Réf. : CAA Bordeaux, 9 juillet 2020, n° 18BX03424 (N° Lexbase : A23973R9)
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par Marie Le Guerroué
le 02 Septembre 2020
► La rédaction d'actes juridiques et une part de conseil juridique personnalisé pour sécuriser une procédure de passation de marché ne constitue pas la suite d’une activité principale de conseil en gestion des services publics ; dès lors, les prestations juridiques proposées ne sont pas autorisées par l'article 60 de la loi du 31 décembre 1971 (N° Lexbase : L6343AGZ) (CAA Bordeaux, 9 juillet 2020, n° 18BX03424 N° Lexbase : A23973R9).
Fait/procédure. Dans le cadre de l'exercice de sa compétence " déchets ", la communauté d'agglomération de La Rochelle avait, par avis d'appel public à concurrence, lancé un marché à procédure adaptée intitulé " assistance à maîtrise d'ouvrage pour l'élaboration et la passation du marché de collecte des déchets ménagers ". Ce marché d'assistance à maîtrise d'ouvrage avait été attribué à une société d'expertise et de conseil pour la gestion des services publics. Le Conseil national des barreaux (CNB) avait mis en demeure la communauté d'agglomération de mettre un terme à ce marché, laquelle avait rejeté cette demande. Le CNB avait saisi le tribunal administratif de Poitiers d'une demande tendant à l'annulation de ce marché. Le tribunal avait annulé le marché. La société relevait appel du jugement.
Réponse. La CAA note, d’abord que c'est à bon droit que le tribunal administratif de Poitiers a écarté la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir du Conseil national des barreaux.
Sur le bien-fondé du jugement. La cour rappelle que sur le fondement de l'article 60 de la loi du 31 décembre 1971, le professionnel ayant reçu la qualification OQPCM peut en conséquence exercer une activité de consultation juridique, dès lors que celle-ci relève directement, mais de façon accessoire de son activité principale, laquelle ne peut être de nature juridique.
Cahier des clauses techniques. La cour relève qu’il résulte du cahier des clauses techniques particulières du marché en litige, relatif à la tranche ferme, qu'était confiée au titulaire l'analyse des besoins au regard des prestations actuelles, des propositions d'organisation des services, la prise en compte des interrogations actuelles sur la mise en œuvre de tarification incitative et sur la redevance spéciale, des propositions et conseils vis-à-vis des alternatives possibles sur les moteurs, notamment sur les motorisations hybrides, GNV ou électriques, la rédaction des pièces techniques et financières, la proposition de critères de jugement, la détermination d'éléments pertinents à intégrer dans le dossier de consultation, la validation et le contrôle de l'ensemble des pièces administratives, la détermination et la validation du planning de la procédure, la gestion des questions éventuelles posées par les candidats en cours de publicité et l'assistance juridique. Selon l'article 4 du même cahier, la tranche conditionnelle, qui a été affermie par la communauté d'agglomération de La Rochelle, consiste en particulier en l'analyse des candidatures sur la base des plis reçus dans le respect du Code des marchés publics, la rédaction d'un avis sur le rapport de présentation, la rédaction de mise au point du marché, le cas échéant, la participation à l'assistance juridique de la communauté d'agglomération pour toute question ponctuelle précise survenue en cours de procédure. Il résulte de l'instruction que la société est un cabinet de conseil en gestion des services publics. Alors même qu'en vertu des dispositions précitées des articles 54 et 60 de la loi du 31 décembre 1971, elle bénéficie d'une qualification OPQCM lui permettant d'exercer une activité juridique à titre accessoire et relevant directement de son activité principale, il résulte toutefois de l'instruction que si le marché litigieux portait pour partie sur une analyse du contexte technique et financier du futur marché de collecte de déchets ménagers dont le lancement était envisagé par la communauté d'agglomération de La Rochelle, il comprenait également la rédaction d'actes juridiques et une part de conseil juridique personnalisé pour sécuriser la procédure de passation de ce marché, qui ne constituait pas la suite de l'activité principale de conseil en gestion de la société. Par suite, ces prestations juridiques, déconnectées des prestations de conseil en gestion de la société prévues au marché, ne relèvent pas directement de son activité principale et ne peuvent être regardées comme étant l'accessoire nécessaire à celle-ci. Dès lors, les prestations juridiques proposées par la société dans son offre, quand bien même elles ne représenteraient que 4,5 jours de travail sur une mission de 22 jours et qu'elles ne constituaient pas une part prépondérante du marché en litige, ne sont pas autorisées par l'article 60 de la loi du 31 décembre 1971.
Annulation. Par suite, la société n'est pas fondée à se plaindre de ce que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a, eu égard au caractère illicite de ce marché, de la gravité de l'illégalité commise et après avoir vérifié que l'annulation ne porterait pas une atteinte excessive à l'intérêt général, annulé le marché en litige (v., ETUDE : Les personnes habilitées sur autorisation ou agrément à délivrer un conseil ou à rédiger un acte juridique in l’Ouvrage « La profession d’avocat » N° Lexbase : E36513RN).
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