Jurisprudence : Cass. crim., 14-01-2025, n° 24-84.110, F-B, Rejet

Cass. crim., 14-01-2025, n° 24-84.110, F-B, Rejet

A19716RG

Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2025:CR00145

Identifiant Legifrance : JURITEXT000051151234

Référence

Cass. crim., 14-01-2025, n° 24-84.110, F-B, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/115026740-cass-crim-14012025-n-2484110-fb-rejet
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Abstract

En l'absence de toute captation de données stockées sur des serveurs, l'interception de flux échangés par l'intermédiaire de réseaux de télécommunication ne relève pas des dispositions de l'article 706-102-1 du code de procédure pénale. C'est à bon droit qu'une chambre de l'instruction écarte le moyen de nullité tiré de la méconnaissance des règles résultant du texte précité en retenant que le recueil des flux de données échangés entre plusieurs serveurs informatiques utilisés par l'exploitant d'un service de messagerie cryptée ne relève pas de la technique spéciale qu'il prévoit mais d'une mesure d'interception de correspondances émises par la voie des communications électroniques en application des articles 100 et suivants du code de procédure pénale


N° A 24-85.955⚖️ F-B
V 24-84.110
B 24-84.116
N° 00145


ODVS
14 JANVIER 2025


REJET
IRRECEVABILITE
DECHEANCE
M. BONNAL président,


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 14 JANVIER 2025



M. [R] [J] a formé des pourvois contre les arrêts n° 396 (pourvoi n° 24-84.110) et 397 (pourvoi n° 24-84.116) de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 27 mai 2024, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de meurtre en bande organisée et association de malfaiteurs, ont prononcé sur ses demandes d'annulation de pièces de la procédure.

MM. [R] [J], [S] [K] et [P] [D] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la même chambre de l'instruction, en date du 2 octobre 2024, qui, dans la même procédure, les a renvoyés devant la cour d'assises des Bouches-du-Rhône, sous l'accusation, pour les deux premiers, de meurtre en bande organisée et association de malfaiteurs, pour le troisième, de meurtre en bande organisée et association de malfaiteurs, en récidive (pourvoi n° 24-85.955).

Les pourvois sont joints en raison de la connexité.

Des mémoires ont été produits.


Sur le rapport de M. Charmoillaux, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [R] [J], et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 janvier 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Charmoillaux, conseiller rapporteur, M. Sottet, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale🏛, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Une information a été ouverte contre personne non dénommée des chefs de meurtre en bande organisée et association de malfaiteurs, à la suite de la découverte, dans une chambre d'hôtel, des corps de deux personnes tuées par arme à feu.

3. MM. [P] [D], [S] [K] et [R] [J], notamment, ont été mis en examen des chefs précités.

4. Le 14 septembre 2023, deux requêtes en annulation de pièces de la procédure ont été présentées pAaur M. [J].

5. Par ordonnance du 6 juin 2024, les juges d'instruction ont renvoyé ces trois personnes devant la cour d'assises des Bouches-du-Rhône sous les accusations susmentionnées.

6. MM. [D], [K], [J] et le ministère public ont relevé appel de cette décision.

Examen de la recevabilité du pourvoi formé par M. [D] par déclaration au greffe de l'établissement pénitentiaire

7. M. [D] ayant épuisé son droit à se pourvoir contre l'arrêt attaqué, par l'exercice qu'en a fait son avocat, en son nom, le 8 octobre 2024, était irrecevable à se pourvoir à nouveau le même jour contre la même décision.

8. Seul est recevable le pourvoi formé par M. [D] par l'intermédiaire de son avocat.


Déchéance du pourvoi formé par M. [D]

9. M. [D] n'a pas déposé dans le délai légal, personnellement ou par son avocat, un mémoire exposant ses moyens de cassation. Il y a lieu, en conséquence, de le déclarer déchu de son pourvoi par application de l'article 590-1 du code de procédure pénale🏛.

Examen des moyens

Sur les premier, troisième moyens, le quatrième moyen, pris en sa seconde branche, les cinquième et sixième moyens du pourvoi formé contre l'arrêt n° 396 du 27 mai 2024, les premier, troisième moyens, le quatrième moyen, pris en sa seconde branche, les cinquième et sixième moyens du pourvoi formé contre l'arrêt n° 397 du même jour, le second moyen du pourvoi formé contre l'arrêt du 2 octobre 2024, proposés pour M. [J], et les premier, deuxième et troisième moyens proposés pour M. [K]

10. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le deuxième moyen du pourvoi formé contre l'arrêt n° 396 du 27 mai 2024 et le deuxième moyen du pourvoi formé contre l'arrêt n° 397 du même jour, proposés pour M. [J]

Enoncé des moyens

11. Les moyens critiquent les arrêts attaqués en ce qu'ils ont rejeté les requêtes en nullité présentée par la défense, alors « que si les enquêteurs peuvent recueillir sans formalité particulière les déclarations spontanées d'informateurs anonymes, ils ne peuvent en revanche procéder à leur audition que dans le strict respect des dispositions des articles 706-57 et suivants du Code de procédure pénale🏛 ; qu'au cas d'espèce, il résulte des termes mêmes du procès-verbal D. 105-1 du 2 septembre 2019 que le brigadier-chef [G] a « interrogé » le témoin anonyme, qui a répondu aux questions de l'enquêteur sur l'identité de l'exposant ; que cet acte, qui ne se bornait pas à recueillir les déclarations spontanées de l'intéressé, mais faisait également mention des réponses de celui-ci aux interrogations de l'enquêteur, constituait dès lors une audition, laquelle ne pouvait être conduite, sous couvert de l'anonymat, que dans les conditions et formes prescrites les dispositions susvisées ; qu'en retenant toutefois, pour refuser d'annuler le procès-verbal litigieux, que « ces procès-verbaux n'étaient effectués qu'auprès d'une personne souhaitant garder l'anonymat, et n'étant qu'un procès-verbal de renseignement guidant les investigations sans être un moyen de preuves », la Cour d'appel, qui a dénaturé le procès-verbal litigieux et n'a pas recherché si les déclarations du témoin anonyme retranscrites par l'enquêteur avaient effectivement été spontanées, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme🏛, préliminaire, 706-57, 706-58, 591 et 593 du Code de procédure pénale. »


Réponse de la Cour

12. Les moyens sont réunis.

13. Pour écarter les moyens de nullité visant le procès-verbal du 1er septembre 2019 coté D 105-1, les arrêts attaqués énoncent que celui-ci n'est qu'un procès-verbal de renseignement recueillant les informations données par une personne souhaitant garder l'anonymat, ayant pour objet de guider les investigations sans être un moyen de preuve, et qu'il ne constitue par conséquent pas une audition de témoin au sens des articles 706-57 et suivants du code de procédure pénale.

14. En se déterminant ainsi, par des motifs qui ne dénaturent pas un procès-verbal retranscrivant en style indirect les propos tenus par un informateur anonyme ayant pris l'initiative de contacter téléphoniquement un enquêteur, la chambre de l'instruction a justifié sa décision.

15. Ainsi, les moyens doivent être écartés.


Sur le quatrième moyen, pris en sa première branche, du pourvoi formé contre l'arrêt n° 396 du 27 mai 2024 et le quatrième moyen, pris en sa première branche, du pourvoi formé contre l'arrêt n° 397 du même jour, proposés pour M. [J]

Enoncé des moyens

16. Les moyens critiquent les arrêts attaqués en ce qu'ils ont rejeté les requêtes en nullité présentées par la défense, alors :

« 1°/ d'une part que constitue une opération de captation de données, et non simplement une mesure d'interception des communications électroniques, la technique visant à obtenir et à exploiter les données contenues dans un ou plusieurs serveurs informatiques ou transitant entre eux ; qu'il s'ensuit qu'une telle opération est irrégulière si elle ne fait pas l'objet d'une ordonnance motivée autorisant spécifiquement sa mise en oeuvre ; qu'au cas d'espèce, la défense faisait valoir que la mesure d' « interception » des données stockées ou transitant par les serveurs OVH utilisés pour héberger la solution « SKYECC » constituait en réalité une opération de captation de données, qui était irrégulière, faute d'ordonnance motivée autorisant sa mise en oeuvre ; qu'en retenant, pour refuser d'annuler les actes et pièces relatant cette opération, que la mesure par laquelle les juges ont autorisé l'exploitation par les enquêteurs du flux entrant et sortant des serveurs utilisés pour la mise en oeuvre de la solution SKY ECC relevaient de la simple « interception des communications électroniques », la Chambre de l'instruction a violé les articles 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme, préliminaire, 100, 706-102-1, 591 et 593 du Code de procédure pénale. »


Réponse de la Cour

17. Les moyens sont réunis.

18. Pour écarter les moyens de nullité, les arrêts attaqués énoncent que les mesures contestées ont visé les communications échangées entre trois serveurs informatiques, soit des communications entrantes et sortantes sur l'un ou l'autre de ces serveurs.

19. Les juges en déduisent que ces mesures consistaient ainsi spécifiquement en des interceptions de flux et non en une captation de données stockées sur l'un ou l'autre de ces serveurs, et que c'est à bon droit que les juges d'instruction ont fait application des articles 100 et suivants du code de procédure pénale🏛.

20. En statuant ainsi, la chambre de l'instruction n'a méconnu aucun des textes visés aux moyens.

21. En effet, en l'absence de toute captation de données stockées sur des serveurs, l'interception de flux échangés par l'intermédiaire de réseaux de télécommunication ne relève pas des dispositions de l'article 706-102-1 du code de procédure pénale🏛.

22. Ainsi, les moyens doivent être écartés.


Sur le premier moyen du pourvoi formé contre l'arrêt du 2 octobre 2024, proposé pour M. [J]

Enoncé du moyen

23. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a ordonné la mise en accusation de M. [Aa] devant la cour d'assises des Bouches-du-Rhône des chefs de meurtre en bande organisée ou complicité de meurtre en bande organisée et de participation à une association de malfaiteurs, alors « que les cassations à intervenir sur les pourvois n° V 24-84-110 et n° B 24-84.116 entraîneront la cassation de l'arrêt de mise en accusation de la Chambre de l'instruction, celle-ci s'étant fondée sur des actes et des pièces vouées à l'annulation. »



Réponse de la Cour

24. Le moyen est rendu sans objet par le rejet et la non-admission des moyens dirigés contre les arrêts n° 396 et 397 du 27 mai 2024.

25. Par ailleurs, les arrêts sont réguliers en la forme, la procédure est régulière et les faits, objet de l'accusation, sont qualifiés crime par la loi.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

Sur le pourvoi formé par M. [D] par déclaration au greffe de l'établissement pénitentiaire :

Le DECLARE IRRECEVABLE ;

Sur le pourvoi formé par M. [D] par l'intermédiaire de son avocat :

CONSTATE la déchéance du pourvoi ;

Sur les pourvois formés par MM. [J] et [K] :

Les REJETTE ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier deux mille vingt-cinq.

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