Le Quotidien du 6 décembre 2022 : Vente d'immeubles

[Brèves] Résolution de la vente, prescription de l’action en responsabilité du notaire, et indemnité d’occupation

Réf. : Cass. civ. 3, 16 novembre 2022, n° 21-19.241, F-D N° Lexbase : A94998TY

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[Brèves] Résolution de la vente, prescription de l’action en responsabilité du notaire, et indemnité d’occupation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/90196705-breves-resolution-de-la-vente-prescription-de-laction-en-responsabilite-du-notaire-et-indemnite-docc
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par Laure Florent

le 05 Décembre 2022

► L’acquéreuse ayant eu tout loisir de se préoccuper de la valeur du bien avant de signer l’acte de vente, le point de départ de son action en réparation du dommage résultant d'une perte de chance de ne pas s'engager dans les termes du contrat est la date de l'acte authentique de vente qui fixe le prix ;
► l'enrichissement sans cause n'est pas applicable aux restitutions consécutives à l'anéantissement d'un contrat et le vendeur n'est pas fondé, en raison de l'effet rétroactif de la résolution de la vente, à obtenir une indemnité correspondant à la seule occupation de l'immeuble.

Faits et procédure. Les propriétaires d’une maison d’habitation l’ont vendue, par acte authentique. En exécution d'un bail d'habitation avec promesse d'achat consenti aux acheteurs, des années avant la vente, une partie du prix de vente devait être réglée comptant avant l’établissement de l’acte notarié de vente, au titre de l’arriéré de loyers dû par les acquéreurs. Le reste du prix devait être réglé après la vente, au titre du prix de vente proprement dit de l’immeuble.

Le prix n’ayant jamais été payé, les vendeurs ont assigné les acquéreurs en résolution de la vente pour non-paiement du solde du prix, et en paiement d’une indemnité d’occupation.

L’une des acquéreurs a mis en cause le notaire, afin d'obtenir, sur le fondement de sa responsabilité quasi-délictuelle pour manquement à son devoir de conseil, sa condamnation à lui payer des dommages et intérêts pour perte de chance et à la garantir des condamnations qui seraient prononcées au bénéfice des vendeurs. Le notaire a toutefois soulevé l’irrecevabilité de la demande pour prescription.

Les juges du fond (CA Agen, 26 avril 2021, n° 19/00584 N° Lexbase : A30494QY) ont déclaré prescrite l’action de l’acquéreuse contre le notaire, et l’ont condamnée au paiement d’une certaine somme, à titre d'indemnité d'occupation.

Prescription de l’action en responsabilité du notaire. La Haute juridiction rejette le pourvoi formé contre l’arrêt, en ce qu’il a déclaré prescrite l’action en responsabilité du notaire, et approuve le raisonnement de la cour d’appel.

Celle-ci avait relevé que l’acquéreuse reprochait au notaire de ne pas lui avoir conseillé de reprendre les termes de la promesse d'achat intégrée au contrat de bail initial, fixant un prix inférieur au prix de l’acte de vente, ce qui l'aurait amenée à conclure la vente à un prix trop élevé.

La cour d’appel avait toutefois constaté que l’acte de vente était intervenu un an après la promesse notariée, et huit ans après le contrat de bail initial, et en a souverainement déduit que l’acquéreuse ayant eu tout loisir de se préoccuper de la valeur du bien avant de signer l’acte de vente, le point de départ de son action en réparation du dommage résultant d'une perte de chance de ne pas s'engager dans les termes du contrat était la date de l'acte authentique qui fixait le prix. Dès lors, l’action engagée plus de cinq ans après cette date est prescrite.

Indemnité d’occupation (non). En revanche, au visa des articles 1234 N° Lexbase : L0970ABK et 1371 N° Lexbase : L1477ABC du Code civil, dans leur rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131, du 10 février 2016 N° Lexbase : L4857KYK, la Cour casse l’arrêt de la cour d’appel d’Agen, en ce qu’elle a condamné l’acquéreuse au paiement d’une indemnité d’occupation.

Elle énonce qu’il résulte de l’article 1234 ancien, énumérant les causes d’extinction de l’obligation, que, pour remettre les parties à un contrat de vente résolu dans leur état antérieur, seules doivent être prises en compte les prestations fournies par chacune des parties en exécution de ce contrat, et qu’il résulte de l’article 1371 du Code civil que nul ne peut s'enrichir sans cause aux dépens d'autrui.

En l’espèce, pour condamner l’acquéreuse au paiement d'une indemnité d'occupation à compter de la signature du contrat de vente résolu jusqu'à la date de sa décision, la cour d'appel avait retenu que, du fait de la résolution de la vente, les vendeurs étaient redevenus propriétaires à compter de la signature de l’acte de vente, alors que, depuis lors, l’acquéreuse n’avait cessé d'occuper l'immeuble sans régler de loyers. Les vendeurs, qui ne jouissaient pas personnellement de l'immeuble, n’avaient tiré aucun profit de son occupation ; à l'inverse, ils s’étaient appauvris, puisqu'ils avaient dû rembourser les emprunts leur ayant permis d'acquérir le bien initialement.

La Haute juridiction réprouve ce raisonnement : selon elle, l'enrichissement sans cause n'est pas applicable aux restitutions consécutives à l'anéantissement d'un contrat, et le vendeur n'est pas fondé, en raison de l'effet rétroactif de la résolution de la vente, à obtenir une indemnité correspondant à la seule occupation de l'immeuble.

À noter que désormais, l’article 1229 du Code civil N° Lexbase : L0934KZM prévoit en ses troisième et quatrième alinéas que « lorsque les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l'exécution complète du contrat résolu, les parties doivent restituer l'intégralité de ce qu'elles se sont procuré l'une à l'autre. Lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l'exécution réciproque du contrat, il n'y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n'ayant pas reçu sa contrepartie ; dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.

Les restitutions ont lieu dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9 ».

L’enrichissement injustifié est quant à lui désormais codifié aux articles 1303 N° Lexbase : L0954KZD à 1303-4 N° Lexbase : L0649KZ3 du Code civil.

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