Le transfert de dossiers de clients d'une société d'expertise comptable vers une concurrente, effectué en méconnaissance des règles déontologiques de la profession d'expert-comptable, suffit à établir que de tels agissements sont constitutifs de concurrence déloyale. Tel est le sens d'un arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 12 juillet 2011 (Cass. com., 12 juillet 2011, n° 10-22.753, F-D
N° Lexbase : A0452HWN). En l'espèce, l'employé comme expert-comptable stagiaire d'un cabinet d'expertise comptable a démissionné pour être embauché par une société concurrente. Un accord portant sur la cession de douze dossiers de clients n'a pu être signé entre les deux sociétés. Se plaignant d'un détournement de clientèle à la suite du départ de ces douze clients, suivis de quatre autres, vers sa concurrente, le cabinet dont le stagiaire avait démissionné a assigné cette dernière en paiement de différentes sommes au titre de la perte de clientèle et des honoraires impayés par ces clients, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil (
N° Lexbase : L1488ABQ). La cour d'appel de Grenoble, saisie de ce litige, limite la condamnation au titre de la perte de clientèle, au motif que la cession de clientèle ne peut concerner que les douze sociétés qui ont fait l'objet d'un projet d'acte de cession, tandis que le principe de la cession était accepté par la plaignante, sans y inclure les quatre clients supplémentaires quand il n'est pas établi que ces derniers aient fait l'objet d'un détournement par des moyens déloyaux faussant le libre jeu de la concurrence et qu'en tout état de cause ces clients n'étaient pas dans le périmètre de la cession (CA Grenoble, ch. com., 12 mai 2010, n° 07/04266
N° Lexbase : A9792E33). Mais la Cour régulatrice censure cette décision : en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que les transferts des dossiers des quatre clients du cabinet d'experts-comptables à sa concurrente s'étaient effectués en méconnaissance des règles déontologiques de la profession d'expert-comptable, ce qui suffisait à établir que de tels agissements étaient constitutifs de concurrence déloyale, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1382 du Code civil.
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