Réf. : Cass. civ. 3, 6 juillet 2022, n° 20-17.430, F-D N° Lexbase : A50648AS
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N2330BZC
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par Anne-Lise Lonné-Clément
le 01 Septembre 2022
► Pour rejeter la demande tendant à l’abattage de deux pins, la cour d'appel a souverainement retenu que la présence des deux arbres, en dépit de leur hauteur et de leur localisation, ne représentait pas un danger pour la sécurité des personnes et des biens, ce dont il résultait qu'aucun trouble anormal du voisinage n'était caractérisé ;
► En revanche, en retenant, pour rejeter la demande tendant à l’élagage de ces pins, que les arbres en litige ne présentaient pas un danger pour la sécurité des biens et des personnes, que le rapport de l’ONF ne préconisait aucun élagage pour l'arbre n° 2 et seulement une taille de réduction en aplomb de la propriété riveraine pour l'arbre n° 1, puis qu'ils faisaient l'objet d'un entretien régulier par le conseil départemental, la cour d’appel a statué par des motifs impropres à justifier une restriction apportée au droit imprescriptible du propriétaire sur le fonds duquel s'étendent les branches de l'arbre du voisin de contraindre celui-ci à les couper.
Faits et procédure. Le 16 décembre 2011, à la suite d'une tempête, deux épicéas du fonds voisin appartenant au conseil départemental s’étaient abattus en partie sur la propriété des parcelles des requérants, sur lesquelles étaient implantées leur maison d'habitation et ses annexes, en provoquant des dégâts matériels.
Après avoir saisi le juge administratif, qui s’était déclaré incompétent, ils avaient assigné le conseil départemental en abattage de deux autres pins implantés sur ce fonds, à l'origine, selon eux, de troubles anormaux du voisinage, et en indemnisation des préjudices subis, tant à la suite du premier sinistre que des nuisances imputées à ces deux arbres.
Ils n’obtiendront pas gain de cause sur l’action en abattage, mais obtiendront satisfaction sur la demande subsidiaire en élagage.
Ils faisaient grief à l'arrêt rendu par la cour d’appel de Rennes (CA Rennes, 3 mars 2020, n° 18/01494 N° Lexbase : A90143GX) de rejeter leur demande tendant notamment à constater que la présence des pins constituait une atteinte à la sécurité des biens et des personnes, et à la voir qualifier de trouble de voisinage, et de condamner le conseil départemental à procéder, à peine d'astreinte, à l'abattage de ces arbres.
En vain. La Haute juridiction approuve la décision de la cour d’appel qui, en premier lieu, avait retenu qu’une première expertise diligentée en 2012 par l’Office national des forêts avait conclu qu'en situation météorologique normale, le renversement des deux arbres en litige, d'une hauteur respective de 25 et 29 mètres, était improbable, et que leur abattage n'avait pas été préconisé ; en second lieu, elle constatait que le diagnostic sanitaire effectué en juin 2019 avait confirmé, d'une part, que les arbres présentaient une dangerosité faible, qu'aucune intervention n'était nécessaire pour l'élimination de potentiels bois morts et, d'autre part, l'effectivité de l'entretien de ces végétaux par leur propriétaire.
Selon la Cour suprême, par ces seuls motifs, la cour d'appel, qui avait souverainement retenu que la présence des deux arbres, en dépit de leur hauteur et de leur localisation, ne représentait pas un danger pour la sécurité des personnes et des biens, ce dont il résultait qu'aucun trouble anormal du voisinage n'était caractérisé, avait légalement justifié sa décision.
Pour rejeter la demande subsidiaire d'élagage, la cour d’appel avait retenu que les arbres en litige ne présentaient pas un danger pour la sécurité des biens et des personnes, que le rapport réalisé en 2012 ne préconisait aucun élagage pour l'arbre n° 2 et seulement une taille de réduction en aplomb de la propriété riveraine pour l'arbre n° 1, puis relevé qu'ils faisaient l'objet d'un entretien régulier par le conseil départemental.
La décision de la cour d’appel est en revanche censurée sur ce point, au visa de l'article 673 du Code civil N° Lexbase : L3273ABT, aux termes duquel « celui sur la propriété duquel avancent les branches des arbres, arbustes et arbrisseaux du voisin peut contraindre celui-ci à les couper ».
Selon la Cour régulatrice, en statuant ainsi, par des motifs impropres à justifier une restriction apportée au droit imprescriptible du propriétaire sur le fonds duquel s'étendent les branches de l'arbre du voisin de contraindre celui-ci à les couper, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
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