Une fois que la loi palliant à des manquements constatés par la Cour européenne des droits de l'Homme est mise en place, un détenu ne peut saisir la Cour tant qu'il n'a pas épuisé les voies de recours internes créées par cette loi.
Précédemment condamnée par le biais d'un arrêt pilote du 10 mars 2015 (CEDH, 10 mars 2015, req. 14097/12
disponible en anglais), la Hongrie avait dû mettre en place une loi permettant aux détenus d'exercer un recours effectif contre certaines de leurs conditions de détention. Ainsi, la CEDH ne peut traiter la requête d'un détenu qui n'aurait pas utilisé les recours créés par cette loi. C'est la position de la Cour européenne des droits de l'Homme dans une décision rendue le 23 novembre 2017 (CEDH, 23 novembre 2017, req. 5433/17
disponible en anglais)
Dans cette affaire, un détenu hongrois, se plaignant de ses conditions de détention, avait saisi la Cour, se fondant sur une violation de l'article 3, relatif à l'interdiction de la torture et des traitements dégradants (
N° Lexbase : L4764AQI) et de l'article 13, relatif au droit à un recours effectif (
N° Lexbase : L4746AQT).
La Cour, tout en rappelant les mauvais traitements constatés au sein du système carcéral hongrois, se réfère à sa décision pilote du 10 mars 2015. Elle constate que le parlement hongrois a adopté en 2016 une loi qui permet des recours, préventifs et compensatoires, et qui doit permettre de pallier aux manquements constatés dans le système pénitentiaire hongrois. Un détenu pourra, par exemple, saisir la direction de la prison pour être transféré dans un nouvel établissement, s'il est constaté des mauvaises conditions de détention.
La Cour a considéré que cette loi respectant en principe les critères énoncés par son arrêt pilote de 2015, le détenu se devait d'utiliser les nouveaux recours qui lui étaient ouverts, avant de pouvoir saisir la CEDH. Après une demande d'information, elle a d'ailleurs acté que le requérant avait déposé deux recours et que les procédures étaient encore en cours.
Dès lors, tout en rappelant que le requérant pourrait à nouveau la saisir une fois la décision de recours rendue, la Cour rejette la demande du détenu sur le fondement de l'article 3, en la déclarant irrecevable. Quant à la violation de l'article 13, la Cour constate logiquement que, deux recours ayant été déposés par le détenu et les procédures étant en cours, ce dernier avait bien eu droit à un recours effectif.
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