Le Quotidien du 21 septembre 2023 : Actualité judiciaire

[A la une] Du 6 au 17 novembre, le sort d’Éric Dupond-Moretti se jouera devant la Cour de justice de la République

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par Vincent Vantighem

le 20 Septembre 2023

Quelques jours simplement ? Ou carrément cinq semaines avec des audiences découpées en demi-journées ? Les rumeurs allaient bon train depuis quelques semaines. Le parquet général de la Cour de cassation y a finalement mis fin, jeudi 14 septembre, en dévoilant les dates auxquelles Éric Dupond-Moretti va être jugé pour « prise illégale d’intérêts » devant la Cour de justice de la République (CJR). Son procès se tiendra donc du lundi 6 novembre en début d’après-midi au vendredi 17 novembre. Avec une pause prévue le lundi 13 novembre. Soit huit jours et demi d’audience au total. « C’est une très bonne nouvelle », souffle une source proche du garde des Sceaux qui s’inquiétait, légitimement, d’une audience à rallonge le contraignant à abandonner le suivi des nombreux dossiers qui l’occupent en ce moment. Et à le montrer occupé à gérer ses problèmes personnels plutôt que ceux des magistrats, des avocats ou des détenus.

Mais non. Le ministre a déjà fait savoir qu’il continuerait à travailler tout en comparaissant devant les quinze juges de la CJR, en l’espèce, trois magistrats et douze parlementaires. Définitivement renvoyé pour être jugé le 28 juillet dernier, l’ancien avocat est soupçonné de « prise illégale d’intérêts » en ce sens qu’il aurait profité de ses fonctions de ministre pour régler des comptes avec certains magistrats avec lesquels il avait eu maille à partir lorsqu’il portait la robe noire. Une décision inédite pour un ministre de la Justice en exercice. L’issue de son procès pourrait remettre en question son avenir politique même s’il a encore été confirmé récemment au gouvernement, Elizabeth Borne indiquant qu’il avait « toute [sa] confiance ».

L’affaire des fadettes et un juge « cow-boy »

Fin juillet, comme il l’a toujours fait depuis le début de cette procédure, le ministre avait affirmé « prendre acte » de la décision de renvoi devant la CJR et « attendre avec confiance de s’y présenter ». Mais il est bien trop intelligent pour ne pas savoir que c’est une audience à haut risque qui se présente sur sa route. Une de celle qui pourrait mettre fin, d’une très mauvaise manière, à son mandat de garde des Sceaux.

Dans cette procédure ouverte début 2021, un premier dossier concerne l’enquête administrative ordonnée en septembre 2020 à l’encontre de trois magistrats du parquet national financier (PNF). Ceux-ci avaient fait éplucher les factures téléphoniques détaillées d’Éric Dupond-Moretti lorsqu’il était encore avocat. Pourquoi ? Dans le but de débusquer une éventuelle taupe qui aurait informé Nicolas Sarkozy qu’il était sur écoutes dans le fameux dossier « Bismuth ». La taupe n’a jamais été déterrée. Mais Éric Dupond-Moretti a, lui, poursuivi les procédures enclenchées contre les magistrats devant le Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Tout comme il l’a fait pour Édouard Levrault, un juge qui avait mis en examen un de ses clients lorsqu’il était avocat et qu’il avait alors qualifié de « cow-boy ».

Au final, aucun des quatre magistrats concernés n’a été sanctionné par leur organe de contrôle qui, à l’inverse, a estimé à deux reprises que le ministre se trouvait « dans une situation objective de conflit d’intérêts » dans ces affaires.

Confronté aux quatre magistrats et à François Molins

Pour sa défense, l’ancien ténor des barreaux a toujours prétendu qu’il n’avait fait que suivre les recommandations de son administration et poursuivre les procédures enclenchées par sa prédécesseure, Nicole Belloubet. Mais les trois magistrats instructeurs de la Cour de justice de la République n’ont pas été convaincus. Et ils ont estimé qu’il devait être jugé pour tout cela.

Désormais, le ministre a hâte de pouvoir s’expliquer et de faire ce qu’il faisait brillamment lorsqu’il était avocat : batailler pour prouver une innocence. Sauf que cette fois-ci, il s’agit de la sienne. Il sait déjà qu’il sera confronté aux quatre magistrats impliqués dans la procédure et qui ont été cités comme témoins. Qu’il devra aussi battre le fer avec François Molins, l’ancien procureur général auprès de la Cour de cassation, lui aussi appelé à venir s’exprimer. Et surtout qu’il devra subir les foudres de l’accusation portée par Rémy Heitz, le tout nouveau procureur général, et Philippe Lagauche, brillant avocat général. En dépit du fait que le premier a été nommé à ce poste par un décret signé de la main d’Elizabeth Borne.

Une audience musclée en perspective, donc. Qui sera suivie, bien au-delà des seuls murs de la Cour de justice de la République, par tout un gouvernement qui doit bien se demander si, au moment de la décision, il devra se séparer de l'un de ses membres, contraint à la démission pour cause de condamnation, fut-elle symbolique...

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