Réf. : Cass. crim., 11 décembre 2019, n° 18-84.938, FS-P+B+I (N° Lexbase : A1517Z8P)
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par June Perot
le 18 Décembre 2019
► Selon l’article 388 du Code civil (N° Lexbase : L0260K7R), le mineur est l’individu qui n’a pas encore l’âge de dix-huit ans accomplis ; les examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l’âge, en l’absence de documents d’identité valables et lorsque l’âge allégué n’est pas vraisemblable, ne peuvent être réalisés que sur décision de l’autorité judiciaire et après recueil de l’accord de l’intéressé ; les conclusions de ces examens, qui doivent préciser la marge d’erreur, ne peuvent à elles seules permettre de déterminer si l’intéressé est mineur ; le doute profite à l’intéressé ;
► Selon l’article 1er de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945, relative à l’enfance délinquante, les mineurs auxquels est imputé un délit ne peuvent être déférés aux juridictions pénales de droit commun et ne sont justiciables que des tribunaux pour enfants.
C’est ainsi que se prononce la Chambre criminelle dans un arrêt du 11 décembre 2019 (Cass. crim., 11 décembre 2019, n° 18-84.938, FS-P+B+I N° Lexbase : A1517Z8P).
Aperçu des faits. Déféré devant le procureur de la République, un homme, après avoir été incarcéré par le JLD, a été traduit devant le tribunal correctionnel selon la procédure de comparution immédiate. Devant le tribunal correctionnel, il a présenté des conclusions soutenant l’incompétence de cette juridiction au motif qu’il est mineur, comme né le 18 février 2002, et réclamant l’annulation du procès-verbal de comparution devant le procureur de la République, au motif que celui-ci l’avait interrogé sans qu’il soit assisté d’un avocat.
Les premiers juges ont rejeté ces exceptions, reconnu l’intéressé coupable et condamné à un an d’emprisonnement avec maintien en détention provisoire. Le prévenu et le procureur ont interjeté appel des dispositions pénales du jugement.
En cause d’appel. L’intéressé a soutenu qu’il était mineur, comme né en 2002, expliquant qu’il avait fait l’objet d’une ordonnance de placement, rendue par le juge des enfants de Nanterre, en date du 14 février 2018, qui mentionne qu’il est né le 18 février 2002. Il a prétendu que sa minorité résultait aussi de son acte de naissance, qui avait été produit devant le tribunal correctionnel.
Pour rejeter cette exception, l’arrêt d’appel indique que la détermination de l’âge osseux du prévenu à dix-neuf ans par le médecin qui l’a finalement examiné est un élément que la cour d’appel n’est pas en mesure de combattre et qui, corrélé aux variations du prévenu sur les éléments de son identité au cours des procédures auxquelles il a été soumis, la convainquent qu’il doit être jugé comme majeur.
Un pourvoi a été formé.
Cassation. Reprenant la solution susvisée, la Haute juridiction prononce la censure de l’arrêt. En premier lieu, pour retenir la majorité de l’intéressé, la cour d’appel a pris en considération un examen médical qui ne pouvait être pratiqué qu’en l’absence de documents d’identité valables. Elle ne s’explique pas sur le moyen du demandeur, soutenant qu’il avait prouvé sa minorité par la production, devant le tribunal correctionnel, d’un document d’état-civil, traduit en français et par une décision du juge des enfants, rendue dans une procédure d’assistance éducative ayant retenu sa minorité.
En deuxième lieu, la cour d’appel a retenu les résultats d’un examen osseux, en énonçant que l’intéressé avait d’abord refusé cet examen, qui avait été finalement pratiqué. L’arrêt ne précise pas quelle autorité judiciaire a ordonné cet examen, ne constate pas que l’intéressé a donné son accord à sa réalisation et ne répond pas au moyen dans lequel il soutient qu’il ne résulte pas de cet examen qu’il y ait consenti.
Enfin, selon la Cour, l’arrêt n’indique pas la marge d’erreur de l’examen, et ne précise pas les éléments qui justifiaient d’écarter le doute existant sur l’âge du demandeur.
La protection de l’intérêt supérieur de l’enfant. La nécessaire prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant a été consacrée par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2002-461 du 29 août 2002 (Cons. const., décision n° 2002-461, du 29 août 2002 N° Lexbase : A2314AZQ), qui a élevé au rang de principe fondamental reconnu par les lois de la République le principe de spécificité du droit pénal des mineurs. Plus récemment, le Conseil constitutionnel, dans une décision n° 2018-768 QPC du 21 mars 2019 (Cons. const., décision n° 2018-768 QPC, du 21 mars 2019 N° Lexbase : A3247XYW), a constitutionnalisé l’intérêt supérieur de l’enfant en se fondant sur les alinéas 10 et 11 du Préambule de la Constitution de 1946. Cette décision y fait suite.
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