Le Quotidien du 20 mai 2020 : Covid-19

[Brèves] Suspension de l’utilisation des drones pour contrôler le déconfinement à Paris par le Conseil d’Etat

Réf. : CE référé, 18 mai 2020, n° 440442 et n° 440445 (N° Lexbase : A64093LX)

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[Brèves] Suspension de l’utilisation des drones pour contrôler le déconfinement à Paris par le Conseil d’Etat. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/58070389-breves-suspension-de-lutilisation-des-drones-pour-controler-le-deconfinement-a-paris-par-le-conseil-
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par Vincent Téchené

le 27 Mai 2020

► Il est enjoint à l’Etat de cesser, sans délai, de procéder aux mesures de surveillance par drone, du respect, à Paris, des règles de sécurité sanitaire applicables à la période de déconfinement.

Tel est le sens d’une ordonnance de référé du Conseil d’Etat rendue le 18 mai 2020 (CE référé, 18 mai 2020, n° 440442 et n° 440445 N° Lexbase : A64093LX).

L’affaire. La Quadrature du Net et la Ligue des droits de l’Homme ont demandé au tribunal administratif de Paris d’ordonner l’arrêt de la surveillance par drones mis en place par la préfecture de police afin de faire respecter les mesures de confinement. Leur requête ayant été rejetée (TA Paris, 5 mai 2020, n° 2006861 N° Lexbase : A23533LQ), les associations ont fait appel devant le Conseil d’Etat.

La décision. La préfecture de police de Paris avait indiqué que les drones n’étaient pas utilisés pour identifier des personnes, mais uniquement pour détecter des rassemblements du public à Paris contraires aux mesures sanitaires en vigueur et pouvoir ainsi procéder à la dispersion du rassemblement ou l’évacuation des lieux (les drones survolant la ville à une hauteur de 80 à 100 mètres, en utilisant un grand angle et sans capturer d’images en l’absence de carte mémoire). Le juge des référés a toutefois relevé que les drones utilisés sont dotés d’un zoom optique et peuvent voler en dessous de 80 mètres, ce qui permet de collecter des données identifiantes. Il a observé que les drones ne sont dotés d’aucun dispositif technique permettant de s’assurer que les informations collectées ne puissent conduire à identifier des personnes filmées, et ce, pour un autre usage que l’identification de rassemblements publics.

Dès lors, le juge des référés a estimé que le dispositif litigieux constitue un traitement de données à caractère personnel qui relève du champ d’application de la Directive 2016/680 du 27 avril 2016 (N° Lexbase : L9729K7H). Ce traitement, qui est mis en œuvre pour le compte de l’Etat, relève dès lors des dispositions de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés (N° Lexbase : L8794AGS) qui sont applicables aux traitements compris dans le champ d’application de cette Directive parmi lesquelles l’article 31 impose une autorisation par arrêté du ou des ministres compétents ou par décret, selon les cas, pris après avis motivé et publié de la CNIL. Pour le Conseil, compte tenu des risques d’un usage contraire aux règles de protection des données personnelles qu’elle comporte, la mise en œuvre, pour le compte de l’Etat, de ce traitement de données à caractère personnel sans l’intervention préalable d’un texte réglementaire en autorisant la création et en fixant les modalités d’utilisation devant obligatoirement être respectées ainsi que les garanties dont il doit être entouré caractérise une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de la vie privée.

Par conséquent, il est ordonné à l’Etat de cesser sans délai la surveillance par drone, tant qu’un arrêté ou décret ministériel n’aura pas été pris sur le sujet après avis de la CNIL, ou tant que les drones ne seront pas dotés d’un dispositif de nature à rendre impossible l’identification des personnes filmées.

A la suite de cette ordonnance, la CNIL a publié un communiqué également daté du 18 mai 2020 dans lequel elle précise qu’elle s’est interrogée depuis plusieurs semaines sur ces pratiques. Elle a ainsi diligenté des contrôles auprès du ministère de l’Intérieur concernant l’usage de drones dans plusieurs villes. Ces contrôles visent des services de la police nationale et de la gendarmerie. Des vérifications similaires sont effectuées auprès de plusieurs communes dont les polices municipales ont elles aussi, semble-t-il, eu recours à des drones. Ces investigations portent tant sur la situation actuelle que sur ce qui s’est passé durant la période de confinement. Les premières demandes d’information à l’initiative de la CNIL datent du 23 avril 2020 et sont en cours d’instruction, en l’attente notamment des éléments de réponse du ministère de l’Intérieur. La CNIL fait également savoir qu’elle prendra position sur cette question à l’issue des procédures de contrôle en cours.

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