Le Quotidien du 29 juillet 2021 : Éditorial

[A la une] Hommage au Professeur Jean Pradel

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par Evan Raschel, Professeur à l’Université Clermont Auvergne, Docteur en droit de l'Université de Poitiers

le 29 Juillet 2021

Chacun sans doute l’aura appris avec incrédulité, tant sa présence paraissait naturelle, presque immuable, pour qui a découvert ou approfondi le droit pénal grâce à ses écrits et enseignements. Le Professeur Jean Pradel nous a quittés. La nouvelle de son décès, début juillet, a suscité un vif émoi parmi la communauté universitaire, à la hauteur de la perte qu’il représente pour l’ensemble des pénalistes, mais aussi et surtout pour l’Université de Poitiers, qu’il aura durablement marquée de son empreinte.

C’est comme éminent spécialiste de droit pénal qu’il devait s’illustrer ; pourtant, Jean Pradel reçut une formation plus générale. Diplômé en droits privé et public mais aussi en histoire du droit, il prépara sa thèse, consacrée à la condition civile du malade (LGDJ, coll. Bibliothèque de droit privé, t. XXXIX, 1963 ), sous la direction d’un autre Professeur qui marqua les juristes poitevins, Gérard Cornu. Jean Pradel eut la chance de bénéficier non seulement de ses enseignements, mais également et notamment de ceux du doyen Carbonnier, de René Savatier et de son fils Jean…

Jean Pradel eut en réalité deux carrières ; si la seconde, le professorat, l’occupa plusieurs décennies, la première lui fournit une expérience pratique qu’il sut valoriser par la suite. Plus précisément, il devint dès la fin des années 1950 juge suppléant au tribunal de Brest où il séjourna brièvement – sa carrière fut alors interrompue par ses obligations militaires en Algérie. Rendu à la vie civile au printemps 1962, il poursuivit sa carrière de magistrat comme juge d’instruction à Bressuire puis à Poitiers. Il y retrouva sa terre natale (Jean Pradel est né en 1933 à Châtellerault) qu’il ne quittera plus – mis à part, bien sûr, ses très nombreux déplacements en France et à l’étranger, et mis à part encore une courte expérience comme maître de conférences à Tunis, peu après son agrégation en 1969, jusqu’à son retour à Poitiers trois ans plus tard.

Car l’essentiel de la carrière de Jean Pradel fut bien consacré à l’Université. Promu Professeur, il y occupa diverses importantes directions (IEJ, Institut de sciences criminelles…), y dirigea plusieurs dizaines de thèses, et y enseigna jusqu’à sa retraite en 2003 (retraite honorée par de formidables « Mélanges », édités en 2006 par Cujas), et bien après – l’auteur de ces lignes s’en souvient avec émotion, ayant bénéficié de ses conférences et enseignements en 2008 encore, dans le cadre du master 2 « Droit pénal approfondi et sciences criminelles ».

Mais si Jean Pradel fut enseignant, il fut surtout chercheur. Il était un pénaliste complet, comme en témoignent ses innombrables articles doctrinaux, ses trois ouvrages de référence publiés aux éditions Cujas : procédure pénale (20 éditions) ; droit pénal général (22 éditions) ; droit pénal spécial (8ème édition parue en 2020, co-écrite avec le Professeur Michel Danti-Juan, dont il dirigea la thèse), un précis Dalloz de droit pénal européen (qui n’a malheureusement plus été édité depuis la troisième édition en 2009) ou encore un plus original « Que sais-je ? » (PUF, 1989) consacré à l’Histoire des doctrines pénales. Plus récemment, Jean Pradel publia un dernier essai, intitulé « Deux siècles de politique pénale » (Cujas, 2020).

Grâce à cette activité impressionnante, la notoriété et les responsabilités de Jean Pradel dépassèrent rapidement et largement le cadre de l’Université de Poitiers. Il fut notamment président de l’Association française de droit pénal (AFDP). Au-delà, il fut un infatigable voyageur ; passionné par les droits étrangers, il fut un grand spécialiste de droit comparé, thématique à laquelle il consacra un autre ouvrage de référence (Droit pénal comparé, Dalloz, coll. Précis, 4ème éd., 2016).

Enfin, et peut-être surtout, Jean Pradel était un homme attachant, souriant et disponible. Comme beaucoup d’hommes et femmes de sa génération, il était pétri d’une grande culture et attaché à de solides principes et convictions. C’est ce souvenir qui restera auprès de ceux qui l’ont connu. C’est lui aussi – et bien d’autres –, qui restera certainement à ses proches, auxquels nous adressons nos sincères condoléances.

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