Jurisprudence : CA Orléans, 28-11-2023, n° 20/02031, Infirmation partielle


COUR D'APPEL D'ORLÉANS


CHAMBRE DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE


GROSSE à :

URSSAF CENTRE VAL DE LOIRE

SCP LE METAYER ET ASSOCIES

EXPÉDITION à :

SOCIETE [10]

MINISTRE CHARGÉ DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Pôle social du Tribunal judiciaire d'ORLEANS


ARRÊT du : 28 NOVEMBRE 2023


Minute n°466/2023


N° RG 20/02031 - N° Portalis DBVN-V-B7E-GHAI


Décision de première instance : Pôle social du Tribunal judiciaire d'ORLEANS en date du 1er Octobre 2020



ENTRE


APPELANTE :


URSSAF CENTRE VAL DE LOIRE

[Adresse 3]

[Localité 5]


Représentée par Mme [H] [E], en vertu d'un pouvoir spécial


D'UNE PART,


ET


INTIMÉE :


SOCIETE [10]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 4]


Représentée par Me Agnès MENOUVRIER de la SCP LE METAYER ET ASSOCIES, avocat au barreau d'ORLEANS


PARTIE AVISÉE :


MONSIEUR LE MINISTRE CHARGE DE LA SECURITE SOCIALE

[Adresse 1]

[Localité 6]


Non comparant, ni représenté


D'AUTRE PART,



COMPOSITION DE LA COUR


Lors des débats et du délibéré :


Madame Nathalie LAUER, Président de chambre,

Madame Anabelle BRASSAT-LAPEYRIERE, Conseiller,

Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller.


Greffier :


Monsieur Alexis DOUET, Greffier lors des débats et du prononcé de l'arrêt.


DÉBATS :


A l'audience publique le 26 SEPTEMBRE 2023.


ARRÊT :


- Contradictoire, en dernier ressort.


- Prononcé le 28 NOVEMBRE 2023 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile🏛.


- signé par Madame Nathalie LAUER, Président de chambre, et Monsieur Alexis DOUET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


* * * * *


L'Urssaf a procédé à un contrôle de la société [10] sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016, et lui a adressé une lettre d'observations, le 6 octobre 2017, puis une mise en demeure, le 18 janvier 2018, pour un montant total de 78'802 euros.


La société [10] a saisi la commission de recours amiable qui, par décision du 29 mai 2019, a fait droit à deux chefs de redressement et maintenu les autres chefs de redressement.


La société [10] a saisi le Pôle social du tribunal judiciaire d'Orléans.



Par jugement en date du 1er octobre 2020, le tribunal judiciaire a':

- annulé le redressement au titre de l'intéressement pour le montant de 53'753'euros,

- annulé le redressement au titre des frais de santé pour 3'343'euros,

- maintenu les redressements portant sur les frais de déménagement de 2'935'euros et les frais administratifs de 648'euros,

- réduit le quantum de l'assiette des redressements suivants':

' point 14 à 4'105'euros,

' point 16 à 6'260'euros,

' point 20 à 5'913,34'euros,

- constaté un trop-perçu par l'Urssaf de 20'152,67'euros et l'a condamnée à rembourser cette somme à la société [10],

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile🏛,

- condamné la société [10] aux dépens.



Par déclaration en date du 15 octobre 2020, l'Urssaf a interjeté appel du jugement sauf en ce qu'il a condamné la société [10] aux dépens.


L'Urssaf Centre Val de Loire demande à la Cour de':

- infirmer le jugement en ce qu'il a annulé le chef de redressement n°'12 'Intéressement- Bénéficiaires- Caractère collectif',

- déclarer ce chef de redressement comme étant désormais une observation pour l'avenir,

- infirmer le jugement en ce qu'il a annulé le chef de redressement n°'21 'Prise en charge de dépenses du salarié - dépenses de santé',

- déclarer ce chef de redressement comme étant désormais une observation pour l'avenir,

En tout état de cause,

- confirmer la totalité des autres dispositions du jugement.


La société [10] demande à la Cour de':

- juger que l'appel principal de l'Urssaf est recevable mais mal fondé, l'en débouter,

- juger que son appel incident est recevable et bien fondé,

En conséquence,

- infirmer le jugement en ce qu'il a confirmé les chefs de redressements suivants':

' sur la prise en charge des frais de déménagement': 2'851'euros

' sur la prise en charge des frais administratifs': 485'euros

- confirmer le jugement rendu pour le surplus,


Statuant à nouveau,

- annuler les chefs de redressement suivants':

' sur la prise en charge des frais de déménagement': 2'851'euros

' sur la prise en charge des frais administratifs': 485'euros

- ordonner à l'Urssaf de procéder à la restitution des sommes trop perçues,

- débouter l'Urssaf de toutes ses demandes plus amples ou contraires,

Y ajoutant,

- condamner l'Urssaf du [Localité 9] au paiement de la somme de 3'000'euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner l'Urssaf du [Localité 9] aux entiers dépens.



MOTIFS


- Sur le redressement au titre de l'intéressement


Moyens des parties


L'Urssaf sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il a annulé ce chef de redressement. Au soutien, elle explique qu'il est apparu que des salariés remplissant la condition d'ancienneté n'avaient pas bénéficié de l'intéressement'; que l'inspecteur a donc réintégré la totalité des sommes versées au titre de l'intéressement en 2015 et 2016'; que le club ne peut se prévaloir d'un accord tacite lors du précédent contrôle dans lequel il appliquait bien les conditions de l'intéressement alors qu'il en omettait le caractère collectif lors du présent contrôle ; qu'eut égard aux circonstances constatées, il est demandé de transformer ce redressement chiffré en observations pour l'avenir.


La société [10] demande la confirmation du jugement sur ce point. Elle indique qu'un accord d'intéressement débutant le 1er juillet 2013 est identique à celui qui avait été conclu pour la période du 1er juillet 2007 au 30 juin 2010'; qu'à l'occasion de son contrôle, l'Urssaf a remis en cause l'exonération de cotisations des sommes attribuées aux salariés en application de cet accord d'intéressement, aux motifs du non-respect du caractère collectif de l'accord d'intéressement ; que ce redressement est cependant parfaitement infondé, puisqu'il contrevient à l'accord tacite de l'Urssaf lors d'un précédent contrôle ; que lors du contrôle opéré par l'Urssaf en 2010, aucune observation ne lui a été faite alors que Mme [G] était placée, pour la période de calcul 2008-2009, dans la même situation que Mme [Aa] et M. [Ab]'; que l'Urssaf n'a pas remis en cause le caractère collectif de l'intéressement, constituant ainsi un accord tacite de l'Urssaf'; qu'elle est donc bien fondée à se prévaloir d'un accord tacite issu du précédent contrôle diligenté par l'Urssaf'; que si M. [Ac] n'a perçu aucun intéressement, c'est parce qu'il ne bénéficiait pas de 3 mois d'ancienneté au sein du club'; qu'en effet, M. [Ac] a bénéficié de deux contrats successifs de sorte qu'il ne s'agit pas d'une simple période de suspension du contrat'; que c'est à juste titre que M. [Ac] n'a pas bénéficié d'intéressement pour l'exercice 2015-2016.


Réponse de la Cour


La lettre d'observations mentionne en son point 12 relatif au caractère collectif de l'intéressement':

'L'accord d'intéressement signé le 9 août 2013 et déposé à la [7] du [Localité 9], définit en son article 3 ses bénéficiaires':

«'Tous les salariés comptant au moins 3 mois d'ancienneté dans l'entreprise bénéficient du contrat d'intéressement.

Les périodes de simple suspension du contrat de travail ne sont pas déduites pour le calcul de l'ancienneté. En cas de départ d'un bénéficiaire en cours de saison, l'intéressement lui restera acquis pour la part éventuelle déjà réalisée à la date de la fin de son contrat (Leaderscup, Coupe de France)'».

[...]

Lors des investigations, il apparaît que des salariés remplissant la condition d'ancienneté n'ont pas bénéficié de l'intéressement':

- Mme [F] au titre de la période de calcul du 1/7/13 au 30/6/14

- Mme [Aa] et M. [I] présents sur la période de calcul du 1/7/14 au 30/6/15

- M. [Z] au titre de la période de calcul du 1/7/15 au 30/6/16.

[']

En l'espèce, l'entreprise a mis en place un accord d'intéressement définissant les bénéficiaires comme étant les salariés ayant plus de 3 mois d'ancienneté.

Les investigations ont permis de constater que les salariés précités remplissaient les conditions fixées par l'accord et devaient bénéficier de l'intéressement':

- Saison 2013/2014': Mme [F] est présente plus de 3 mois lorsque le cumul est effectué entre la période de calcul et les 12 mois qui précèdent. La détermination de la prime d'intéressement due à chaque salarié présent sur la période de calcul intervient au terme de cette même période et non lors du départ du salarié.

- Saison 2014/2015': M. [Ab] et Mme [N] remplissent également les conditions d'ancienneté. Tout accord conclu ou somme versée ne peut se substituer au droit du salarié concernant les dispositifs d'épargne salariale.

- Saison 2015/2016': M. [Z] remplit la condition d'ancienneté lorsque le cumul est effectué entre la période de calcul et les 12 mois qui précèdent'».

Par conséquent, le caractère collectif n'est pas respecté et remet en cause l'exonération de cotisations sociales des sommes versées au titre de l'intéressement'.


Aux termes de l'article R. 243-59 du Code de la sécurité sociale🏛, dans sa version alors applicable, l'organisme de recouvrement communique les observations ne conduisant pas à redressement mais appelant la personne contrôlée à une mise en conformité en vue des périodes postérieures aux exercices contrôlés, et exposant cette personne, si elle n'y procède pas, aux dispositions du septième alinéa du III du présent article.


En application de l'article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale🏛, pour le calcul des cotisations, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail. L'article L. 3312-4 du Code du travail🏛, dans sa version applicable, prévoit que les sommes attribuées aux bénéficiaires en application d'un accord d'intéressement n'ont pas le caractère de rémunération, au sens de l'article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale.


Les sommes attribuées aux salariés en application de l'accord d'intéressement sont donc exonérées de cotisations si les conditions en sont respectées. Dès lors que l'accord stipule une condition d'ancienneté pour bénéficier de l'intéressement, aucun salarié ayant l'ancienneté requise ne peut être exclu du bénéfice de l'intéressement.


La société [10] invoque toutefois l'existence d'un accord tacite pour s'opposer aux observations émises par l'Urssaf.


L'article R. 243-59-7 du Code de la sécurité sociale🏛 dispose':

'Le redressement établi en application des dispositions de l'article L. 243-7 ne peut porter sur des éléments qui, ayant fait l'objet d'un précédent contrôle dans la même entreprise ou le même établissement n'ont pas donné lieu à observations de la part de l'organisme effectuant le contrôle dans les conditions prévues à l'article R. 243-59 dès lors que':

1° L'organisme a eu l'occasion, au vu de l'ensemble des documents consultés, de se prononcer en toute connaissance de cause sur ces éléments';

2° Les circonstances de droit et de fait au regard desquelles les éléments ont été examinés sont inchangées'.


Il résulte de ces dispositions que l'absence d'observations vaut accord tacite concernant les pratiques ayant donné lieu à vérification, dès lors que l'organisme de recouvrement a eu les moyens de se prononcer en connaissance de cause sur la pratique litigieuse lors de contrôles antérieurs. Il appartient au cotisant qui entend se prévaloir d'un accord tacite de l'organisme de recouvrement d'en rapporter la preuve, et la seule consultation au moment du précédent contrôle des mêmes pièces communément présentées lors des opérations de contrôle, ne suffit pas à établir que l'Urssaf avait eu, à cette époque, les moyens de se prononcer en toute connaissance de cause sur les pratiques litigieuses et, qu'en l'absence d'observations, elle avait donné son accord tacite sur ces pratiques, ainsi que l'a jugé la Cour de cassation (Civ., 2ème 22 septembre 2022, pourvoi n° 21-11.277⚖️).


L'intimée qui invoque l'existence d'un accord tacite ne produit que les deux premières pages de la lettre d'observations du 30 juin 2010, laquelle mentionne que l'Urssaf avait consulté l'accord d'intéressement dont les parties conviennent qu'il est identique à celui en vigueur lors du contrôle opéré sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016.


Toutefois, la société [10] ne démontre pas que les documents consultés par l'Urssaf au cours du précédent contrôle mentionnaient expressément que Mme [G], nonobstant le fait qu'elle remplissait la condition d'ancienneté prévue par l'accord d'intéressement, n'avait pas bénéficié de celui-ci. En conséquence, la cotisante est mal fondée à se prévaloir d'un accord tacite de l'Urssaf.


L'Urssaf est donc fondée à rappeler à la société [10] qu'en cas de non-respect des règles liées à la condition d'ancienneté, le caractère collectif de l'accord d'intéressement est remis en cause, de sorte que les sommes allouées aux salariés ne pouvant bénéficier des exonérations liées à l'intéressement, doivent être réintégrées dans l'assiette des cotisations.


Il convient donc de dire que les observations formulées par l'Urssaf au titre du point n° 12 de la lettre d'observations, ne valent plus redressement mais constituent des observations pour l'avenir que la cotisante devra respecter. Il convient donc d'infirmer le jugement en ce qu'il a annulé purement et simplement ce chef de redressement.


- Sur le redressement au titre des dépenses de santé d'un salarié


Moyens des parties


L'Urssaf sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il a annulé ce chef de redressement. Elle fait valoir que la prise en charge de dépenses de santé personnelles du salarié constitue un avantage soumis à cotisations'; que l'inspecteur a constaté que la prise en charge des frais médicaux par le club ne résultait pas des obligations légales ou conventionnelles et que, par conséquent, le seul objectif d'augmenter les performances des joueurs n'était pas suffisant pour qualifier ces frais de professionnels'; que si les frais ont été engagés par le club dans le cadre d'un accident du travail, la législation sur les sinistres professionnels s'appliquerait'; que la société n'a nullement produit le justificatif permettant d'établir que les frais dentaires ont été engagés dans le cadre d'un accident de travail de M. [Ad] et ont fait l'objet à ce titre d'une prise en charge par la caisse primaire d'assurance maladie'; que le certificat médical n'est pas suffisant pour établir ce lien, la caisse envoyant systématiquement un document de prise en charge des frais'; que bien que ce certificat ne permette pas d'établir pleinement le cadre d'accident du travail, il est demandé d'infirmer le jugement et de transformer ce point de redressement chiffré en observation pour l'avenir.


La société [10] demande la confirmation du jugement pour ce chef de redressement. Elle explique que ce redressement contrevient à l'accord tacite de l'Urssaf lors d'un précédent contrôle'; que lors du précédent contrôle effectué par l'Urssaf en 2010, la prise en charge des soins d'ostéopathie et de podologie des joueurs salariés n'avait donné lieu à aucun redressement ni aucune observation'; que l'Urssaf a eu accès à un grand nombre de documents lors de son contrôle de 2010, notamment le Grand livre et les justificatifs de frais professionnels'; que c'est donc à bon droit que, reconnaissant l'existence d'un accord implicite de l'Urssaf, le tribunal judiciaire a annulé ce chef de redressement'; qu'elle justifie en outre parfaitement du fait que les soins dentaires ont fait suite à un accident de travail'; que l'Urssaf ne peut soutenir que ce certificat médical ne suffit pas.


Réponse de la Cour


Aux termes de l'article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale, dans sa version applicable, pour le calcul des cotisations, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail.


Le fait que l'employeur tire profit d'une dépense engagée par un salarié ne peut suffire à conférer à celle-ci le caractère de frais professionnel au sens de l'article 1er de l'arrêté du 20 décembre 2002🏛 modifié relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale, ainsi que l'a d'ailleurs jugé la Cour de cassation (Civ., 2ème 31 mars 2016, pourvoi n° 15-12.364⚖️).


En l'espèce, il est établi que l'employeur a pris en charge des dépenses de soins de plusieurs salariés sur la période contrôlée, sans que cela ne donne lieu au paiement de cotisations sociales.


La société [10] ne justifie pas que l'Urssaf aurait précisément examiné la question de la prise en charge des dépenses de santé des salariés lors du précédent contrôle, de sorte que l'intimée est mal-fondée à se prévaloir d'un accord tacite de l'organisme sur ce point, étant rappelé qu'elle ne produit pas la lettre d'observations du 30 juin 2010 dans son intégralité.


L'Urssaf est donc fondée à rappeler à la société [10] que la prise en charge de dépenses de santé personnelles des salariés doit être réintégrée dans l'assiette des cotisations.


Il convient donc de dire que les observations formulées par l'Urssaf au titre du point n° 21 de la lettre d'observations, ne valent plus redressement mais constituent des observations pour l'avenir que la cotisante devra respecter. Il convient donc d'infirmer le jugement en ce qu'il a annulé purement et simplement ce chef de redressement.


- Sur le redressement au titre de la prise en charge des frais de déménagement


Moyens des parties


La société [10] sollicite l'infirmation du jugement sur ce point. Elle expose que les frais de déménagement pris en charge par elle sont liés à des changements de résidence de basketteurs professionnels pour occuper un nouvel emploi dans un autre club, et constituent non pas une convenance personnelle, mais bien une contrainte imposée par le marché'; qu'à défaut d'accepter la mobilité qui leur est proposée à l'issue de leur contrat, les joueurs n'auraient plus d'emploi'; qu'il ne s'agit donc pas d'une nouvelle embauche qui fait suite à une recherche de la part des salariés, mais d'une mobilité nécessaire à la poursuite de leur carrière'; que dans ces circonstances, les frais liés à la mobilité des joueurs peuvent être remboursés par le club qui accueille le joueur.


L'Urssaf demande la confirmation du jugement au titre de ce chef de redressement. Elle indique que lors du dernier contrôle, il a été indiqué que les frais de première installation pouvaient être déductibles des cotisations sociales'; que toutefois, l'application des dispositions relatives à la mobilité professionnelle suppose un changement de lieu de résidence lié à un changement de poste de travail du salarié dans un autre lieu de travail au sein de la même entreprise'; que lorsqu'il s'agit d'une nouvelle embauche qui fait suite à une recherche de la part des salariés, comme c'est le cas pour MM. [L], [T] et [W], la législation sur la mobilité n'est pas applicable'; que la société peut prendre en charge ces éléments pour les salariés mais aucune exonération de cotisations sociales ne peut s'appliquer.


Réponse de la Cour


Aux termes de l'article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale, dans sa version applicable, pour le calcul des cotisations, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail.


L'article 8 de l'arrêté du 20 décembre 2002🏛 relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, dispose':

'Les frais engagés par le travailleur salarié ou assimilé dans le cadre d'une mobilité professionnelle sont considérés comme des charges de caractère spécial inhérentes à l'emploi.

La mobilité professionnelle suppose un changement de lieu de résidence lié à un changement de poste de travail du salarié dans un autre lieu de travail'.


En conséquence, l'employeur est autorisé à déduire de l'assiette des cotisations sociales les indemnités destinées à compenser les frais de déménagement exposés par le salarié lorsque celui-ci change de résidence en raison d'un changement de poste au sein de la même entreprise. L'employeur ne peut donc déduire de l'assiette des cotisations sociales les frais de déménagement liés à l'embauche d'un salarié, quand bien-même celui-ci serait un joueur de basket-ball professionnel comme tel est le cas en l'espèce.


Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a validé le redressement opéré par l'Urssaf au titre de la prise en charge par l'employeur de frais de déménagement de nouveaux salariés.


- Sur le redressement au titre de la prise en charge des frais administratifs


Moyens des parties


La société [10] sollicite l'infirmation du jugement sur ce point. Elle expose que c'est à tort que l'Urssaf a considéré que les timbres fiscaux sollicités par la Préfecture pour l'obtention du titre de séjour des joueurs étrangers non ressortissants de l'Union européenne constituaient des dépenses personnelles des joueurs'; que le règlement de la [8] prévoit que les clubs ayant conclu des contrats de travail avec des joueurs étrangers non ressortissants de l'Union européenne, sont responsables du respect des dispositions légales et réglementaires régissant l'entrée et le séjour des étrangers sur le territoire français et, par conséquent, sont tenus de justifier de la demande d'obtention d'un titre de séjour pour ces joueurs'; que dès lors que l'obtention d'un titre de séjour pour des joueurs étrangers est assujettie à la fourniture de timbres fiscaux, ce qui rend bien l'achat de ces derniers obligatoires pour l'obtention du titre de séjour, le paiement du timbre fiscal n'est pas une dépense personnelle du salarié mais une dépense engagée par le club dans son propre intérêt, afin de ne pas s'exposer au paiement d'une amende.


L'Urssaf demande la confirmation du jugement au titre de ce chef de redressement. Elle explique qu'il a été constaté que la société [10] prenait en charge les timbres fiscaux pour les joueurs étrangers qui n'ont effectué aucun remboursement à ce titre'; que les sommes ainsi prises en charge n'ont été soumises ni à cotisations ni à contributions sociales'; que la ligue nationale de basket impose la fourniture de la copie du titre de séjour des joueurs étrangers et non la prise en charge des timbres fiscaux obligatoires à la constitution du dossier auprès de la Préfecture'; que la société peut prendre en charge ces éléments pour le salarié mais aucune exonération de cotisations sociales ne peut s'appliquer.


Réponse de la Cour


Aux termes de l'article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale, dans sa version applicable, pour le calcul des cotisations, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail.


L'article 87 i) du règlement de la [8] stipule':

'Pour les joueurs de nationalité étrangère, non ressortissants d'un pays de l'Union Européenne ou de l'Espace Économique Européen, les clubs doivent attester de la demande de titre de séjour autorisant le joueur à travailler (copie du courrier et du récépissé d'envoi en recommandé avec A.R.).

Il est de l'entière responsabilité des clubs de se conformer aux obligations légales et réglementaires régissant l'entrée et le séjour des étrangers sur le territoire français'.


Cette obligation s'imposant aux clubs de basket professionnel visant à l'emploi de joueurs étrangers non munis de titres de séjours les habilitant à travailler, d'une part, ne leur impose pas la prise en charge du timbre fiscal afférent à la demande de titre de séjour, et d'autre part, ne constitue nullement une dérogation aux dispositions de l'article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale en cas de prise en charge du coût du timbre fiscal.


L'employeur qui a pris en charge le coût des timbres fiscaux a donc pris en charge une dépense personnelle de ses salariés, ce qui constitue un avantage soumis à cotisations sociales.


En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a validé le redressement sur ce point.


- Sur les frais de procédure


Le jugement sera confirmé en ses chefs statuant sur les dépens et les frais irrépétibles. La demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile formée par l'intimée sera rejetée. La société [10] sera condamnée aux dépens d'appel.


PAR CES MOTIFS:


Statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,


Infirme le jugement en ce qu'il a':

- annulé le redressement au titre de l'intéressement pour le montant de 53'753'euros,

- annulé le redressement au titre des frais de santé pour 3'343'euros';


Confirme le jugement pour le surplus';


Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,


Dit que les observations formulées par l'Urssaf au titre des points n° 12 et 21 de la lettre d'observations, ne valent plus redressement mais constituent des observations pour l'avenir';


Déboute la société [10] de sa demande fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile';


Condamne la société [10] aux entiers dépens d'appel.


LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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