Le Quotidien du 20 mai 2021 : Actualité judiciaire

[A la une] Nicolas Sarkozy de retour au tribunal avec treize autres prévenus pour le dossier « Bygmalion »

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[A la une] Nicolas Sarkozy de retour au tribunal avec treize autres prévenus pour le dossier « Bygmalion ». Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/68078171-a-la-une-nicolas-sarkozy-de-retour-au-tribunal-avec-treize-autres-prevenus-pour-le-dossier-bygmalion
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par Vincent Vantighem, Grand Reporter à 20 Minutes

le 19 Mai 2021

Il connaît déjà le chemin. Le moelleux des sièges réservés aux prévenus. Et même la dureté de la barre sur laquelle il va forcément s’appuyer au moment de son interrogatoire. Un peu plus de deux mois après avoir été lourdement condamné à trois ans de prison dont deux avec sursis pour « corruption » et « trafic d’influence » dans l’affaire dite « des écoutes de Paul Bismuth », Nicolas Sarkozy a de nouveau rendez-vous au tribunal judiciaire de Paris, jeudi 20 mai. Au deuxième étage. Dans la salle d’audience 2.01. À l’endroit même où il a déjà passé trois semaines en décembre dernier.

Cette fois, avec treize autres prévenus, il doit être jugé pour le financement illégal de sa campagne présidentielle de 2012. C’est le dossier « Bygmalion » du nom de l’agence de communication impliquée dans cette affaire. L’audience devrait avoir lieu alors qu’un premier renvoi était intervenu en mars, en raison de l’état de santé de l’un des avocats de la procédure touché par le coronavirus.

 Une symphonie pour l’entrée en scène du président candidat

Le tribunal va donc se replonger dans la guerre fratricide entre copéistes, fillonistes et sarkozystes qui a éparpillé la droite « façon puzzle » après son échec à l’élection présidentielle de 2012. À l’époque, après un premier quinquennat, Nicolas Sarkozy avait décidé de rempiler pour un mandat supplémentaire à l’Élysée. Et pour convaincre l’opinion publique, il avait opté pour une campagne éclair. De quelques mois à peine. Un peu sur le modèle de François Mitterrand en 1988. Avec comme slogan « La France forte » plutôt que « La France unie ».

« La France forte » donc. À toute vitesse surtout. En effet, la campagne de l’ancien chef de l’État a rapidement pris l’allure d’un train que rien ne semblait pouvoir arrêter et qui a fini par dérailler. Alors que son équipe avait tablé sur l’organisation d’une quinzaine de meetings coûteux – une vingtaine grand maximum – Nicolas Sarkozy en fera finalement quarante-quatre entre janvier et le 6 mai 2012. Soit plus de huit par mois tandis que son challenger victorieux, François Hollande, s’en contentera d’une dizaine sur toute la période.

Pour emporter la bataille, Nicolas Sarkozy avait choisi d’en mettre plein la vue. Après une première réunion un peu terne à Marseille (Bouches-du-Rhône), ses équipes décident de changer de braquet. Les chaînes d’information en continu attirent de plus en plus de téléspectateurs ? On leur fournit des images grandioses. Quitte à tirer des filins sur lesquels les caméras se déplacent. Il faut voir des centaines de militants agiter des drapeaux bleu blanc rouge ? On affrète des trains et des bus pour les faire venir. Il faut une musique qui claque quand le président candidat entre sur scène ? On compose une symphonie et on la fait jouer par un orchestre.

Évidemment, tout cela a un coût. Chargées de monter les « spectacles », la société Bygmalion et sa filiale événementielle, Event & Cie, alignent les factures. Jusqu’à ce que l’équipe de campagne réalise que le plafond de dépenses autorisé par la loi (22,5 millions d’euros pour le second tour) va être dépassé, invalidant de fait la candidature de Nicolas Sarkozy… Les experts-comptables émettent alors des doutes sur la tenue finale des comptes. Mais la magie de la campagne opère. Nicolas Sarkozy remonte dans les sondages. Et rien ne peut arrêter la machine lancée. Le 11 mars 2012, quatre jours seulement après un premier avertissement des comptables, le candidat tient une réunion publique à Villepinte dont le coût (près de 6 millions d’euros) représente à lui seul le quart du budget autorisé…

Nicolas Sarkozy encourt un an de prison et 3 750 euros d’amende

Pour réduire la facture tout en maintenant le train de la campagne, les cadres de l’UMP et de la société Bygmalion sont aujourd’hui accusés d’avoir monté un système de fausses factures. Le principe était de faire supporter les coûts par le parti politique plutôt que par le candidat en faisant croire qu’ils correspondaient à des conventions politiques bidon sur la pêche, l’Europe ou encore l’immigration plutôt qu’à des meetings de campagne…

« Au total, 18,5 millions de fausses factures ont été réglées par l’UMP, allégeant d’autant les comptes de l’Association pour le financement de la campagne de Nicolas Sarkozy », assure ainsi le juge d’instruction Serge Tournaire qui parle, dans son ordonnance de renvoi, de « maquillages », de « manipulations » et surtout de « dérapages ». Lors de l’instruction, Nicolas Sarkozy a assumé son statut de candidat, mais a martelé ne pas avoir été mis au courant de la manœuvre illégale. Le juge n’en a d’ailleurs pas trouvé la trace. « L’enquête n’a pas établi qu’il avait ordonné [les fraudes] ni qu’il y avait participé ni même qu’il en avait été informé […] Mais il en a incontestablement bénéficié », écrit encore Serge Tournaire pour justifier du renvoi de l’ancien chef de l’État devant le tribunal.

Une analyse que n’a pas partagée Renaud Van Ruymbeke. Cosaisi du dossier lors de l’instruction, il n’a pas souhaité apposer sa signature en bas de l’ordonnance. Ce qui est rare. Et ce que ne manquera pas de souligner, lors de l’audience, la défense de l’ancien président de la République. Uniquement renvoyé pour le délit de « financement illégal de campagne électorale », Nicolas Sarkozy encourt une peine d’un an de prison et de 3 750 euros d’amende. Ses coprévenus – anciens cadres de l’UMP, de Bygmalion et organisateurs de la campagne électorale – devront, eux, répondre de faits plus graves « d’escroquerie », « d’abus de confiance » et de « faux » et « usage de faux », punis de cinq ans d’emprisonnement au maximum.

Le procès devrait durer jusqu’au 22 juin. Nicolas Sarkozy a déjà fait savoir qu’il n’assisterait qu’aux audiences le concernant personnellement. Selon nos informations, il devrait être interrogé sur le fond la semaine du 14 juin.

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