique décisionnelle cohérente en matière d'imposition des amendes, laquelle permet, à son tour, de garantir l'égalité de traitement des entreprises qui sont sanctionnées pour infractions aux règles du droit de la concurrence. Dans le cas présent, le Tribunal constate que la Commission s'est écartée des lignes directrices, en ce qui concerne la méthode de calcul du montant final des amendes, sans fournir aucune justification".

En conséquence, le montant final de l'amende infligée à la requérante par le tribunal a donc été calculé comme suit : "au montant de base de l'amende [36,25 millions d'euros] sont d'abord ajoutés 40 % de ce montant de base [14,5 millions d'euros] et soustraits 10 % dudit montant [3,625 millions d'euros], ce qui aboutit à un montant de 47,125 millions d'euros. Ensuite, ce montant est réduit de 10 % au titre de la coopération, ce qui aboutit à un montant final d'amende de 42,4125 millions d'euros".

Jean-Pierre Lehman
Ancien rapporteur du Conseil de la concurrence


(1) JO 1996C207 p. 4.
(2) Règlement (CE) n° 17 du Conseil, 6 février 1962, Premier règlement d'application des articles 85 [81] et 86 [82] du traité (N° Lexbase : L0676BAB) (JO 1962, 17, p. 204).
(3) JO 1996, C 207, p. 4.
(4) JO 1998, C 9, p. 3.
(5) TPICE, 9 juillet 2003, aff. T-220/00, Cheil Jedang Corp. c/ Commission des Communautés européennes (N° Lexbase : A0650C9X).

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Sociétés

[Jurisprudence] Les modalités de détermination de la rémunération complémentaire accordée au président du conseil d'administration : la Cour de cassation persiste et signe !

Réf. : Cass. com., 11 octobre 2005, n° 02-13.520, Société Ciments Français c/ M. Pierre Conso, F-P+B (N° Lexbase : A0177DL7)

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par Marine Parmentier, Avocat à la cour d'appel de Paris

Le 07 Octobre 2010

Outre les jetons de présence qu'il reçoit en sa qualité d'administrateur, le président du conseil d'administration peut percevoir une rémunération complémentaire laquelle est déterminée par le conseil d'administration. En effet, l'article L. 225-47 du Code de commerce (N° Lexbase : L5918AIZ) confère une compétence de principe au conseil d'administration pour octroyer une rémunération à son président, au même titre que l'article L. 225-53 (N° Lexbase : L5924AIA) du même code lui attribue la compétence de déterminer la rémunération du directeur général et des directeurs généraux délégués. Si les règles semblent être clairement définies, la question des modalités de détermination de la rémunération complémentaire accordée au président du conseil d'administration fait l'objet d'un contentieux important. En témoigne, notamment, l'arrêt rendu récemment par la Cour de cassation, destiné au Bulletin, par lequel la Haute juridiction rappelle la compétence de principe du conseil d'administration pour allouer une retraite complémentaire à son président, rémunération qui doit être justifiée par les services particuliers rendus par le mandataire social à la société (Cass. com., 11 octobre 2005, n° 02-13.520, Société Ciments Français c/ M. Pierre Conso, F-P+B). Malgré le rappel de solutions qui semblent, désormais, acquises, la Cour de cassation apporte certaines précisions qui ne manqueront pas de retenir l'intérêt des praticiens.

En l'espèce, le conseil d'administration de la société Ciments Français a désigné un comité composé de deux administrateurs, chargé de fixer les conditions générales de la rémunération et de la retraite de Monsieur C., devenu directeur général, puis président du conseil d'administration. Le comité a fait savoir à Monsieur C., par deux documents intitulés "lettre" et "décision", qu'il lui garantissait le versement d'un complément de retraite s'il ne quittait pas volontairement la société avant l'âge de la retraite fixé à 65 ans et qu'il lui garantissait, dans les mêmes conditions, un montant minimum annuel de ressources.

Monsieur C. a démissionné de ses fonctions de président du conseil d'administration et a été licencié de la société. Ayant atteint les 65 ans requis pour bénéficier des compléments de rémunération, Monsieur C. a sollicité le versement de la retraite complémentaire qui lui avait été accordée. La société Ciments Français s'y est, alors, opposé faisant valoir, d'une part, l'irrégularité de la décision du conseil d'administration et, d'autre part, l'absence de justification de cette rémunération complémentaire par les services rendus lors de son mandat.

Les juges versaillais, saisis en appel (CA Versailles, sect. 2, 12e ch., 31 janvier 2002 N° Lexbase : A3309A4C), ont estimé, en substance, que "l'engagement de versement d'un complément de retraite, tant qu'il procède d'une délibération du conseil d'administration, n'est entaché d'aucune irrégularité formelle". Concernant les conditions de fond de l'attribution d'une rémunération complémentaire à Monsieur C., la cour d'appel retient que ladite rémunération trouve sa cause dans les services particuliers rendus par ce dernier à la société et qu'elle est, donc, valable.

L'arrêt est cassé en toutes ses dispositions par la Haute juridiction qui précise, concernant les conditions de forme de l'engagement, que : "la rémunération allouée au président, notamment, sous la forme d'un complément de retraite, doit faire l'objet d'une délibération du conseil d'administration sur son montant et ses modalités, et que la confirmation, par simple référence à une décision prise par deux administrateurs même mandatés à cet effet, ne peut suppléer la décision du conseil d'administration".

Elle ajoute, concernant la validité "de fond" de cet engagement, qu'il appartenait aux premiers juges de "caractériser les services rendus par le dirigeant social qui seraient de nature à justifier l'octroi d'un complément de retraite".

Cet arrêt souligne la fermeté de la Cour de cassation concernant, tant les modalités de détermination de la rémunération complémentaire allouée au président du conseil d'administration (I), que sa justification (II).

I - La compétence exclusive du conseil d'administration pour déterminer la rémunération de son président

Ainsi qu'il l'a été rappelé, l'article L. 225-47 du Code de commerce attribue au conseil d'administration une compétence de principe pour déterminer la rémunération de son président. Cela implique donc, a contrario, l'exclusion de la compétence de tout autre organe de la société, même dans l'hypothèse où le conseil viendrait ratifier a posteriori cette décision.

A - Le caractère exclusif de la compétence du conseil d'administration

Si la compétence de principe résulte des textes du Code de commerce, le caractère exclusif de cette compétence a été affirmé par la jurisprudence.

Ainsi, dans un arrêt de principe du 4 juillet 1995, la Haute juridiction a pu décider que pour être déterminée conformément aux dispositions de l'article L. 225-47 du Code de commerce, ou autorisée conformément aux dispositions de l'article L. 225-38 du même code (N° Lexbase : L5909AIP) lorsqu'elle procède d'une convention, "la rémunération allouée au président, notamment sous forme d'un complément de retraite, doit faire l'objet d'une délibération du conseil d'administration sur son montant et ses modalités" (Cass. com., 4 juillet 1995, n° 93-17.969, M. de la Fournière c/ M Aymard et autre, publié N° Lexbase : A1252ABY ; Bull. civ. IV, n° 206 p. 192).

La Cour rejette, donc, en l'espèce, la possibilité pour une commission ad hoc désignée par le conseil d'administration de déterminer la rémunération du président dès lors que le rapport de ladite commission n'avait pas fait l'objet d'une délibération formelle par le conseil d'administration.

B - L'exclusion de la compétence d'autres organes de la société

Le caractère exclusif de la compétence du conseil d'administration a été maintes fois réaffirmé depuis. Ainsi, le conseil d'administration ne peut valablement déléguer ses pouvoirs à un comité, même dans l'hypothèse où les membres seraient administrateurs. L'arrêt rapporté est une illustration de ce principe.

De même, le président du conseil d'administration n'a pas compétence pour s'"auto-attribuer" une rémunération complémentaire. C'est ce qu'a récemment précisé la Haute juridiction dans un arrêt du 30 novembre 2004 (Cass. com., 30 novembre 2004, n° 01-13.216, F-D N° Lexbase : A1144DE4) en retenant que "le conseil d'administration d'une société anonyme a une compétence exclusive pour déterminer la rémunération du président, mais n'a pas le pouvoir de ratifier la décision du président qui, sans obtenir préalablement une décision du conseil, s'est allouée une rémunération".

Cette compétence exclusive du conseil d'administration exclut également la compétence de l'assemblée générale des actionnaires (voir, en ce sens, CA Aix-en-Provence, 5 janvier 1982, Bull. Cour d'Aix 1982/2, p. 93, cité in Mémento Francis Lefebvre, Sociétés commerciales 2005, n° 8111).

C - Le caractère exprès et collégial de la décision du conseil d'administration

La jurisprudence va plus loin et exige que la décision du conseil résulte d'une délibération expresse et non d'une ratification ou d'une acceptation implicite. 

Ainsi, dans un arrêt du 27 février 2001, la Cour casse l'arrêt d'appel au visa de l'article L. 225-47 du Code de commerce, lequel avait déduit la ratification implicite par le conseil d'administration d'un engagement de porte-fort concernant l'octroi d'un complément de retraite à son président de la connaissance qu'en auraient eue personnellement certains membres du conseil d'administration (Cass. com., 27 février 2001, n° 98-14.502, Société Malteries franco Belges c/ M. Gérard Bernheim, inédit N° Lexbase : A0453ATX).

Il faut, donc, que la décision du conseil d'administration se traduise, matériellement, par une délibération préalable à l'allocation d'une rémunération au président, délibération qui sera constatée dans un procès-verbal.

Selon une partie de la doctrine, si le procès-verbal relate la lecture des propositions d'un comité ad hoc et leur approbation, ce serait suffisant, à condition que ces propositions soient annexées au procès-verbal et fassent corps avec lui (J. Mestre et D. Velardocchio, Lamy Sociétés commerciales 2005, n° 3408).

L'arrêt commenté semble en contradiction avec ce courant doctrinal et marque une position ferme de la Haute juridiction, laquelle indique que "la confirmation par simple référence à une décision prise par deux administrateurs même mandatés à cet effet, ne peut suppléer à la décision du conseil d'administration". Elle sanctionne, ainsi, la position des juges du fond lesquels avaient estimé suffisant le fait que le conseil d'administration ait donné "plein effet" aux propositions faites par le comité ad hoc et qu'en confirmant les propositions faites par ledit comité les administrateurs avaient nécessairement délibéré sur le montant et les modalités d'un complément de retraite. En l'occurrence, la Haute juridiction a estimé que le principe même d'une décision prise par le conseil d'administration était contestable.

La délibération du conseil d'administration doit, donc, traduire expressément la volonté de cet organe d'allouer une rémunération à son président ainsi que la détermination par le conseil, réuni collégialement, des modalités de cette rémunération.

Outre l'inscription à l'ordre du jour de l'allocation d'une rémunération au président et de la détermination de ses modalités, le procès-verbal des délibérations du conseil devra relater l'existence d'un vote par les administrateurs sur ces questions qui auront été débattues pendant la séance du conseil. Même si la décision du conseil revient à entériner les solutions arrêtées par un comité ad hoc, la jurisprudence exige qu'il y ait un vote du conseil sur les propositions faites par ledit comité, le conseil ne pouvant se contenter de donner plein effet à ces propositions.

D - La compétence du conseil pour déterminer la rémunération de son président emporte celle, sauf abus de droit, de la modifier ou de la supprimer

La compétence du conseil d'administration s'étend à la modification de la rémunération allouée au président ainsi qu'à sa suppression.

En revanche, la Haute juridiction a adopté une position critiquable dans l'arrêt précité du 30 novembre 2004 (Cass. com., 30 novembre 2004, n° 01-13.216, F-D, précité) puisqu'elle admet que le conseil d'administration puisse modifier implicitement cette rémunération. En effet, dans cette espèce, le conseil d'administration avait adopté en 1988 une délibération "cadre" fixant la rémunération de son président, cette délibération ne prévoyant pas de limitation de durée. Puis, en 1990 et 1991, la rémunération avait été fixée annuellement par le conseil. En 1992, le président a décidé de s'octroyer une rémunération identique à celle prévue les autres années.

La question qui se posait, alors, était celle de savoir si l'absence de délibération du conseil en 1992 impliquait la suppression implicite de la rémunération du président du conseil d'administration ? C'est ce qu'a admis la Cour de cassation. Or, et par application du principe du parallélisme des formes, s'il est exigé une décision explicite pour déterminer les modalités et le montant de la rémunération du président, ne faut-il pas exiger que la décision de modification ou de suppression soit également explicite ?

Nous rejoignons en ce sens Monsieur J.-F. Barbiéri (note sous Cass. com., 30 nov. 2004, Rev. Sociétés 2005, n° 3, p. 631 et s.) qui s'interroge en ces termes : "une décision qui modifierait, réduirait ou supprimerait une rémunération antérieurement allouée ne doit-elle pas, à son tour, être explicite ? Ne suppose-t-elle pas nécessairement une délibération expresse -et motivée- du conseil ?".

En tout état de cause, la décision de modifier ou de supprimer la rémunération allouée au président du conseil d'administration demeure possible, sous réserve pour le président de démontrer l'existence d'un abus de droit du conseil d'administration (Cass. com., 24 octobre 2000, n° 98-18.367, Mme Hugon c/ Société L'Impeccable et autre, publié N° Lexbase : A9320ATD ; Bull. civ. IV, n° 166 p. 148). La Cour de cassation a, en effet, indiqué que la décision de supprimer la rémunération complémentaire allouée au président du conseil répondait à des difficultés économiques rencontrées par la société, ce dont il résultait qu'elle était devenue une charge excessive pour celle-ci, et qu'ainsi, sauf abus de droit, il appartenait au conseil d'administration de la modifier ou de la supprimer.

E - L'absence de délibération préalable, collégiale et expresse du conseil d'administration ne constitue pas une "simple" irrégularité formelle et implique la nullité de la décision illégalement adoptée

Un arrêt de la cour d'appel de Paris du 21 mars 1990 (CA Paris, 5e ch. sect. A, 21 mars 1990, Société Française Auer c/ Laurans, Bull. Joly Sociétés 1990 § 137) avait retenu que le non-respect, notamment, de l'article L. 225-47 du Code de commerce constituait une irrégularité formelle et qu'il convenait, en conséquence, de rechercher si cette irrégularité avait eu des conséquences pour la société et lui avait causé un préjudice.

Ce moyen avait été repris dans l'arrêt précité du 30 novembre 2004 par l'auteur du pourvoi en cassation. Cependant, la Haute juridiction ne s'est pas arrêtée sur cette question.

Ainsi, l'absence de délibération préalable, collégiale et expresse du conseil d 'administration sur la détermination de la rémunération allouée à son président constitue une irrégularité de fond sanctionnée par la nullité de la décision prise irrégulièrement. Elle implique une obligation de restituer les sommes indûment perçues par le mandataire social, sous réserve que l'action en restitution ne soit pas prescrite (Cass. com., 4 juillet 1995, n° 93-17.969, M. de la Fournière c/ M. Aymard et autre, publié, précité).

II - La justification de la rémunération complémentaire allouée au président du conseil d'administration

La seconde question soulevée par l'arrêt rapporté concerne la justification de la rémunération complémentaire allouée par le conseil d'administration à son président.

Il est, désormais, acquis qu'entre dans les prévisions de l'article L. 225-47 du Code de commerce, et non dans celles de l'article L. 225-38, l'octroi d'un complément de retraite ayant pour contrepartie des services particuliers rendus à la société pendant l'exercice de ses fonctions par le président dès lors que l'avantage accordé est proportionné à ces services et ne constitue pas une charge excessive pour la société.

Dès lors que l'octroi d'une retraite complémentaire répond à ces trois conditions, la décision doit être prise dans les conditions de l'article L. 225-47 du Code de commerce et ne relève pas du domaine des conventions réglementées.

En outre, lorsque la rémunération devient une charge excessive pour la société, le conseil d'administration a la faculté de la réduire ou de la supprimer, et ce de manière unilatérale : il ne s'agit pas d'une obligation contractuelle dont la modification impliquerait l'accord des parties et donc celui du président du conseil (voir en ce sens Cass. com., 10 février 1998,n° 95-22.052, Société Sidergie c/ M. Marmonier, publié N° Lexbase : A2489AC8 ; Bull. civ. IV, n° 70 et Cass. com., 24 octobre 2000, n° 98-18.367, Mme Hugon c/ Société L'Impeccable et autre, publié, précité).

La notion de "services particuliers" rendus par le mandataire social à la société justifiant l'allocation d'une rémunération complémentaire, utilisée pour la première fois dans l'arrêt du 3 mars 1987, concerne des actions indépendantes de celles impliquées par l'exercice du mandat social.

Comme le relève M. Hatoux (note sous Cass. com. 3 mars 1987, n° 84-15.726, Union de banques à Paris c/ M Lebon, publié N° Lexbase : A3045AAZ ; Bull. civ. IV, n° 64 p. 49 ; Gaz. Pal. 1987, 264), "il est manifeste que les juges ont entendu exiger que soient rétribués non les services constitués par l'exercice du mandat social en lui-même, mais ceux qui ne pouvaient être appréciés qu'en fin de mandat au regard d'une sorte de bilan révélant le dévouement et la réussite du président manifestés par les résultats obtenus". Il appartient aux juges du fond de déterminer la nature de ces services.

C'est ce que rappelle précisément l'arrêt commenté qui retient que "en se déterminant ainsi sans caractériser les services rendus par le dirigeant social qui seraient de nature à justifier l'octroi d'un complément de retraite" les juges du fond ont violé les dispositions de l'article L. 225-47 du Code de commerce. En l'espèce, les juges versaillais avaient justifié l'allocation de cette retraite complémentaire en procédant à une analyse a contrario. Ils ont retenu, en effet, qu'à la date du prononcé de l'arrêt, aucun fait imputé à M. C. n'a reçu de qualification pénale ayant justifié sa condamnation des chefs des poursuites dirigées contre lui et qu'il n'est pas davantage démontré que l'option, alors, prise par ce dirigeant en faveur d'importants investissements industriels et d'une diversification à l'échelle internationale des produits de la société se serait révélée contraire aux intérêts commerciaux et financiers à moyen et long terme de la société.

Or, les juges du fond auraient dû procéder par une analyse positive de l'action du président du conseil d'administration, consistant à souligner les actions positives pour la société dont le président est à l'origine.

Cet arrêt, s'inscrivant dans le courant jurisprudentiel antérieur, marque, néanmoins, un affermissement de la position de la Cour de cassation relatif tant à l'analyse des modes de détermination de la rémunération allouée au président du conseil d'administration qu'à sa justification.

Il convient, enfin, de souligner que de nouvelles dispositions sont applicables au contrôle de la rémunération des dirigeants depuis la loi "Breton" .

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Sociétés

[Manifestations à venir] Pactes d'actionnaires & actions de préférence

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Le 07 Octobre 2010

Les éditions formations entreprises (EFE) organisent, les 25 et 26 janvier 2006, deux journées ayant pour thème "Pactes d'actionnaires & actions de préférence". L'objectif de cette manifestation est de faire le point sur l'organisation des droits attachés aux actionnaires. Ainsi, cette formation permettra de revenir sur toute l'actualité jurisprudentielle et l'apport de l'ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004 sur les valeurs mobilières (N° Lexbase : L5052DZ7), d'analyser les clauses clés à négocier dans le cadre de la répartition des pouvoirs et des droits de vote des associés. En outre, il s'agira, également, de maîtriser la composition du capital et la distribution des dividendes. Enfin, cette formation doit permettre d'obtenir les clés pour rédiger en toute sécurité les clauses essentielles des pactes : clauses "managériales", clauses antidilution, clauses de "weighted average", ou encore, les nouvelles clauses insérées dans les pactes.
  • Programme

Mercredi 25 janvier 2006

Actions de préférence ou pactes d'actionnaires : quel montage en fonction de l'investissement choisi ?
Tirez le meilleur parti du régime des actions de préférence
Faites le point sur les droits particuliers attachés aux actions de préférence
Maîtrisez les cessions de titres dans le cadre du pacte
Maîtrisez la composition de votre capital
Clauses antidilution et liquidation préférentielle : quelle forme choisir entre actions de préférence ou clauses du pacte ?
Clauses statutaires ou intégrées dans les pactes

Jeudi 26 janvier 2006

Désignation et répartition des pouvoirs des dirigeants
Clauses statutaires ou intégrées dans les pactes
Clauses des pactes d'actionnaires destinées à fidéliser ou sanctionner les managers
Comment répartir et distribuer les bénéfices et les pertes ?
Clauses de sortie : faites le point sur les techniques juridiques utilisées
Les garanties d'exécution du pacte : anticiper, prévenir, gérer la phase contentieuse

  • Intervenants

Thierry Brun, Renee Kaddouch, Jeantetassociés ;
Françoise Monod, Roy Arakelian, PDGB Société d'Avocats ;
Pierre-Louis Perrin, SJ Berwin ;
Stéphane Davin, Alain Sauty de Chalon, Baker & McKenzie ;
Anne Tolila, Karen Noël, Morgan Lewis & Bockius ;
Monique Sentilles-Dupont, Gilles de Poix, Lovells ;
Paul Morel, Salans ;
Xavier Rohmer, August & Debouzy ;
Jean-François Pourdieu, Nomos Société d'Avocats ;
Elie Kleiman, Freshfields Bruckhaus Deringer

  • Dates

Mercredi 25 janvier 2006
Jeudi 26 janvier 2006

  • Prix

1 jour : 900 euros H.T.
2 jours : 1 600 euros H.T.

  • Renseignements / Contact

EFE - Département formation
50, avenue de la Grande Armée
75848 Paris cedex 17
Tél. : 01 44 09 24 23
Fax : 01 44 09 22 22
inscriptions@efe.fr

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Avocats

[Manifestations à venir] Journée des Commissions Ouvertes

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Le 07 Octobre 2010

A l'occasion de la rentrée du Barreau de Paris, qui aura lieu à la Maison du Barreau et la Bibliothèque de l'Ordre (Palais de Justice), se tiendra, le 15 novembre 2005, la journée des Commissions Ouvertes, où le Barreau de Paris accueillera, sous la Présidence de M. le Bâtonnier, magistrats, membres des professions judiciaires et représentants de la Société Civile . Elle viendra clôturer une année de travail intense de l'ensemble des commissions ouvertes du Barreau de Paris et de leurs responsables dans tous les domaines du droit, et le livre des commissions ouvertes exposant le rôle et la responsabilité de l'avocat dans la Cité y sera présenté. Notamment, dans le cadre de la commission bioéthique et droit de la santé, deux conférences-débats sont organisées :
  • Dossier Médical Personnel (DMP) et réseaux de santé: de nouveaux outils de coordination des soins

Date : mardi 15 novembre 2005 à 9h30
Lieu : Salle du Pont Neuf
Intervenants : Mme Agnès Schmitz Schweitzer, avocat à la Cour, M. Jean de Kervasdoué, Professeur d'économie de la santé au Conservatoire des Arts et Métiers.

  • Médiation médicale

Date : mardi 15 novembre 2005 à 15h00
Lieu : Salle du Barreau
Intervenants : Mme Magali Richard, chef de bureau de la médication et de la responsabilité médicale à l'APHP, M. Christian Pages, chirurgien orthopédiste, M. Jean Marc Morin, Directeur des affaires juridiques et des droits du patient à l'APHP, Mme Laurence Azoux Bacrie, avocat à la Cour, Médiateur.

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