Réf. : Cass. crim., 18 juin 2019, n° 18-85.298, FS-P+B+I (N° Lexbase : A9361ZEG)
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par June Perot
le 26 Juin 2019
► De même que la responsabilité en cascade prévue par l’article 42 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse (N° Lexbase : L7589AIW) ne s’applique que lorsque le journal est imprimé et publié en France (Cass. crim., 25 octobre 2005, n° 04-82.400, F-P+F N° Lexbase : A3526DL8), la responsabilité en cascade prévue par l’article 93-3 de la loi du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle (N° Lexbase : L0991IEG) ne s’applique que lorsque le service de communication au public par voie électronique est fourni depuis la France.
Ainsi statue la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 18 juin 2019 (Cass. crim., 18 juin 2019, n° 18-85.298, FS-P+B+I N° Lexbase : A9361ZEG).
Dans cette affaire, à la suite de la mise en ligne, sur un site internet fourni par une association de droit suisse «Riposte laïque», de deux textes incitant à expulser les musulmans, le procureur de la République a fait citer devant le tribunal correctionnel une personne supposée être le directeur de publication, en raison de certains passages de ces deux textes. Après avoir rejeté une exception d’incompétence tirée de l’absence de critères de rattachement des propos au territoire français, les juges du premier degré ont renvoyé le prévenu des fins de la poursuite. Le ministère public, ainsi que la LICRA et la LDH, qui s’étaient constituées partie civile, ont relevé appel de cette décision.
Pour confirmer le jugement, l’arrêt a énoncé qu’il était établi que l’association de droit français «Riposte laïque», que le prévenu avait présidée, ayant d’ailleurs été condamné à ce titre en qualité de directeur de la publication du site litigieux, a postérieurement transféré la publication dudit site à l’association «Riposte laïque» suisse. Le président de cette dernière association a confirmé la date des publications et le nom de l’auteur, mais a refusé de fournir plus d’informations. Un précédent président de cette même association suisse, avait confirmé à deux reprises lors d’enquêtes antérieures être, à ce titre, le directeur de publication du site concerné et a été condamné en cette qualité pour des propos qui y avaient été publiés. Les juges ont également retenu que l’adresse électronique de contact du site était une adresse secondaire de celle du prévenu, et que les prélèvements correspondants étaient effectués sur un compte au nom de celui-ci, qui était également titulaire du compte Paypal utilisé par le site. Si une perquisition a permis de trouver chez le prévenu les mots de passe et codes d’accès au site, plusieurs autres personnes ont attesté en disposer également pour publier leurs textes, les mettre à jour, les illustrer ou les corriger.
Ils en ont déduit qu’au moment des faits dont ils étaient saisis, il n’était pas établi, avec la certitude nécessaire au prononcé d’une condamnation pénale, que le prévenu serait encore le directeur de publication ou le responsable, en droit ou en fait, de ce site, ni qu’il serait le dirigeant de droit ou de fait de l’association suisse, qui édite le site depuis l’étranger, pas davantage que n’est démontrée sa participation personnelle à la gestion du site ni une quelconque participation à la mise en ligne ou à la rédaction des propos incriminés. Un pourvoi a été formé par les parties civiles.
Reprenant la solution susvisée, la Chambre criminelle, considère que les juges n’avaient pas à examiner si le prévenu était ou non le directeur de la publication du site internet, dès lors que le service de communication litigieux n’était pas fourni depuis la France.
Elle considère toutefois que la cassation n’est pas encourue dans la mesure où les juges du fond ont relevé qu’il n’était pas démontré que le prévenu avait personnellement participé à la diffusion en France, sur un site internet édité à l’étranger, des propos litigieux, dont il n’était plus contesté qu’ils étaient destinés au public français (cf. l’Ouvrage «Droit pénal général», E. Raschel, La responsabilité pénale, Les règles relatives à internet N° Lexbase : E2277GAL).
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