Jurisprudence : CE 3/8 ch.-r., 13-11-2023, n° 474211, mentionné aux tables du recueil Lebon

CE 3/8 ch.-r., 13-11-2023, n° 474211, mentionné aux tables du recueil Lebon

A29621ZQ

Référence

CE 3/8 ch.-r., 13-11-2023, n° 474211, mentionné aux tables du recueil Lebon. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/101387246-ce-38-chr-13112023-n-474211-mentionne-aux-tables-du-recueil-lebon
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Abstract

24-01-03-01-04-015 Lorsqu’il est saisi par le préfet d’un procès-verbal constatant une occupation irrégulière du domaine public, et alors même que la transmission n’est ni assortie, ni suivie de la présentation de conclusions tendant à faire cesser l’occupation irrégulière et à remettre le domaine public en l’état, le juge de la contravention de grande voirie est tenu d’y faire droit sous la seule réserve que des intérêts généraux, tenant notamment aux nécessités de l’ordre public, n’y fassent obstacle. ...Dès lors qu’il ne peut utilement se prévaloir, pour contester un jugement de tribunal administratif prescrivant la remise en état du domaine public, de ce que cette remise en état est susceptible de porter atteinte à ses propres intérêts privés, les intérêts d’un syndicat de copropriété et ceux du propriétaire des installations litigieuses sont, dans l’instance par laquelle ce dernier a été déféré comme prévenu d’une contravention de grande voirie au titre de l’occupation sans autorisation du domaine public, concordants. ...Le syndicat doit donc être regardé comme étant représenté devant la cour par cette société au sens de l’article R. 832-1 du code de justice administrative (CJA), de sorte que sa tierce opposition est irrecevable.



CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux

N° 474211

Séance du 23 octobre 2023

Lecture du 13 novembre 2023

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 8ème et 3ème chambres réunies)


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Le préfet des Alpes-Maritimes a déféré au tribunal administratif de Nice la société anonyme à responsabilité limitée (SARL) Westmead Production et son gérant, M. A, comme prévenus d'une contravention de grande voirie prévue et réprimée par l'article L. 2132-3 du code général de la propriété des personnes publiques🏛, sur la base d'un procès-verbal dressé le 2 février 2016 constatant, sur le territoire de la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat (Alpes-Maritimes), l'occupation sans autorisation du domaine public maritime par un ensemble composé d'une terrasse, d'un escalier d'accès à la mer construit sur les roches existantes, d'un appontement situé sous cette terrasse et d'une portion d'embarcadère débordant de l'emprise de cette dernière, et lui a demandé de condamner les intéressés à l'amende maximale prévue à cet effet au titre de l'action publique, d'ordonner la remise en état du domaine public maritime par la démolition des ouvrages et des constructions visés dans le procès-verbal à compter de la notification du jugement sous astreinte de 500 euros par jour de retard, en autorisant l'administration, en tant que de besoin, à exécuter d'office aux frais, risques et périls des contrevenants, la remise en état des lieux, et de mettre à leur charge les frais d'établissement du procès-verbal.

Par un jugement n° 1602244 du 21 novembre 2017, ce tribunal a jugé que l'action publique était prescrite, rejeté les conclusions du déféré du préfet des Alpes-Maritimes tendant à la condamnation de la société Westmead Production et de son gérant au paiement d'une amende et au remboursement des frais d'établissement du procès-verbal et condamné cette société et son gérant à évacuer le domaine public des installations et ouvrages visés dans le procès-verbal du 2 février 2016, sous astreinte de 300 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de six mois à compter de la notification du jugement et autorisé l'administration à procéder d'office, aux frais, risques et périls de cette société, à cette évacuation en cas d'inexécution du jugement dans ce même délai.

Par un arrêt nos 18MA00263, 18MA00639 du 16 novembre 2018, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de la société Westmead Production et de son gérant, annulé l'article 3 du jugement du tribunal administratif de Nice en tant qu'il les condamne à démolir la portion d'embarcadère débordant de l'emprise de la terrasse, rejeté le surplus des conclusions et prononcé un non-lieu à statuer sur leur requête à fin de sursis à exécution du jugement.

Recours en tierce opposition

Par une requête en tierce opposition, enregistrée le 3 août 2021 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, le syndicat de la copropriété " La Joie de Vivre ", représenté par son syndic, a demandé à cette cour de surseoir à l'exécution de son arrêt du 16 novembre 2018 et de le déclarer nul et non avenu. Par un arrêt n° 21MA03256 du 7 avril 2023, cette cour a rejeté sa demande.

Par un pourvoi, enregistré le 16 mai 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat de la copropriété " La Joie de Vivre " demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa requête en tierce opposition ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Benjamin Duca-Deneuve, auditeur,

- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gury et Maître, avocat du syndicat de la copropriété " La Joie de Vivre " ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que la société à responsabilité limitée (SARL) Westmead Production et son gérant ont été déférés au tribunal administratif de Nice comme prévenus d'une contravention de grande voirie au titre de l'occupation sans autorisation du domaine public maritime par un ensemble composé d'une terrasse, d'un escalier d'accès à la mer, d'un appontement et d'une portion d'embarcadère. Par un jugement du 21 novembre 2017, ce tribunal a condamné la société et son gérant à évacuer ces installations et ouvrages du domaine public maritime et autorisé l'administration à procéder d'office à cette évacuation en cas d'inexécution de son jugement. Par un arrêt du 16 novembre 2018, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé ce jugement en tant qu'il a condamné la société et son gérant à démolir la portion d'embarcadère et rejeté le surplus de leurs conclusions d'appel. Le syndicat de la copropriété " La Joie de Vivre " se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 7 avril 2023 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté la requête en tierce opposition qu'il avait formée contre son arrêt du 16 novembre 2018.

2. Aux termes de l'article R. 832-1 du code de justice administrative🏛 : " Toute personne peut former tierce opposition à une décision juridictionnelle qui préjudicie à ses droits, dès lors que ni elle ni ceux qu'elle représente n'ont été présents ou régulièrement appelés dans l'instance ayant abouti à cette décision ". En vertu de ces dispositions, toute personne qui n'a été ni appelée, ni représentée dans l'instance peut former tierce opposition à une décision juridictionnelle. Cette voie de rétractation est ouverte à ceux qui se prévalent d'un droit auquel la décision entreprise aurait préjudicié.

3. Lorsqu'il est saisi par le préfet d'un procès-verbal constatant une occupation irrégulière du domaine public, et alors même que la transmission n'est ni assortie, ni suivie de la présentation de conclusions tendant à faire cesser l'occupation irrégulière et à remettre le domaine public en l'état, le juge de la contravention de grande voirie est tenu d'y faire droit sous la seule réserve que des intérêts généraux, tenant notamment aux nécessités de l'ordre public, n'y fassent obstacle.

4. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que le syndicat de la copropriété " La Joie de Vivre " n'a été ni présent, ni régulièrement mis en cause dans l'instance qui a donné lieu à l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 16 novembre 2018. Au soutien de la requête en tierce opposition qu'il a formée devant cette cour, ce syndicat soutenait que ses intérêts ne concordaient pas, dans l'instance de contravention de grande voirie, avec ceux de la société Westmead Production, propriétaire du lot n°1, dès lors que la destruction des ouvrages implantés sans autorisation sur le domaine public maritime était susceptible d'avoir des conséquences sur les parties communes de la copropriété, en particulier sur un mur de soutènement commun à tous les lots. Toutefois, dès lors qu'il ne pouvait, ainsi qu'il découle de ce qui est dit au point 3, utilement se prévaloir, pour contester le jugement du tribunal administratif de Nice prescrivant la remise en état du domaine public, de ce que cette remise en état était susceptible de porter atteinte à ses propres intérêts privés, le syndicat de copropriété n'est pas fondé à soutenir que la cour administrative d'appel de Marseille aurait entaché son arrêt d'erreur de droit ou d'erreur de qualification juridique des faits en jugeant que, dans l'instance en cause, ses intérêts et ceux de la société Westmead Production étaient concordants, pour en déduire qu'il devait être regardé comme ayant été représenté en appel par cette société, au sens de l'article R. 832-1 du code de justice administrative.

5. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi du syndicat de la copropriété " La Joie de Vivre " doit être rejeté, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi du syndicat de la copropriété " La Joie de Vivre " est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au syndicat de la copropriété " La Joie de Vivre " et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Délibéré à l'issue de la séance du 23 octobre 2023 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Stéphane Verclytte, président de chambre ; M. Jonathan Bosredon, M. Hervé Cassagnabère, M. Christian Fournier, M. Frédéric Gueudar Delahaye, Mme Françoise Tomé, M. Vincent Mahé, conseillers d'Etat et M. Benjamin Duca-Deneuve, auditeur-rapporteur.

Rendu le 13 novembre 2023.

Le président :

Signé : M. Pierre Collin

Le rapporteur :

Signé : M. Benjamin Duca-Deneuve

La secrétaire :

Signé : Mme Magali Méaulle

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