Le Quotidien du 2 juin 2023 : Sociétés

[Brèves] Clause pénale : dénaturation ou disproportion ?

Réf. : Cass. com., 11 mai 2023, n° 19-24.977, F-D N° Lexbase : A33639U4

Lecture: 4 min

N5440BZI

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

[Brèves] Clause pénale : dénaturation ou disproportion ?. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/96211738-breves-clause-penale-denaturation-ou-disproportion
Copier

par Perrine Cathalo

le 01 Juin 2023

► Pour retenir l'existence d'une disproportion manifeste entre le montant de la clause pénale insérée dans l'acte de cession et le préjudice de la société cédante et rejeter la demande en paiement formée par cette dernière, la cour d'appel, après avoir relevé que la société cessionnaire avait déjà versé une certaine somme, retient que la clause litigieuse obligeait celle-ci à régler une deuxième fois le prix des parts sociales sans cependant pouvoir en avoir le bénéfice ;

En statuant ainsi, alors que le contrat de cession stipulait qu'à défaut de règlement d'une seule annuité aux dates et montants convenus, l'intégralité du prix de cession deviendrait immédiatement exigible et les sommes versées jusqu'au défaut de règlement seraient allouées à la société cédante, à titre de premiers dommages et intérêts, celle-ci pouvant poursuivre la société cessionnaire, soit en paiement du solde du prix de cession, soit en résolution de la vente assortie de dommages et intérêts, ce dont il résultait, à l'évidence, que cette clause n'avait pas pour objet de permettre au cédant de percevoir deux fois le prix des parts sociales, mais seulement de lui permettre, en cas de résolution de la cession desdites parts, de conserver les sommes déjà versées par le cessionnaire à titre de paiement partiel, la cour d'appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé le principe susvisé.

Faits et procédure. Par un acte du 21 juillet 2008, une première SARL a cédé les actions qu’elle détenait dans le capital d’une société à une seconde SARL, moyennant un certain prix payable en douze annuités.

Le contrat de cession stipulait qu’« à défaut de règlement d’une seule annuité aux dates et montant convenus, l’intégralité du prix de cession deviendra immédiatement exigible et les sommes versées jusqu’au défaut de règlement, seront allouées au cédant […] à titre de premiers dommages et intérêts lequel pourra poursuivre comme bon lui semble [le] cessionnaire, soit en paiement du solde du prix de cession, soit en résolution de la vente assortie de dommages et intérêts ».

Soutenant que la société cessionnaire ne s’était acquittée des échéances de 2013 et de 2015 que de manière partielle, la société cédante l’a assignée en résolution de la cession et aux fins d’application de la clause pénale insérée dans le contrat.

Par une décision du 10 octobre 2019, la cour d’appel de Versailles (CA Versailles, 10 octobre 2019, n° 20/00342 N° Lexbase : A826737C) a rejeté la demande du cédant tenant à l’application de la clause pénale insérée dans l’acte du 21 juillet 2008, aux motifs que cette clause obligeait le cessionnaire à régler une deuxième fois le prix des parts sociales sans cependant pouvoir en avoir le bénéfice.

Le cédant a formé un pourvoi devant la Cour de cassation.

Décision. Rappelant l’obligation faite au juge de ne pas dénaturer l’écrit qui lui est soumis (C. civ., art. 1103 N° Lexbase : L0822KZH et 1192 N° Lexbase : L0901KZE), la Haute juridiction censure l’arrêt d’appel.

Les juges de la Cour de cassation reprochent aux juges du fond d’avoir dénaturé les termes clairs et précis de la clause pénale litigieuse en retenant l’existence d’une disproportion manifeste entre le montant de la clause pénale insérée dans l’acte de cession et le préjudice de la société cédante.

Or, la Chambre commerciale affirme au contraire que la clause de cession litigieuse n’avait pas pour objet de permettre à la société cédante de percevoir deux fois le prix des parts sociales mais seulement de lui permettre, en cas de résolution de la cession des dites parts, de conserver les sommes déjà versées par la société cessionnaire à titre de paiement partiel.

Observations. Cette solution rappelle un arrêt rendu par la Chambre commerciale le 24 novembre 2021, dans lequel la Haute juridiction affirmait déjà qu'une clause d'un contrat de cession de parts sociales prévoyant que le cédant conserve la partie du prix de cession déjà versée en cas de résolution du contrat n'impose pas un double versement du prix à la charge du cessionnaire.

Les juges de la Cour de cassation avaient également jugé que « dénature cette clause pénale la cour d'appel qui se fonde sur un telle interprétation pour juger la pénalité excessive et en écarter l'application » (Cass. com., 24 novembre 2011, n° 19-24.977, inédit N° Lexbase : A50707D7).

newsid:485440

Cookies juridiques

Considérant en premier lieu que le site requiert le consentement de l'utilisateur pour l'usage des cookies; Considérant en second lieu qu'une navigation sans cookies, c'est comme naviguer sans boussole; Considérant enfin que lesdits cookies n'ont d'autre utilité que l'optimisation de votre expérience en ligne; Par ces motifs, la Cour vous invite à les autoriser pour votre propre confort en ligne.

En savoir plus