Jurisprudence : CJCE, 27-09-2001, aff. C-16/00, Cibo Participations SA c/ Directeur régional des impôts du Nord-Pas-de-Calais

CJCE, 27-09-2001, aff. C-16/00, Cibo Participations SA c/ Directeur régional des impôts du Nord-Pas-de-Calais

A5734AWB

Référence

CJCE, 27-09-2001, aff. C-16/00, Cibo Participations SA c/ Directeur régional des impôts du Nord-Pas-de-Calais. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1007623-cjce-27092001-aff-c1600-cibo-participations-sa-c-directeur-regional-des-impots-du-nordpasdecalais
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Arrêt de la Cour (première chambre) du 27 septembre 2001.

Recueil de jurisprudence 2001 page 0000

Dans l'affaire C-16/00,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 234 CE, par le tribunal administratif de Lille (France) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Cibo Participations SA

et

Directeur régional des impôts du Nord-Pas-de-Calais,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation des articles 4, paragraphes 1 et 2, 13, B, sous d), et 17, paragraphes 2, sous a), et 5, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1),

LA COUR

(première chambre),

composée de MM. M. Wathelet, président de chambre, P. Jann et L. Sevón (rapporteur), juges,
avocat général: Mme C. Stix-Hackl,
greffier: Mme D. Louterman-Hubeau, chef de division,

considérant les observations écrites présentées:
- pour Cibo Participations SA, par Me M. Pourbaix, avocat,
- pour le gouvernement français, par Mme K. Rispal-Bellanger et M. S. Seam, en qualité d'agents,
- pour la Commission des Communautés européennes, par MM. E. Traversa, C. Giolito et Mme H. Michard, en qualité d'agents,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales de Cibo Participations SA, du gouvernement français et de la Commission à l'audience du 14 décembre 2000,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 6 mars 2001,

rend le présent


Arrêt


1 Par jugement du 6 janvier 2000, parvenu à la Cour le 19 janvier suivant, le tribunal administratif de Lille a posé, en vertu de l'article 234 CE, trois questions préjudicielles sur l'interprétation des articles 4, paragraphes 1 et 2, 13, B, sous d), et 17, paragraphes 2, sous a), et 5, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1, ci-après la «sixième directive»).

2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un litige opposant Cibo Participations SA (ci-après «Cibo») au directeur régional des impôts du Nord-Pas-de-Calais, quant à la question de savoir si et, le cas échéant, dans quelle mesure un holding peut déduire la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la «TVA») grevant les services acquis dans le cadre de la prise de participations dans ses filiales.

La réglementation communautaire

3 L'article 2, point 1, de la sixième directive soumet à la TVA les livraisons de biens ainsi que les prestations de services effectuées à titre onéreux à l'intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel. En vertu de l'article 4, paragraphe 1, de ladite directive, est considéré comme assujetti quiconque accomplit, d'une façon indépendante, l'une des activités économiques mentionnées au paragraphe 2 de cette disposition. La notion d'«activités économiques» est définie à l'article 4, paragraphe 2, de la sixième directive comme englobant toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services, et notamment les opérations comportant l'exploitation d'un bien corporel ou incorporel en vue d'en retirer des recettes ayant un caractère de permanence.

4 L'article 13, B, sous d), point 5, de la sixième directive dispose:
«Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les États membres exonèrent [...]:
[...]
d) les opérations suivantes:
[...]
5. les opérations, y compris la négociation mais à l'exception de la garde et de la gestion, portant sur les actions, les parts de sociétés ou d'associations, les obligations et les autres titres, à l'exclusion:
- des titres représentatifs de marchandises, - des droits ou titres visés à l'article 5 paragraphe 3».

5 L'article 17 de la sixième directive, intitulé «Naissance et étendue du droit à déduction», dispose en son paragraphe 2, sous a), que, «[d]ans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de ses opérations taxées, l'assujetti est autorisé à déduire de la taxe dont il est redevable [...] la taxe sur la valeur ajoutée due ou acquittée pour les biens qui lui sont ou lui seront livrés et pour les services qui lui sont ou lui seront rendus par un autre assujetti».

6 En ce qui concerne les biens et les services qui sont utilisés par un assujetti pour effectuer à la fois des opérations ouvrant droit à déduction et des opérations n'ouvrant pas droit à déduction, l'article 17, paragraphe 5, premier alinéa, de la sixième directive précise que «la déduction n'est admise que pour la partie de la taxe sur la valeur ajoutée qui est proportionnelle au montant afférent aux premières opérations». Aux termes de l'article 17, paragraphe 5, deuxième alinéa, de la même directive, «[c]e prorata est déterminé pour l'ensemble des opérations effectuées par l'assujetti conformément à l'article 19».

7 L'article 19, paragraphes 1 et 2, de la sixième directive dispose:
«1. Le prorata de déduction, prévu par l'article 17 paragraphe 5 premier alinéa, résulte d'une fraction comportant:
- au numérateur, le montant total, déterminé par année, du chiffre d'affaires, taxe sur la valeur ajoutée exclue, afférent aux opérations ouvrant droit à déduction conformément à l'article 17 paragraphes 2 et 3,
- au dénominateur, le montant total, déterminé par année, du chiffre d'affaires, taxe sur la valeur ajoutée exclue, afférent aux opérations figurant au numérateur ainsi qu'aux opérations qui n'ouvrent pas droit à déduction. Les États membres ont la faculté d'inclure également dans le dénominateur le montant des subventions autres que celles visées à l'article 11 sous A paragraphe 1 sous a).
Le prorata est déterminé sur une base annuelle, fixé en pourcentage et arrondi à un chiffre qui ne dépasse pas l'unité supérieure.
2. Par dérogation au paragraphe 1, il est fait abstraction, pour le calcul du prorata de déduction, du montant du chiffre d'affaires afférent aux livraisons de biens d'investissement utilisés par l'assujetti dans son entreprise. Il est également fait abstraction du montant du chiffre d'affaires afférent aux opérations accessoires immobilières et financières ou à celles visées à l'article 13 sous B sous d), lorsqu'il s'agit d'opérations accessoires. [...]»
Le litige au principal et les questions préjudicielles

8 Cibo est un holding qui détient des participations importantes dans trois entreprises spécialisées dans le domaine du cycle. Elle a été créée par la société Compagnie d'importation des laines (ci-après «CIL»), son actionnaire majoritaire.

9 Il ressort du jugement de renvoi que Cibo conteste devant le tribunal administratif de Lille le rappel de TVA procédant du refus par l'administration fiscale d'admettre la déduction de la TVA que Cibo a pratiquée, pour la période du 2 novembre 1993 au 31 décembre 1994, sur différentes prestations de services qui lui ont été facturées par des tiers dans le cadre des opérations de prise de participations dans ses filiales. Lesdites prestations étaient notamment relatives à l'audit de sociétés, à une intervention dans le cadre de la négociation du prix d'acquisition des actions, au montage de la prise de contrôle des sociétés et à une intervention en matière juridique et fiscale.

10 À l'appui de sa demande de déduction, Cibo a fait valoir que son président a pris la présidence des trois filiales, qu'elle rend des services rémunérés à celles-ci, que CIL met à sa disposition, moyennant rémunération, des personnes compétentes pour intervenir auprès des filiales dans le domaine de la direction générale, administrative, financière, commerciale et technique et que ces services ont été facturés aux filiales sur la base d'un forfait égal à 0,5 % de leurs chiffres d'affaires. Cibo soutient qu'elle s'immisce ainsi dans la gestion des filiales et que, en conséquence, les frais liés à ses prises de participations relèvent du champ d'application de la TVA en tant que frais généraux, dès lors que ces frais se rattachent à l'activité générale du holding.

11 Selon la juridiction de renvoi, l'administration fiscale française répond que Cibo tire l'essentiel de son chiffre d'affaires de la perception de dividendes. En outre, d'une part, Cibo ne réaliserait pas d'opérations commerciales en son nom propre et, d'autre part, les sociétés du groupe resteraient juridiquement indépendantes, Cibo se bornant, indépendamment de son rôle financier, à assurer contre rémunération une action de conseil et d'animation de la politique du groupe. Par conséquent, il n'y aurait pas d'immixtion directe ou indirecte de Cibo dans la gestion de ses filiales. Les frais liés à la prise de participations ne se rattacheraient pas à des prestations de services en faveur de ses filiales. Ils auraient seulement trait à la détention de participations et à la perception de dividendes, qui ne relèveraient pas du champ d'application de la TVA.

12 Au cas où Cibo serait néanmoins considérée comme s'immisçant dans la gestion de ses filiales, l'administration fiscale française soutient que les dividendes doivent être rattachés à l'activité économique de la société et donc à ses recettes relevant du champ d'application de la TVA, mais que, comme ils sont exonérés conformément à l'article 13, B, sous d), de la sixième directive, il y a lieu de calculer un prorata de déduction.

13 Dans ces circonstances, le tribunal administratif de Lille a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:
«1) Quel est le critère à retenir pour la définition de l'immixtion? Pourrait-il être tiré notamment soit de l'existence de prestations rémunérées, soit de l'animation d'un groupe par un holding, soit de la gestion de fait, excluant toute indépendance de la filiale, soit de tout autre élément?
2) En cas d'immixtion, la perception de dividendes demeure-t-elle hors du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée pour une raison autre que l'activité économique, en tant qu'elle n'est pas la contrepartie d'une opération de livraison de biens ou de prestations de services, ou, compte tenu du fait que les frais sont engagés pour l'acquisition d'actions ayant pour objet direct la participation à des activités économiques, la perception de dividendes entre-t-elle dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée, et, dans cette hypothèse, est-elle exonérée par le 1 du d) du B de l'article 13 de la sixième directive ou taxée?
3) Si la perception de dividendes demeure hors du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, quelles en sont les conséquences sur la question des droits à déduction:
- tout droit à déduction de la taxe afférente aux frais engagés pour l'acquisition d'actions est-il exclu, dès lors qu'ils ne concourent à aucune opération taxée,
- ou la déduction doit-elle être admise au titre des frais généraux?»

Sur les questions préjudicielles
Sur la première question

14 Par la première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, quel critère doit être utilisé pour apprécier si l'immixtion d'un holding dans la gestion des sociétés dans lesquelles il a pris des participations constitue une activité économique au sens de l'article 4, paragraphe 2, de la sixième directive.

Observations soumises à la Cour

15 Cibo fait valoir que la prise de participation dans une entreprise s'accompagne dans deux hypothèses d'une immixtion dans sa gestion et constitue en conséquence une activité économique relevant du champ d'application de la TVA. La première hypothèse serait celle où l'acquisition porte sur la quasi-totalité du capital et où l'actionnaire prend en mains les destinées de la filiale, intervient dans sa gestion et désigne ses dirigeants, tout en respectant sa personnalité morale. Dans ce cas, l'actionnaire serait le plus souvent amené à fournir à sa filiale des prestations rémunérées. Le second cas de figure serait proche du premier, à la différence que le holding ne respecterait plus le fonctionnement normal de la filiale en la gérant de fait.

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