Réf. : Cass. civ. 1, 9 mai 2019, n° 18-12.073, FS-P+B (N° Lexbase : A0630ZBX)
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par Marie Le Guerroué
le 22 Mai 2019
► L’article 21 de la loi du 31 décembre 1971 (N° Lexbase : L6343AGZ), dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 (N° Lexbase : L8851IPI), ne déroge pas à l’article 1843-4 du Code civil (N° Lexbase : L8956I34), il n’y déroge qu’en ce qu’il donne compétence au Bâtonnier pour procéder à la désignation d'un expert aux fins d'évaluation des parts sociales ou actions de sociétés d'avocats ;
► Sous l’empire des dispositions de l’article 1843-4 du Code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014 (N° Lexbase : L1321I4P), l’expert dispose d’une entière liberté d’appréciation pour fixer la valeur des parts sociales selon les critères qu’il juge opportuns.
Tels sont les enseignements de l’arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 9 mai 2019 (Cass. civ. 1, 9 mai 2019, n° 18-12.073, FS-P+B N° Lexbase : A0630ZBX).
A la suite d’un différend entre associés au sein d’une société civile professionnelle d’avocats (la SCP), devenue une SELARL, un avocat et la SCP -tous deux retrayants de la SCP-, avaient saisi le Bâtonnier de l’Ordre des avocats au barreau de Rennes, par lettre du 23 mars 2010, d’une demande d’arbitrage portant notamment sur l’établissement des comptes intermédiaires au 30 octobre 2009, date de leur retrait, et sur la valorisation de leurs parts sociales détenues dans la SCP. Par décision avant dire droit du 21 juin 2010, le Bâtonnier avait désigné un expert pour déterminer la valeur des parts sociales de la SCP et en qualité de sapiteur pour lui proposer des éléments lui permettant de trancher les autres points en litige, puis avait statué par décision du 27 février 2017.
La SCP et les autres associés faisaient grief à l’arrêt de dire que l’expert avait commis une erreur grossière, d’écarter en conséquence le caractère impératif de son évaluation des parts sociales, et de renvoyer les parties à désigner ensemble un expert ou à saisir le président du tribunal de grande instance de Rennes pour y procéder.
La Cour de cassation confirme, cependant, l’interprétation de la cour d’appel, l’article 21 de la loi du 31 décembre 1971 (N° Lexbase : L6343AGZ), dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011, ne dérogeait pas à l’article 1843-4 du Code civil (N° Lexbase : L8956I34). Dans sa rédaction issue de cette dernière loi, il n’y déroge qu’en ce qu’il donne compétence au Bâtonnier pour procéder à la désignation d'un expert aux fins d'évaluation des parts sociales ou actions de sociétés d'avocats. C’est donc à bon droit qu’ayant constaté que l’expert avait été désigné le 21 juin 2010, que la cour d’appel a retenu que son évaluation était soumise aux dispositions d’ordre public de l’article 1843-4 du Code civil et qu’elle-même ne pouvait procéder à l’évaluation des parts sociales. Le moyen n’est donc, selon la Cour, pas fondé.
Pour écarter le caractère impératif de l’évaluation par l’expert des parts de la SCP, l’arrêt retenait qu’en se fondant sur une disposition abrogée qui a déterminé son choix et en refusant de prendre en compte un usage non discuté conforme tant au règlement intérieur qu’aux statuts modifiés et créateurs de droit, l’expert avait commis une erreur grossière quant au mode même de détermination de la valeur des parts sociales.
La première chambre civile estime, au visa de l’article 1843-4 du Code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014, qu’en statuant ainsi, alors que, sous l’empire des dispositions applicables à la date de sa désignation, l’expert disposait d’une entière liberté d’appréciation pour fixer la valeur des parts sociales selon les critères qu’il jugeait opportuns, la cour d’appel, qui s’est déterminée par des motifs impropres à caractériser une erreur grossière dans cette évaluation, a violé le texte précité. La Haute Cour censure donc sur ce point l’arrêt rendu par la cour d’appel de Rennes (cf. l’Ouvrage «La profession d’avocat» N° Lexbase : E7262E9T).
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