Jurisprudence : CA Douai, 28-09-2012, n° 11/04127, Infirmation partielle

CA Douai, 28-09-2012, n° 11/04127, Infirmation partielle

A9193ITN

Référence

CA Douai, 28-09-2012, n° 11/04127, Infirmation partielle. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/6870139-ca-douai-28092012-n-1104127-infirmation-partielle
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ARRÊT DU
28 Septembre 2012
N° 1448/12
RG 11/04127
HB/VG
NM
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Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ARRAS
en date du
15 Novembre 2010
(RG 09/476 -section 3)
NOTIFICATION
à parties
le 28/09/12
Copies avocats
le 28/09/12
COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'hommes-

APPELANTE
ASSOCIATION COMITE CULTUREL LOISIRS 'CRECHE DES PAPILLONS'

VITRY EN ARTOIS
Représentant Me Yann OSSEYRAN (avocat au barreau D'ARRAS)
En présence de Mme ...
INTIMÉE
Mme Clotilde Y épouse Y

ATHIES
Présente et assistée Me Anne ... (avocat au barreau D'ARRAS)

DÉBATS à l'audience publique du 19 Juin 2012
Tenue par Hervé ...
magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER Stéphanie LOTTEGIER
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Vincent VERGNE
PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Thierry VERHEYDE CONSEILLER Hervé BALLEREAU CONSEILLER
ARRÊT Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 28 Septembre 2012,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Vincent VERGNE, Président et par Serge LAWECKI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE
Suivant contrat de travail à durée déterminée en date du 13 septembre 2002, l'Association COMITE CULTURE ET LOISIRS a embauché Madame Clotilde Y épouse Y en qualité d'Auxiliaire de puériculture à raison de 30 heures de travail par semaine, pour une durée de six mois.
Ce contrat a été renouvelé le 16 mars 2003 pour une durée d'un an.
Par avenant du 26 septembre 2003, la durée hebdomadaire du travail a été fixée à 35 heures.
Le contrat de travail à durée déterminée a été à nouveau reconduit du 16 mars 2004 au 15 mars 2005.
Un contrat de travail à durée indéterminée a été signé entre les parties le 15 mars 2005 sur la base de la même qualification et du même temps de travail.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 31 décembre 2008, Madame ... a été convoquée à un entretien préalable au licenciement et s'est vue notifier une mise à pied conservatoire devant prendre effet le 5 janvier 2009.
Une rupture conventionnelle du contrat de travail est intervenue le 21 janvier 2009 mais la demande d'homologation a été refusée par le Directeur Départemental du Travail le 30 janvier 2009 faute de respect du délai de rétractation.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 4 février 2009, l'Association COMITE CULTURE ET LOISIRS a notifié à Madame ... son licenciement pour faute grave.
Madame ... a saisi le Conseil de prud'hommes d'ARRAS le 29 octobre 2009 de différentes demandes tendant notamment à voir constater l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement et à obtenir le paiement d'une indemnité de requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée ainsi que des rappels de salaire.

Par jugement en date du 15 novembre 2010, le Conseil de prud'hommes a
- Requalifié le contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée;
- Dit que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse ;
- Condamné l'Association COMITE CULTURE ET LOISIRS à payer à Madame ... les sommes suivantes
* 1.438,89 euros au titre de l'indemnité de requalification
* 17.266,68 euros net à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
* 1.438,89 euros brut à titre de rappel de salaire afférent à la période de mise à pied conservatoire
* 143,89 euros brut au titre des congés payés afférents
* 2.677,78 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis
* 267,78 euros brut au titre des congés payés afférents
* 2.374,17 euros net à titre d'indemnité de licenciement conventionnelle
* 1.900 euros net au titre du préjudice subi pour absence de répartition des horaires sur le contrat de travail
* 2.800 euros brut au titre des heurs supplémentaires
* 280 euros brut au titre des congés payés afférents
* 1.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Le Conseil de prud'hommes a en outre ordonné la remise dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement, d'un certificat de travail, de bulletins de paie et d'une attestation ASSEDIC conformes à la décision, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document.

Par lettre recommandée portant la date d'expédition du 17 décembre 2010, l'avocat de l'Association COMITE CULTURE ET LOISIRS a interjeté appel de cette décision.
L'affaire a fait l'objet d'une décision de radiation le 20 septembre 2011 et a fait l'objet d'un nouvel enrôlement le 28 novembre 2011.
' Par voie de conclusions soutenues par son avocat à l'audience, l'Association COMITE CULTURE ET LOISIRS demande à la Cour d'infirmer le jugement déféré, de débouter Madame ... de ses demandes et subsidiairement, d'ordonner le sursis à statuer dans l'attente du résultat de l'enquête pénale diligentée suite à l'accident du 27 novembre 2008.
L'Association appelante développe en substance l'argumentation suivante
- Monsieur ..., qui a prétendu représenter l'Association en première instance, détient un certain nombre de documents administratifs relatifs notamment aux procédures prud'homales en cours ; il a d'ailleurs été licencié pour ce motif ;
- Madame ... ne subit aucun préjudice du fait de l'absence de mention, dans le contrat de travail à durée déterminée, du motif de recours à ce type de contrat ;
- La salariée a commis des fautes graves qu'elle a expressément reconnues ;
- Elle est à l'origine de graves brûlures occasionnées à un enfant âgé de quinze mois, cette faute résultant d'un non-respect du protocole de la crèche ;
- Une enquête confiée à la Gendarmerie Nationale est en cours ;
- La demande formée au titre de l'absence de mention de la répartition des heures de travail à temps partiel est prescrite ;
- La Convention collective prévoit que dans la branche professionnelle, le principe en matière d'heures supplémentaires est celui de la récupération des dites heures ; par ailleurs les plannings établis par la salariée n'ont pas de caractère probant ;
- Il n'existe pas de préjudice lié à l'absence de versement des cotisations ORGANIC ;
- Le harcèlement moral n'est pas établi, les pièces produites à ce titre étant postérieures à la cessation d'activité de Madame ....
' Par voie de conclusions soutenues par son avocat à l'audience, Madame ... demande à la Cour de confirmer le jugement déféré et, y ajoutant, de condamner l'Association COMITE CULTURE ET LOISIRS à payer les sommes suivantes
- 8.033,34 euros à titre de dommages-intérêts pour travail dissimulé
- 1.427,40 euros à titre de remboursement des cotisations ORGANIC
- 17.266,68 euros à titre de dommages-intérêts pour défaut de paiement des cotisations
- 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle demande en outre la condamnation de l'Association COMITE CULTURE ET LOISIRS à lui remettre un certificat de travail, des bulletins de paie et une attestation ASSEDIC modifiés, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document, la Cour se réservant la possibilité de liquider l'astreinte.
Elle demande enfin la capitalisation des intérêts.
Madame ... développe en substance l'argumentation suivante

- A défaut d'indication du motif de recours à ce type de contrat, le contrat de travail à durée déterminée conclu le 13 septembre 2002 doit être requalifié en contrat de travail à durée indéterminée ;
- La direction de la crèche a reconnu sa responsabilité dans la survenance de l'accident en raison de la défectuosité d'un robinet et la rupture ne repose donc pas sur un motif réel et sérieux ;
- Aucune mise en examen n'est intervenue et la responsabilité pénale de la salariée n'a jamais été envisagée ;
- La signature du compte-rendu à la suite de quatre entretiens préalables a été obtenue sous la contrainte ; ce document ne peut constituer une preuve de la réalité des griefs reprochés ;
- La procédure de licenciement n'a pas été respectée, dans la mesure où d'une part moins de cinq jours ouvrables séparent la convocation de l'entretien et que, d'autre part, les adresses de la mairie et de l'Inspection du travail ne sont pas mentionnées ;
- Le contrat de travail à temps partiel ne mentionne pas la répartition hebdomadaire des heures de travail, ce dont il résulte un préjudice dont la salariée est en droit de réclamer l'indemnisation;
- Des heures supplémentaires ont été effectuées et n'ont donné lieu ni à récupération ni à paiement ;
- L'Association s'est rendue coupable de travail dissimulé en ne payant pas les heures réellement effectuées ;
- En 2005, les cotisations prélevées par l'employeur n'ont pas été reversées à la CRAM, ce dont il résulte un préjudice pour la salariée qui devra travailler quatre trimestres supplémentaires pour être en mesure de faire valoir ses droits à la retraite ;
- L'employeur a commis des actes de harcèlement moral en adressant de nombreux courriers comportant des menaces de poursuites pénales.
A l'issue des débats, le prononcé de l'arrêt a été fixé au 28 septembre 2012.
* * *

MOTIFS DE LA DÉCISION
1- Sur la demande de requalification du contrat de travail à durée déterminée
En vertu de l'article L1242-1 du code du travail, 'un contrat à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise'.
Aux termes de l'article L1242-2 du code du travail, 'sous réserve des dispositions de l'article L1242-3, un contrat à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas suivants
1°Remplacement d'un salarié en cas a)D'absence
b)De passage provisoire à temps partiel, conclu par avenant à son contrat de travail ou par échange écrit entre ce salarié et l'employeur ;
c)De suspension de son contrat de travail
d)De départ définitif précédant la suppression de son poste de travail après consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s'il en existe ;
e)D'attente de l'entrée en service effective du salarié recruté par contrat à durée indéterminée appelé à le remplacer
2°Accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise ;
3°Emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels, dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ;
4°Remplacement d'un chef d'entreprise artisanale, industrielle ou commerciale, d'une personne exerçant une activité libérale, de son conjoint participant effectivement à l'activité de l'entreprise à titre professionnel et habituel ou d'un associé non salarié d'une société civile professionnelle, d'une société civile de moyens ou d'une société d'exercice libéral ;
5°Remplacement du chef d'une exploitation agricole ou d'une entreprise mentionnée au 1° à 4° de l'article L722-1 du code rural, d'un aide familial, d'un associé d'exploitation, ou de leur conjoint mentionné à l'article L722-10 du même code dès lors qu'il participe effectivement à l'activité de l'exploitation agricole ou de l'entreprise'.
L'article L1245-1 du code du travail rappelle qu''est réputé à durée indéterminée tout contrat de travail conclu en méconnaissance des dispositions de l'article L1242-1 et L1242-2".
Par ailleurs, en vertu de l'article L1242-12 du code du travail, 'le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif. A défaut, il est réputé conclu pour une durée indéterminée'.
En l'espèce, il est constant et non contesté par l'employeur que le contrat de travail à durée déterminée conclu le 13 septembre 2002 entre l'Association COMITE CULTURE ET LOISIRS et Madame Clotilde Y ne comporte aucune indication quant au motif de recours à ce type de contrat de travail.
Il en va de même des contrats conclus les 16 mars 2003 et 16 mars 2004.
C'est donc à bon droit que le Conseil de prud'hommes a ordonné la requalification en contrat de travail à durée indéterminée.
En vertu de l'article L1245-2 du code du travail, 'lorsque le conseil de prud'hommes fait droit à la demande du salarié, il lui accorde une indemnité, à la charge de l'employeur, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire. Cette disposition s'applique sans préjudice de l'application des dispositions du titre III du présent livre relatives aux règles de rupture du contrat de travail à durée indéterminée'.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a condamné l'Association COMITE CULTURE ET LOISIRS à payer à Madame ... la somme de 1.438,89 euros, représentant un mois de salaire, à titre d'indemnité de requalification.
2- Sur la demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

2-1 Sur la demande de sursis à statuer
En vertu de l'article 380 du Code de procédure civile, la décision de sursis à statuer suspend le cours de l'instance pour le temps ou jusqu'à la survenance de l'événement qu'elle détermine.
En l'espèce, l'Association COMITE CULTURE ET LOISIRS soutient que l'instance objet du présent litige doit être suspendue dans la mesure où elle a déposé une plainte auprès de la Brigade de Gendarmerie de VITRY-EN-ARTOIS à l'encontre de Madame ....
L'article 4 du code de procédure pénale est relatif à l'exercice de l'action civile en réparation du dommage causé par une infraction et prévoit l'obligation pour le juge civil de surseoir au jugement de cette action tant qu'il n'a pas été prononcé définitivement sur l'action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement.
L'alinéa 3 de ce texte précise que la mise en mouvement de l'action publique n'impose pas la suspension du jugement des autres actions exercées devant la juridiction civile, de quelque nature qu'elles soient, même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d'exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du procès civil.
En l'espèce, il est fait état dans un courrier émanant de l'avocat de l'employeur, daté du 15 juin 2012 et adressé au Bureau d'ordre du tribunal de grande instance d'ARRAS, non pas d'une plainte avec constitution de partie civile, seule à même de mettre en mouvement l'action publique, mais d'une plainte simple.
Par ailleurs, l'action civile objet de la présente instance est relative non pas aux conséquences du dommage causé par l'infraction dénoncée par voie de plainte mais à l'indemnisation du dommage causé au salariée du fait d'un licenciement dont elle soutient l'absence de cause réelle et sérieuse.
Les éléments relatifs aux fautes graves reprochées à la salariée par l'employeur ont été produits et discutés contradictoirement par les parties, de telle sorte que la juridiction civile est en mesure d'apprécier la teneur des faits et de se prononcer sur leur qualification au regard des règles édictées par le Code du travail, peu important l'issue de la plainte pénale déposée par l'Association COMITE CULTURE ET LOISIRS.
La demande de sursis à statuer sera donc rejetée. 2-2 Sur le fond
L'article L 1232-1 du Code du travail subordonne la légitimité du licenciement à l'existence d'une cause réelle et sérieuse.
La cause doit ainsi être objective, exacte et les griefs reprochés doivent être suffisamment pertinents pour justifier la rupture du contrat de travail.
La faute grave privative du préavis prévu à l'article L 1234-1 du même Code est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée de ce préavis.
La charge de la preuve de la faute grave repose sur le seul employeur.
En vertu de l'article L 1235-1 du même Code, en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles.
Si un doute subsiste, il profite au salarié.
En l'espèce, la lettre de licenciement datée du 4 février 2009 est ainsi rédigée
'Par courrier en date du 31 décembre 2008, nous vous avons adressé une convocation en vue d'un entretien préalable en date du 7 janvier 2009.
Au cours de cet entretien, nous vous avons exposé les motifs qui nous amenaient à envisager votre licenciement pour faute grave.
La proposition d'une rupture conventionnelle a été émise, nous nous sommes rencontrés les 15/19/ et 21 janvier pour débattre de l'exécution de celle-ci et de ses modalités.
La demande d'homologation ayant été rejetée par la direction départementale du travail en date du 3 février, nous informant qu'il nous fallait procéder à un licenciement et prendre des renseignements auprès de l'inspection du travail, (chose faite ce jour elle nous conseille également la procédure de licenciement).
Ce qui nous conduit à vous rappeler les raisons pour lesquelles nous envisageons cette mesure suite à l'accident survenu à l'enfant Faustin ... le 27 novembre, suite à la rupture de fixation du flexible de douchette en salle de change nous considérons que
- Décider de changer un enfant en étant seule dans la section des petits (il n'y avait pas urgence), - Mettre le mitigeur à fond sur l'eau chaude,
- S'éloigner d'un enfant installé sur le tapis à langer, alors qu'il y avait de la place à côté, au risque de le voir tomber, et que l'eau chaude continuait à couler,
- Paniquer dans une situation d'urgence, non assistance à personne en danger, - Mentir sur la réalité des faits,
- Tous ces éléments constituent des fautes professionnelles graves pour une auxiliaire de puéricultrice diplômée depuis 7 ans.
En conséquence nous sommes au regret de vous informer par la présente, que nous avons décidé de procéder à votre licenciement, sans préavis ni indemnité de quelque sorte que ce soit (...)'.
La lettre de licenciement fixe les limites du litige.
L'Association COMITE CULTURE ET LOISIRS se prévaut devant la Cour du compte-rendu d'un entretien en date du 15 décembre 2008, qui ne correspond pas à l'entretien préalable au licenciement lequel s'est tenu le 7 janvier 2009, mais à une réunion informelle lors de laquelle Madame ..., qui n'était pas assistée, aurait reconnu la responsabilité des faits reprochés.
Toutefois, la lettre de licenciement ne fait nullement référence à cet entretien et n'évoque aucune reconnaissance des faits par la salariée puisqu'il est au contraire reproché à celle-ci de 'mentir sur la réalité de faits'.
Par ailleurs, il résulte des termes de cet entretien et il n'est pas sérieusement contesté par l'employeur que les brûlures occasionnées sur la personne de l'enfant Faustin ... sont la conséquence d'une rupture de fixation du flexible de la douchette qu'utilisait alors la salariée occupée à changer le jeune enfant.
Aucun élément ne vient établir que cette rupture soit liée à un comportement fautif de Madame ... alors qu'il résulte en revanche du même compte rendu d'entretien du 15 décembre 2008 que 'la douchette avait été recollée' et qu'il a été nécessaire de 'modifier les équipements' pour éviter tout risque de brûlures.
La préexistence d'un dysfonctionnement technique est confirmée par les propos de Monsieur Fabrice ..., directeur de la Crèche, relatés en ces termes dans un article du journal 'LA VOIX DU NORD' en date du 3 décembre 2008 'Il y avait un dysfonctionnement sur ce robinet qui était en attente de réparation'.
Rien ne démontre que Madame ... ait délibérément ignoré un 'protocole de change de l'enfant' dont le caractère contractuel n'est au demeurant pas établi.
Rien ne démontre qu'elle ait commis une faute grave en intervenant seule pour changer un enfant ni qu'elle se soit éloignée de ce dernier en l'abandonnant sur la table à langer, cette relation des faits étant là-encore démentie par les termes du compte-rendu d'entretien du 15 décembre 2008 dont se prévaut l'employeur.
La description des événements qui sont à l'origine de la décision de rompre le contrat de travail et l'analyse qu'a cru devoir en faire l'employeur sur des notions aussi vagues que la 'panique' ou encore le fait de 'mentir sur la réalité des faits', relèvent non de faits objectifs et vérifiables par la Cour mais d'une analyse subjective, de surcroît contredite par les éléments susvisés du dossier.
C'est donc à juste titre que les premiers juges ont considéré que le licenciement ne reposait ni sur une faute grave ni sur la moindre cause réelle et sérieuse.
Le jugement déféré sera donc confirmé de ce chef.
3- Sur le non-respect de la procédure de licenciement
Madame ... fait observer que la procédure de licenciement n'a pas été respectée mais ne formule cependant aucune demande de ce chef, étant observé que l'indemnisation allouée pour absence de cause réelle et sérieuse de licenciement couvre l'ensemble du préjudice subi, y compris au titre des irrégularités de forme.
4- Sur la demande au titre de l'absence de répartition des horaires de travail
L'article L 3123-14 du Code du travail dispose 'Le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit.
Il mentionne
1° La qualification du salarié, les éléments de sa rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d'aide à domicile et les salariés relevant d'un accord collectif de travail conclu en application de l'article L 3122-2, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois (...)'.
Madame ... réclame l'indemnisation du préjudice subi du fait de l'absence dans le contrat de travail à durée déterminée, de la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine.
L'Association COMITE CULTURE LOISIRS affirme que 'cette demande est manifestement prescrite' sans s'expliquer sur cette fin de non-recevoir alors que s'agissant non pas d'une demande à caractère salarial mais d'une demande indemnitaire, la prescription quinquennale n'est pas opposable à la salariée.
L'employeur ne s'explique pas sur le fond quant à l'absence de répartition des horaires relevée à juste titre par Madame ... et la production de deux plannings non-signés de cette dernière est impropre à renverser la présomption de contrat à temps plein.
Madame ..., tenue de rester en permanence à la disposition de son employeur, a nécessairement subi un préjudice faute de ne pouvoir chercher un emploi complémentaire et c'est donc à juste titre que les premiers juges ont fait droit à la demande de dommages-intérêts présentée de ce chef.
5- Sur la demande relative aux heures supplémentaires
En vertu de l'article L3171-4 du code du travail, 'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles'.
S'il résulte de cet article que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.
L'article 5.4.0 de la Convention collective nationale de l'Animation du 28 juin 1988 applicable dans l'entreprise prévoit que 'dans la branche professionnelle, le principe est la récupération des heures supplémentaires. Leur payement n'intervient qu'à titre exceptionnel'.
Cette disposition conventionnelle ne saurait faire échec à l'obligation pour l'employeur d'attribuer les heures de récupération dues en compensation des heures supplémentaires effectuées ou à défaut d'effectuer le paiement des dites heures aux taux majorés de 25 % et 50% pour celles effectuées au-delà de 44 heures hebdomadaires.
Madame ... produit des relevés circonstanciés qui établissent qu'elle a effectué entre 2004 et 2008 des heures supplémentaires qui n'ont donné lieu ni à compensation par attribution d'heures de récupération majorées ni, à défaut, à un quelconque paiement.
La salariée établit précisément que la compensation financière des heures ainsi effectuées au delà de la durée légale du travail est égale à la somme de 2.800 euros.
L'Association COMITE CULTURE ET LOISIRS se borne à contester la réalité des plannings invoqués par la salariée sans apporter le moindre élément de preuve de nature à justifier les horaires réalisés par l'intéressée.
Dans ces conditions, c'est à juste titre que les premiers juges ont fait droit aux demandes présentées par Madame ... au titre des heures supplémentaires.
5- Sur la demande au titre du travail dissimulé
Madame ... sollicite le paiement d'une somme de 8.033,34 euros à titre de dommages-intérêts pour travail dissimulé.
Nonobstant le fait que les bulletins de salaire mentionnent un nombre d'heures de travail inférieur à la durée réelle du travail effectuée par la salariée, il n'est pas établi que cette irrégularité procède d'une omission volontaire et intentionnelle de l'employeur.
Les conditions d'application des articles L 8221-5 et L 8223-1 ne sont donc pas réunies en l'espèce et Madame ... sera en conséquence déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour travail dissimulé.
6- Sur la demande concernant l'absence de versement des cotisations de retraite
Il est constant que la contribution du salarié au Régime général de retraite géré par la Sécurité sociale est précomptée sur sa rémunération lors de chaque paie et que le paiement du salaire effectué sous déduction de la part salariale des cotisations vaut acquit de cette contribution par l'employeur.
En l'espèce, Madame ... se plaint de ce que les cotisations précomptées au titre de l'année 2005 n'aient pas été reversées à l'organisme de Sécurité sociale.
Les bulletins de paie font clairement apparaître un prélèvement mensuel de 81,58 euros au titre de l'Assurance vieillesse et 37,37 euros au titre de la Retraite complémentaire CIRNASE.
En revanche, le relevé de carrière établi par la Caisse Régionale d'Assurance Maladie Nord-Picardie le 27 avril 2010, ne mentionne aucun trimestre acquis au titre de l'année 2005.
L'Association COMITE CULTURE ET LOISIRS ne justifie nullement du reversement aux organismes concernés des cotisations précomptées sur le salaire de Madame ... et se contente, sans en justifier, d'affirmer que la salariée peut demander la 'régularisation de ses droits valablement précomptés'.
Or, c'est à l'employeur, responsable du versement de la contribution salariale, de rapporter la preuve de ce qu'il a effectué les versements correspondants aux précomptes effectués sur la paie.
A défaut, sa responsabilité est engagée lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, le salarié constate qu'il lui manque des trimestres de cotisations alors que le salaire correspondant à la période litigieuse a bien été amputé de la part salariale des cotisations.
C'est donc à tort que les premiers juges ont débouté la salariée de sa demande.
L'Association COMITE CULTURE ET LOISIRS sera condamnée à payer à Madame ... la somme de 1.427,40 euros correspondant aux cotisations indûment prélevées.
La faute commise par l'employeur est la source d'un préjudice direct subi par Madame ... dans la mesure où quatre trimestres de cotisations lui font défaut, ce qui retardera d'autant pour elle la possibilité de faire valoir ses droits à la retraite.
La Cour dispose des éléments qui lui permettent d'évaluer le préjudice subi de ce chef à la somme de 5.000 euros que l'Association COMITE CULTURE ET LOISIRS sera condamnée à payer à Madame ... à titre de dommages-intérêts.
7- Sur la demande au titre du harcèlement moral
En vertu de l'article L1152-1du code du travail, 'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel'.
L'article L1154-1 dispose que 'lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L1152-1 à L1152-3 et L1153-1 à L1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles'.
En vertu de ce dernier texte, il pèse sur le salarié l'obligation de rapporter la preuve d'éléments précis et concordants ; ce n'est qu'à cette condition que le prétendu auteur du harcèlement doit s'expliquer sur les faits qui lui sont reprochés.
En l'espèce, Madame ... se plaint de pressions exercées par l'employeur au moyen de courriers recommandés la menaçant de poursuites pénales.
Elle produit une lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 4 mai 2010 intitulé 'DÉPÔT DE PLAINTE AVEC CONSTITUTION DE PARTIE CIVILE', dans lequel l'employeur lui reproche tour à tour sa stratégie de défense devant le Conseil de prud'hommes, les témoignages qu'elle a sollicités et la menace de poursuites pour des chefs divers ('incitation à la calomnie, atteinte à la bonne notoriété de l'association ou encore accusation de ne pas avoir été payé de vos heures de récupération' (SIC)).
Elle produit encore une lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 13 juin 2010, dans lequel l'employeur lui reproche les termes employés dans les attestations de Mesdames ..., ... et ... et ajoute qu'il n'exclut pas de poursuivre l'intéressée pour des faits de 'non assistance à personne en danger' ou encore 'abstention volontaire de porter connaissance à une personne en péril' (SIC).
Elle produit enfin des lettres recommandées avec demande d'avis de réception adressées en mai et juin 2010 adressés à Mesdames ..., ... et ..., menaçant ces salariées de plaintes pour avoir témoigné en faveur de Madame ....
Pour particulièrement désagréables que soient ces manoeuvres intimidantes auxquelles l'Association intimée a cru devoir se livrer, c'est à juste titre que le Conseil de prud'hommes a relevé que les courriers adressés à Madame ... sont postérieurs à la rupture du contrat de travail et ne peuvent donc caractériser des faits de harcèlement moral au sens des dispositions légales précitées.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté Madame ... de sa demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral.
8- Sur la demande de remise de documents
C'est à juste titre que les premiers juges ont ordonné la remise d'un certificat de travail, de bulletins de paie et d'une attestation destinée au POLE EMPLOI, qui devront être établis conformément aux termes de la décision rendue.
Il n'est pas contesté par l'Association appelante qu'aucun de ces documents n'a été établi postérieurement à la décision de première instance.
Cette obligation sera en conséquence assortie d'une astreinte de 80 euros par jour de retard qui courra à compter du quinzième jour suivant la notification du présent arrêt et ce, pendant une durée d'un mois.
Conformément au droit commun, la compétence reviendra au juge de l'exécution en ce qui concerne l'éventuelle liquidation de l'astreinte.
9- Sur les autres demandes

Conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil, les intérêts afférents aux sommes dues produiront eux-mêmes des intérêts pourvu qu'il s'agisse d'intérêts dus pour au moins une année entière.
L'Association COMITE CULTURE ET LOISIRS, partie perdante, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
Elle sera également condamnée à payer à Madame ... la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS
REJETTE la demande de sursis à statuer ;
INFIRME le jugement déféré en ce qu'il a débouté Madame Clotilde Y épouse Y de sa demandes relatives à l'absence de reversement des cotisations de retraite précomptés au titre de l'année 2005 ;
Statuant à nouveau de ce chef,
CONDAMNE l'Association COMITE CULTURE ET LOISIRS à payer à Madame Clotilde Y épouse Y les sommes suivantes
- Mille quatre cent vingt sept Euros et quarante cents (1.427,40 euros) au titre du remboursement des cotisations prélevées en 2005 et non reversées à l'organisme de Sécurité sociale ;
- Cinq mille Euros (5.000 euros) à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l'absence de paiement des cotisations de retraite de l'année 2005 ;
CONFIRME pour le surplus le jugement déféré ;
ASSORTIT l'obligation de remise à Madame ... d'un certificat de travail, de bulletins de paie et d'une attestation destinée au POLE EMPLOI d'une astreinte de quatre vingt Euros (80euros) par jour de retard qui courra à compter du quinzième jour suivant la notification du présent arrêt et ce, pendant une durée de un mois ;
DÉBOUTE Madame Clotilde Y épouse Y du surplus de ses demandes ;
CONDAMNE l'Association COMITE CULTURE ET LOISIRS à payer à Madame Clotilde Y épouse Y la somme de Deux mille Euros (2.000 euros) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE l'Association COMITE CULTURE ET LOISIRS aux dépens de première instance et d'appel.
Le Greffier Le Président
S. ... V. ...

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