Jurisprudence : CA Amiens, 19-06-2025, n° 24/01301

CA Amiens, 19-06-2025, n° 24/01301

B2946ANG

Référence

CA Amiens, 19-06-2025, n° 24/01301. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/120825385-ca-amiens-19062025-n-2401301
Copier

ARREAa




[J]


C/


A. SKYDOME


copie exécutoire

le 19 juin 2025

à

Me DUQUESNE

Me DESSEIGNE

CBBTCBIL


COUR D'APPEL D'AMIENS


5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE


ARRET DU 19 JUIN 2025


*************************************************************

N° RG 24/01301 - N° Portalis DBV4-V-B7I-JA6M


JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE LAON DU 15 MARS 2024 (référence dossier N° RG 23/00003)



PARTIES EN CAUSE :


APPELANT


MonsieurAa[Ab] [J]

[Adresse 2]

[Localité 3]


comparant en personne, assisté, concluant et plaidant par Me Caroline DUQUESNE, avocat au barreau de LILLE substitué par Me Christophe LECLERCQ, avocat au barreau de LILLE


ET :


INTIMEE


S.A.S.U. SKYDOME Prise en la personne de son Président domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 1]


représentée, concluant et plaidant par Me Jean-claude DESSEIGNE de la SCP J.C. DESSEIGNE ET C. ZOTTA, avocat au barreau de LYON substituée par Me Cécile ZOTTA de la SCP J.C. DESSEIGNE ET C. ZOTTA, avocat au barreau de LYON


Représentée par Me Hélène CAMIER de la SELARL LX AMIENS-DOUAI, avocat au barreau D'AMIENS


DEBATS :


A l'audience publique du 24 avril 2025, devant Madame Corinne BOULOGNE, siégeant en vertu des articles 805 et 945-1 du code de procédure civile🏛🏛 et sans opposition des parties, l'affaire a été appelée.


Madame Corinne BOULOGNE indique que l'arrêt sera prononcé le 19 juin 2025 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile🏛.


GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Ac B



COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :


Madame Corinne BOULOGNE en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :


Mme Corinne BOULOGNE, présidente de chambre,

Mme Caroline PACHTER-WALD, présidente de chambre,

Mme Eva GIUDICELLI, conseillère,


qui en a délibéré conformément à la Loi.


PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :


Le 19 juin 2025, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Corinne BOULOGNE, Présidente de Chambre et MmeIsabelle LEROY, Greffière.


*

* *


DECISION :


M. [Aa], né le … … …, a été embauché à compter du 5 avril 2004 dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée, par la société Baxter, puis par la société Skydome, ci-après dénommée la société ou l'employeur, en qualité de délégué commercial Skydome secteur nord. Dans le cadre d'un nouveau contrat de travail à durée indéterminée, M. [Aa] a été embauché en qualité de directeur commercial France, à compter du 1er avril 2017.


La société Skydome emploie plus de 10 salariés.


La convention collective applicable est celle des ingénieurs et cadres assimilés des travaux publics.


M. [Aa] a été placé en arrêt de travail à compter du 27 mai 2022.


Par courrier du 31 mai 2022, le salarié a été convoqué à un entretien préalable, fixé au 13 juin 2022.


Le 30 juin 2022, il a été licencié pour insuffisance professionnelle, par lettre ainsi libellée :


« Monsieur,


Par lettre recommandée en date du 31 mai 2022, nous vous avons convoqué à un entretien préalable pour le 13 juin 2022 à 14h00 afin de vous exposer les éléments reprochés et recueillir vos explications. Vous ne vous êtes pas présenté à cet entretien. Votre absence à l'entretien n'entrave pas la procédure engagée.


Nous vous informons, par la présente, de notre décision de vous notifier votre licenciement au motif d'insuffisance professionnelle.


Nous vous rappelons que dans le cadre de votre contrat de travail et conformément à vos obligations professionnelles de Directeur commercial vous devez adopter un comportement professionnel, vis à vis votre hiérarchie, de vos collaborateurs, de vos clients et vous devez également vous conformer aux consignes de votre hiérarchie ainsi qu'aux règles de fonctionnement interne.


En tant que Directeur Commercial, vous managez l'équipe commerciale SKYDOME et Indirect Sales KLA sur le territoire Français, et vous avez notamment comme mission de :


Définir et mettre en place les KPI de suivi des activités

Animer et piloter les équipes

Réaliser des réunions d'équipe et des réunions d'activités individuelles

Accompagner chacun des membres de votre équipe sur le terrain en clientèle


Or nous avons été contraints de constater que vous n'avez à ce jour pas mis en place ces actions et ce malgré nos multiples demandes.


En effet, lors de votre entretien annuel en date du 18 janvier 2022 il vous a été clairement expliqué les attentes de votre hiérarchie quant au management de votre équipe commerciale, qui étaient entre autres: La mise en place des AIC hebdomadaire (Animation à Intervalle Court) - Etablir et suivre le planning de tournée commerciale - Organiser le suivi toutes les 3 semaines - Assurer un suivi Individualisé tous les trimestres avec votre responsable - Communiquer trimestriellement vos prévisions de ventes.


Votre manager, Monsieur [Ad] [S], soutenu par moi-même, n'a cessé de vous les rappeler notamment par de nombreux email mais également durant des entretiens durant lesquels vous vous étiez engagé à faire des efforts pour répondre aux attentes de votre hiérarchie.


Le 11 avril 2022, vous avez été reçu par la direction générale et votre direction commerciale France afin de faire un point de situation. A cette date, votre direction relève une amélioration de la situation et vous a toutefois rappelé que 80% des actions de suivi et de pilotage des équipes n'avaient pas été menées ni même planifiées. Votre direction vous a encouragé à poursuivre vos efforts et ce dans le seul but d'avoir un pilotage de la force de vente efficace et régulier.


A la suite de cet entretien, le 29 avril, vous avez planifié vos AIC Hebdomadaire (chaque lundi à 9h30). Cette initiative n'a été que de courte durée puisque dès le 5 mai vous avez changé la périodicité de ces AIC en les planifiant toutes les 2 semaines et ce en opposition totale avec les demandes de votre hiérarchie et les pratiques des autres départements ventes du groupe.


Par ailleurs, en tant que Directeur commercial vous devez être à même de fournir à votre direction vos prévisions de vente à 3 mois. Ces indicateurs, qui doivent être remis à jour régulièrement, ont une importance capitale non seulement d'un point de vue financier mais également dans la gestion de nos capacités de production.


Or, votre responsable n'a pu que constater votre absence totale de réponse à ses demandes de prévision de vente à 3 mois ou encore à vos réponses partielles lorsqu'on vous demande l'état à jour du carnet de commandes « assurées » pendant une période de baisse d'activité pour nos usines.


En complément de ces carences, votre gestion récente de la société [A], un des plus gros clients sur votre secteur d'activité, a mis à mal la négociation d'une affaire de près d'un million d'euros. La prise en charge de la demande client établie le 9 mars (une demande de BFA) a été traitée par votre direction avec 2 mois de délais, et ce après la plainte du client auprès de la direction commerciale et générale. Cette mauvaise gestion a des impacts financiers important et n'est pas acceptable compte tenu du niveau de responsabilité inhérent à votre fonction de Directeur Commercial.


Cette incapacité à assumer correctement vos fonctions met en cause la bonne marche de votre service et oblige votre responsable à prendre en charge vos missions (animation et pilotage de vos équipes, réalisation de vos prévisions de vente, reprise en main de marché en négociation...).


Par ailleurs, les divers entretiens réalisés ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation ou d'espérer un quelconque changement.


Ainsi, compte tenu de votre ancienneté dans l'entreprise, votre préavis est de 3 mois et débutera à date de première présentation de la présente lettre


Nous vous informons également, conformément aux termes de l'article 5 mentionné dans l'annexe de votre contrat de travail initial du 5 avril 2004, nous vous libérons de l'interdiction de concurrence stipulé dans ce même article


Par voie de conséquence, vous serez libre d'exercer tout activité professionnelle à l'issue de votre préavis.


Sachez que la présente renonciation décharge l'entreprise SKYDOME de tout paiement de la contrepartie financière qui dépendait de l'application de la clause de non-concurrence.


A l'issue de votre préavis, vous recevrez les documents suivants : Votre dernier bulletin de salaire et son règlement - votre reçu pour solde de tout compte - votre certificat de travail - votre attestation pôle emploi


Par ailleurs, nous vous informons que vous avez la possibilité de bénéficier du maintien de vos droits en matière de prévoyance et de mutuelle, à compter de la cessation de votre contrat de travail, sous réserve de votre prise en charge par l'assurance chômage et pour une durée maximale de 12 mois.


Veuillez agréer, Monsieur, l'expression de nos salutations distinguées ».


Contestant la légitimité de son licenciement et ne s'estimant pas rempli de ses droits au titre de l'exécution de son contrat de travail, Aa. [J] a saisi le conseil de prud'hommes de Laon, le 6 janvier 2023.



Par jugement du 15 mars 2024, le conseil a :


jugé que le statut de cadre dirigeant était applicable à

M. [Aa] ;

jugé le licenciement de M. [Aa], notifié le 30 juin 2022, fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

débouté M. [Aa] de l'ensemble de ses demandes ;

déclaré irrecevable la demande la société Skydome de statuer sur les dépens d'appel ;

condamné M. [Aa] à verser à la société Skydome la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile🏛 ;

condamné M. [Aa] aux entiers dépens de la présente instance.


M. [Aa], qui est régulièrement appelant de ce jugement, par dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 26 novembre 2024, demande à la cour de :


dire son appel du jugement recevable et bien-fondé ;

réformer le jugement en toutes ses dispositions, en ce qu'il a :


- jugé que le statut de cadre dirigeant lui était applicable ;

- jugé son licenciement, notifié le 30 juin 2022, fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

- l'a débouté de l'ensemble de ses demandes ;

- déclaré irrecevable la demande la société Skydome de statuer sur les dépens d'appel ;

- l'a condamné à verser à la société Skydome la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- l'a condamné aux entiers dépens de la présente instance ;


Statuant à nouveau,


Sur la rupture du contrat de travail,


à titre principal, le juger victime de harcèlement moral de la part de la société Skydome ;

par conséquent, juger que son licenciement est nul ;

par conséquent, condamner la société Skydome à lui payer 295 047,20 euros de dommages et intérêts pour licenciement nul (20 mois de salaire), et à titre subsidiaire sur ce point, s'il n'était pas fait droit aux demandes de rappels de salaire pour heures supplémentaires, à la somme de 185 818,60 euros de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

débouter la société Skydome de ses demandes sur ce point ;


à titre subsidiaire, juger que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;

par conséquent, condamner la société Skydome à lui payer 213 909,22 euros de dommages et intérêts (14,5 mois de salaire) et à titre subsidiaire sur ce point, s'il n'était pas fait droit aux demandes de rappels de salaire pour heures supplémentaires, à la somme de 134 718,49 euros de dommages et intérêts ;

débouter la société Skydome de ses demandes sur ce point ;


en tout état de cause, condamner la société Skydome à lui verser les sommes suivantes :


- 45 605,5 euros au titre du solde de l'indemnité de licenciement ;

- 22 597,08 euros au titre du solde de l'indemnité compensatrice de préavis outre 2'259,71 euros de congés payés afférents ;


Sur l'exécution du contrat de travail,


Sur les demandes relatives au temps de travail,


juger qu'il ne pouvait pas se voir appliquer le statut de cadre dirigeant ;

juger qu'il ne disposait pas du statut de cadre autonome ;

débouter la société Skydome de ses demandes sur ces 2 points ;

juger qu'il doit être considéré comme soumis à la durée légale du travail ;

juger qu'il justifie de ses prétentions au titre des heures supplémentaires ;

débouter la société Skydome de ses demandes sur ce point ;

par conséquent, condamner la société Skydome à lui verser les sommes suivantes :


- 140 492,78 euros brut au titre des rappels de salaire au titre des heures supplémentaires effectuées sur les années 2019 à 2022 ;

- 14 049,28 euros brut au titre des congés payés afférents ;

- 73 982,13 euros au titre de l'indemnisation de la contrepartie en repos obligatoire, non proposée et non prise et congés payés afférents ;

- 10 000 euros au titre des dommages et intérêts au titre de la violation des durées maximales de travail et des durées minimales de repos ;

- 88 514,16 euros (6 mois de salaire) au titre des dommages et intérêts pour travail dissimulé ;


condamner la société Skydome à lui verser la somme de 1 969,09 euros, à titre du paiement du solde de jours de RTT ;


Sur les autres demandes,


le juger victime de harcèlement moral ;

par conséquent, condamner la société Skydome à lui payer la somme de 20 000'euros de dommages et intérêts au titre du préjudice subi par celui-ci du fait du harcèlement moral dont il a été victime ;

juger que la société Skydome a violé son obligation de sécurité ;

par conséquent, condamner la société Skydome à lui payer la somme de 20'000'euros de dommages et intérêts ;

condamner la société Skydome à lui verser la somme de 5 700 euros net, à titre des frais de télétravail et pour l'occupation d'une chambre de sa maison ;

condamner la société Skydome au paiement de la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts pour non-respect des règles relatives au droit d'accès aux données personnelles prévues par le RGPD ;


En tout état de cause,


débouter la société Skydome de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, en ce compris celles formées au titre de son appel incident ;

condamner la société Skydome au versement de la somme de 6 000 euros au titre de la procédure de première instance et à la somme de 6 000 euros au titre de la présente procédure d'appel, en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner la société Skydome aux entiers dépens ;

fixer la moyenne de ses salaires à la somme de 14 752,36 euros, heures supplémentaires comprises, et subsidiairement sur ce point, s'il ne devait pas être fait droit à ses demandes de rappels de salaire au titre des heures supplémentaires, à la somme de 9 290,93 euros ;

ordonner la remise des bulletins de salaire et des documents de fin de contrat rectifiés et conformes à la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, à compter de la décision à intervenir ;

condamner la société Skydome, aux intérêts légaux à compter de la saisine du conseil de prud'hommes et dire que les intérêts seront capitalisés en application de l'article 1343-2 du code civil🏛 ;

ordonner le remboursement de ses allocations chômage, dans la limite de 6 mois de salaire.


La société Skydome, par dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 20 février 2025, demande à la cour de :


confirmer en toutes ses dispositions le jugement ;

rejeter toutes prétentions, fins et conclusions contraires ;


Subsidiairement,


juger que M. [Aa] disposait du statut de cadre autonome et le débouter de ses prétentions à titre d'heures supplémentaires, de contrepartie de repos obligatoire, de dommages et intérêts pour violation des durées maximales de travail et des durées minimales de repos, d'indemnité pour travail dissimulé tant à titre principal qu'à titre subsidiaire ;

débouter M. [Aa] de sa demande d'intérêts à compter de la saisine du conseil de prud'hommes ainsi qu'au titre de la capitalisation de l'article 1343-2 du code civil, seules les créances de salaire ouvrant droit à intérêts à compter de la saisine du conseil de prud'hommes à l'exclusion des demandes de dommages et intérêts ;

rejeter la demande à titre d'astreinte comme étant infondée et injustifiée ;

débouter M. [Aa] de sa demande de remboursement d'allocations chômage, nul ne plaidant par procureur ;


En tout état de cause,


débouter M. [Aa] de ses prétentions à titre d'article 700 du code de procédure civile à hauteur de cour ;

condamner M. [Aa] à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner M. [Aa] aux entiers dépens de première instance et d'appel.


L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 avril 2025 et l'affaire a été fixée en audience de plaidoirie du 24 avril 2025.


Il est renvoyé aux conclusions des parties pour le détail de leur argumentation.



MOTIFS


Sur l'exécution du contrat de travail


Sur le statut de cadre dirigeant du salarié


M. [Aa] conteste le statut de cadre dirigeant repris au contrat de travail exposant que son salaire n'était pas parmi les plus élevées de la société mais qu'il ne dispose pas d'accès à des éléments de preuve étant sorti de la société, qu'il ne disposait pas d'une autonomie sur de nombreux sujets dans son périmètre de directeur commercial et ne participait pas à la direction de l'entreprise. Il ajoute que suite au rachat par la société Kingspan, il n'avait plus aucune autonomie, l'organigramme le démontrant, étant sous la hiérarchie de M. [S] qui assurait la direction commerciale en ayant perdu la possibilité de recruter ou de licencier, de gérer ses propres commerciaux.


La société rétorque que M. [Aa] disposait d'une totale autonomie dans l'organisation de son emploi du temps, disposant de toutes habilitations de négociations d'affaires avec les clients, une rémunération qui le place au deuxième rang de la société derrière le directeur général, pouvait embaucher en respectant les procédures notamment en terme de salaires, ne pouvait licencier mais pouvait engager la procédure avec accord de la direction générale, qu'il avait donné son accord sur l'activité opérationnelle mise en place au dernier trimestre 2021, que M. [S] ne s'immisçait pas dans son travail mais ne faisait que pallier aux manques constatés.


Sur ce


En application de l'article L. 3111-2 du code du travail🏛, « les cadres dirigeants ne sont pas soumis aux dispositions des titres II et III.


Sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement. »


Est considéré comme cadre dirigeant celui à qui sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de son emploi du temps, qui est habilité à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoit une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunérations pratiquées dans l'entreprise ou son établissement. Les critères ainsi définis sont cumulatifs et le juge doit vérifier précisément les conditions réelles d'emploi du salarié concerné, peu important que l'accord collectif applicable retienne pour la fonction occupée par le salarié la qualité de cadre dirigeant. Ces critères cumulatifs impliquent que seuls relèvent de cette catégorie les cadres participant à la direction de l'entreprise.

M. [Aa] a signé le 6 mai 2017 un contrat à durée indéterminée en qualité de cadre dirigeant au sens de l'article L. 3111-2 du code du travail.


M. [Aa] avait signé une convention de forfait jours et pouvait organiser ses journées de travail tant qu'il respectait le cadre des 212 jours prévus.


Le salaire annuel de M. [Aa] était de 93 026 euros. Ce montant doit être comparé à celui des autres cadres dirigeants de la société afin de déterminer si cette rémunération se situe dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise.


L'employeur, qui dispose des informations sur les revenus des cadres dirigeants et qui affirme que M. [Aa] faisait partie des plus importantes rémunérations vise une pièce 52 qui est un courrier du conseil de la société précisant envoyer une farde (liasse de papier ou une chemise cartonnée ou plastifiée qui sert à rassembler cette liasse) mais sans produire ces documents ou à tout le moins au regard de leur importance, de ceux des documents utiles au litige à savoir les salaires des autres cadres dirigeants de la société afin d'effectuer une comparaison utile.


La cour observe que l'organigramme de la société Kingspan place M. [S] au poste de directeur commercial du groupe et M. [Aa] en position de N-1 au poste de « indirect sales de Skydôme » alors qu'avant le rachat il était directeur commercial pour la France. Il n'est en outre pas établi qu'il ait bénéficié de délégation de pouvoirs sur des compétences particulières, notamment en termes de discipline ce que l'employeur reconnaît dans ses conclusions.


Par ailleurs, les échanges entre M. [S] et M. [Aa] démontrent que ce dernier recevait des consignes impératives notamment sur les process du groupe Kingspan en termes de suivi commercial avec la mise en place de suivis individuels des commerciaux et points trimestriels, bilan chiffré annuel etc' et envoi de consignes individuelles précises, référence à un courriel du 13 mai 2022 de M. [S] envoyé à 8h06 pour obtenir de M. [Aa] qu'il appelle tous les commerciaux pour un point précis de ce qui rentre en commande avant un séminaire, pourcentage d'affaires conclues, pourcentage de celles en négociation et affaires à saisir dans le mois avec retour ce midi.


Il résulte de l'ensemble de ces éléments l'existence de directives incompatibles avec une large autonomie telle que prévue à l'article L 3111-2 du code du travail et l'absence de preuve que le salarié percevait une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunérations pratiquées dans l'entreprise.


La cour infirmera le jugement qui a débouté le salarié de sa demande en contestation du statut de cadre dirigeant et jugera désormais que M. [Aa] n'était pas cadre dirigeant de la société Skydome.


Sur le statut de cadre autonome


La société soutient que M. [Aa] était un cadre autonome disposant d'une totale autonomie dans l'organisation de son travail et de ses horaires, qu'il avait choisi le télétravail et le travail au siège pour les 2/3 de son activité et ne réalisait que peu de déplacements extérieurs.

Le salarié rétorque que l'employeur ne précise ni à quel régime juridique il se réfère, ni pourquoi les conditions de travail permettraient de caractériser que les conditions sont bien remplies notamment dans le cas d'un forfait jours il ne justifie pas d'un entretien au moins annuel au cours duquel serait abordé la question de sa charge de travail et de l'articulation vie professionnelle-vie personnelle, qu'en tout état de cause il ne remplit pas les conditions de forfait ni en jours ni en heures.


Sur ce


La convention individuelle de forfait doit être passée par écrit (Soc., 16 décembre 2008, n°07-42.107⚖️, publié), l'absence d'écrit rendant le forfait en jours prévu par un accord collectif inopposable au salarié.


La société ne qualifie pas le régime juridique du cadre autonome auquel elle fait référence. Le contrat de travail à effet du 1er avril 2017 indique que M. [Aa] est recruté en qualité de cadre dirigeant, dont la cour a jugé précédemment que tel n'était pas le cas. Ce contrat précise qu'il bénéficiera de la réduction du temps de travail et du compte épargne temps dans les mêmes conditions que les cadres rémunérés sur la base annuelle d'un forfait jours, en application des dispositions de l'accord de l'établissement du siège de l'entreprise relatif à l'organisation et à la réduction du temps de travail et de l'accord instituant un compte épargne temps.


Le contrat de travail signé par M. [Aa] fait bénéficier de la réduction de temps de travail et d'un compte épargne temps comme les cadres en forfait jours mais il ne stipule pas un forfait jours avec notamment mention du nombre de jours de travail, le suivi sur la compatibilité entre la vie professionnelle et la vie personnelle et familiale.


Dès lors le salarié ne peut être considéré comme exerçant dans la cadre d'une convention de forfait jours et considéré comme un cadre autonome.


Sur les heures supplémentaires


Le salarié revendique le paiement d'heures supplémentaires exposant que sa charge de travail le contraignait à dépasser régulièrement les 10 heures quotidiennes alors que la société ne contrôlait pas la durée du travail, que le fait d'être en télétravail ne change pas la situation de surcharge dont il s'était pourtant plaint lors de l'entretien individuel de janvier 2022, que l'employeur avait donné une autorisation implicite d'effectuer des heures supplémentaires du fait de la charge de travail, qu'il produit outre des décomptes précis des heures revendiquées, des captures d'échanges de courriels envoyés tôt et tard, pendant les week-ends et les congés outre des attestations alors que celle de Mme [Ae] est en contradiction avec des mails échangés hors du temps de travail ordinaire. Il sollicite d'écarter son témoignage ainsi que ceux de M. [T] président, de M. [Af], directeur général et de M. [S] directeur commercial, qu'il justifie enfin de nombreux déplacements.


La société conteste les heures revendiquées, que le salarié était très sybillin sur sa démonstration de l'existence d'heures supplémentaires, que le décompte produit n'est corroboré par aucun éléments sérieux quelques captures d'écran illisibles ne pouvant suffire, qu'il ne s'est jamais plaint d'une quelconque surcharge ne justifiant aucunement sa demande.


Sur ce


La durée légale de travail effectif des salariés à temps complet est fixée à trente-cinq heures par semaine.

Selon l'article L. 3121-28 du code du travail🏛, toute heure accomplie au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent.


L'article L. 3121-36 du même code🏛 dispose qu'à défaut d'accord, les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente donnent lieu à une majoration de salaire de 25 % pour chacune des huit premières heures supplémentaires. Les heures suivantes donnent lieu à une majoration de 50 %.


Il résulte de la combinaison des articles L. 3171-3 et L. 3171-4 du code du travail🏛🏛, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.


La preuve est libre dans le cadre d'un litige prud'homal, et l'absence de mise en place par l'employeur d'un système objectif, fiable et accessible permettant de mesurer la durée du temps de travail journalier effectué par chaque travailleur, ne le prive pas du droit de soumettre au débat contradictoire tout élément de droit, de fait et de preuve, quant à l'existence ou au nombre d'heures accomplies.


Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.


Selon la chambre sociale de la Cour de cassation, le salarié peut prétendre « au paiement des heures supplémentaires accomplies soit avec l'accord au moins implicite de l'employeur, soit s'il est établi que la réalisation de telles heures a été rendue nécessaire par les tâches qui lui ont été confiées » (Cass. soc., 14 novembre 2018, n°17-16959⚖️). De façon générale, la jurisprudence considère que l'employeur a donné son accord implicite à la réalisation des heures lorsqu'il est établi qu'il avait connaissance de la réalisation de ces heures et n'a rien fait face à cette situation.


Le temps passé en télétravail se décompte de la même façon qu'en présentiel au siège de l'entreprise et sur les déplacements professionnels. Le fait que le salarié n'ait pas formé de demande en paiement d'heures supplémentaires ne lui interdit pas de former cette réclamation par la suite, le seul obstacle étant la prescription triennale de l'action.


M. [Aa] produit à la procédure des tableaux des heures revendiquées pour la période entre janvier 2020 et le 25 mai 2022, jour par jour avec mention des heures de début et de fin de travail précision des temps de pause déjeuner et mention des congés payés. Par ailleurs les nombreux courriels échangés entre le salarié et plusieurs interlocuteurs démontrent qu'il commençait souvent le travail vers 7 heures 30 et même avant et débordait parfois au-delà de 18 heures.


Il y a lieu de considérer que le salarié fournit des éléments suffisamment précis permettant à l'employeur d'y répondre en apportant les siens.


L'employeur conteste les tableaux fournis par le salarié mais ne produit pas d'élément fiable sur son temps de travail. La cour relève d'une part que la société n'avait pas mis en place de système de contrôle des heures réalisées alors que le salarié utilisait son ordinateur à domicile et en déplacements et qu'il aurait été possible de le mettre en œuvre. D'autre part dans l'hypothèse où les heures supplémentaires n'ont pas été expressément demandées par l'employeur, c'est ce dernier qui doit soit de prouver qu'il a refusé l'accomplissement de ces heures, soit que ces heures supplémentaires n'étaient pas indispensables à la réalisation des tâches confiées.


Or M. [Aa] occupait un poste de directeur commercial d'une société importante et le fait d'avoir prévu un régime de temps de travail et un compte épargne temps comme les cadres en forfait jours prouve qu'elle avait conscience que l'activité nécessitait la réalisation d'heures supplémentaires. Enfin la cour relève qu'il ne résulte pas des conclusions de l'employeur que celui-ci ait fait valoir que les heures de travail dont le paiement était réclamé n'auraient pas été accomplies avec son accord, au moins implicite, ou n'auraient pas été rendues nécessaires par les tâches confiées au salarié.


Le salarié qui demande à ce que soient écartées les attestations de l'employeur au motif du lien de subordination de leurs auteurs, n'apporte cependant aucun élément pertinent permettant de considérer qu'elles auraient été obtenus par une quelconque forme de contrainte exercée par la société. La cour rappelle pourtant qu'en matière prud'homale la preuve est libre, et que dès l'instant que la partie à qui sont opposés des témoignages a pu en contester la force probante, notamment en faisant valoir que les auteurs des attestations étaient soumis à un lien de subordination avec l'employeur, il appartient au juge saisi de cette contestation d'en apprécier souverainement la valeur et la portée. Le juge ne peut ainsi, par principe, dénier toute valeur probante à de telles attestations sans un examen préalable de leur contenu et des circonstances de l'espèce.


Si la société produit aux débats plusieurs attestations du directeur général, du directeur commercial du groupe, de la cheffe des ventes et de deux consultants extérieurs embauchés au moment du rachat de la société Skydome indiquant que le salarié n'avait pas réalisé des heures supplémentaires, qu'il était injoignable avant 8h30 le matin, coupait son téléphone pendant ses congés ou absences et prenait de longues pauses déjeuner, M. [Aa] verse aux débats de nombreux échanges de courriels envoyés pendant l'heure de la pause méridienne, vers 7h et même avant, en soirée et un SMS de Madame [Ae] cheffe des ventes, qui le 28 juin 2021 lui demande ce qu'il fait connecté à son PC alors qu'il est en vacances, ce qui contredit ses assertions. Par ailleurs la cour relève que ces témoignages, qui ne peuvent être écartés des débats du seul fait de l'existence d'un lien de subordination de leurs auteurs, ne font état que de considérations générales et ne sont pas circonstanciées et donc impropres à combattre les éléments suffisamment précis du salarié sur les heures supplémentaires revendiquées. Enfin le salarié embauché 18 ans auparavant n'avait jamais fait l'objet d'une quelconque sanction ou même remarque sur un non-respect de son temps de travail.


Il résulte de l'ensemble de ces développements et sans qu'il soit besoin d'ordonner une mesure d'instruction, que la cour a acquis la conviction, au sens du texte précité, que M. [Aa] a bien effectué les heures supplémentaires dont le paiement est réclamé. Le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande au titre des heures supplémentaires et la cour jugera désormais qu'il y a lieu de condamner la société à lui payer les sommes de 140 492,78 euros d'heures supplémentaires à 25%, puis à 50% au-delà de 8 heures hebdomadaires outre 14 049,28 euros de congés payés afférents, sommes qui ne sont d'ailleurs pas spécifiquement contestées par l'employeur à titre subsidiaire.


Sur la contrepartie obligatoire en repos


M. [Aa] sollicite le paiement d'une indemnité en réparation de la violation des durées maximales de travail et de la violation des durées minimales de repos faisant valoir qu'il a dépassé le nombre maximal du contingent annuel d'heures supplémentaires prévu par la convention collective fixé à 180 jours, ces heures supplémentaires n'ayant pas donné lieu à repos compensateur.


La société s'y oppose faute d'existence d'heures supplémentaires, que le salarié n'était pas disponible avant 9 heures le matin et n'était plus joignable après 18 heures.


Sur ce


Il résulte des articles L. 3121-11, L. 3121-22 du code du travail🏛🏛, dans leur rédaction issue de la loi 2008-789 du 20 août 2008🏛 qu'en plus des majorations prévues en contrepartie des heures supplémentaires, les salariés ont droit à une contrepartie obligatoire en repos pour toute heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent annuel. Selon l'article 18 IV de cette loi, la contrepartie obligatoire en repos, qui remplace le repos compensateur obligatoire, due pour toute heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent prévu aux deux derniers alinéas de l'article L. 3121-11 du code du travail dans la rédaction issue de cette loi, est fixée à 50% pour les entreprises de 20 salariés au plus, et à 100% pour les entreprises de plus de 20 salariés.


Le salarié qui n'a pas été en mesure, du fait de son employeur, de formuler une telle demande de repos, a droit à l'indemnisation du préjudice subi, laquelle comporte le montant d'une indemnité calculée comme si le salarié avait pris son repos, auquel s'ajoute le montant de l'indemnité de congé payé. L'article D. 3121-14 du code du travail🏛 prévoit ainsi que le salarié, dont le contrat de travail prend fin avant qu'il ait pu bénéficier de la contrepartie obligatoire en repos à laquelle il a droit, ou avant qu'il ait acquis des droits suffisants pour pouvoir prendre ce repos reçoit une indemnité en espèces dont le montant correspond à ses droits acquis. Cette indemnité a le caractère de salaire. Le volume du contingent annuel d'heures est fixé par accord collectif, ou à défaut, par décret.


En application de l'article L. 3121-30 du code du travail🏛, les heures imputées sur le contingent annuel d'heures supplémentaires sont celles accomplies au-delà de la durée légale. Toute heure supplémentaire effectuée au-delà du contingent conventionnel, ou du contingent réglementaire ouvre droit à une contrepartie obligatoire en repos. Il s'agit d'une règle d'ordre public. La durée, les caractéristiques et les conditions de prise de cette contrepartie obligatoire en repos sont fixées par accord collectif, ou à défaut par le code du travail. Il s'agit des heures de travail effectif ou assimilées comme telles par la loi au regard de la législation sur les heures supplémentaires.


En l'espèce la convention collective applicable du 20 novembre 2015 étendue par arrêté du 26 juin 2020 prévoit que le contingent annuel d'heures supplémentaires est fixé à 145 heures par an et par salarié et il est augmenté de 35 heures pour les salariés dont l'horaire n'est pas annualisé.


Compte tenu du nombre d'heures supplémentaires accomplies annuellement par le salarié entre 2020 et 2022 au-delà du contingent de 180 heures par an puisque son horaire n'était pas annualisé, sans que l'intéressé ne soit informé de son droit à contrepartie obligatoire en repos et sans qu'il ne prenne effectivement ce repos avant la rupture de son contrat de travail,


Il est dû au salarié la somme qu'il a exactement calculée, qui n'est d'ailleurs pas spécifiquement contestée par l'employeur à titre subsidiaire. Le jugement déféré sera infirmé de ce chef et la cour condamnera la société à verser à M. [Aa] la somme de 73 982,13 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos.


Sur la violation des durées maximales de travail et la durée minimale des repos


M. [Aa] soutient avoir été contraint de travailler au-delà des durées maximales du travail autorisées, soit plus de 10 heures par jour et 48 heures par semaine y compris pendant ses déplacements.


La société s'y oppose car le salarié travaillait en autonomie, dépassait rarement les 7 heures quotidiennes et pouvait au besoin compenser.


Sur ce


Selon l'article L.3121-18 du code du travail🏛, la durée quotidienne du travail effectif ne peut excéder 10 heures, sauf dans des cas particuliers détaillés. En application de l'article L.3121-5, la durée du travail hebdomadaire ne peut dépasser 48 heures. Cette limite d'ordre public s'apprécie nécessairement sur une semaine, peu important que le temps de travail soit organisé sur une période plus longue que la semaine.


La preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l'Union européenne et des durées maximales de travail fixées par le droit interne incombe à l'employeur.


En l'espèce, le seul constat du dépassement de la durée maximale de travail, en l'occurrence hebdomadaire, ouvre droit à réparation. La société échoue en effet à démontrer qu'elle a respecté les durées maximales du travail et que le salarié a bénéficié du repos auquel il pouvait prétendre. Au contraire, il est établi par les éléments du dossier et les développements qui précèdent que l'amplitude horaire a à plusieurs reprises dépassé la durée maximale hebdomadaire du travail sur la période considérée, M. [Aa] n'a pu bénéficier de la contrepartie obligatoire en repos à laquelle il avait droit du fait des heures supplémentaires accomplies.


Eu égard au déséquilibre ainsi nécessairement engendré au détriment de la vie personnelle et familiale du salarié et de son droit au repos, mais aussi de l'absence de tout élément produit par l'intéressé pour illustrer le préjudice allégué, et de nature à justifier le montant sollicité, il convient d'évaluer la réparation due pour réparer intégralement son préjudice à la somme de 500 euros. Le jugement sera infirmé en ce qu'il a intégralement débouté M. [Aa] de cette demande.


Sur le paiement des jours de RTT non pris


Le salarié sollicite le paiement de 6 jours de RTT repos sur le bulletin de paie de juillet 2022 qui mentionne 9 jours alors que la société n'en a réglé que 3 jours.


La société s'y oppose indiquant que le calcul est erroné dans son principe et son quantum, que le salarié a droit à un jour de RTT par mois de présence soit 12 jours par an, que M. [Aa] a pris 3 jours de RTT puis a été placé en arrêt maladie en mai 2022 perdant le droit au jour de RTT de présence en 2022.


Sur ce


La fiche de paie de juillet 2022 indique à la rubrique « jours RTT » le nombre de 12 acquis et 3 pris avec un solde de 9 jours. Si l'employeur soutient que le salarié n'aurait eu droit qu'à un jour de RTT pas mois de travail et qu'aucun jour ne serait dû en cas d'arrêt maladie, il n'en justifie pas, pas plus qu'il n'explique la raison pour laquelle l'avant avant dernière fiche de paie mentionne qu'il avait un solde de RTT acquis de 9 jours.


La dernière fiche de paie de septembre 2022 indique que la société a payé 3 jours de RTT alors qu'il en restait dû 9 jours. Il s'en déduit que 6 jours n'ont pas été réglés et la cour, par infirmation du jugement condamnera la société à verser à M. [Aa] la somme de 1'969,09 euros, somme dont le montant n'est pas spécifiquement contesté par l'employeur.


Sur le travail dissimulé


M. [Aa] argue qu'il a réalisé de nombreuses heures supplémentaires dont l'employeur avait connaissance ce qui caractérise l'intention frauduleuse.


La société conteste tout travail dissimulé s'agissant d'une demande purement opportuniste dans le but de battre monnaie, soulevant en outre l'absence de toute intention frauduleuse.


Sur ce


Il résulte des dispositions des articles L. 8221-5 et L. 8223-1 du code du travail🏛🏛, que le fait, pour l'employeur, de mentionner intentionnellement sur le bulletin de paie du salarié un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli est réputé travail dissimulé et ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaires. Ainsi, la dissimulation d'emploi salarié n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle.


En l'espèce, la cour a jugé que le salarié ne relevait pas du statut de cadre dirigeant alors qu'il était prévu au contrat de travail, et a, en conséquence de cette situation, a posteriori, retenu la réalisation de nombreuses heures supplémentaires au profit du salarié. Cette circonstance de l'absence d'heures supplémentaires mentionnées sur les bulletins de paie ne saurait donc suffire à établir la volonté délibérée de dissimuler l'emploi du salarié par la société, qui a pu se méprendre quant à la validité de la clause relative au statut de cadre dirigeant, étant souligné l'absence de toute remise en cause par l'intéressé au cours de la relation de travail, et même l'absence de toute réclamation pour des heures accomplies non rémunérées. Aucune intention frauduleuse de dissimulation durant la relation contractuelle n'est établie en l'état des moyens débattus et des pièces versées aux débats, de sorte qu'il convient, par confirmation du jugement, de le débouter de ce chef de prétention.


Sur le harcèlement moral


M. [Aa] expose avoir été victime de harcèlement moral qui a pris les formes suivantes :


- la modification unilatérale de ses fonctions suite au rachat de la société Skydome par le groupe Kingspan, étant placé sous la subordination hiérarchique, non plus du directeur général, mais de M. [S], directeur commercial qui était son homologue chez Kingspan, cette rétrogradation entrainant le retrait de certaines fonctions et la perte d'autonomie notamment sur le recrutement et le licenciement, d'organisation des projets dans lesquels M. [S] s'immisçait dans son travail en cherchant à l'écarter, passant de directeur commercial à responsable commercial simple cadre intermédiaire, son poste étant vidé de sa substance sans qu'il ait donné son accord à ces modifications du contrat de travail


- la mise à l'écart orchestrée par M. [S] qui ne lui transmettait pas les informations essentielles sur des projets


- la dégradation des conditions de travail notamment en termes de surcharge en dépit de ses alertes travaillant plus de 48 heures par semaine et 10 heures par jour, qu'il justifie de courriels envoyés à des heures tardives ou très tôt et pendant ses vacances ce qui contredit les attestations de Mme [Ae] et de M. [Af] dont la sincérité est sujette à caution du fait du lien de subordination, que les déplacements représentaient entre un tiers et la moitié des jours de travail justifiés par les notes de frais alors que le nombre de commerciaux à gérer passait de 22 à 40 qu'il devait suivre individuellement et collectivement selon l'exigence de M. [S] qui n'a pas pris en compte ses alertes sur la surcharge de travail


- les pressions subies de M. [S] pour asseoir son autorité et le rabaisser corrélativement, qu'il devait solliciter à plusieurs reprises sa hiérarchie pour obtenir des véhicules pour ses commerciaux, devait répondre à des demandes urgentes formulées le matin avec réponse exigée pour le midi alors qu'aucun impératif n'était invoqué.


M. [Aa] invoque la dégradation de son état de santé, faisant état d'un épuisement professionnel ayant entraîné divers maux et un arrêt de travail à compter du 27 mai 2022 renouvelé jusqu'à sa sortie des effectifs et un suivi avec prescription d'anxiolytiques alors que dans le même temps depuis 2015 il n'avait pu bénéficier d'une visite médicale du travail quand bien même il avait alerté la société de son état lors de l'entretien individuel du 17 janvier 2022.


La société conteste tout harcèlement moral et rétorque qu'elle n'a fait qu'exercer son pouvoir de direction normal, qu'il n'appartenait pas au salarié de critiquer les process mis en place mais de les appliquer, qu'il a été remplacé par un nouveau directeur commercial avec exactement le même périmètres d'exercice ; qu'il a été associé à l'élaboration de la structure commerciale lors du rachat avec le concernant une extension de ses compétences sur les services commerciaux Skydome/KLA, que le recrutement était soumis aux directives de la direction générale alors qu'un salarié a été licencié en raison de ses faibles résultats. L'employeur argue que M. [S] s'assurait du respect des exigences en termes de suivi des commerciaux et des plans d'action, que les standards demandés étaient tout à fait normaux mais que M. [Aa] n'en tenait aucun compte, ses fonctions et tâches étant inchangées mais que les insuffisances du salarié sont apparues grâce aux process mis en place, qu'il n'avait pas été surchargé, organisant son travail comme il l'entendait et étant peu disponible, les seuls déplacements étant compensés et en nombre insuffisant, que les captures d'écran produites sont illisibles, qu'il n'avait pas demandé à bénéficier d'une visite médicale du travail ni informé d'une quelconque difficulté. La société souligne que les insuffisances avaient été pointées dès l'entretien de mars 2017, avec une appréciation moyenne, qu'il avait bénéficié d'un coaching de M. [X] et [S] alors qu'il n'avait jamais demandé de formation spécifique et que le process nouveau était ordinaire sans nécessité particulière, que les courriels échangés ne sont pas représentatifs d'une activité importante, qu'il n'est pas établi une quelconque pression.


Sur ce


Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail🏛, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.


Selon l'article L. 1154-1 du même code🏛, dans sa version applicable à la cause, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L.1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.


Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.


Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail ; que, dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement et que, sous réserve d'exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et si l'employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement.


Si un seul fait unique est matériellement établi, il n'est pas constitutif d'un harcèlement moral.


Sur le premier fait


L'employeur conteste la matérialité des faits exposés par le salarié et soutient qu'il est demeuré directeur commercial de la société Skydome en se voyant attribuer des responsabilités supplémentaires au niveau du groupe, qu'il a été associé à toutes les évolutions, qu'il ne justifie pas d'une surcharge de travail alors qu'il n'effectuait que très peu de visites de terrain et qu'il ne faisait pas l'objet d'exigences irréalistes.


Or, s'il a été retenu l'existence de directives incompatibles avec une large autonomie telle que prévue à l'article L 3111-2 du code du travail, la seule lecture comparative des organigrammes de la société Skydome avant son rachat et du groupe Kingspan après le rachat ne permet pas d'établir les conditions dans lesquelles M. [Aa] exerçait ses fonctions de directeur commercial depuis sa nomination le 1er avril 2017 et, par là même, une modification des conditions d'exercice de ses fonctions et une perte d'autonomie compte-tenu des changements survenus après le rachat.


Il ne peut être déduit l'existence d'une rétrogradation du salarié dans la hiérarchie de la société Skydome à l'appui de l'organigramme du groupe Kingspan qui, de surcroît, étaye les dires de l'employeur sur le fait que M. [Aa] est demeuré directeur commercial de la société Skydome avec l'attribution de responsabilités supplémentaires liées aux ventes indirectes du groupe.


Si M. [Aa] était placé sous l'autorité directe de M. [Af], directeur général, et que les changements survenus du fait du rachat ont placé M. [S] comme intermédiaire hiérarchique, ce seul fait ne permet pas d'établir une modification de ses fonctions de directeur commercial de la société Skydome, ni une perte d'autonomie, ni une rétrogradation.


Sur le second fait


S'agissant d'une mise à l'écart orchestrée par M. [S], le salarié produit un courriel de M. [S] envoyé le 24 mai 2022 à Mme [Ae], cheffe des ventes de la société Skydome, sollicitant de sa part des critiques et des modifications sur l'ébauche d'un projet dénommé « Belgique » sans placer M. [Aa] parmi les destinataires.


Toutefois, les captures d'écran des éléments envoyés de sa boîte courriel permettent de relever que, le matin du 24 mai 2022, le salarié a adressé à Mme [Ae] un courriel portant pour objet « point Belgique » et contenant un lien pour la participation à une réunion sur ce sujet par l'intermédiaire du logiciel Teams.


Tandis que le salarié n'évoque aucun autre fait qui relèverait selon lui d'une mise à l'écart orchestrée par M. [S], ces éléments démontrent, au contraire, que, pour le projet « Belgique », M. [Aa] était intégré aux échanges du 24 mai 2022.


Sur le troisième fait


Par ailleurs, il a été retenu que M. [Aa] a accompli un certain nombre d'heures supplémentaires.


Les états de frais produits par l'employeur pour justifier des nuitées d'hôtel pour la période d'avril 2021 à octobre 2022 permettent de relever que le salarié réalisait chaque mois entre 2 et 4 nuitées hors de son domicile.


Il produit lui-même des captures d'écran de sa boîte courriel ainsi que des courriels de janvier à mai 2022 desquelles il s'évince qu'il envoyait des messages professionnels tôt le matin ou tard le soir, un organigramme de la direction commerciale justifiant du fait qu'il encadrait une équipe de 20 commerciaux itinérants et 20 commerciaux sédentaires, ainsi qu'une note interne du groupe Kingspan définissant, pour la période 2022/2024, les modalités et les fréquences du suivi collectif et individuel des commerciaux.


Or, si M. [Aa] expose à juste titre que l'accompagnement des commerciaux itinérants représente une charge de travail correspondant à 40 jours de travail pour un trimestre d'environ 60 jours ouvrés et que le suivi bimensuel représente 20 heures de travail, ces éléments, même à considérer que les tâches ainsi exposées ne pouvaient pas être réalisées de manière concomitante, ne permettent pas à eux seuls d'établir une charge excessive de travail.


Alors que M. [Aa] n'apporte aucun autre élément permettant d'apprécier la quantité de travail associée à d'autres missions qui lui étaient confiées, il ne peut être établi un lien entre, d'une part, l'accomplissement d'heures supplémentaires, les heures d'envoi de certains courriels, le nombre de déplacements réalisés, et, d'autre part, une surcharge de travail qui lui aurait été imposée par l'employeur.


Sur le quatrième fait


Si M. [Aa] soutient que M. [S] a exercé une pression à son égard en ne répondant pas à ses demandes sur l'affectation des véhicules, il est observé que le courriel du 17 mai 2022 relève, au contraire, d'une réponse du salarié à M. [S] et qui n'appelait pas à une réponse de sa part.


De plus, le courriel de M. [Af] du 25 mai 2022, l'informant qu'il souhaitait le rencontrer physiquement le 30 mai 2022 et le remerciant de se rendre impérativement disponible, est rédigé sur un ton neutre et, nonobstant l'absence de raison exprimée sur l'objet de cette rencontre, ne permet pas de relever une quelconque forme de pression exercée à son encontre.


Seul demeure le courriel de M. [S] du 13 mai 2022 à 8h06 exigeant de la part du salarié qu'il appelle tous les commerciaux pour réaliser un point « précis » pour obtenir, « avant midi », des données sur les affaires en cours. Le court délai imposé au salarié combiné aux exigences sur la précision des données qu'il devait récolter s'apparente bien à une pression.


Toutefois, un fait unique ne pouvant caractériser un harcèlement moral, c'est à bon droit que les premiers juges ont débouté M. [Aa] de sa demande de dommages et intérêts à ce titre.


Sur le manquement à l'obligation de sécurité par l'employeur


M. [Aa] relate avoir été surchargé de travail suite au rachat de la société par le groupe Kingspan, son équipe passant de 22 à 40 personnes alors que M. [S] lui a imposé des process de suivi augmentant considérablement sa charge de travail ; que la société informée n'a pas pris de mesures pour le préserver, cette situation ayant entraîné un arrêt de travail à compter du 27 mai, ininterrompu jusqu'à son départ de la société en septembre 2022. Il précise que l'employeur n'a pas assuré de suivi auprès de la médecine du travail invoquant l'absence de visite médiale en 7 ans et sans l'informer de la possibilité d'organiser lui-même un rendez-vous, que sa demande en réparation du préjudice né de cette absence est fondée.


La société s'oppose à cette demande qui fait double emploi avec celle visant à obtenir un licenciement nul.


Sur ce


L'article L. 4121-1 du code du travail🏛 dispose : « L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent :


1° Des actions de prévention des risques professionnels ;


2° Des actions d'information et de formation ;


3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.


L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes ».


L'article R 4624-10 du code du travail🏛 dispose que tout travailleur bénéficie d'une visite d'information et de prévention, réalisée par l'un des professionnels de santé mentionnés au premier alinéa de l'article L. 4624-1 dans un délai qui n'excède pas trois mois à compter de la prise effective du poste de travail.


Le salarié doit aussi bénéficier d'une visite médicale régulière au minimum tous les 5 ans.


L'obligation de sécurité de l'employeur est en cause lorsqu'il manque à cette obligation, qu'il ne justifie pas avoir pris les dispositions nécessaires de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail du salarié restaient raisonnables et assuraient une bonne répartition dans le temps du travail et donc à assurer la protection et la santé du salarié (Soc., 2 mars 2022, n°20-16.683⚖️, publié). Il doit alors réparer le préjudice subi.


La cour a précédemment jugé que le salarié n'avait pas été surchargé de travail et a écarté une augmentation considérablement de sa charge de travail.


En l'espèce, l'employeur ne conteste pas l'absence de visite médicale alléguée et n'est pas en mesure d'établir qu'il a respecté son obligation de sécurité, alors qu'il lui appartient de justifier qu'il est étranger à tout manquement. Il y a lieu de constater en conséquence que l'employeur ne démontre pas qu'il a fait procéder ni assuré l'effectivité des visites médicales.


Cependant, il appartient au salarié de démontrer que l'absence de visite aurait engendré le préjudice dont il demande réparation. En l'espèce, M. [Aa] n'invoque aucune inaptitude à l'emploi occupé au cours de l'exécution de son contrat de travail, s'il verse aux débats une ordonnance pour un bilan sanguin du 27 mai 2022 et un courrier rédigé par son médecin traitant à destination d'un autre praticien pour une consultation cardiologique dans un contexte lié au travail, c'est sur les informations fournies par le salarié que le médecin a indiqué cette précision. Il n'est en l'état pas possible de relier l'orientation vers un cardiologue à la défaillance de l'employeur sur la visite médicale.


A défaut de démonstration d'un préjudice à ce titre, il y a lieu de confirmer le jugement querellé et de débouter le salarié de sa demande de dommages et intérêts.


Sur les frais relatifs au télétravail et l'occupation d'une pièce de la maison


Le salarié sollicite le paiement une indemnité d'occupation pour l'utilisation d'une chambre de son logement qu'il a dû transformer en bureau à des fins de télétravail.


La société réplique que le salarié avait le choix de télétravailler sans obligation de sa part, qu'il disposait d'un ordinateur portable professionnel et n'avait pas de matériel à stocker à son domicile nécessitant une pièce pour le faire.


Sur ce


Aux termes de l'article L. 1222-9, alinéa 1er du code du travail🏛, « le télétravail désigne toute forme d'organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l'employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon volontaire en utilisant les technologies de l'information et de la communication.»


Par principe, la Cour de cassation considère que le salarié peut prétendre à une indemnité au titre de l'occupation de son domicile à des fins professionnelles dès lors qu'un local professionnel n'est pas mis effectivement à sa disposition.


Cependant si le travail du salarié l'amenait de façon régulière à effectuer des déplacements, ni le contrat de travail ni les avenants successifs n'ont prévu la réalisation du travail par le télétravail. Le salarié disposait d'un bureau au sein de la société Skydome et le télétravail a été un choix de sa part. Dans ces conditions il ne peut revendiquer une prise en charge des frais liés au télétravail par le versement d'une indemnité.


La cour confirmera le débouté de cette demande.


Sur le non-respect des règles relatives au droit d'accès aux données personnelles prévues au RGPD


M. [Aa] expose que le 12 juillet 2022 son conseil a sollicité de la société qu'elle lui communique dans le délai d'un mois les données personnelles le concernant, qu'après avoir donné un accord de principe elle a répondu par la voix de son conseil qu'elle lui transmettrait directement les informations demandées mais qu'il a dû déposer une plainte sur le site de la CNIL faute d'avoir obtenu ces informations. Il ajoute n'avoir reçu que partiellement les documents demandés notamment pas son agenda alors que la société n'a pas justifié d'une raison légitime pour s'y opposer.


La société rétorque que la demande a été faite de façon opportune pendant les vacances et visait à pallier à sa carence probatoire, qu'il a obtenu une réponse par lettre officielle du 15 septembre 2022 avec 385 pièces, qu'il ne justifie d'aucun manquement, qu'elle ne peut produire des pièces dont elle ne dispose pas.


Sur ce


Le règlement n° (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 (ci-après RGPD) d'application directe depuis lmai5 mai 2018 et applicable au traitement effectué dans le cadre des activités d'un établissement du responsable de traitement ou du sous-traitant se situant sur le territoire de l'UE, prévoit en son article 15 un droit d'accès à la personne concernée par le traitement de données personnelles en disposant notamment 'La personne concernée a le droit d'obtenir du responsable du traitement la confirmation que des données à caractère personnel la concernant sont ou ne sont pas traitées et, lorsqu'elles le sont, l'accès auxdites données à caractère personnel ('). Le responsable du traitement fournit une copie des données à caractère personnel faisant l'objet d'un traitement. Le responsable du traitement peut exiger le paiement de frais raisonnables basés sur les coûts administratifs pour toute copie supplémentaire demandée par la personne concernée. Lorsque la personne concernée présente sa demande par voie électronique, les informations sont fournies sous une forme électronique d'usage courant, à moins que la personne concernée ne demande qu'il en soit autrement'.


En application de ces textes, tout salarié ou ancien salarié justifiant de son identité doit pouvoir demander à son employeur (ou ancien employeur) l'accès à toutes les données personnelles ayant été collectées -en particulier les échanges de courriels et conservées'; l'employeur doit accéder à sa demande dans un délai d'un mois. En l'espèce, la cour relève que la société ne conteste pas être en possession des courriels échangés avec le salarié.


Il est justifié par le salarié qu'il a formé, par l'intermédiaire de son conseil, une demande écrite d'accès à ces enregistrements le 12 juillet 2022 auprès de l'employeur en listant


- tous les mails, documents ou messages de quelque type que ce soit échangés sur l'ensemble des supports de la société entre la direction et lui-même depuis 3 ans

- toutes les données personnelles le concernant au sein des systèmes, applications et logiciels de la société

- tous les documents, certificats, dossiers médicaux etc' incluant les informations personnelles identifiables le concernant traités par la société

- tous les documents concernant son recrutement, son historique de carrière, l'évaluation de se compétences professionnelles, notamment ses entretiens professionnels, son agenda'


La société a répondu par courrier du 19 juillet 2022 en indiquant qu'elle allait transmettre les documents demandés dans les meilleurs délais et au plus tard dans le mois.


Le 22 août 2022 le cabinet d'avocat de la société indique que la société allait transmettre directement les données réclamées. Faute de transmission, M. [Aa] a formé une réclamation auprès de la Cnil qui a accusé réception le 1er septembre 2022 et le 15 septembre le conseil de la société a adressé une farde de 385 pages en réponse à la demande.


Faute pour le salarié de déterminer précisément la liste des documents qui n'auraient pas été communiqués et si les éléments manquants dont la communication est demandée ne sont pas de nature à porter atteinte à la vie personnelle d'autres salariés, de justifier alors que sa demande était indispensable à l'exercice du droit à la preuve et proportionnée au but poursuivi, et surtout, faute de preuve d'un préjudice résultant d'une absence de communication de certains documents, la cour par confirmation du jugement, le déboutera de sa demande.


Sur la rupture du contrat de travail


Sur le licenciement


M. [Aa] sollicite de la cour qu'elle juge le licenciement nul en raison du harcèlement moral qu'il a subi ; subsidiairement qu'il soit jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse faisant valoir que les accusations de l'employeur en ce qu'il aurait fait exécuter ses tâches par Mme [Ae] sont fausses, que les attestations produites émanent du président de la société, du directeur général, du directeur commercial et de la secrétaire sont dénuées de toute objectivité et doivent être écartées des débats, ce d'autant qu'elle sont contredites par de nombreuses pièces, qu'il envoyait des mails dès 6h20 ce qui contredit le fait qu'il n'était disponible avant 8 heures 30 - 9 heures car il promenait son chien, qu'elle était devenue chef de ventes selon l'organigramme et ne peut soutenir qu'elle ne devait pas s'occuper des facturations, étant ajouté qu'elle est toujours sous lien de subordination. Il fait valoir qu'ayant été salarié pendant 18 ans il n'a pu faire illusion si longtemps en s'appuyant sur ses collaborateurs, qu'en réalité suite au rachat il était en doublon avec M. [S], directeur commercial de Kingspan et que la direction a préféré garder ce dernier en cherchant à se séparer de lui d'abord en le harcelant puis en le licenciant, que les attestations de Messieurs [X] et [U] sont en contradiction avec les pièces qu'il verse, que ses évaluations étaient satisfaisantes y compris en juin 2020, son management ayant été jugé adapté, l'entretien du 17 janvier 2022 était aussi positif ciblant des axes de progrès sans difficulté majeure et alors qu'il percevait des primes exceptionnelles jusqu'à deux mois avant le licenciement en atteignant ses objectifs. M. [Aa] invoque l'absence de formation après le rachat alors que l'équipe avait été doublée et que la nouvelle direction avait mis en place des process nouveaux et imposé un nouveau logiciel, que les fonctions visées dans le courrier de licenciement n'ont pas été acceptées aucun avenant au contrat de travail n'ayant été régularisé, qu'il s'était vu confié le responsabilité d'une équipe sédentaire à [Localité 5] et une équipe d'itinérants commerciaux imposant de nombreux déplacements sur lesquels M. [S] imposait un suivi collectif et individuel et des demandes urgentes de dernière minute. Il précise que l'absence de planification des tournées avec ses commerciaux n'est pas reprise dans la lettre de licenciement, qu'il avait mis en place des animations à intervalle court, qu'en tout état de cause quand bien même elles n'auraient pas été réalisées de façon hebdomadaire cela n'a pas eu d'influence sur le fonctionnement de l'entreprise, que sur le retard sur les prévisions de vente il n'était pas le seul en retard ce qui n'expliquait pas la surcharge, que le reproche sur la société [A], client de Kingspan, n'est pas fondé car il a agi sous le contrôle de M. [S] et selon ses instructions.


La société réplique que lors du rachat par la société Kingspan le rôle de M. [Aa] devait être étendu à la direction commerciale, avec une équipe plus importante et une promotion salariale, que deux consultants extérieurs ont remarqué le peu d'investissement professionnel du salarié qui déléguait beaucoup à Mme [Ae] et ne voulait pas changer ses habitudes notamment en n'étant qu'une seule journée hebdomadaire sur le terrain avec les commerciaux au lieu des trois jours demandés, qu'il était déjà directeur commercial et que ses tâches et fonctions sont restées inchangées, que des réunions ont été organisées en 2021 afin de le coacher, que lors de la réunion fin 2021 pour fixer les objectifs 2022 il s'est placé en retrait laissant Ag [Ae] et [B] effectuer l'essentiel du travail. Elle expose qu'en janvier 2022 une réunion avait déterminé les règles de suivi commercial avec indicateurs de performance, suivi individuel et collectif des commerciaux et mise en place des actions à intervalle court que M. [Aa] n'a quasiment rien effectué de ce qui était demandé malgré les relances de M. [S], limitant le nombre d'animation à intervalle court à toutes les deux semaines ce qui est insuffisant, que M. [S] a lancé un ultime plan d'action le 10 mai 2022, en vain, ajoutant que le salarié n'a pas géré d'importants clients comme la société [A]. L'employeur précise que le salarié était placé sous la hiérarchie de M. [Af], que M. [S] ne faisait que son travail en le poussant à se prendre en mains, que M. [Aa] avait accepté de prendre en charge les commerciaux de KLA ce qui faisait passer l'équipe de 9 à 19 et non à 40 comme il le prétend, que l'ensemble du suivi commercial aurait dû lui prendre 70 % du temps de travail mais qu'il n'avait pas engagé les actions élémentaires dévolues à son poste de directeur commercial alors qu'il n'y avait pas eu de modifications de ses fonctions et de ses tâches, n'étant pas en doublon avec M. [S], que si ses objectifs étaient réalisés son poste ne se résumait pas à cela, étant précisé que son inaction commençait à avoir des conséquences au niveau des commandes en mai 2022.


Sur ce


En application des articles L. 1232-1, L. 1232-6 et L. 1235-1 du Code du travail🏛🏛🏛, lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception qui doit comporter l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur.


Tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. Les motifs énoncés dans la lettre de licenciement fixent les termes du litige et il appartient au juge d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur en formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute persiste, il profite au salarié.


L'insuffisance professionnelle s'entend comme l'incapacité manifeste du salarié à exécuter son travail de façon satisfaisante l'emploi correspondant à sa qualification, sans que cela corresponde à une défaillance passagère, alors que l'employeur lui a donné tous les moyens pour qu'il puisse faire ses preuves en temps et en formation.


Pour constituer une cause légitime de rupture, l'insuffisance professionnelle doit être établie par des éléments objectifs, constatée sur une période suffisamment longue pour ne pas apparaître comme passagère ou conjoncturelle, et être directement imputable au salarié et non la conséquence d'une conjoncture économique difficile ou du propre comportement de l'employeur. Son appréciation relève du pouvoir de direction de l'employeur, mais doit reposer sur des faits précis, matériellement vérifiables, et établis.


La société a fondé le licenciement sur 3 types de reproches caractérisant l'insuffisance professionnelle, à savoir :


- les non-respect des modalités attendues en termes de process suite au rachat de la société Skydome


- l'absence de prévisions de ventes à 3 mois comme demandé


- les carences sur le dossier [A] ayant entrainé un impact financier important.


A titre liminaire la cour rappelle que le juge ne peut, par principe, dénier toute valeur probante à une attestation émanant d'un salarié soumis à un lien de subordination avec son employeur sans un examen préalable du contenu de l'attestation et des circonstances de l'espèce. La sincérité du témoignage d'un salarié au profit de son employeur peut être discutée compte tenu de son état de subordination et de dépendance économique mais il ne doit pas être considéré, en soi, comme servile ou mensonger, dès lors qu'aucun élément objectif ne permet de l'affirmer et que le salarié n'apporte pas d'élément permettant de considérer que ces témoignages ont été extorqués à leur auteur ou ont été suscités par la peur.


L'employeur produit aux débats 4 attestations dont le salarié demande à ce qu'elles soitent écartées des débats.


Le témoignage de Mme [Ae] sur le manque de disponibilité du salarié est contredit par des pièces objectives produites, notamment les nombreux courriels du salarié envoyés tôt le matin, dans l'heure de la pause méridienne et en soirée outre celui adressé par Mme [Ae] elle même qui demande au salarié pourquoi il se connecte à une reunion alors qu'il est en congés.


La cour a précédement jugé que M. [S] n'avait pas harcelé M. [Aa] mais lui avait une fois demandé à très court laps de temps de fournir des informations sur la situation des commerciaux.


La cour observe que M. [T] est le PDG de la société Kingspan. Il est donc l'employeur de M. [Aa] et ne peut attester de façon objective. En revanche, rien ne permet de mettre en doute la sincérité des témoignages de M. [S] et de M. [Af] directeur général produits par l'employeur, qu'il n'y a donc pas lieu de les écarter.


Sur le premier élément


Les témoignages de Messieurs [V] et [U] ne précisent ni la durée de leur mission ni le but de leur embauche, si ce n'est pour une tâche provisoire qui n'est pas très claire, s'agissant selon les conclusions de l'employeur d'apporter une vision extérieure sur les synergies possibles entre les différentes sociétés. Faute de définir la durée de la mission de ces consultants, leurs témoignages ne permettent pas de déduire que le comportement décrit est celui habituellement adopté par le salarié ; par ailleurs ils comportent des appréciations de valeur générales sans rapporter de faits précis, leur contenu reprenant essentiellement l'argumentaire de la lettre de licenciement. M. [V] souligne que le salarié était très peu présent sur le terrain à raison d'une journée par semaine alors que la société demandait 3 jours. Or cette exigence est en contradiction avec la note interne suite à une réunion en janvier 2022, sur la fréquence des tournées reprise en pièce 16, qui exige que le responsable commercial tourne 2 jours par trimestre minimum avec chaque commercial itinérant qui sont au total 19 pour les deux sociétés.


Le témoignage de M. [U] est aussi contredit en ce qu'il affirme que le salarié n'atteignait pas ses objectifs puisque les pièces produites démontrent que tel n'était pas le cas.


M. [Af] atteste qu'au moment du rachat il était très content de la possibilité offerte à M. [Aa] de voir ses responsabilités étendues et de continuer à progresser mais qu'il s'est très vite apparu qu'il était incapable de prendre en charge le moindre plan d'action commercial, qu'il a tenté à de nombreuses reprises de lui faire prendre le chemin d'un cursus de véritable directeur commercial, mais il n'y arrivait pas ou ne souhaitait pas le faire ; qu'il n'a pas fait les routines AIC attendues d'une demi-heure par semaine avec chaque commercial et 30 minutes de visio avec toute l'équipe pour chaque société.


M. [S] atteste que fin 2021 des lacunes de management de suivi commercial et d'investissement ont commencé à apparaître, que lorsqu'il était sollicité par un membre de son équipe il répondait « fais comme tu le sens », qu'il s'engageait sur les activités mais ne les tenait pas, qu'il ne suivait pas le plan validé.


L'employeur demandait en sus des tournées sur le terrain avec les commerciaux, un contact bi-mensuel pour chaque commercial de 30 minutes avec un suivi sur les indicateurs de performance, le nombre de visites, le nombre de prospects et la transformation, le suivi des clients et le suivi du pipe. Il était enfin demandé un bilan trimestriel avec chaque commercial avec point d'étapes et annuellement un bilan chiffré avec axes de progrès et challenge pour l'année suivante. Ces nouvelles modalités de fonctionnement étaient donc connues dAa M. [J].


A compter de février 2022, M. [S] a relancé le salarié à plusieurs reprises pour qu'il définisse le planning des tournées en réexpliquant le cahier des charges sur ce qui était demandé en joignant des tableaux vierges, il lui reproche un manque de suivi sur certaines actions, le 10 mai 2022 M. [S] lui indiquant qu'il n'est plus possible de continuer comme çà, en lui imposant un plan d'action avec créations de groupes Whatsapp pour les deux sociétés et des réunions régulières à jour et heure fixes avec les commerciaux.


Sur le second élément


Les échanges de courriels démontrent que le 6 décembre 2021 M. [S] a demandé à plusieurs salariés dont M. [Aa] de remplir des fichiers de prévision pour les commandes en utilisant un certain type de fichiers de prévisions de vente, que le 10 janvier M. [S] relance le salarié qui n'avait pas retourné les documents et précise qu'il a du « bricoler » quelque chose pour la validation, rappelant la nécessité de réunions hebdomadaires pour que chaque commercial donne la tendance et celle de demander de remplir des fichiers en vue de prévoir les chantiers à venir pour lancer la production. Les 25 février et 7 mars M. [S] le relance encore. Or les prévisions sont déterminantes pour fixer un indicateur de charges dans la perspective de production dans l'atelier qui reste dans l'expectative et ne sait pas comment programmer le travail, ce dont s'inquiétait M. [E] responsable de production.


Sur le troisième élément


Le 9 mars 2022 M. [I] de la société Kingspan informe M. [Aa] que la société [A] attend la régularisation de sa BFA 2021 avec paiement en chèque. Le 23 mars 2022 M. [Aa] demande à un commercial de lui indiquer le montant du BFA qui lui répond le lendemain. Le salarié informe M. [S] le 1er avril du montant de BFA et propose une livraison de matériel en équivalent ce qui est refusé par le supérieur hiérarchique suivant courriel du 13 avril 2022. Mais ce n'est que le 16 mai que M. [Aa] demande de lancer le règlement qui interviendra quelques jours après le 18 mai sur information communiquée par M. [S] à la société [A].


Ainsi le paiement a trainé, ce qui a impacté le client. Toutefois il n'est pas établi que ce retard a eu pour conséquence la perte d'un gros marché.


M. [Aa] occupait le poste de directeur commercial depuis 17 ans lorsque la société Skydome a été rachetée par la société Kingspan. Les consignes qui lui étaient données pour suivre les process applicables dans le groupe Ah n'étaient pas complexes et ne requéraient pas une formation particulière. Il s'agissait simplement de suivre les modalités demandées avec la nécessité de remplir des tableaux de suivi, dont M. [S] avait envoyé le modèle, et d'organiser des réunions bi mensuelles avec les commerciaux itinérants et de les accompagner sur le terrain de façon régulière.


Le poste occupé a été le même avant et après le rachat, si le nombre de l'équipe de commerciaux à suivre a été doublée, aucun avenant n'était nécessaire pour modifier le nombre de collaborateurs à encadrer, le contrat de travail initial ne prévoyait pas de nombre et les tâches étaient inchangées.


Il est constant que le salarié avait jusqu'au rachat de la société Skydome donné satisfaction à son poste de directeur commercial, ses évaluations le démontrant. Il atteignait ses objectifs y compris en 2022. Mais ce n'est pas en raison de son manque de résultat que la société l'a licencié, l'insuffisance professionnelle invoquée concerne l'absence d'application des process mis en place à compter du rachat.


Au regard de l'ensemble de ces éléments, l'employeur rapporte la preuve de l'insuffisance professionnelle du salarié justifiant ainsi une cause réelle et sérieuse du licenciement.


La cour confirmera le jugement qui a dit le licenciement fondé et a débouté M. [Aa] de sa demande en licenciement infondé et en ses demandes indemnitaires subséquentes.


Sur les bulletins de salaire


La cour ordonne la remise au salarié les bulletins de salaire rectifiés suite à la prise en compte des heures supplémentaires avec la mention d'un salaire mensuel de 14 752,36'euros, non spécifiquement contesté par l'employeur. Toutefois il n'est pas nécessaire à ce stade d'assortir cette mesure d'une astreinte.


Sur les frais irrépétibles et les dépens


Les dispositions de première instance seront infirmées.


Succombant en partie, la société sera condamnée à verser à M. [Aa] en application de l'article 700 du code de procédure civile une somme que l'équité commande de fixer à 2500 euros pour l'ensemble de la procédure.


La société sera condamnée aux entiers dépens de l'ensemble de la procédure.



PAR CES MOTIFS


La cour, statuant contradictoirement et en dernier ressort,


Infirme le jugement du conseil de prud'hommes de Laon du 15 mars 2024 sauf en ce qu'il a :


* débouté M. [Aa] de sa demande au titre du travail dissimulé


* débouté M. [Aa] de sa demande au titre du harcèlement moral


* débouté M. [Aa] de sa demande au titre du manquement à l'obligation de sécurité


* débouté M. [Aa] de sa demande au titre des frais de télétravail


* débouté M. [Aa] de sa demande au titre du non-respect de l'accès aux données RGPD


* dit le licenciement de M. [Aa] fondé sur une cause réelle et sérieuse,


* débouté M. [Aa] de ses demandes indemnitaires en réparation d'un licenciement infondé


Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,


Condamne la société Skydome à verser à M. [Ab] [Aa] les sommes de :


- 140 492,78 euros d'heures supplémentaires outre 14049,20 euros au titre des congés payés afférents


- 73 982,13 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos


- 500 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice né du non-respect de la durée du travail


- 1 969,09 euros de RTT


Condamne la société Skydome à verser à M. [Ab] [Aa] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour l'ensemble de la procédure.


Rejette les demandes plus amples ou contraires.


Condamne la société Skydome aux dépens de l'ensemble de la procédure.


LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.

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