Les dommages causés par un incendie ayant fait l'objet d'une organisation impliquant moyens de communication et cocktails Molotov mais s'inscrivant dans le prolongement d'un rassemblement spontané sont de nature à engager la responsabilité de l'Etat. Telle est la solution dégagée par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 30 décembre 2016 (CE 4° et 5° ch.-r., 30 décembre 2016, n° 386536, mentionné aux tables du recueil Lebon
N° Lexbase : A4371SYK, voir pour le cas d'un blocage prémédité organisé en dehors d'un rassemblement spontané, CE, 30 décembre 2016, n° 389835, mentionné aux tables du recueil Lebon
N° Lexbase : A4878S33). La Haute juridiction rappelle qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 2216-3 du Code général des collectivités territoriales (
N° Lexbase : L8738AAU), applicable au litige porté devant les juges du fond et désormais repris à l'article L. 211-10 du Code de la sécurité intérieure (
N° Lexbase : L5211ISS) : "
l'Etat est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens". Etait ici en cause le rassemblement d'une foule très hostile à la suite du décès de deux adolescents ayant péri dans une collusion avec un véhicule de police, suivi du déplacement de plusieurs centaines de personnes vers l'endroit où les corps avaient été déposés puis dans une avenue de la commune où un garage a été incendié. Bien que, d'une part, les auteurs des dégradations aient utilisé des moyens de communication ainsi que des cocktails Molotov et des battes de base-ball et qu'ils aient formé des groupes mobiles, et alors que, d'autre part, un restaurant de la même commune avait fait l'objet d'une attaque une heure avant le décès des deux adolescents, cet incendie a bien été le fait d'un attroupement ou rassemblement au sens de l'article L. 2216-3 précité. En effet, il a été provoqué par des personnes qui étaient au nombre de celles qui s'étaient spontanément rassemblées, peu de temps auparavant, pour manifester leur émotion après le décès des deux adolescents et que l'attaque du restaurant était sans rapport avec cette manifestation. La cour administrative d'appel (CAA Versailles, 2 octobre 2014, n° 12VE02119
N° Lexbase : A6884MYM) a donc commis une erreur de droit en rejetant la demande de la société exploitant le garage incendié recherchant la responsabilité de l'Etat sur le fondement des dispositions de l'article L. 2216-3 (cf. l’Ouvrage "Responsabilité administrative"
N° Lexbase : E3798EU9).
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