Réf. : Cass. civ. 1, 16 septembre 2020, n° 18-25.429, FS-P+B (N° Lexbase : A38033UE)
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N4635BYC
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par Anne-Lise Lonné-Clément
le 24 Septembre 2020
► 1° L'action en répétition des paiements effectués au titre d'une contribution à l'entretien et à l'éducation d'un enfant fondée sur l’effet déclaratif d’un jugement accueillant une action en contestation du lien de filiation ne peut être dirigée que contre celui qui en a reçu paiement en qualité de créancier ; elle ne peut dès lors, en l’occurrence, être dirigée que contre la mère, et non également contre le père biologique, au motif qu’il n’aurait pas contribué à son entretien et se serait en conséquence enrichi ; seule une action fondée sur l'enrichissement injustifié peut être engagée contre le père ayant profité du paiement.
2° à défaut de dispositions propres aux quasi-contrats, l'action en répétition des paiements effectués au titre d'une contribution à l'entretien et à l'éducation d'un enfant fondée sur l’effet déclaratif d’un jugement accueillant une action en contestation du lien de filiation est soumise au délai de prescription quinquennale de droit commun.
Les faits. Un enfant était né du mariage de M. C et de Mme B. Le 8 janvier 2008, alors que ces derniers étaient en instance de divorce, M. A avait reconnu l'enfant. Une ordonnance de non-conciliation du 7 février 2008 avait condamné M. C à verser mensuellement à Mme B une somme de 300 euros à titre de contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant. Le 16 mai 2008, M. A avait engagé une action en contestation et en établissement de paternité, qui avait été accueillie par jugement du 29 avril 2016.
La cour d’appel de Rouen avait condamné solidairement M. A et Mme B à payer à M. C la somme de 29 400 euros en remboursement de la contribution mensuelle à l'entretien et à l'éducation de l’enfant du 7 février 2008 au 29 avril 2016.
La décision est censurée par la Cour suprême qui, par sa décision du 16 septembre 2020, vient préciser les conditions d’exercice de l'action en répétition des paiements effectués au titre d'une contribution à l'entretien et à l'éducation d'un enfant fondée sur l’effet déclaratif d’un jugement accueillant une action en contestation du lien de filiation, et ceci à deux égards, d’une part s’agissant des personnes contre qui l’action peut être dirigée, d’autre part s’agissant de son délai de prescription.
Les requérants contestaient en premier lieu la condamnation solidaire, faisant valoir que l’action en répétition de l’indu ne peut être engagée que contre celui qui a reçu le paiement ou pour le compte duquel le paiement a été reçu ; il n’était donc, selon eux, pas possible de condamner le père biologique en répétition de l’indu parce qu’il n’était ni le réceptionnaire, ni le destinataire des paiements litigieux.
L’argument est accueilli par la Haute juridiction, qui rappelle, d’abord, que l'effet déclaratif attaché à un jugement accueillant une action en contestation du lien de filiation fait disparaître rétroactivement l'obligation d'entretien qui pesait sur le parent évincé en application de l’article 371-2 du Code civil, en sorte que les paiements qu'il a fait pour subvenir aux besoins de l'enfant se trouvent dépourvus de cause ; ensuite que, selon l’article 1376 du Code civil, celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s'oblige à le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu.
Il en résulte, comme indiqué ci-dessus, qu’une telle action en répétition de l’indû ne pouvait dès lors, en l’occurrence, être dirigée que contre la mère, et non également contre le père biologique, au motif qu’il n’aurait pas contribué à son entretien et se serait en conséquence enrichi. La Haute juridiction précise alors que, seule une action fondée sur l'enrichissement injustifié pouvait être engagée contre le père biologique ayant profité du paiement.
Les requérants faisaient également grief à l’arrêt rendu par la cour d’appel de Rouen d’avoir retenu que l'action en répétition de l'indu fondée sur l'effet déclaratif d'un jugement accueillant une action en contestation de paternité n’était pas soumise à la prescription quinquennale.
Ils obtiennent là encore, la cassation de l’arrêt sur ce point par la Haute juridiction, qui précise que le délai de prescription quinquennale prévu par l’article 2224 du Code civil (N° Lexbase : L7184IAC), qui correspond à la prescription de droit commun, est applicable, à défaut de dispositions propres aux quasi contrats, à l'action en répétition des paiements effectués en exécution d'une contribution à l'entretien et à l'éducation d'un enfant fondée sur l'effet déclaratif d’un jugement accueillant une action en contestation de paternité.
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