Réf. : Cass. civ. 3, 15 juin 2022, n° 21-13.286, FS-B N° Lexbase : A4696773
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N1949BZ9
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par Anne-Lise Lonné-Clément
le 22 Juin 2022
► Viole l’article 1137 du Code civil pour ne pas avoir tiré les conséquences légales de ses propres constatations, la cour d’appel qui rejette la demande de nullité de la vente pour dol, alors qu'elle avait constaté que le vendeur avait apporté des réponses mensongères aux demandes répétées de l'acquéreur relatives à la présence d’algues sargasses, avec la volonté de tromper, sans qu’il soit nécessaire d’établir que le vendeur savait que ce mensonge portait sur un élément déterminant pour son contractant et avait été informé de sa santé fragile et de celle de son fils ;
► de même, viole l'article 1641 du Code civil en ajoutant à la loi une restriction qu'elle ne comporte pas, la cour d'appel qui, pour rejeter l'action en garantie des vices cachés engagée par l'acquéreur d'une maison en raison de nuisances provenant de l'échouage saisonnier d'algues sargasses, retient qu'un phénomène extérieur, naturel, dont la survenue était imprévisible ne constitue pas un vice caché.
En l’espèce, le litige portait sur la vente d’une maison d’habitation, située près de l'océan, en Martinique. Invoquant un défaut d'information sur les nuisances liées à l'échouage saisonnier d'algues sargasses, l'acquéreure avait assigné la venderesse en annulation de la vente sur le fondement du dol et, subsidiairement, en résolution de la vente sur le fondement de la garantie des vices cachés.
La cour d’appel l’avait déboutée sur chacune de ces demandes. Elle forme un pourvoi et obtient la cassation sur chacun de ces points.
La solution n’a rien ici de novateur, mais a le mérite de rappeler les principes en la matière, tels que posés par l’article 1137, aliénas 1 et 2, du Code civil N° Lexbase : L1978LKH, aux termes duquel :
« Le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des manœuvres ou des mensonges.
Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie ».
Pour rejeter la demande de nullité de la vente pour dol, la cour d’appel de Fort-de-France (CA Fort-de-France, 24 novembre 2020, n° 19/00276 N° Lexbase : A151538M) avait retenu que, si la venderesse avait volontairement omis d'informer l'acquéreur sur le phénomène des échouages des algues sargasses qui affectait le bien vendu, il n'était pas établi qu'elle savait que ce mensonge portait sur un élément déterminant pour son contractant et avait été informée de sa santé fragile et de celle de son fils.
La décision est censurée, au visa de l’alinéa 1er de l’article 1137 précité, par la Cour suprême qui reproche à la cour de ne pas avoir tiré les conséquences légales de ses constatations, alors qu'elle avait constaté que la venderesse avait apporté des réponses mensongères aux demandes répétées de l'acquéreure relatives à la présence des algues sargasses, avec la volonté de tromper.
La solution précitée de la Cour de cassation sur le terrain de l’action en nullité pour vice caché apporte en revanche une précision utile, contribuant à mieux définir la notion de « vice caché ».
Pour rejeter la demande en résolution de la vente, la cour d’appel avait retenu qu'un phénomène extérieur, naturel, dont la survenue était imprévisible, ne constituait pas un vice caché.
La Haute juridiction censure, car c’est alors ajouter à la loi (plus précisément à l’article 1641 du Code civil N° Lexbase : L1743AB8) une restriction qu'elle ne comporte pas.
Elle rappelle en effet la teneur de ce dernier article : « le vendeur est tenu de la garantie à raison des vices cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus ».
Pour aller plus loin : sur cet arrêt, v. E. Meiller, obs. in Chronique de jurisprudence du droit de la vente d’immeubles (avril à juin 2022), à paraître dans Lexbase Droit privé, n° 912, 30 juin 2022. |
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