Réf. : CJUE, 16 juillet 2020, aff. C-129/19, Présidenza del Consiglio dei Ministri/BV (N° Lexbase : A24513R9)
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N4161BYR
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par Adélaïde Léon
le 16 Juillet 2020
► La Directive n° 2004/80 du Conseil du 29 avril 2004, relative à l'indemnisation des victimes de la criminalité (
L’indemnisation octroyée ne doit pas nécessairement couvrir la réparation intégrale des dommages mais elle doit être adéquate et son montant ne peut être purement symbolique.
Résumé des faits. Victime d’une agression sexuelle commise sur le territoire italien, une citoyenne italienne résidente n’a pas pu obtenir, en raison de la fuite des auteurs, le versement de la somme que ces derniers avaient été condamnés à lui payer à titre de dommages et intérêts. L’intéressée avait assigné en justice la présidence du Conseil des ministres italienne en réparation du dommage qu’elle estimait avoir subi du fait de la non-transposition, en temps utile, de la Directive n° 2004/80 du Conseil du 29 avril 2004, relative à l'indemnisation des victimes de la criminalité (ci-après « Directive n° 2004/80 ») (N° Lexbase : L0716GTP). En première instance, la présidence du Conseil des ministres a été condamnée à verser à la victime 90 000 euros.
En cause d’appel. En appel, le montant de l’indemnisation dû par la présidence du Conseil des ministres a été réduit à 50 000 euros. La présidence du Conseil des ministres a formé un pourvoi en cassation contre la décision d’appel.
À hauteur de cassation. La Cour de cassation italienne a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour deux questions préjudicielles. L’une portait sur la possible mise en cause de la responsabilité extracontractuelle d’un État membre du fait de la transposition tardive de la Directive n° 2004/80 à l’égard de victimes résidant sur son territoire. L’autre question concernait le caractère « juste et approprié », au sens de ladite directive, de la somme forfaitaire prévue par la réglementation italienne pour l’indemnisation des victimes d’agressions sexuelles.
Décision. La Cour constate que la Directive n° 2004/80 impose aux États membres de se doter d’un régime d’indemnisation couvrant toutes les victimes de la criminalité intentionnelle violente commise sur son territoire et non seulement les victimes se trouvant dans une situation transfrontalière. Dès lors cette obligation vaut également pour les victimes résidant sur le territoire de l’État membre dans lequel l’infraction a été commise. Pour la Cour, le régime de la responsabilité extracontractuelle d’un État membre pour le dommage causé par la violation du droit à réparation découlant de la Directive n° 2004/80 a vocation à s’appliquer, au motif que cet État n’a pas transposé ce texte en temps utile, à l’égard de victimes résidant dans cet État membre, sur le territoire duquel l’acte de criminalité intentionnelle violente a été commis.
Outre l’exigence d’un caractère « juste et approprié » la Cour relève également que la Directive n° 2004/80 ne comporte pas de précision s’agissant du montant de l’indemnisation des victimes et laisse aux États une marge d’appréciation sur cet aspect. La Cour reconnaît qu’il n’est pas nécessaire que cette indemnisation assure une réparation complète du dommage subi par les victimes. Elle juge toutefois que l’indemnité fixée ne peut avoir un caractère purement symbolique ou manifestement insuffisant compte tenu de la gravité des conséquences subies par les victimes. La Cour de justice précise à cet égard qu’une indemnisation forfaitaire ne fait pas, par nature, obstacle à une indemnisation « juste et appropriée » mais doit comporter un barème suffisamment détaillé pour assurer l’octroi d’indemnités adéquates.
Contexte. En 2016, la Cour de justice avait déjà condamné l’Italie au motif que cet État membre n’avait pas pris toutes les mesures nécessaires pour garantir l’existence, dans les situations transfrontalières, d’un régime d’indemnisation des victimes de toutes les infractions intentionnelles violentes commises sur son territoire (CJUE, 11 octobre 2016, aff. C-601/14 N° Lexbase : A5041R7T).
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