La lettre juridique n°950 du 22 juin 2023 : Procédure pénale

[Brèves] Demande de mise en liberté et appel au fond : en cas d’identité de moyen, un même juge peut-il successivement statuer ?

Réf. : Cass. crim., 21 juin 2013, n° 22-84.384, F-B N° Lexbase : A982693C

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N6014BZR

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par Adélaïde Léon

le 24 Juillet 2023

► Deux juges qui ont statué sur une demande de mise en liberté peuvent ensuite connaître de l’appel au fond n’ayant pas, à l’occasion de la première décision, manifesté une opinion sur la culpabilité du demandeur.

Il en est ainsi même si le premier arrêt a rejeté un moyen également soulevé au fond ; lequel portait sur la capacité du tribunal correctionnel à modifier la date de la prévention fixée par l’acte de saisine.

Rappel de la procédure. Un individu est poursuivi selon la procédure de comparution immédiate des chefs d’infractions à la législation sur les stupéfiants et détention de marchandises dangereuses pour la santé, en récidive, et refus de remettre aux autorités judiciaires la convention secrète de déchiffrement d'un moyen de cryptologie. L’acte de poursuite visait des faits commis le 25 février 2022.

Les faits avaient en réalité été commis entre le 24 et le 25 février 2022.

Le 5 avril 2022, considérant qu’il s’agit d’une simple erreur matérielle, le tribunal correctionnel rectifie la date des faits avant de reconnaitre le prévenu coupable et de le condamner à six ans d’emprisonnement, outre une peine complémentaire de confiscation. Le maintien en détention de l’intéressé est également ordonné.

Le prévenu relève appel suivi par le ministère public, à titre incident.

Le 6 avril 2022, le prévenu dépose une demande de mise en liberté au soutien de laquelle était soulevé le moyen tiré de ce que les juges du siège ne pouvaient modifier la date de la prévention fixée par l’acte de saisine. La demande de mise en liberté est rejetée par arrêt du 1er juin 2022.

En cause d’appel. Devant la cour d’appel, constatant que deux des magistrats qui avaient été amenés à statuer sur sa demande de mise en liberté,  le demandeur a sollicité un renvoi afin d’obtenir le remplacement desdits juges, pour défaut d’impartialité.

Le prévenu faisait valoir que les deux magistrats qui avaient eu à connaître du contentieux de la détention provisoire le concernant avaient, au soutien du rejet de la demande, rejeté le moyen tiré de ce que les juges du siège ne pouvaient modifier la date de la prévention fixée par l’acte de saisine.

Or, ce moyen étant également soulevé dans le cadre de l’appel de la condamnation, le demandeur estimait que les deux juges ne pouvaient de nouveau statuer sur ce même motif sans être impartiaux.

La cour d’appel a rejeté la demande de renvoi en estimant que la cour d’appel qui avait statué sur le contentieux de la détention provisoire ne s’était pas prononcée sur le fond et n’avait donc pas préjugé de la culpabilité du prévenu.

Décision. Des juges qui ont statué sur une demande de mise en liberté peuvent-ils donc ensuite connaître de l’appel au fond ?

La Cour de cassation répond par l’affirmative au visa de l’article 148-1 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L1744IPB. Elle rappelle qu’en tout temps de la procédure et en tout état de cause, le mis en examen, le prévenu ou l’accusé peuvent formulée des demandes de mise en liberté.

La Cour souligne également que lorsqu’une juridiction de jugement est saisie, il lui appartient de statuer sur la détention provisoire. Dès lors, de mêmes juges peuvent être appelés à statuer sur la demande d'un prévenu qui a relevé appel d'un jugement qui l'a placé ou maintenu en détention, avant de le juger en appel. Cette situation n’est pas contraire à l’exigence d’impartialité de l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarder des droits de l’Homme lequel interdit aux magistrats de statuer à deux reprises sur la culpabilité d’un accusé ou d’un prévenu.

La Cour rappelle qu’elle s’est prononcée en ce sens en matière criminelle dans un arrêt du 14 avril 2021 (Cass. crim., 14 avril 2023, n° 21-80.865, FS-P N° Lexbase : A81174PC) en soulignant que les demandes de mise en liberté sont étudiées au regard des seuls critères de l’article 144 du Code de procédure pénale, indifférents à la question de la culpabilité.

En l’espèce, si les deux magistrats se voient successivement amenés à statuer sur un même moyen à deux reprises, il demeure qu’à l’occasion du rejet de la demande de mise en liberté, ils n’ont pas manifesté d’opinion sur la culpabilité du demandeur.

Pour aller plus loin : N. Catelan, ÉTUDE : Les mesures de contrainte au cours de l'instruction : contrôle judiciaire, assignation à résidence et détention provisoire, Les demandes de mise en liberté, in Procédure pénale (dir. J.-B. Perrier) N° Lexbase : E4788Z99.

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