Dans un arrêt rendu le 14 septembre 2010, la Cour européenne des droits de l'Homme a estimé que la saisie de matériaux provenant de sources confidentielles de journalistes était illégale (CEDH, 14 septembre 2010, Req. 38224/03
N° Lexbase : A2131E9S). En l'espèce, les journalistes d'une société néerlandaise, dont l'activité consiste à publier et vendre des magazines, se virent offrir la possibilité de prendre des photos d'une course de rue automobile illégale, des voitures et du public, à condition de donner l'assurance que l'identité des participants ne serait pas divulguée. Par la suite, la société requérante fut contrainte de remettre les photographies à la police qui enquêtait sur une autre infraction, bien que les journalistes se fussent fortement élevés contre l'obligation de livrer des informations propres à permettre l'identification de leurs sources. Le requérant y voyait une violation de son droit à la liberté de recevoir ou de communiquer des informations découlant de l'article 10 de la CESDH (
N° Lexbase : L4743AQQ), relatif à la liberté d'expression. Le 31 mars 2009 (
N° Lexbase : A4634E9I), la Chambre de la CEDH avait estimé qu'il n'y avait pas eu violation de l'article 10 de la Convention. La Grande Chambre considère, quant à elle, qu'eu égard à l'importance de la protection des sources journalistiques pour la liberté de la presse dans une société démocratique, une ingérence ne peut être jugée compatible avec l'article 10 de la CESDH que si elle est justifiée par un impératif prépondérant d'intérêt public (cf., déjà en ce sens, CEDH, 27 mars 1996, Req. 16/1994/463/544
N° Lexbase : A8390AWN ; CEDH, 25 février 2003, Req. 51772/99
N° Lexbase : A3073A7X). Elle ne met pas en doute l'affirmation de la société requérante selon laquelle ses journalistes s'étaient engagés à ne pas révéler l'identité des participants à la course en question. Elle en conclut que l'injonction constituait, en soi, une ingérence dans la liberté de la société de recevoir et de communiquer des informations garantie par l'article 10 § 1. La Cour considère, enfin, que si l'ingérence litigieuse avait une base légale (le Code de procédure pénale néerlandais), la qualité de la loi était déficiente, dans la mesure où il n'existait aucune procédure entourée de garanties légales adéquates qui eût permis à la société requérante d'obtenir une appréciation indépendante du point de savoir si l'intérêt de l'enquête pénale qui était en cours devait l'emporter sur l'intérêt public à la protection des sources des journalistes. Les juges luxembourgeois jugent qu'il y a donc eu violation de l'article 10 en raison du fait que l'ingérence incriminée n'était pas "
prévue par la loi".
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