Jurisprudence : TA Poitiers, du 04-05-2011, n° 0901379


TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE POITIERS
N° 0901379
___________
M. Jean-Paul CLABAUT
c/
Rectorat de l'académie de Versailles
Trésorerie générale des Yvelines
___________
M. Raymond
Magistrat désigné
___________
M. Jaehnert
Rapporteur public
___________
Audience du 6 avril 2011
Lecture du 4 mai 2011
___________
ar
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Tribunal administratif de Poitiers
Le magistrat désigné
36.08.03.002
C
Vu la requête, enregistrée le 4 juin 2009, sous le n° 0901379, présentée par M. Jean-Paul
CLABAUT, demeurant 44 avenue Louis Guillet à La Rochelle (17000) ;
M. Jean-Paul CLABAUT demande que le tribunal :
- annule la décision de l'inspecteur d'académie du Val d'Oise du 29 janvier 2009 rejetant sa
réclamation relative au reversement d'un trop-perçu de supplément familial de traitement ;
- condamne l'Etat à lui rembourser les sommes déjà versées ;
- condamne l'Etat à lui verser une somme de 200 euros au titre des frais irrépétibles ;
Il soutient que marié en 1976 il a divorcé en 1999 ; qu'ayant prévenu de sa situation
l'inspection d'académie du Val d'Oise a continué à lui verser le supplément familial de traitement
pour ses deux enfants ; qu'ayant reçu un titre de perception aux fins de reversement de ce
supplément familial de traitement il a sollicité une remise gracieuse ; que la régularisation lui parait
totalement infondée ; qu'après son divorce il a signalé sa nouvelle situation auprès des services de
l'inspection d'académie du Val d'Oise ; que ceux-ci ne lui ont pas signalé qu'il ne devait pas
percevoir ce supplément familial de traitement ; que son ex-épouse n'était pas fonctionnaire ; que
ces sommes sont prises en compte fiscalement ; qu'il ne peut régler cette somme eu égard à ses
charges ; qu'il y a erreur de droit car ce versement constitue une décision créatrice de droits ;
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Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 juin 2009, présenté par la Trésorerie générale
des Yvelines qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient qu'une remise gracieuse se fonde sur la situation personnelle du redevable ; que
la demande du requérant a fait l'objet d'une étude approfondie ; que les décisions de remise gracieuse
ne relève pas des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 ; que le bien-fondé du titre a été confirmé
par le recteur de l'académie de Versailles ;
Vu le mémoire, enregistré le 15 juillet 2009, présenté par M. CLABAUT ;
Il soutient en outre que le mémoire du trésorier doit être considéré comme nul et non
avenu ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 octobre 2009, présenté par le Recteur de
l'académie de Versailles qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que dans le cas d'une garde conjointe sans alternance des foyers la qualité de
l'allocataire est reconnue à la personne qui assume la charge effective et permanente des enfants et
au foyer de laquelle ils vivent et selon la position de la caisse nationale d'allocations familiales
même si le jugement de divorce prévoit que les prestations doivent être versées à l'autre parent ; que
la législation des prestations familiales prend prioritairement en considération la situation de fait ;
que le requérant a donc perçu à tort le supplément familial de traitement ; que le jugement de divorce
du 5 janvier 1999 indique que la résidence des enfants se situait chez la mère et que le père devait
verser les prestations familiales ;
qu'aucun texte ne l'obligeait à informer l'intéressé de ses obligations ;
que par lettre du 2 octobre 2006 il a été informé qu'il était redevable du supplément familial
de traitement ;
que n'ont pas le caractère créateur de droit, les mesures qui se bornent à procéder à la
liquidation de la créance née d'une décision prise antérieurement ; qu'un titre de perception ne peut
être regardé comme un acte retirant une telle décision ;
que la jurisprudence a permis des aménagements au principe de non rétroactivité lorsqu'un
acte administratif est un acte de régularisation ;
que la prescription est trentenaire ; que si la loi du 17 juin 2008 a abrogé l'article 2262 du
code civil, les actions personnelles et mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le
titulaire d'un droit aurait dû connaître les faits ; qu'il a pu réclamer la somme à M. CLABAUD ;
Vu l'ordonnance en date du 11 mars 2010 fixant la clôture d'instruction au 14 avril 2010 ;
Vu le mémoire enregistré le 29 mars 2011 après clôture de l'instruction, présenté par
M. CLABAUT ;
Vu la décision attaquée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu le décret n° 85-1148 du 24 octobre 1985 modifié relatif à la rémunération des
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personnels civils et militaires de l'Etat, des personnels des collectivités territoriales et des personnels
des établissements publics d'hospitalisation ;
Vu l'arrêté du Vice-Président du Conseil d'Etat, en date du 27 janvier 2009, fixant la liste
des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre
expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu, en application de l'article R. 222-13 du code de justice administrative, la décision en
date du 1er octobre 2010 par laquelle le président du tribunal a désigné M. Raymond, premier
conseiller, pour statuer sur les litiges visés audit article ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 avril 2011 :
- le rapport de M. Raymond, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Jaehnert, rapporteur public ;
- et les observations de M. CLABAUT, requérant ;
Considérant qu'aux termes de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 susvisé : « Les
fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l'indemnité
de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte
législatif ou réglementaire. (…) Le droit au supplément familial de traitement est ouvert en fonction
du nombre d'enfants à charge au sens du titre Ier du livre V du code de la sécurité sociale, à raison
d'un seul droit par enfant. En cas de pluralité de fonctionnaires assumant la charge du ou des mêmes
enfants, le fonctionnaire du chef duquel il est alloué est désigné d'un commun accord entre les
intéressés. Le supplément familial de traitement n'est pas cumulable avec un avantage de même
nature accordé pour un même enfant par un employeur mentionné aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 86-1
du code des pensions civiles et militaires de retraite ainsi que par un établissement public à caractère
industriel et commercial, une entreprise publique ou un organisme dont le budget de fonctionnement
est alimenté en permanence et pour plus de 50 % de son montant soit par des taxes parafiscales, soit
par des cotisations rendues obligatoires en vertu d'un texte légal ou réglementaire, soit par des
subventions allouées par un des employeurs, établissements, entreprises ou organismes précités. » ;
qu'aux termes de l'article 10 du décret du 24 octobre 1985 susvisé : « Le droit au supplément
familial de traitement, au titre des enfants dont ils assument la charge effective et permanente à
raison d'un seul droit par enfant, est ouvert aux magistrats, aux fonctionnaires civils, aux militaires à
solde mensuelle ainsi qu'aux agents de la fonction publique de l'Etat, de la fonction publique
territoriale et de la fonction publique hospitalière dont la rémunération est fixée par référence aux
traitements des fonctionnaires ou évolue en fonction des variations de ces traitements, à l'exclusion
des agents rétribués sur un taux horaire ou à la vacation. La notion d'enfant à charge à retenir pour
déterminer l'ouverture du droit est celle fixée par le titre Ier du livre V du code de la sécurité sociale.
(…) ;
Considérant que M. CLABAUT, professeur des écoles, demande l'annulation de la décision
par laquelle l'inspecteur d'académie du département du Val d'Oise a rejeté son recours gracieux
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contre le titre de perception émis à son encontre le 24 septembre 2007 pour le recouvrement d'une
somme d'un montant de 4 245,78 euros représentant un trop-perçu de supplément familial de
traitement ; que M. CLABAUT demande en outre la condamnation de l'Etat à lui rembourser les
sommes qu'il a été amené à reverser à ce titre ;
Considérant que, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires et
hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l'administration ne peut retirer une
décision individuelle créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant
la prise de cette décision ; qu'une décision administrative explicite accordant un avantage financier
crée des droits au profit de son bénéficiaire alors même que l'administration avait l'obligation de
refuser cet avantage ; qu'en revanche, n'ont pas cet effet les mesures qui se bornent à procéder à la
liquidation de la créance née d'une décision prise antérieurement ; que le maintien indu du
versement d'un avantage financier à un agent public, n'a pas le caractère d'une décision accordant
un avantage financier et constitue une simple erreur de liquidation ; qu'il appartient à
l'administration de corriger cette erreur et de réclamer le reversement des sommes payées à tort, sans
que l'agent intéressé puisse se prévaloir de droits acquis à l'encontre d'une telle demande de
reversement ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite du jugement de divorce entre
M. CLABAUT et son épouse intervenu le 5 janvier 1999, la situation de famille de M. CLABAUD a
changé, celui-ci n'ayant plus d'enfant à charge ; que , toutefois, l'administration a continué à lui
verser le supplément familial de traitement pour ses deux enfants ayant leur résidence chez leur
mère ; que le maintien de ce versement a constitué une erreur de liquidation ; qu'il appartenait à
l'administration de corriger cette erreur et de demander à l'intéressé le recouvrement des sommes
indûment payées ; qu'ainsi le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'administration n'aurait pu
retirer une décision lui retirant un avantage financier ; que le fait que M. CLABAUD aurait informé
les services de l'inspection académique du département du Val d'Oise de son changement de
situation et que ceux-ci ne lui ont pas indiqué qu'il ne devait pas percevoir le supplément familial de
traitement et qu'il aurait été de bonne foi, alors surtout que le jugement précité du 5 janvier 1999
mentionnait expressément que M. CLABAUT « perd le supplément familial de 461 francs par mois
compte tenu du divorce », est sans influence sur la légalité de la décision ; que de la même façon, la
double circonstance que les sommes perçues indûment par le requérant aient fait l'objet de
déclaration au titre de revenus auprès de l'administration fiscale et que l'intéressé soit dans une
situation financière difficile sont sans influence sur la légalité de la décision attaquée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions de la requête présentée par
M. CLABAUT doivent être rejetées ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans
toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à
payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les
dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il
peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette
condamnation. » ; que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est
pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. CLABAUT demande au titre des
frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
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D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. Jean-Paul CLABAUT est rejetée.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. Jean-Paul CLABAUT, à la trésorerie
générale des Yvelines et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.
Copie en sera adressée, pour information, au recteur de l'académie de Versailles.
Lu en audience publique le 4 mai 2011.
Le magistrat désigné,
Signé
D. RAYMOND
Le greffier,
Signé
N. COLLET
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie
associative en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les
voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Pour le greffier en chef,
Le greffier,
N. COLLET

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