La lettre juridique n°823 du 7 mai 2020 : Covid-19

[Brèves] Crise sanitaire : le Conseil d’Etat ordonne le rétablissement de l’enregistrement des demandes d'asile en Ile-de-France

Réf. : CE référé, 30 avril 2020, n° 440250 (N° Lexbase : A10753LE)

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par Marie Le Guerroué

le 06 Mai 2020

► Le juge des référés ordonne au ministre de l’Intérieur et à l’OFII de rétablir dans un délai de cinq jours et dans les conditions sanitaires imposées par le covid-19, l’enregistrement des demandes d’asile, en priorité de celles émanant des personnes présentant une vulnérabilité particulière, et de rouvrir la plateforme téléphonique de prise de rendez-vous.

Telle est la solution d'une ordonnance rendue par le juge des référés le 30 avril 2020 (CE référé, 30 avril 2020, n° 440250 N° Lexbase : A10753LE).

Recours. Sept associations dont la Ligue des droits de l’Homme et le Groupe d'information et de soutien des immigrés (Gisti) et sept particuliers avaient formé un recours devant le tribunal administratif de Paris. Ce dernier avait ordonné à l’administration le rétablissement du dispositif d'enregistrement des demandes d'asile en Ile-de-France, supprimé en mars dernier. Le ministère de l'Intérieur et de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) demandaient l’annulation de cette décision au Conseil d’Etat.

Obligations de l'autorité compétente. Le Conseil d’Etat rappelle qu’en application des dispositions transposant la Directive 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale (N° Lexbase : L9264IXE), l’autorité compétente qui, sur sa demande d’admission au bénéfice du statut de réfugié, doit mettre le demandeur d’asile en possession d’une autorisation provisoire de séjour jusqu’à ce qu’il ait été statué sur cette demande, doit également, aussi longtemps qu’il est admis à se maintenir sur le territoire en qualité de demandeur d’asile et quelle que soit la procédure d’examen de sa demande, lui assurer, selon ses besoins et ses ressources, des conditions d’accueil lui permettant de satisfaire à ses besoins.

Contexte. Le Conseil d’Etat relève qu’en raison de l’épidémie de covid-19, et alors que, par une circulaire du 16 mars 2020, le ministre de l’Intérieur avait indiqué aux préfets que l’accueil des demandeurs d’asile figurait au nombre des missions qui devaient continuer à être assurées, les guichets uniques pour demandeur d'asile (GUDA) des départements d’Ile-de-France ont suspendu leur activité le 17 mars, à l’exception du GUDA de Paris, qui a cessé de fonctionner le 27 mars. Cette fermeture générale devait cependant être accompagnée, ainsi que l’administration l’avait indiqué dans le cadre de l’instance de référé ayant donné lieu à l’ordonnance du 9 avril 2020 (CE référé, 9 avril 2020, n° 439895 N° Lexbase : A75023K3), d’une part, de la poursuite de l’enregistrement des demandes des personnes vulnérables, d’autre part, d’un recensement par les préfectures, en lien avec les associations et les Structures de premier accueil des demandeurs d’asile (SPADA), des personnes qui manifesteraient l’intention de présenter une demande d’asile. C’est notamment au bénéfice de ces deux mesures que le juge des référés du Conseil d’Etat avait estimé qu’il n’était pas porté d’atteinte grave et manifestement illégale au droit d’asile.

Pas de recensement. Même si les juges notent qu’une « permanence » est assurée dans chaque préfecture pour traiter les demandes d’asile des personnes vulnérables et que six signalements seulement ont été effectués dans ce cadre depuis la fermeture des GUDA, il résulte de l’instruction que ce dispositif, peu ou pas connu par les personnes intéressées, mais aussi par les associations qui leur viennent en aide, ne saurait constituer la continuation de l’enregistrement des demandes d’asile pour ces personnes. Par ailleurs, s’agissant du recensement des personnes ayant l’intention de présenter une demande d’asile, le ministre de l’Intérieur se borne à indiquer dans la présente instance qu’une consigne a été donnée en ce sens, consigne dont au demeurant les associations défenderesses déclarent n’avoir pas eu connaissance, et qu’« une enquête sur ce point est en cours auprès des préfectures qui seront chargées de recenser dans les structures d’hébergement créées pendant le Covid au plan national les personnes souhaitant demander l’asile». Ainsi, en l’état de l’instruction, il n’apparaît pas que ce recensement ait été effectivement mis en œuvre.

Mobilisation des agents. Par ailleurs, l’administration fait valoir l’impossibilité de disposer d’un minimum d’agents pour remettre en fonction, ne serait-ce que partiellement, certains GUDA d’Ile-de-France. Le juge note que la mobilisation d’un minimum d’agents est possible malgré le contexte pour rouvrir les guichets d’enregistrement en nombre suffisant. L’impossibilité d’appliquer les mesures de protection et de distanciation sociale ne peut pas non plus être invoquée selon le juge, qui observe que d’autres préfectures, notamment dans des départements particulièrement touchés par l’épidémie, peuvent les appliquer.

Décision CE / urgence remplie. Le Conseil d’Etat relève qu’il résulte des indications fournies par le ministre de l’Intérieur après l’audience :

1) que les étrangers en situation irrégulière qui manifesteraient l’intention de déposer une demande d’asile ne sauraient faire l’objet d’une mesure d’éloignement ;

2) que les préfets des départements où les GUDA ont été fermés recevront instruction de ne décompter qu’à partir de la fin de l’état d’urgence sanitaire le délai de quatre-vingt-dix jours depuis l’entrée sur le territoire national au terme duquel le préfet peut placer en procédure accélérée la demande d’asile, et qu’en tout état de cause la personne éventuellement concernée pourra faire valoir ses droits devant le juge administratif ;

3) que la réouverture des GUDA figure dans les plans de continuité de toutes les préfectures concernées pour la période s’ouvrant le 11 mai ;

4) que des mesures ont été prises pour assurer que tous les migrants qui le souhaitent bénéficient, dans le cadre du programme national d’aide aux personnes démunies, d’un hébergement et de «chèques services» ;

Néanmoins, pour la Haute Cour, la carence de l’Etat à mettre en œuvre l’enregistrement des demandes d’asile constitue une atteinte grave et manifestement illégale au droit d'asile et justifie l’intervention du juge des référés. Le juge des référés ordonne au ministre de l’Intérieur et à l’OFII de rétablir dans un délai de cinq jours et dans les conditions sanitaires imposées par le covid-19, l’enregistrement des demandes d’asile, en priorité de celles émanant des personnes présentant une vulnérabilité particulière, et de rouvrir la plateforme téléphonique de prise de rendez-vous.

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