Aux termes de l'article 35, § 1 de la CESDH (
N° Lexbase : L4770AQQ), la Cour européenne des droits de l'Homme ne peut être saisie qu'après l'épuisement des voies de recours internes, de sorte que la requête d'un débiteur faisant l'objet d'une procédure collective, fondée sur non-respect du droit à un procès équitable dans un délai raisonnable en raison de la longueur de la procédure (22 ans), doit être déclarée irrecevable, le requérant n'ayant pas exercé au préalable le recours fondé sur l'article L. 141-1 du Code de l'organisation judiciaire (
N° Lexbase : L2419LB9) pour engager la responsabilité de l'Etat en raison de la durée excessive de la procédure de liquidation. Tel est le sens d'un arrêt rendu par la CEDH le 21 mars 2017 (CEDH, 21 mars 2017, Req. 16470/15
N° Lexbase : A9410U9E).
En l'espèce, en décembre 1995, un débiteur, éleveur de chevaux, a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire. Par un arrêt rendu le 19 janvier 2017, la cour d'appel de Douai ordonne la clôture des opérations de la procédure de liquidation judiciaire. Invoquant l'article 6, § 1 de la CESDH (
N° Lexbase : L7558AIR droit à un procès équitable dans un délai raisonnable), le requérant s'est plaint d'une durée excessive de la procédure de liquidation de son exploitation.
Ainsi, la Cour rappelle qu'il existe un recours fondé sur l'article L. 141-1 du COJ pour engager la responsabilité de l'Etat en raison de la durée excessive de la procédure de liquidation. Elle constate que la Cour de cassation (Cass. com., 16 décembre 2014, n° 13-19.402, FP-P+B+R+I
N° Lexbase : A6743M7U ; lire
N° Lexbase : N5530BUD) a tiré les conséquences de l'arrêt "Tetu c/ France" (CEDH, 22 septembre 2011, req. n° 60983/09
N° Lexbase : A9479HXD), dans lequel la Cour avait relevé que le droit interne empêchait le débiteur soumis à une liquidation judiciaire d'engager ce type d'action. En effet, dans un arrêt du 16 décembre 2014, la Cour de cassation a jugé que le débiteur à la liquidation pouvait désormais agir sur le fondement de l'article L. 141-1 du COJ, au titre de ses droits propres, pour se plaindre de la durée de la procédure de liquidation. S'agissant de la date à laquelle ce recours est devenu effectif en droit interne, la Cour relève que l'arrêt du 16 décembre 2014 a été diffusé le jour même sur le site internet de la Cour de cassation, avant d'être commenté par la doctrine dès le mois de janvier 2015. La Cour juge raisonnable de retenir que cet arrêt ne pouvait plus être ignoré du public après le mois de janvier 2015. Tel était notamment le cas du requérant en l'espèce, à la date d'introduction de sa requête, le 28 mars 2015. Dans ces conditions, la Cour estime qu'il disposait d'un recours effectif pour faire redresser le grief tiré de l'article 6, § 1 de la convention. Il s'ensuit que la requête doit être rejetée pour non-épuisement des voies de recours internes (cf. l’Ouvrage "Entreprises en difficulté"
N° Lexbase : E4996EUL).
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