La lettre juridique n°407 du 9 septembre 2010 : Fiscalité du patrimoine

[Chronique] Chronique de fiscalité du patrimoine - Septembre 2010

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par Daniel Faucher, Consultant au CRIDON de Paris

le 07 Octobre 2010

Lexbase Hebdo - édition fiscale vous propose, cette semaine, de retrouver la chronique d'actualités en fiscalité du patrimoine, réalisée par Daniel Faucher, Consultant au Cridon de Paris. Au tout premier plan de cette chronique, l'auteur revient sur la question de la déductibilité de l'IR d'une indemnité de remboursement anticipé dans le cadre d'un emprunt substitutif, avec un arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 5 juillet 2010 (CE 9° et 10° s-s-r., 5 juillet 2010, n° 301044, mentionné dans les tables du recueil Lebon). Toujours en matière de déductibilité de l'IR, un arrêt rendu le 7 juillet 2010 par la Haute juridiction administrative rappelle le principe de non-déductibilité des pertes en capital (CE 9° et 10° s-s-r., 7 juillet 2010, n° 318936, mentionné dans les tables du recueil Lebon). A l'honneur, également, un arrêt, en date du 5 juillet 2010, qui apporte des précisions relatives au régime d'investissement locatif "Périssol". Enfin, l'auteur relève les précisions de la doctrine administrative à propos des neveux ou nièces venant à la succession de leur oncle ou tante (QE n° 78724 de M. Grall, réponse publiée au JOAN du 3 août 2010, p. 8576).
  • Revenus fonciers : déduction de l'indemnité de remboursement anticipé d'un emprunt auquel est substitué un emprunt à un taux inférieur (CE 9° et 10° s-s-r., 5 juillet 2010, n° 301044, mentionné dans les tables du recueil Lebon N° Lexbase : A1293E4N)

Le Conseil d'Etat confirme la solution récente, qui avait mis un terme aux hésitations des tribunaux, selon laquelle est déductible la somme versée au titre du remboursement anticipé d'un emprunt souscrit initialement auquel se substitue un nouvel emprunt. En effet, une telle opération a incontestablement pour objet la conservation du revenu au sens de l'article 13 du CGI (N° Lexbase : L1050HLH).

1. L'indemnité de remboursement anticipé d'un emprunt ne correspond pas à la catégorie "intérêts d'emprunts" au sens de l'article 31, I-1°d du CGI (N° Lexbase : L3907IAX)....

Le juge admet que puissent être déduits les intérêts d'un emprunt à un taux inférieur, emprunt qui vient se substituer à celui initialement souscrit pour l'acquisition d'un immeuble destiné à la location (CE, 18 mars 1987, n° 43680 N° Lexbase : A2410APX). En effet, même s'il est indirect, il y a un lien entre la souscription de l'emprunt substitutif et l'immeuble productif de revenus fonciers. Cependant, s'agissant de l'indemnité de remboursement, ce lien est "très distendu" puisqu'il faudrait admettre, pour la déduire au titre des intérêts d'emprunt que cette catégorie peut viser une somme versée ayant pour objet de diminuer, pour le futur, la charge d'intérêts. De surcroît, il est loisible de considérer que cette indemnité de remboursement constitue en réalité une réparation du préjudice subi par l'établissement prêteur et n'est donc pas liée aux frais d'acquisition de l'immeuble productif de revenus. Ce qui a été jugé en 2007 par les juges du Palais-Royal (CE 3° et 8° s-s-r., 5 octobre 2007, n° 281658, Mentionné aux Tables du Recueil Lebon N° Lexbase : A6684DY9).

2.... Mais elle doit être considérée comme une dépense en vue de l'acquisition du revenu au sens de l'article 13 du CGI

L'article 13 du CGI permet la déduction des dépenses effectuées en vue de l'acquisition ou de la conservation du revenu. Cette disposition, générale, est applicable dès lors que, pour chaque catégorie de revenus, la dépense concernée n'est pas exclue par le texte spécifique concernant les revenus en cause. Or, dans la mesure où l'indemnité de résiliation versée n'accroît pas la valeur de l'immeuble, auquel cas elle ne serait pas déductible, mais permet de conserver la source de revenus, sa déduction est autorisé sur le fondement de l'article 13 du CGI (CE, 5 juillet 2010, n° 301044). Cette décision confirme la position adoptée en 2007 (CE, 5 octobre 2007, n° 281658, précité).

  • IR : non-déductibilité des pertes en capital (CE 9° et 10° s-s-r., 7 juillet 2010, n° 318936, mentionné dans les tables du recueil Lebon N° Lexbase : A1353E4U)

L'obligation, pour l'associé d'une SCI, de rembourser, à hauteur de sa participation, un prêt consenti à la société constitue une perte en capital, non déductible de l'impôt sur le revenu.

1. Principe de non-déduction des pertes en capital

Au motif qu'elle ne constitue pas une dépense engagée en vue de l'acquisition ou la conservation d'un revenu, une perte en capital n'est pas déductible des revenus de celui qui la subit. En effet, les charges déductibles sont celles qui sont inhérentes à l'emploi ou à l'exploitation sociale et ont donc un caractère contraignant. Ainsi, par exemple, une perte de change sur la part des annuités affectée à l'amortissement du capital d'un emprunt contracté à l'étranger n'est pas une charge déductible (CE, 15 décembre 1933, n° 99479, recueil Dupont 1934, DA 5-B 2431, n° 13). De même, l'abandon de son compte courant par un ancien dirigeant s'analyse en une perte en capital (CAA Nantes, 1ère ch., 2 mai 1996, n° 93NT01099 N° Lexbase : A9718BGZ). On remarquera que, si l'appauvrissement du dirigeant ne donne lieu à aucune déduction, l'enrichissement correspondant pour la société, qui voie sa dette disparaître, est imposable. Au cas particulier de l'affaire examinée par le Conseil d'Etat, une personne détenait 10 % des parts d'une SCI dont l'objet était la construction d'un immeuble. La société avait contracté un prêt qu'elle avait cessé de rembourser. Sur le fondement de l'article 1857 du Code civil (N° Lexbase : L2054ABP), selon lequel "à l'égard des tiers les associés d'une société civile répondent indéfiniment des dettes sociales à proportion de leur part dans le capital à la date de leur exigibilité", le prêteur avait obtenu une décision judiciaire en sa faveur. Selon cette décision, l'associé devait s'acquitter de 10 % du capital restant dû. Ayant demandé la déduction de la somme correspondante sur le fondement de l'article 13 du CGI, selon lequel le revenu imposable est constitué par excédent du produit brut, y compris la valeur des profits et avantages en nature, sur les dépenses effectuées en vue de l'acquisition ou de la conservation du revenu, le contribuable s'était vu opposer un refus. Refus justifié pour le Conseil d'Etat qui, constatant que les parts de SCI détenues par le contribuable ne constituaient pas un actif affecté à une activité professionnelle mais un élément de son patrimoine privé, confirme que le versement effectué représentait une perte en capital, dont aucune disposition n'autorise la déduction.

2. Exceptions au principe

Les rares exceptions à ce principe concernent essentiellement les versements effectués en exécution d'engagements de caution. Ainsi, s'appuyant sur les articles 83, 3° (N° Lexbase : L0093IKN) et 13, 1° du CGI, le juge accepte la déduction, dans la catégorie des traitements et salaires, des sommes versées par un dirigeant salarié en exécution d'un engagement de caution souscrit au profit de la société dans laquelle il exerce son activité (CE 22 décembre 1989, n° 56905 N° Lexbase : A0669AQT). En revanche, la déduction des mêmes sommes n'est pas accordée lorsque le versement d'une caution est opéré par une personne qui est simple administrateur ou associé d'une société, sans y exercer d'activité salariée. Les exceptions concernent donc bien les seuls cas où le demandeur exécute un engagement lié à la perception d'un revenu.

  • Enregistrement : neveux ou nièces venant à la succession de leur oncle ou tante (QE n° 78724 de M. Grall, réponse publiée au JOAN du 3 août 2010, p. 8576 [LXB=L0163IND])

L'administration vient de confirmer que le ou les neveux ou nièces qui viennent à la succession de leur oncle ou tante à raison de prédécès de leur auteur, seul frère ou soeur du défunt, viennent de leur propre chef et non par représentation. Ils ne peuvent donc bénéficier de l'abattement et du tarif de leur auteur, soit celui en frères et soeurs. Elle refuse ainsi toute mesure de tolérance, comme celle qu'elle accorde aux petits-enfants, soit en ligne directe.

1. La représentation nécessite une pluralité de souches

L'article 51 de la loi de finances rectificative pour 2006 (loi n° 2006-1771 du 30 décembre 2006 N° Lexbase : L9270HTI) a modifié le IV de l'article 779 du CGI (N° Lexbase : L0154IKW) afin que les représentants d'un renonçant ou d'un prédécédé en ligne collatérale bénéficient de l'abattement personnel qui aurait pu être revendiqué par leur auteur. Ainsi, depuis le 1er janvier 2007, les neveux ou nièces venant à la succession de leur oncle ou de leur tante par représentation de leur auteur bénéficient désormais, en se le partageant, de cet abattement, dont le montant, actualisé chaque année, s'établit à 15 697 euros en 2010. S'agissant du tarif des droits de succession applicable, l'article 82 de la loi de finances pour 2009 (loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 N° Lexbase : L3783IC4) a modifié l'article 777 du CGI (N° Lexbase : L0155IKX) afin d'appliquer aux neveux et nièces venant à la succession par représentation de leur auteur prédécédé le tarif applicable à ce dernier.

Cependant, ces dispositions ne s'appliquent que pour autant qu'il existe, au jour du décès, une pluralité de souches "actives". En effet, aux termes de l'article 752-2 du Code civil (N° Lexbase : L3476AWN) "En ligne collatérale, la représentation est admise en faveur des enfants et descendants de frères ou soeurs du défunt, soit qu'ils viennent à sa succession concurremment avec des oncles ou tantes, soit que tous les frères et soeurs du défunt étant prédécédés, la succession se trouve dévolue à leurs descendants en degrés égaux ou inégaux". La représentation est donc une institution légale en vertu de laquelle certains successibles descendant d'une même souche et en concours avec des successibles d'autres souches, exercent les droits qu'aurait eu dans la succession ouverte leur ascendant prédécédé s'il avait survécu au défunt. La représentation est donc limitée par l'existence d'une pluralité de souches : "l'extension du domaine de la représentation est cependant limitée par la nécessité d'une pluralité de souches, inhérente au mécanisme analysé" (F. Terré et Y. Lequette, Les successions, Les libéralités, Dalloz 3ème éd., n° 87, p. 83). L'analyse est identique lorsque l'une des souches est éteinte, faute de descendants : dans cette hypothèse, le neveu ou la nièce vient également de son propre chef.

2. L'absence d'exception

Confirmant l'analyse civile, le ministre de l'Economie a précisé, dans une réponse récente (QE n° 54899 de Jean-Jacques Candelier, réponse publiée au JOAN du 26 janvier 2010, p. 846 N° Lexbase : L0161INB), que le mécanisme de la représentation est une fiction de la loi, prévue par le Code civil, dont l'objectif est d'assurer l'égalité entre les souches en permettant aux descendants d'un auteur prédécédé de venir à la succession à sa place, en concours avec les autres héritiers. Dès lors, ce mécanisme ne peut être invoqué en présence d'une seule souche. Par suite, lorsque des neveux ou nièces viennent à la succession d'un oncle ou d'une tante à raison du prédécès de leur auteur seul frère ou soeur du défunt, ils doivent être considérés comme venants de leur chef. A ce titre, ils ne peuvent bénéficier que de leur abattement personnel, soit 7 849 euros. Le surplus imposable est taxé au taux de 55 %. Cette réponse vient d'être réitérée en précisant que la différence de traitement des neveux ou nièces, selon qu'il existe au jour du décès de leur ou tante une ou plusieurs souches n'est pas une discrimination d'origine fiscale. Selon l'administration, cette différence de traitement ne résulte que de la loi civile. Force est donc de constater que l'administration est moins "bienveillante" envers les successions en ligne collatérale qu'à l'égard des successions en ligne directe. En effet, alors que sur le plan civil, un petit-enfant qui vient à la succession de son grand-père par suite du décès de son père, fils unique du défunt, est considéré comme venant également de son propre chef, et ne devrait donc bénéficier que de l'abattement résiduel de 1 570 euros, elle admet qu'il puisse bénéficier de l'abattement de son auteur bien qu'il ne vienne pas par représentation, soit celui de 156 974 euros (QE n° 49368, de Eric Ciotti, réponse publiée au JOAN du 20 juillet 2010, p. 8131 N° Lexbase : L0160INA ; QE n° 54898 de Annick Le Loch, réponse publiée au JOAN du 23 février 2010, p. 2035 N° Lexbase : L0165ING). Autrement dit, le civil "tient le fiscal" quand l'administration le veut bien !

  • Revenus fonciers : régime d'investissement locatif "Périssol" (CE 9° et 10° s-s-r., 5 juillet 2010, n° 307102, mentionné dans les tables du recueil Lebon N° Lexbase : A1303E4Z)

Même si cette réserve de jouissance est temporaire, l'associé d'une SCI qui en bénéficie ne peut revendiquer l'amortissement "Périssol" au titre de l'immeuble détenu par la société.

1. L'amortissement Périssol...

Réservé aux investissements réalisés entre le 1er janvier 1996 et le 31 août 1999, ce dispositif permettait aux acquéreurs de logements neufs qui s'engageaient à les louer pendant neuf ans de déduire de leurs revenus fonciers jusqu'à 80 % de leur investissement. Les immeubles éligibles à cet amortissement pouvaient être détenus par une société non soumise à l'IS.

2.... ne peut être revendiqué lorsque l'associé se réserve temporairement la jouissance du bien

Si la loi ne pose aucune condition quant à la qualité du locataire qui peut être une personne physique ou morale, ou quant à l'affectation, résidence principale ou secondaire, il est impératif que la location soit effective pendant la période de neuf ans, ce qui exclut toute affectation à des locations saisonnières ou l'hypothèse dans laquelle le propriétaire ou l'associé de la société qui détient l'immeuble s'en réserve la jouissance temporaire (DA 5 D 2226, n° 24 du 10 mars 1999). Au cas particulier de l'affaire examinée par le Conseil d'Etat dans le cadre d'un pourvoi en cassation, une SCI avait donné à bail à une autre SCI l'immeuble qu'elle avait fait construire. Les associés de la première SCI qui détenaient également 48 % de parts de la société locataire s'étaient réservés temporairement la jouissance de l'immeuble pour lequel l'amortissement "Périssol" avait été pratiqué. Selon le juge, c'est à bon droit que la cour administrative d'appel avait validé la remise en cause de ce régime de faveur.

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