ETUDE : Flash info. Ordonnance gouvernementale sur la prolongation des détentions provisoires durant l’état d’urgence sanitaire : le Conseil constitutionnel valide la loi d’habilitation * Rédigé le 16.07.2020

ETUDE : Flash info. Ordonnance gouvernementale sur la prolongation des détentions provisoires durant l’état d’urgence sanitaire : le Conseil constitutionnel valide la loi d’habilitation * Rédigé le 16.07.2020

E70523RM

sans cacheDernière modification le 04-01-2021

ETUDE : Flash info. Ordonnance gouvernementale sur la prolongation des détentions provisoires durant l’état d’urgence sanitaire : le Conseil constitutionnel valide la loi d’habilitation * Rédigé le 16.07.2020

  • La loi habilitant le Gouvernement à prendre, par voie d’ordonnance, des mesures adaptant les règles relatives à la durée des détentions provisoires, n’est pas en elle-même contraire à l’article 66 de la Constitution (N° Lexbase : L0895AHM) ni à aucun autre droit ou liberté garantis par la Constitution ;

     

    L’absence de précision de la loi d’habilitation s’agissant des conditions de prolongation des détentions provisoires n’est pas constitutive d’une incompétence négative ;

     

    À l’expiration du délai de l’habilitation fixé par la loi, les dispositions d’une ordonnance prise sur son fondement et non ratifiée par le Parlement doivent être regardées comme des dispositions législatives dont l’appréciation de la conformité à la Constitution relève du Conseil constitutionnel (Cons. const., décision n° 2020-851/852 QPC, du 3 juillet 2020 N° Lexbase : A28793QP).

  • LOI n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 (1)
    Dispositions contestées. La loi n° 2020-290, du 23 mars 2020, d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 habilite le Gouvernement, sur le fondement de l’article 38 de la Constitution, à prendre, par voie d’ordonnance, certaines mesures relevant du domaine de la loi. Aux termes du d) du 2° du paragraphe I de l’article 11 de cette loi, le Gouvernement est notamment autorisé à prendre des mesures adaptant, aux seules fins de limiter la propagation du virus parmi les personnes participant à ces procédures, les règles relatives au déroulement et à la durée des détentions provisoires pour permettre « d’une part, l’allongement des délais au cours de l’instruction et en matière d’audiencement, pour une durée proportionnée à celle de droit commun et ne pouvant excéder trois mois en matière délictuelle et six mois en appel ou en matière criminelle, et, d’autre part, la prolongation de ces mesures au vu des seules réquisitions écrites du parquet et des observations écrites de la personne et de son avocat ». Saisi par la Cour de cassation, le Conseil constitutionnel a été invité à se prononcer sur la constitutionnalité de ces dispositions.
  • Motif du recours. Les requérants ont soutenu que les dispositions contestées autoriseraient le Gouvernement à prendre des mesures susceptibles de permettre une prolongation automatique de tous les titres de détention provisoire venant à expiration durant la période d’état d’urgence sanitaire, sans que cette prolongation soit subordonnée à l’intervention d’un juge. Selon les auteurs du recours, ces dispositions de la loi d’habilitation méconnaissaient les exigences de l’article 66 de la Constitution (N° Lexbase : L0895AHM) ainsi que les droits de la défense.

     

    Il était également fait grief au législateur de n’avoir pas suffisamment précisé, dans la loi d’habilitation, les conditions de la prolongation de la détention provisoire ce qui serait constitutif d’une incompétence négative.

  • Sur le contrôle exercé par le Conseil constitutionnel sur les ordonnances de l’article 38. Le Conseil constitutionnel rappelle, dans un premier temps, que les dispositions d’une ordonnance prise sur le fondement de l’article 38 de la Constitution (N° Lexbase : L1298A9X) acquièrent valeur législative à compter de sa signature lorsqu’elle a été ratifiée par le législateur. Il précise ensuite qu’à l’expiration du délai d’habilitation fixé par la loi, les dispositions d’une ordonnance prise sur son fondement doivent être regardées comme législatives. Dès lors, leur conformité à la Constitution ne peut être contestée que par le biais d’une question prioritaire de constitutionnalité. Cette précision semble en réalité directement destinée au Conseil d’État dans le cadre d’une saga qui oppose les deux juridictions depuis la décision du Conseil constitutionnel du 28 mai 2020 (Const. const., décision n° 2020-843 QPC, du 28 mai 2020 N° Lexbase : A22923MT). À cette occasion, les sages s’étaient déjà prononcés sur la nature des ordonnances non ratifiées après l’expiration du délai d’habilitation et sur leur compétence pour en connaître. Par la suite, le Conseil d’État s’est, le 28 mai 2020, lui-même déclaré compétent pour apprécier les recours formés contre une ordonnance non ratifiée après l’expiration du délai d’habilitation (CE, 1er juillet 2020, n° 429132 N° Lexbase : A10663QK). Le Conseil constitutionnel revient donc en l’espèce affirmer sa compétence en la matière.
  • Sur la constitutionnalité des dispositions contestées. Pour écarter le grief tiré de la méconnaissance de l’article 66, le Conseil constitutionnel rappelle que ce texte impose l’intervention d’un juge dans le plus court délai en cas de privation de liberté. Or, le Conseil constate que les dispositions contestées n’excluent pas, en elles-mêmes, l’intervention d’un juge à l’occasion de la prolongation d’un titre de détention provisoire arrivant à expiration au cours de l’état d’urgence sanitaire. Par ailleurs, il ne pourrait être présumé que ces dispositions entendent dispenser le Gouvernement du respect des règles et principes de valeur constitutionnelle dès lors qu’une loi d’habilitation ne peut conduire à un tel blanc-seing.

     

    Tout en rappelant que, dans ce contexte d’habilitation, le Gouvernement demeure tenu au respect des règles et principes à valeur constitutionnelle, le Conseil affirme qu’en l’espèce, l’inconstitutionnalité alléguée ne pourrait résulter que de l’ordonnance prise sur le fondement de la loi d’habilitation, sans que cette dernière puisse être désignée comme responsable d’une telle méconnaissance. Cette décision n’exclut en effet pas un contrôle ultérieur de la constitutionnalité des ordonnances prises sur le fondement des dispositions en cause ; le Conseil s’étant lui-même déclaré compétent pour en connaître.

     

    Le Conseil précise également que les dispositions contestées ne méconnaissent pas non plus les droits de la défense ni aucun autre droit ou liberté garantis par la Constitution. Enfin, les Sages rejettent le grief tiré de l’incompétence négative lequel est inopérant s’agissant d’une loi d’habilitation.

  • Ordonnance n° 2020-557 du 13 mai 2020
    LOI n° 2020-546 du 11 mai 2020
    Contexte ultérieur. Depuis la saisine du Conseil constitutionnel, deux textes importants sont intervenus en matière de détention provisoire, l’ordonnance n° 2020-303, du 25 mars 2020 (lire J.-B. Thierry, La procédure pénale confinée par voie d’ordonnance : commentaire de l’ordonnance « covid-19 », Lexbase Pénal, avril 2020 N° Lexbase : N3033BYY) prévoyant un allongement automatique sans débats ni intervention du juge judiciaire et la loi n° 2020-546, du 11 mai 2020 organisant un retour progressif au droit commun de la détention provisoire.

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