Jurisprudence : TA Marseille, du 03-07-2007, n° 0200892

TA Marseille, du 03-07-2007, n° 0200892

A9099HZZ

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TA Marseille, du 03-07-2007, n° 0200892. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/5630339-ta-marseille-du-03072007-n-0200892
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TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE MARSEILLE



Nos 0200892,0204457

Société BOUYGUES TELECOM

M. Steck

Président-rapporteur

M. Gonneau

Commissaire du gouvernement



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif de Marseille

(8ème chambre)



Audience du 26 juin 2007

Lecture du 3 juillet 2007

51-02-03

Vu, I, sous le n° 0200892, la requête, enregistrée au greffe du Tribunal le 20 février 2002, présentée pour la société BOUYGUES TELECOM, dont le siège est Arc de la Seine, 20 quai du Point du jour à Boulogne Billancourt (92100), prise en la personne de ses représentants légaux, par Me Sorba ;

La société BOUYGUES TELECOM demande au Tribunal :

- d’annuler l’arrêté pris par le maire de la commune des Pennes Mirabeau en date du 4 septembre 2001 interdisant l’implantation d’antennes de radiotéléphonie mobile sur le territoire de la commune dans un rayon de 300 mètres autour des habitations et établissements recevant du public ;

- d’annuler la décision implicite en date du 5 janvier 2002 par laquelle le maire de la commune des Pennes Mirabeau a rejeté le recours gracieux formé par elle tendant au retrait de l’arrêté municipal du 4 septembre 2001 ;

- de condamner la commune des Pennes Mirabeau à lui verser la somme de 4 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- l’arrêté litigieux est illégal ;

- la mesure d’interdiction n’est justifiée par aucun risque de menace à la sécurité publique ;

- elle présente un caractère trop général et trop absolu ;

- elle est discriminatoire ;

- aucune circonstance locale ne permet de justifier une telle mesure ;

- elle soumet à un régime d’autorisation préalable l’installation de futures antennes de radiotéléphonie mobile ;



- l’illégalité manifeste de l’arrêté litigieux entache de la même illégalité la décision implicite de refus ;

Vu l’arrêté attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 13 juin 2002, présenté pour la commune des Pennes Mirabeau, représentée par son maire en exercice, par Me Aelion-Guerini, tendant au rejet de la requête et à la condamnation de la société requérante à lui verser la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune des Pennes Mirabeau fait valoir que :

- la requête est tardive ;

- l’arrêté vise à prévenir les accidents et sauvegarder la sécurité et la salubrité publiques ;

- la mesure a une portée limitée dans le temps et dans l’espace ; elle n’est ni générale ni absolue ;

Vu le mémoire, enregistré le 23 février 2005, présenté pour la société BOUYGUES TELECOM, par Me Sorba, tendant aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens en les précisant sur certains points ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 juin 2007, présenté pour la société BOUYGUES TELECOM, par Me Sorba, qui persiste dans ses conclusions ;

Vu la production de pièces, enregistrée le 22 juin 2007, effectuée pour la société BOUYGUES TELECOM ;

Vu, II, sous le n° 0204457, la requête, enregistrée comme ci-dessus au greffe du Tribunal le 17 septembre 2002, présentée pour la société BOUYGUES TELECOM, par Me Sorba ;

La société BOUYGUES TELECOM demande au Tribunal :

- de constater que le changement des circonstances de fait et de droit résultant de l’entrée en vigueur du décret du 3 mai 2002 relatif aux valeurs limites d’exposition du public aux champs électromagnétiques justifie l’abrogation de l’arrêté municipal pris par le maire de la commune des Pennes Mirabeau le 4 septembre 2001 interdisant l'installation d'équipements de radiotéléphonie mobile dans certaines zones de la commune ;

- d'annuler la décision implicite en date du 22 juillet 2002 par laquelle le maire de la commune des Pennes Mirabeau a rejeté la demande gracieuse formée par la société BOUYGUES TELECOM tendant à l’abrogation de l’arrêté municipal du 4 septembre 2001 ;

- d'enjoindre au maire d’abroger cet arrêté dans un délai de 30 jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

- de condamner la commune des Pennes Mirabeau à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir qu'en refusant de satisfaire, par sa décision implicite du 22 juillet 2002, à sa demande d'abrogation de l'arrêté municipal du 4 septembre 2001, le maire a méconnu les dispositions du décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 et les principes dont il s'inspire ;



Nos 0200892. 3

Vu le mémoire, enregistré le 12 décembre 2002, présenté pour la commune des Pennes Mirabeau, représentée par son maire en exercice, par Me Aelion-Guerini, tendant au rejet de la requête et à la condamnation de la société requérante à lui verser la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

- la requête est tardive ;

- l'arrêté vise à prévenir les accidents et sauvegarder la sécurité et la salubrité publiques ;

- la mesure a une portée limitée dans le temps et dans l’espace ; elle n’est ni générale ni absolue ;

- le décret du 3 mai 2002 n'était pas applicable lorsque l'arrêté a été pris ;

- la société BOUYGUES TELECOM ne justifie pas respecter les valeurs imposées par ledit décret ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 25 juin 2007, présenté pour la société BOUYGUES TELECOM qui persiste dans ses conclusions ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des postes et télécommunications ;

Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;

Vu le décret n° 2002-775 du 3 mai 2002 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 juin 2007 :

- le rapport de M. Steck, président ;

- les observations de Me Guichaoua, substituant Me Sorba, pour la société BOUYGUES TELECOM ;

- et les conclusions de M. Aa, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées n° 0200892 et n° 0204457, présentées pour la société BOUYGUES TELECOM, présentent à juger des questions semblables et ont fait l’objet d’une instruction commune ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement ;



Nos 0200892. 4

Considérant que, par arrêté en date du 4 septembre 2001, le maire de la commune des Pennes Mirabeau a interdit l’implantation d’antennes de radiotéléphonie mobile sur le territoire de la commune dans un rayon de 300 mètres autour des habitations et établissements recevant du public ; que le maire s’est fondé sur l’absence d’indications précises et nationales pouvant lever le doute quant à la dangerosité sur la santé des équipements de radiotéléphonie et qu’ainsi, il y avait lieu d’appliquer le principe de précaution ;

En ce qui concerne la requête n° 0200892 :

Sur la recevabilité de la requête :

Considérant qu’aux termes de l’article R. 421-1 du code de justice administrative : « Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. » ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que l’arrêté attaqué a été pris le 4 septembre 2001, régulièrement publié le 5 septembre par voie d’affichage et notifié le 10 octobre 2001 à la société BOUYGUES TELECOM ainsi qu’à tous les opérateurs de téléphonie mobile ; que la société BOUYGUES TELECOM a formé le 29 octobre 2001, contre l’arrêté municipal du 4 septembre 2001, un recours gracieux qui a conservé le délai de recours contentieux ; qu'en l'absence de réponse à ce recours gracieux une décision implicite de rejet est intervenue le 29 décembre 2001 ; qu'il suit de là que la requête, enregistrée le 20 février 2002, soit avant l'expiration du délai de recours contentieux, n'est pas tardive ; que, par suite la fin de non-recevoir opposée par la commune des Pennes Mirabeau, tirée de la tardiveté de la requête, doit être écartée ;

Sur les conclusions à fin d’annulation de l’arrêté en date du 4 septembre 2001 :

Considérant, d’une part, que pour justifier ses décisions en cause, le maire de la commune des Pennes Mirabeau n’invoque aucune urgence liée aux circonstances locales ni aucune menace grave pour l’ordre public ; que, d’autre part, en l’état actuel des données et connaissances scientifiques, aucun risque réel n’ayant été démontré quant aux effets sur la santé des populations de la présence des installations de relais de radiotéléphonie mobile, le « principe de précaution » ne saurait légalement justifier l’édiction par le maire de mesures de police générale tendant à empêcher ou réglementer, notamment en leur imposant une distance minimale par rapport aux immeubles habités ou fréquentés par le public, l’installation d’antennes de radiotéléphonie mobile sur le territoire communal ; que, par suite, le maire des Pennes Mirabeau n’a pu légalement se fonder, au titre des précautions convenables, sur l’existence de risques sanitaires, pour interdire, par son arrêté attaqué, l’implantation d’antennes de radiotéléphonie dans certaines zones de la commune et à les soumettre à une procédure d’autorisation préalable ;

Considérant qu’il résulte de ce qu’il précède, et sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que la société BOUYGUES TELECOM est fondée à demander l’annulation de l’arrêté municipal du 4 septembre 2001 ainsi que de la décision implicite du maire refusant de retirer cet arrêté ;



Nos 0200892. 5

En ce qui concerne la requête n° 0204457 :

Sur les conclusions aux fins d’annulation de la décision implicite par laquelle le maire de la commune des Pennes Mirabeau a refusé d’abroger l’arrêté en date du 4 septembre 2001 :

Considérant que la société BOUYGUES TELECOM, se prévalant du décret du 3 mai 2002 susvisé relatif aux valeurs limites d’exposition du public aux champs électromagnétiques émis par les équipements utilisés dans les réseaux de télécommunication ou par les installations radioélectriques, demande l’annulation de la décision implicite du maire des Pennes Mirabeau rejetant sa demande d’abrogation de l’arrêté municipal du 4 septembre 2001 interdisant l’implantation d’antennes dans certaines zones de la commune ;

Considérant que si le décret du 3 mai 2002 fixe et impose le respect de valeurs limites d’émission d’ondes électromagnétiques et met en place des procédures de contrôle, ces changements n’ont pas revêtu une importance telle qu’ils aient modifié les circonstances de droit et de fait sur lesquelles se fonde l’arrêté attaqué ; qu’il en résulte que la société requérante n’est pas fondée à demander l’annulation de la décision implicite par laquelle le maire des Pennes Mirabeau a rejeté sa demande tendant à l’abrogation de son arrêté du 4 septembre 2001 ; que la requête, sans qu’il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la commune, doit, dès lors, être rejetée ;

Sur les conclusions à fin d’injonction sous astreinte contenues dans la requête susvisée :

Considérant que le présent jugement n’appelle aucune mesure d’exécution au sens des dispositions des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative ; que, par suite, les conclusions à fin d’injonction sous astreinte présentées par la société BOUYGUES TELECOM doivent être rejetées ;

En ce qui concerne les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative contenues dans les requêtes n° 0200892 et 0204457 :

Considérant qu’il y a lieu de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la commune des Pennes Mirabeau une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société BOUYGUES TELECOM et non compris dans les dépens dans le cadre de l’instance n° 0200892 ; qu’il n’y a pas lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions dans l’instance n° 0204457 ;

Considérant que les demandes de frais irrépétibles présentées par la commune de Pennes Mirabeau dans le cadre des deux instances susvisées doivent être rejetées ;



Nos 0200892. 6


DECIDE :

Article 1er : L’arrêté en date du 4 septembre 2001 pris par le maire de la commune des Pennes Mirabeau interdisant l’implantation d’antennes de radiotéléphonie mobile sur le territoire de la commune à moins de 300 mètres d’une habitation ou d’un établissement recevant du public et la décision implicite du maire refusant de retirer cet arrêté sont annulés.

Article 2 : La requête n° 0204457 de la société BOUYGUES TELECOM est rejetée.

Article 3 : La commune des Pennes Mirabeau versera à la société BOUYGUES TELECOM la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la commune des Pennes Mirabeau tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5: Le présent jugement sera notifié à la société BOUYGUES TELECOM et à la commune des Pennes Mirabeau.


Délibéré après l'audience du 26 juin 2007, à laquelle siégeaient :

M. Steck, président,

M. Malardier, premier conseiller,

M. L’hôte, conseiller,

assistés de Mme Dupouy, greffier.



Nos 0200892. 7

Lu en audience publique le 3 juillet 2007.

Le président-rapporteur, Le premier assesseur,

signé signé

G. A Ab B

Le greffier,

signé

Ac C

La République mande et ordonne au préfet des Bouches-du-Rhône en ce qui le concerne et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l’exécution du présent jugement.

Pour expédition conforme,

Pour le greffier en chef,

Le greffier,

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