Jurisprudence : CA Orléans, 06-03-2023, n° 19/03704, Infirmation partielle


COUR D'APPEL D'ORLÉANS


C H A M B R E C I V I L E


GROSSES + EXPÉDITIONS : le 06/03/2023

la SCP THIERRY GIRAULT

la SELARL ACTE - AVOCATS ASSOCIES


ARRÊT du : 06 MARS 2023


N° : - N° RG : 19/03704 - N° Portalis DBVN-V-B7D-GCA5


DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance d'ORLEANS en date du 05 Juin 2019



PARTIES EN CAUSE


APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265248755469758


SAMCV THELEM ASSURANCES, identifiée au répertoire SIREN sous le n°085 580 488, agissant poursuites et diligences de son représentant légal

[Adresse 2]

[Adresse 2]


représentée par Me BERGER substituant Me Thierry GIRAULT de la SCP THIERRY GIRAULT, avocat au barreau d'ORLEANS


D'UNE PART


INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265247632555175


S.A.S. BELLIER, représentée par son président domicilié en cette qualité audit siège,

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]


ayant pour avocat Me Gaetane MOULET de la SELARL ACTE - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau d'ORLEANS


D'AUTRE PART


DÉCLARATION D'APPEL en date du : 02 Décembre 2019.

ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 22 Novembre 2022



COMPOSITION DE LA COUR


Lors des débats :


En l'absence d'opposition des parties ou de leurs représentants :


Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de chambre,

Madame Laure- Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile🏛🏛.


Après délibéré au cours duquel Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de chambre et Madame Laure- Aimée GRUA, Magistrat honoraire, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de:


Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de chambre,

Madame Florence CHOUVIN-GALLIARD, Conseiller,

Madame Laure- Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles


Greffier :


Madame Fatima HAJBI, Greffier lors des débats et du prononcé.


DÉBATS :


A l'audience publique du 23 Janvier 2023, à laquelle ont été entendus Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de chambre , en son rapport et les avocats des parties en leurs plaidoiries.


Prononcé le 06 MARS 2023 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile🏛.



FAITS ET PROCEDURE


M. [D] [N] et Mme [Aa] [N] ont confié à la société Bati Renov Centre exerçant sous le nom commercial Bidron Renov divers travaux de rénovation d'un immeuble ancien.


Se plaignant de désordres et de l'abandon du chantier, ils ont saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Blois, qui le 21 janvier 2014, a ordonné une mesure d'expertise judiciaire.


Les opérations d'expertise ont été étendues à la société Thelem Assurances, assureur de la société Bati Renov Centre, et à la société Bellier, sous-traitante qui a fourni et installé un escalier.


L'expert a déposé son rapport le 19 janvier 2016.


Par acte d'huissier du 2 mai 2017, la société Thelem Assurances a fait assigner la société Bellier devant le tribunal de grande instance d'Orléans aux fins de la voir condamner à lui payer les sommes de 18 077 euros en principal, outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation, 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛, et de la voir condamner aux dépens.



Par jugement en date du 5 juin 2019, le tribunal de grande instance d'Orléans a :

- déclaré recevable l'action introduite par la société Thelem Assurances contre la société Bellier ;

- ordonné un partage de responsabilité entre les deux parties qui sont intervenues dans la réalisation du désordre affectant les escaliers et garde-corps comme suit :

70% pour la société Bati Renov Centre ;

30 % pour la société Bellier

- condamné la société Bellier à payer à la société Thelem Assurances les sommes suivantes :

4 356 euros TTC au titre des travaux de reprise des garde-corps et des escaliers ;

2 600,44 euros TTC au titre des préjudices immatériels ;

2066,59 euros au titre des frais d'expertise ;

- condamné la société Bellier aux dépens de la présente instance lesquels comprendront les frais d'expertise à hauteur de 2066,65 euros et à payer à la société Thelem Assurances une indemnité de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté les autres chefs de demande.



Par déclaration du 2 décembre 2019, la société Thelem Assurances a interjeté appel de ce jugement en critiquant expressément tous ses chefs.


Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 14 novembre 2022, la société Thelem Assurances demande de :

- condamner la société Bellier à lui payer la somme de 18.077 € augmentée des intérêts de droit à compter du jour du jugement, et à défaut à compter de l'arrêt à intervenir ;

- confirmer le jugement entrepris pour le surplus ;

- déclarer tant irrecevables que mal fondées les demandes fins et conclusions de la société Bellier et l'en débouter ;

- condamner la SAS Bellier au paiement de la somme de 2.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la SAS Bellier aux dépens de première instance et d'appel et autoriser la S.C.P Thierry Girault, Avocats à la cour d'appel d'Orléans, [Adresse 1] à recouvrer directement contre la ou les parties condamnées ceux des dépens dont il aurait fait l'avance sans avoir reçu provision, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile🏛.


Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 29 août 2022, la société Bellier demande de :

- déclarer la société Thelem Assurances mal fondée en son appel ;

- en conséquence, l'en débouter ;

- déclarer au contraire la société Bellier recevable en son appel incident ;

- en conséquence, infirmer le jugement rendu entre les parties le 5 juin 2019;

- statuant à nouveau, débouter la société Thelem Assurances de l'ensemble des demandes formées contre la société Bellier ;

A titre subsidiaire,

- déclarer que la responsabilité de la société Bellier à l'égard de la société Bidron Renov et, partant de son assureur à supposer valablement subrogé, est engagée à hauteur des sommes suivantes :

2.178,00 € au titre des préjudices matériels ;

277,45 € au titre des préjudices immatériels ;

352,00 € au titre des frais de maîtrise d'œuvre, d'expertise, autres dépens et frais irrépétibles ;

En toute hypothèses,

- condamner la société Thelem Assurances à payer à la société Bellier une indemnité de 4.000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Thelem Assurances aux entiers dépens et allouer à la SELARL Acte Avocats Associés le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.


La société Bellier a formé appel incident dans ses conclusions du 27 mars 2020.


Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions récapitulatives.



MOTIFS


Sur la recevabilité des demandes de la société Thelem assurances


La société Bellier soutient que les demandes de la société Thelem assurances sont irrecevables.


Elle soutient en effet que la société Thelem assurances ne peut valablement se prévaloir du protocole transactionnel conclu avec les époux [N] pour fonder ses demandes contre la société Bellier à la hauteur des sommes qu'elle leur a versées, alors que la société Bellier n'a pas été invitée aux discussions engagées avec les époux [N] à la suite du dépôt du rapport d'expertise. Elle ajoute qu'elle n'est pas codébitrice solidaire de la société BIDRON RENOV, qui est le seul cocontractant des époux [N], et encore moins de la société THELEM assurance.


Elle estime que la société THELEM ne justifie pas remplir les conditions du recours subrogatoire.


********


Aux termes de l'article L. 121-12, alinéa 1, du code des assurances🏛, l'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur.


Il est constant que la subrogation n'a lieu que lorsque l'indemnité a été versée en application des garanties souscrites.


Il n'est en revanche pas distingué selon que l'assureur a payé l'indemnité de sa propre initiative, ou qu'il l'a payée en vertu d'un accord transactionnel ou en exécution d'une décision de justice ( 2e Civ., 16 décembre 2021, pourvoi n° 20-13.692⚖️).


En l'espèce, la société Thelem assurances produit la police d'assurance 'Responsabilité décennale' n°TDCB02873454 souscrite par la société Bidron Renov à effet au 1er avril 2011. Il résulte des conditions particulières versées


aux débats qu'était notamment garantie la responsabilité décennale de l'assuré dans la limite de 3 100 000 euros, les dommages immatériels consécutifs étant quant à eux garantis dans la limite de 80 000 euros.

Selon l'article 4.1.1 des conditions générales versées aux débats, l'assuré est garanti pour les travaux de réparation de la construction à laquelle il a contribué, lorsque sa responsabilité est engagée sur le fondement de la présomption de responsabilité établie par les articles 1792 et suivants du code civil🏛.


Les désordres affectant les escaliers et garde-corps posés par la société Bellier les rendent, selon le rapport d'expertise, impropres à leur destination en ce qu'ils ne répondent pas aux normes de sécurité en vigueur et présentent un danger pour la sécurité des personnes, ce qui les rend non conformes à leur destination; de sorte qu'ils ont vocation à être garantis au titre de la garantie décennale prévue par l'article 1792 du code civil.


L'activité pose d'escaliers et de garde-corps était garantie par la police d'assurance ainsi qu'il résulte du paragraphe 'menuiseries intérieures' du contrat d'assurance.


La réception peut selon le rapport d'expertise être fixée au 30 juillet 2012. Les époux [Ab] ont sollicité la mise en oeuvre de la garantie dans le délai de dix ans prévu par l'article 1792 du code civil.


Les désordres affectant la pose des escaliers et garde-corps étaient donc garantis par la police d'assurance souscrite par la société Bidron Renov.


Il en résulte que l'indemnité versée aux époux [N] au titre des désordres affectant l'escalier, et pour laquelle la société Thelem assurances agit contre la société Bellier, l'a bien été en application des garanties soucrites par la société Bidron renov.


Il importe peu en revanche que l'indemnité d'assurance ait été versée en vertu d'un accord transactionnel conclu avec les maîtres de l'ouvrage, dès lors qu'il est établi qu'elle a été payée en exécution des garanties souscrites (2ème Civ., 16 décembre 2021, n°20-13.692 publié).


Le fait que la société Bellier ne soit pas débitrice solidaire des époux [Ab] est dès lors sans emport sur la recevabilité du recours subrogatoire de la société Thelem assurances, fondé sur la responsabilité encourue par le sous-traitant en raison des non conformités des travaux qu'il a réalisés.


La société Thelem assurances est dès lors recevable, sur le fondement de la subrogation légale prévue par l'article L121-12, alinéa 1, du code des assurances, à agir contre la société Bellier.


Il convient d'ajouter qu'en tout état de cause, l'action de la société Thelem assurances est en l'espèce également recevable sur le fondement de la subrogation conventionnelle. En effet, il est constant que l'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance dispose contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur, non seulement de la subrogation légale de l'article L. 121-12 du code des assurances, mais aussi du droit d'invoquer la subrogation conventionnelle dans les droits de son assuré, prévue par l'article 1250 du code civil🏛, résultant de la volonté expresse de ce dernier, manifestée concomitamment ou antérieurement au paiement reçu de l'assureur, sans avoir à établir que ce règlement a été fait en exécution de son obligation contractuelle de garantie.


En l'espèce, il résulte expréssement du protocole d'accord signé par M. et Mme [Ab] et la société Thelem assurances que M. et Mme [Ab] ont expressément accepté dans ce document de subroger la société Thelem assurances 'légalement et en tant que de besoin conventionnellement' dans leurs droits et actions (Article 5 : 'Subrogation') de sorte que'la société Thelem assurances conserve ses droits et action récursoire à l'encontre de la société Bellier sous-traitante de la société Bidron Renov pour les désordres dont l'implication résulte du rapport d'expertise judiciaire' (même article). Il résulte de cette manifestation de volonté expresse de M. et Mme [Ab], manifestée antérieurement au paiement reçu de l'assureur puisque ce document prévoit que le paiement doit intervenir dans le mois de la signature du présent protocole (Article 2), que la société Thelem assurance est en tout état de cause recevable à agir contre la société Bellier sur le fondement de la subrogation conventionnelle.


Sur le bien-fondé de l'action


* sur la responsabiltié de la société Bellier


La société Thelem assurances soutient que la société Bellier était, en sa qualité de sous-traitante la société Bidron renov, tenue d'une obligation de résultats à laquelle elle a manqué puisque les escaliers et garde-corps ne sont pas conformes. Elle précise que la société Bidron renov n'était pas maître d'oeuvre contrairement à ce que soutient la société Bellier et que la société Bellier était tenue d'un devoir de conseil à l'égard de la société Bidron Renov et aurait dû lui signaler les difficultés. Elle ajoute qu'aucun élément ne démontre qu'il y aurait eu des modifications intervenues en cours d'exécution de chantier, que notamment aucune cloison n'était envisagée à l'étage, et que la société Bellier se devait de respecter les normes en vigueur, ce qu'elle n'a pas fait.


Elle estime que le partage de responsabilité auquel a procédé le tribunal qui a mis 70 % de la responsabilité à la charge de la société Bidron Renov et 30 % à la charge de la société Bellier n'est pas conforme à la jurisprudence de la Cour de cassation puisque le sous-traitant est tenu d'une obligation de résultat qui emporte présomption de faute et de causalité.


Elle sollcite que soit imputée à la société Bellier 85% de la responsabilté et donc du coût des dommages dont elle est responsable.


La société Bellier soutient au contraire que la société Bidron renov était maître d'oeuvre et qu'elle lui a donné les instructions à l'origine des non-conformité. Elle explique qu'elle a notamment reçu l'instruction de la société Bidron renov de supprimer le garde-corps et de créer un escalier tenant compte des contraintes des lieux liées à la faible largeur de la trémie. Elle précise en particulier que l'absence de garde-corps extérieur de l'escalier entre le rez-de-chaussée et le premier étage s'explique par le fait que la société Bidron renov devait fermer ce côté avec un placoplâtre. Elle fait valoir que l'obligation de résultat du sous-traitant à l'égard de l'entrepreneur principal cède lorsque les travaux ont été accomplis sous la conduite des consignes et directives de l'entrepreneur principal, ce qui est le cas en l'espèce. Elle ajoute qu'elle a rempli son obligation de conseil puisqu'elle avait proposé un escalier dans un premier devis, que la société Bidron Renov lui a fait modifier dans un second devis. Elle reconnaît la non-conformité s'agissant de la zone de remplissage du garde-corps. Elle estime que la faute commise par la société Bidron Renov, qui lui a imposé des directives en faisant fi de ses conseils et recommandations, exonère la société Bellier de responsabilité, totalement ou à tout le moins partiellement, sa part de responsabilité ne pouvant en tout état de cause excéder 15%.


Le sous-traitant est tenu envers son donneur d'ordre d'une obligation de résultat (Civ. 3e, 3 déc. 1980, Bull. civ. III, no 188 ; 3e Civ., 10 décembre 2003, pourvoi n 02-14.320, Bulletin civil 2003, III, n 227), ses travaux devant être exempts de vices (3e Civ 22 juin 1988, pourvoi n° 86-16.263⚖️, Bulletin 1988 III N° 115).


Il ne peut s'exonérer de sa responsabilité que par la preuve d'une cause étrangère (3e Civ., 17décembre 1997, pourvoi n 95-19.504⚖️, Bull. 1997, III, n 227.)


Le sous-traitant est également tenu d'une obligation de conseil envers l'entrepreneur principal (1ère Civ., 24 janvier 1995, n°92-17.792⚖️). Le fait que son cocontractant soit lui-même un professionnel de la construction ne dispense pas le sous-traitant du devoir de conseil auquel il est tenu en sa qualité d'homme de l'art.

Le sous-traitant ne peut pas se contenter d'exécuter conformément à la demande de l'entrepreneur principal les travaux envisagés. S'il estime que la solution technique est insuffisante ou inefficace, il est tenu à l'égard de son cocontractant d'un devoir de critique et de réserves (3 Civ., 30 janvier 2008, n 06-19.100⚖️).

S'il est admis que le sous-traitant puisse échapper à sa responsabilité en démontrant la faute de l'entrepreneur principal, il n'en demeure pas moins qu'il est tenu à son égard d'un devoir de conseil et qu'il ne peut donc échapper à sa responsabilité lorsqu'il a manqué au devoir de conseil auquel il est tenu envers l'entrepreneur principal.


Or en l'espèce, il résulte du rapport d'expertise que les gardes-corps et l'escalier du 2ème étage ne sont pas conformes aux règles de l'art :

- sur l'escalier allant du rez-de-chaussée au 1er étage, il a été constaté un garde-corps manquant.

- sur l'escalier allant du 1er au 2ème étage : l'emmarchement est d'une largeur inférieure à 60 cm alors qu'il doit être au minimum, selon la norme XP P21-211, pour les escaliers 'gain de place', de 0,60 cm. Les dimensions des garde-corps ne sont pas conformes à la norme française NF P01-012 : l'espace entre les mains courantes est de de 46,8 cm alors qu'il devrait être de 60 cm minimum, l'espace entre limons est de 48,3 cm alors qu'il devrait être de 60 cm minimum, l'espace entre deux cables devrait être égal ou inférieur à 18 cm (alors qu'il est de 22 cm) et le remplissage du garde-corps doit être plein sur une hauteur supérieure ou égale à 45 cm, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.


La société Bellier ne justifie pas que le côté de l'escalier devait être fermé avec un placoplâtre comme elle l'affirme, et elle ne saurait se retrancher derrière l'instruction qu'elle dit avoir reçue de la société Bidron de supprimer le garde-corps litigieux alors qu'il lui appartenait au contraire d'informer la société Bidron du caractère obligatoire de cette protection, ce qu'elle ne justifie pas avoir fait.


La société Bellier ne justifie pas avoir informé son cocontractant, la société Bidron renov, de ce que les ouvrages ainsi réalisés, fût-ce sa demande, étaient non conformes aux normes applicables en matière d'escaliers, normes qu'elle ne pouvait ignorer puisqu'il s'agissait de sa spécialité, et portaient atteinte à la sécurité de l'ouvrage de sorte que les escaliers ainsi posés étaient non conformes à leur destination. Le fait que la société Bidron renov lui ait fait modifier le projet présenté dans un premier devis ne la dispensait pas d'informer son cocontractant des non-conformités du nouveau projet, ce qu'elle ne justifie pas avoir fait.


Elle a donc incontestablement manqué tant à son obligation de résultats de poser un escalier exempt de vices qu'à son obligation de conseil, manquements qui ont contribué à la survenance du dommage.


Toutefois, la société Bidron renov a également commis une faute à l'origine du préjudice des époux [N] puisqu'elle a prévu une trémie d'escalier sous-dimensionnée, qui ne s'imposait pas selon l'expert, et qui a contraint à la pose d'un escalier particulièrement étroit dont l'emmarchement est de ce fait inférieur aux normes minimales, à l'origine de difficultés d'amménagement et d'approvisionnement de l'étage.


Il en résulte que la reponsabilité de la société Bidron renov et de la société Bellier dans la survenance du dommage leur incombe à chacune par moitié.


* sur le quantum des demandes


La société Thelem assurances a payé à M. et Mme [Ab] une somme de 105 973,97 euros par application du protocole transactionnel, réparant à hauteur de 72 237 euros le préjudice matériel (tableau électrique : 8481 euros; absence de ventilation : 4730 euros ; dysfonctionnement chauffage et production eau chaude : 44 506 euros ; escalier non conforme : 14 520 euros), outre les frais de maîtrise d'oeuvre, les frais d'étude thermique, les préjudices immatériels déduction faite de la franchise, les frais d'expertise, les dépens et l'indemnité de procédure.


Au titre de l'escalier non conforme, l'expert a chiffré à à 13 200 euros le montant hors taxe des travaux nécessaires à leur mise en conformité, soit 14 520 euros avec la TVA. La société Thelem a versé une somme de 14 520 euros à M. et Mme [N] au titre de l'indemnisation de ce poste de préjudice, ainsi qu'il résulte du protocole d'accord transactionnel. La société Bellier sera donc condamnée à lui verser une somme de 50% de ce montant soit 7260 euros à ce titre.


La société Thelem assurances sollicite également la condamnation de la société Bellier à l'indemniser au titre des sommes versées pour :

- les frais de maîtrise d'oeuvre,

- l'étude thermique

- les préjudices immatériels

- l'article 700 du code de procédure civile

- les frais d'expertise

- les dépens.


Compte tenu du montant total du préjudice matériel réparé par l'indemnité versée par l'assureur à M. et Mme [Ab], d'un montant total de 72 237 euros, la société Bellier, condamnée à supporter ce préjudice à hauteur de 7260 euros soit 10,05 % de cette somme, sera en conséquence tenue de supporter 10,05 % des postes de préjudice suivants :

- les frais de maîtrise d'oeuvre (8668,14 euros) à hauteur de 10,05 % : 871,15 euros

- les préjudices immatériels (13500 euros) à hauteur de 10,05% : 1356,75 euros

- les frais d'expertise (6888,65 euros) à hauteur de 10,05 % : 702,36 euros

- les frais de procédure (1500 euros + 43,54 +43,54 +13 = 1600,08 euros) à hauteur de 10,05 % : 160,80 euros.


Si les frais de procédure qui ont été supportés par la société Thelem, procédure pour partie justifiée par les désordres affectant les escaliers, doivent être en effet considérés comme un préjudice imputable à la société Bellier dans la proportion de 10,05% ci-dessus déterminée, en revanche, les frais d'étude thermiques, qui sont sans lien avec le désordre imputable à la société Bellier, ne peuvent pas lui être imputés.


La société Bellier sera en conséquence condamnée à payer à la société Thelem assurances une somme totale de 7260 + 871,15 + 1356,75 + 702,36 + 160,80 = 10 351,06 euros.


Sur les demandes accessoires


La société Belier sera tenue aux dépens de la procédure de première instance et d'appel, en ce non compris les frais de l'expertise judiciaire, dont la charge est supportée par elle dans les proportions ci-dessus déterminées.


Les circonstances de la cause justifient de la condamner à payer à la société Thelem assurances une somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



PAR CES MOTIFS


Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,


INFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu'il a déclaré recevable l'action introduite par la société Thelem assurances contre la société Bellier ;


Statuant à nouveau et y ajoutant :


DÉCLARE recevable le recours subrogatoire exercé par la société Thelem assurances contre la société Bellier ;


DÉCLARE la société Bellier responsable à hauteur de 50 % des désordres affectant les escaliers et les garde-corps ;


CONDAMNE la société Belllier à payer à la société Thelem assurances une somme totale de 10 351,06 euros se décomposant comme suit :

- préjudice matériel : 7260 euros ;

- frais de maîtrise d'oeuvre : 871,15 euros ;

- préjudices immatériels : 1356,75 euros ;

- frais d'expertise : 702,36 euros ;

- frais de procédure : 160,80 euros ;


REJETTE les demandes plus amples ou contraires ;


CONDAMNE la société Bellier à payer à la société Thelem assurances une somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;


CONDAMNE la société Bellier aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la SCP Thierry GIRAULT, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.


Arrêt signé par Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de Chambre et Madame Fatima HAJBI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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