La lettre juridique n°175 du 7 juillet 2005 : Social général

[Textes] L'ordonnance relative à l'accomplissement de certaines formalités contractuelles par voie électronique

Réf. : Ordonnance du 16 juin 2005, n° 2005-674, relative à l''accomplissement de certaines formalités contractuelles par voie électronique (N° Lexbase : L5423G9Q)

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par Nicolas Mingant, Ater en droit privé à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV

le 07 Octobre 2010

Selon l'article L. 121-1 du Code du travail (N° Lexbase : L5443ACL), "le contrat de travail est soumis aux règles du droit commun". Cette soumission de principe du contrat de travail aux règles du droit commun des contrats justifie que soit examinée, dans une perspective travailliste, l'ordonnance du 16 juin 2005 relative à l'accomplissement de certaines formalités contractuelles par voie électronique. Ce texte a notamment pour objectif de reconnaître et d'encadrer la valeur juridique d'un procédé que la pratique a rendu courant : le courrier électronique. Cette réforme du Code civil est susceptible d'avoir des répercussions en droit du travail car, d'une part, le courrier électronique devient un vecteur légal d'information (1) et, d'autre part, il peut, sous certaines conditions, avoir la même valeur qu'un écrit traditionnel (2). 1. L'information du salarié par courrier électronique

Selon l'article 1369-2 nouveau du Code civil, "les informations qui sont demandées en vue de la conclusion d'un contrat ou celles qui sont adressées au cours de son exécution peuvent être transmises par courrier électronique si leur destinataire a accepté l'usage de ce moyen".

On sait qu'en droit du travail l'employeur est soumis, en matière d'information du salarié, à un certain nombre d'obligations légales. L'entrée en vigueur de l'ordonnance du 16 juin 2005 conduit à s'interroger sur la possibilité de transmettre ces informations par courrier électronique. La jurisprudence n'a pas souvent eu l'occasion de se prononcer et il est certainement difficile de donner une réponse de principe à cette question.

Ce qui est certain, c'est que l'article 1369-2 nouveau du Code civil pose une restriction importante. Selon ce texte, l'information par courrier électronique ne peut être admise que si le destinataire a préalablement été informé que ce moyen d'information serait utilisé dans la relation contractuelle. A contrario, l'expéditeur ne peut prétendre avoir communiqué une information si, d'une manière ou d'une autre, il n'a pas obtenu l'assentiment du destinataire pour l'utilisation de ce procédé.

Si cette condition tenant à l'acceptation préalable du procédé par le destinataire est certainement pertinente dans le cadre de relations commerciales, elle semble assez peu adaptée à la relation entre l'employeur et le salarié. Pourtant, dans le cadre de la relation de travail, il est certainement envisageable pour l'employeur d'insérer au contrat de travail une clause par laquelle le salarié accepte de recevoir les informations relatives à la conclusion ou à l'exécution de son contrat de travail par courrier électronique.

Mais, quand bien même le salarié accepterait l'usage du procédé, cela ne signifierait probablement pas que l'employeur pourrait, par la suite, se contenter systématiquement de transmettre les informations par courrier électronique. Chaque texte imposant à l'employeur une obligation d'information prévoit, en effet, des modalités de mise en oeuvre différentes.

La Cour de cassation, dans un arrêt du 20 avril 2005, a estimé que l'information par la voie électronique n'était pas de nature à libérer l'employeur de son obligation lorsqu'elle ne permettait pas de respecter l'intégralité des dispositions légales applicables (Cass. soc., 20 avril 2005, n° 03-41.802, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A9303DHZ, lire Christophe Radé, Information des salariés et usage de l'intranet, Lexbase Hebdo n° 166 du 5 mai 2005 - édition sociale N° Lexbase : N3898AI9 ; l'arrêt portait sur l'obligation, prévue par l'article L. 212-4-9 du Code du travail N° Lexbase : L9588GQ8, d'informer les salariés sur les emplois disponibles ressortissant à leur catégorie professionnelle).

Même si l'article 1369-2 nouveau du Code civil ouvre certainement des possibilités nouvelles aux employeurs en matière d'information des salariés, il conviendra certainement de vérifier, au regard des exigences propres à chaque obligation légale d'information, si le courrier électronique peut être admis ou non.

2. L'envoi ou la remise d'un écrit au salarié par courrier électronique

L'ordonnance insère dans le chapitre VII du titre III du livre III du Code civil, intitulé "Des contrats sous forme électronique", une section 3 intitulée "De l'envoi ou de la remise d'un écrit par voie électronique". Cette section comporte trois articles, qui ont pour objet de reconnaître à l'écrit sous forme électronique la même valeur que l'écrit sur support papier.

L'article 1369-7 du Code civil prévoit qu'"une lettre simple relative à la conclusion ou à l'exécution d'un contrat peut être envoyée par courrier électronique".

L'article 1369-8 du Code civil prévoit qu'"une lettre recommandée relative à la conclusion ou à l'exécution d'un contrat peut être envoyée par courrier électronique à condition que ce courrier soit acheminé par un tiers selon un procédé permettant d'identifier le tiers, de désigner l'expéditeur, de garantir l'identité du destinataire et d'établir si la lettre a été remise ou non au destinataire. Le contenu de cette lettre, au choix de l'expéditeur, peut être imprimé par le tiers sur support papier pour être distribué au destinataire ou peut être adressé à celui-ci par voie électronique. Dans ce dernier cas, si le destinataire n'est pas un professionnel, il doit avoir demandé l'envoi par ce moyen ou en avoir accepté l'usage au cours d'échanges antérieurs. Un avis de réception peut être adressé à l'expéditeur par voie électronique ou par tout autre dispositif lui permettant de le conserver".

L'article 1369-9 prévoit que "hors les cas prévus aux articles 1369-1 et 1369-2, la remise d'un écrit sous forme électronique est effective lorsque le destinataire, après avoir pu en prendre connaissance, en a accusé réception".

Il n'y a certainement pas de raison de principe d'exclure la relation contractuelle de travail du champ d'application de ces dispositions. En application de l'article L. 121-1 du Code du travail (N° Lexbase : L5443ACL), l'assimilation de la lettre électronique à la lettre traditionnelle concerne aussi bien le droit du travail que le droit civil. 

Lorsqu'un écrit est exigé dans le cadre de la relation entre l'employeur et le salarié, celui-ci peut, en principe, revêtir la forme prévue aux articles 1369-7 à 1369-9 du Code civil. Il convient donc de relire toutes les dispositions du Code du travail imposant l'exigence d'un écrit (lettre simple ou lettre recommandée, éventuellement avec avis de réception) à la lumière de ces dispositions nouvelles du Code civil.

L'employeur pourra, par exemple, par lettre simple électronique, respecter son obligation de remettre au salarié lié par un contrat à durée indéterminée ou à durée déterminée, dans les deux mois qui suivent la date d'embauche, un ou plusieurs documents comportant des éléments d'information sur les éléments essentiels du contrat (directive (CE) 91/533 du Conseil du 14 octobre 1991 relative à l'obligation de l'employeur d'informer le travailleur des conditions applicables au contrat ou à la relation de travail N° Lexbase : L7592AUQ).

L'employeur pourra aussi, par exemple, conformément à l'article L. 321-1-2 du Code du travail (N° Lexbase : L8923G7M), proposer au salarié une modification de son contrat de travail pour motif économique, par lettre recommandée électronique. Il pourra, également, utiliser ce procédé pour convoquer le salarié à l'entretien préalable au licenciement (C. trav., art. L. 122-14 N° Lexbase : L9576GQQ) ou pour notifier le licenciement (C. trav., art. L. 122-14-1 N° Lexbase : L9577GQR).

Il convient, cependant, de préciser que le salarié n'est pas un "professionnel" au sens de l'article 1369-8 du Code civil. Pour que le procédé soit valable, il faudra donc que le salarié ait "demandé l'envoi par ce moyen" ou qu'il ait "accepté l'usage au cours d'échanges antérieurs". La validité de la lettre recommandée sous forme électronique est donc subordonnée à l'accord du salarié. S'il est assez improbable que le salarié demande à l'employeur de recourir à ce type de procédé, il n'est, en revanche, pas impossible que l'employeur tente de lui en faire accepter l'usage par une clause du contrat de travail initial ou par un avenant.

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