Réf. : Cass. soc., 13 juin 2018, n° 16-25.301, FS-P+B (N° Lexbase : A3296XRI)
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par Blanche Chaumet
le 20 Juin 2018
►Est conforme à l’exigence de loyauté de la collecte posée par l’article 6, 1° de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 (N° Lexbase : L8794AGS) le fait d’informer préalablement les pilotes de l'existence de ce traitement automatisé des données à caractère personnel, de sa finalité, des destinataires des données collectées et de leurs droits d'accès, de rectification et de suppression depuis sa date de création, par le biais d’un mémo circularisé sous forme papier et disponible de manière constante sur l’intranet qui leur était dédié, et qu’ils pouvaient à tout moment accéder directement à l’événement, lors de sa création et une fois l’événement traité par le «manager», pour y ajouter leurs commentaires.
►Dès lors que l’application «Main Courante» permettait d’assurer un suivi, entre les Personnels navigants techniques (PNT) et leurs «managers», de l’activité journalière et des événements notables liés à l’exploitation de la flotte susceptibles d’avoir un impact en termes d’exploitation de la flotte et de gestion des emplois du temps, que seul l’événement était inscrit dans l’application «Main Courante» et non ses conséquences disciplinaires qui faisaient l’objet d’un traitement distinct par un autre service, le service des ressources humaines n’ayant pas besoin de consulter cette application dès lors qu’il disposait pour l’exercice de son activité d’autres applications dédiées, que l’application «Main Courante» ne comportait aucune donnée portant sur d’éventuelles sanctions et qu’aucun rapprochement entre les données contenues dans l’application «Main Courante» et celles permettant de gérer les dossiers professionnels des pilotes, notamment pour la prise de décisions dans le déroulement de leur carrière, n’était effectué, la cour d’appel a pu en déduire, les deux cas d’utilisation de données issues de l’application litigieuse dénoncés par le syndicat comme fautifs n’étant pas à eux seuls suffisants à démontrer l’illicéité de l’application, l’absence de détournement de la finalité déclarée de l’application à des fins de gestion illicite du personnel en violation de l’article 6, 2° de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978.
Telles sont les solutions dégagées par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 13 juin 2018 (Cass. soc., 13 juin 2018, n° 16-25.301, FS-P+B N° Lexbase : A3296XRI).
En l’espèce, depuis 2005, la société Air France dispose d’un outil informatique dénommé «Main Courante divisions de vol» et déclaré auprès de la CNIL comme ayant pour finalité d’être un outil informatique réservé à l’encadrement PNT et permettant un suivi de l’activité journalière et un passage de consignes entre les cadres de permanence des sites de Roissy et d’Orly. Ces informations ont pour but d’informer les cadres sur les événements liés à l’exploitation et les demandes particulières des pilotes et cette finalité n’a fait l’objet d’aucune critique de la part de la CNIL au moment de sa déclaration en 2005. Cette application, aujourd’hui dénommée «Fidèle», a été étendue à l’ensemble de la flotte. A la suite d’une plainte du syndicat des pilotes d’Air France (le SPAF), une procédure de contrôle de cette application a été menée en 2014 par la CNIL et a été clôturée le 18 juillet 2014, après que la société Air France s’est conformée aux préconisations formulées par la CNIL lors d’une réunion du 15 mai 2014.
Estimant cette application illicite au regard des dispositions de la loi du 6 janvier 1978, le SPAF a saisi, le 15 mai 2014, le juge des référés afin qu’il soit jugé que l’application n’était ni conforme à ladite loi ni aux dispositions conventionnelles de la Convention collective nationale des PNT et du livre des standards, qu’il soit enjoint à la société de cesser toute utilisation de cette application, et notamment de cesser de collecter, recueillir ou conserver et traiter les données nominatives des pilotes ou toute indication permettant de les identifier, d’y supprimer toute rubrique comportant des indications nominatives et toute mention à caractère personnel, de la condamner à lui payer des dommages-intérêts et d’ordonner la publication de la décision à intervenir.
La cour d’appel CA Paris, Pôle 2, 7ème ch., 29 juin 2016, n° 14/24522 (N° Lexbase : A0536RX7) l’ayant débouté de l’ensemble de ses demandes, il s’est pourvu en cassation.
Cependant, en énonçant la règle susvisée, la Haute juridiction rejette le pourvoi (cf. l’Ouvrage «Droit du travail» N° Lexbase : E5521E7M).
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