Réf. : CE Section, 3 décembre 2018, n° 412010, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A9467YNX)
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N6745BX4
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par June Perot
le 12 Décembre 2018
► En raison de la situation d'entière dépendance des personnes détenues vis-à-vis de l'administration pénitentiaire, l'appréciation du caractère attentatoire à la dignité des conditions de détention dépend notamment de leur vulnérabilité, appréciée compte tenu de leur âge, de leur état de santé, de leur personnalité et, le cas échéant, de leur handicap, ainsi que de la nature et de la durée des manquements constatés et eu égard aux contraintes qu'implique le maintien de la sécurité et du bon ordre dans les établissements pénitentiaires ;
► les conditions de détention s'apprécient au regard de l'espace de vie individuel réservé aux personnes détenues, de la promiscuité engendrée, le cas échéant, par la sur-occupation des cellules, du respect de l'intimité à laquelle peut prétendre tout détenu, dans les limites inhérentes à la détention, de la configuration des locaux, de l'accès à la lumière, de l'hygiène et de la qualité des installations sanitaires et de chauffage ;
► seules des conditions de détention qui porteraient atteinte à la dignité humaine, appréciées à l'aune de ces critères et des articles D. 349 (N° Lexbase : L0996ACU) à D. 351 (N° Lexbase : L1293ACU) du Code de procédure pénale, révèlent l'existence d'une faute de nature à engager la responsabilité de la puissance publique ; une telle atteinte, si elle est caractérisée, est de nature à engendrer, par elle-même, un préjudice moral pour la personne qui en est la victime qu'il incombe à l'Etat de réparer ;
► le préjudice moral subi par un détenu à raison de conditions de détention attentatoires à la dignité humaine revêt un caractère continu et évolutif ; par ailleurs, rien ne fait obstacle à ce que ce préjudice soit mesuré dès qu'il a été subi ; il s'ensuit que la créance indemnitaire qui résulte de ce préjudice doit être rattachée, dans la mesure où il s'y rapporte, à chacune des années au cours desquelles il a été subi.
Ainsi statue le Conseil d’Etat dans une décision rendue le 3 décembre 2018 (CE Section, 3 décembre 2018, n° 412010, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A9467YNX).
Au cas de l’espèce, un homme incarcéré dans une maison d’arrêt avait saisi le juge des référés du tribunal administratif d’une demande tendant au versement d’une provision de 9 100 euros en réparation du préjudice qu’il estime avoir subi du fait de conditions de détention attentatoires à la dignité humaine. Il s’est pourvu en cassation contre l’ordonnance par laquelle le juge des référés a rejeté sa demande aux motifs, d’une part, que la créance dont il se prévalait correspondant au chef de préjudice se rapportant à ses conditions de détention sur la période allant du 24 mai au 31 décembre 2011 était prescrite et, d'autre part, que la créance correspondant au chef de préjudice se rapportant à la période de détention allant du 1er janvier 2012 au 6 août 2013 ne présentait pas, en l'état de l'instruction, un caractère non sérieusement contestable au sens des dispositions de l'article R. 541-1 du Code de justice administrative (N° Lexbase : L2548AQG).
Enonçant les solutions susvisées, le Conseil d’Etat annule l’ordonnance en tant qu’elle statue sur la demande de l’intéressé au titre de la période du 1er janvier 2012 au 6 août 2013 et condamne l’Etat à lui verser une provision de 5 500 euros.
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