La lettre juridique n°368 du 22 octobre 2009 : Fonction publique

[Textes] La nouvelle loi sur la mobilité et les parcours professionnels dans la fonction publique

Réf. : Loi n° 2009-972 du 3 août 2009, relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique (N° Lexbase : L6084IE3)

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par Frédéric Dieu, Rapporteur public près la cour administrative d'appel de Marseille

le 07 Octobre 2010

L'importance de la mobilité des agents publics avait été soulignée par le Président de la République, Nicolas Sarkozy, dans son discours de Nantes du 19 septembre 2007. Il s'était alors exprimé en ces termes : "l'administration ne doit plus pouvoir s'opposer à la mobilité d'un agent qui souhaite aller vers un autre emploi, dans une autre administration ou dans le secteur privé. La seule obligation serait de respecter un préavis pour que ça ne désorganise le service. Il faut faire circuler les hommes, les idées, les compétences. C'est une idée totalement étrangère à notre tradition administrative, à son organisation verticale, à sa gestion par corps, à ses cloisonnements statutaires". La loi n° 2009-972 du 3 août 2009, relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique, mettant en oeuvre ces orientations, a profondément modifié les règles relatives au détachement et à l'intégration directe, afin de promouvoir la mobilité entre les différentes fonctions publiques. Elle contient, également, des dispositions très critiquées relatives à la réorientation professionnelle des fonctionnaires, et à l'introduction de l'intérim dans la fonction publique. Elle comporte, enfin, un certain nombre de dispositions "fourre-tout" qui participent toutefois de la modification du statut général de la fonction publique. Cette loi devrait, certes, favoriser juridiquement la mobilité entre les fonctions publiques. Toutefois, sa mise en oeuvre pourrait se heurter à la réticence de certains corps et statuts particuliers, traditionnellement hostiles à la mobilité. Par ailleurs, la loi du 3 août 2009 accentuera vraisemblablement la mobilité des fonctionnaires de l'Etat vers les collectivités territoriales.

I - Le développement des mobilités

A - Le départ des fonctionnaires et l'accès à la fonction publique

1 - Le droit au départ

L'article 4 de la loi consacre "un droit au départ". Il ne s'agit pas d'un droit au départ définitif mais de l'impossibilité pour l'administration, sauf nécessités du service ou avis d'incompatibilité rendu par la commission de déontologie, de s'opposer à la demande d'un fonctionnaire désirant être placé en détachement, en disponibilité ou hors cadres, voire souhaitant être intégré directement dans une autre administration.

La rédaction initiale du projet de loi mentionnait une obtention de plein droit sous réserve des nécessités du service, ce qui s'avérait assez paradoxal. La nouvelle rédaction de la loi évite l'écueil du "plein droit sous réserve" et pose un délai de préavis pouvant aller jusqu'à six mois. Toutefois, ce droit au départ n'est pas applicable aux mutations prononcées par la voie d'un tableau de mutation.

2 - L'ouverture de la fonction publique au détachement, à l'intégration et à l'accès direct

Le nouvel article 13 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires (N° Lexbase : L6938AG3) pose le principe de l'accès par voie de détachement, éventuellement suivi d'une intégration ou par voie d'intégration directe à tous les corps (1) et cadres d'emplois. Ce principe d'ouverture générale doit s'imposer à toutes les dispositions contraires pouvant être contenues dans les décrets portant statuts particuliers, ceci afin de peser sur les corps qui restreignent les possibilités d'accueil en détachement et restent, ainsi, très fermés. Néanmoins, la nouvelle loi dispose que le détachement et l'intégration directe des fonctionnaires pourront se faire dans tous les corps et cadres d'emplois comparables à ceux auxquels ils appartiennent. L'équivalence sera appréciée essentiellement en fonction de la catégorie des corps concernés et des missions exercées par les agents sans, toutefois, pouvoir outrepasser les exigences de diplômes dans le cas des professions réglementées. Les corps qui comportent des attributions d'ordre juridictionnel ne sont pas concernés par cette réforme.

Le fonctionnaire détaché, admis à poursuivre son détachement au-delà d'une période de cinq ans, se verra proposer une intégration dans l'administration d'accueil. Derrière ce nouveau droit à l'intégration après cinq ans de détachement se cachent des considérations gouvernementales plus pragmatiques visant à "orienter" des fonctionnaires de l'Etat vers la fonction publique territoriale. Toutefois, les collectivités territoriales, qui ont déjà intégré des agents publics de France Télécom et des personnels TOS (Techniciens, Ouvriers et de Service), seront peut-être enclines à mettre fin au détachement au terme des cinq ans pour ne pas être obligées de proposer l'intégration.

Enfin, les règles du détachement ont été revisitées. Sans mettre fin au principe de la double carrière, l'article 5 de la loi du 3 août 2009 en a sérieusement nuancé la rigueur, en ajoutant, dans les trois fonctions publiques civiles, qu'il est tenu compte, lors de la réintégration à l'issue d'un détachement, du grade et de l'échelon atteints dans le corps ou cadre d'emplois de détachement, sous réserve, naturellement, qu'ils soient plus favorables à l'intéressé. Dans le même esprit, le fonctionnaire intégré dans un corps, ou cadre d'emplois, d'accueil doit voir le grade et l'échelon de son corps, ou cadre d'emplois, d'origine pris en compte. Cependant, les rivalités existant entre fonctions publiques, en particulier entre fonction publique de l'Etat et fonction publique territoriale, évolueront probablement moins rapidement que le droit de la fonction publique. Il est, en effet, fréquent que les fonctionnaires d'Etat en détachement soient pénalisés dans leur avancement et bloqués dans leur carrière au motif qu'ils sont destinés à réintégrer prochainement leur corps d'origine et qu'ils sont en concurrence avec des fonctionnaires territoriaux.

B - Les mouvements au sein de la fonction publique

1 - La restructuration et la réorientation professionnelle

Le statut général de la fonction publique de l'Etat compte, désormais, de nouveaux articles rassemblés au sein d'une sous-section intitulée "Réorientation professionnelle" située au sein de la section "Activité" du chapitre V. Ce placement indique qu'il ne s'agit pas d'une nouvelle position statutaire proprement dite, mais d'une variante de la position d'activité comme peut l'être la mise à disposition.

Le fonctionnaire peut être placé en situation de réorientation professionnelle "en cas de restructuration d'une administration de l'Etat ou de l'un de ses établissements publics administratifs [...] dès lors que son emploi est susceptible d'être supprimé". Cela ne renseigne guère sur ce qu'est une restructuration sur le plan juridique ou sur ce qu'est un emploi "susceptible d'être supprimé", et la loi ne donne aucune définition de la réorientation professionnelle, contrairement à ce qu'il en est pour les autres positions statutaires. La rédaction de l'avant-projet de loi était plus explicite, en énonçant que "la réorientation professionnelle est la situation dans laquelle peut être placé le fonctionnaire dont l'emploi a été supprimé ou modifié de façon substantielle".

Dans cette situation de réorientation professionnelle, le fonctionnaire qui sera concrètement à la recherche d'un emploi pourra être tenu de suivre des actions de formation. Cette situation de réorientation professionnelle, qui ne connaît théoriquement pas de délai, prend fin lorsque le fonctionnaire accède à un nouvel emploi, ou s'il refuse "successivement trois offres d'emploi public fermes et précises correspondant à son grade et à son projet personnalisé d'évolution professionnelle, et tenant compte de sa situation de famille et de son lieu de résidence habituel". Dans ce dernier cas, le fonctionnaire peut être placé en disponibilité d'office (donc sans traitement et sans droits à la retraite durant cette période) ou admis à la retraite. Soulignons, à cet égard, que la disponibilité d'office se termine soit par un reclassement, soit par la mise à la retraite ou le licenciement si le fonctionnaire n'a pas acquis suffisamment de droits à pension.

Afin d'atténuer le choc, notamment, financier des restructurations d'administration, le législateur a prévu, à l'article 6 de la loi, la mise en place d'une indemnité "d'accompagnement à la mobilité" dont le montant correspond "à la différence entre le montant indemnitaire effectivement perçu dans l'emploi d'origine et le plafond des régimes indemnitaires applicable à l'emploi d'accueil".

2 - La réforme de la mise à disposition des fonctionnaires de l'Etat

Le régime de la mise à disposition des fonctionnaires de l'Etat est, une nouvelle fois, modifié, deux ans à peine après avoir connu une réforme d'ensemble avec la loi n° 2007-148 du 2 février 2007, de modernisation de la fonction publique (N° Lexbase : L2882HUB), qui réaffirmait l'exigence d'une convention de mise à disposition et celle d'une obligation de remboursement entre les employeurs publics. La loi du 3 août 2009 apporte une nuance à cette obligation puisque, désormais, lorsqu'un fonctionnaire d'Etat est mis à disposition d'une collectivité territoriale ou de l'un de ses établissements publics, ou d'un établissement public de santé ou médico-social, il peut être dérogé à la règle du remboursement pendant un an au maximum, et sur la moitié, au plus, de la dépense de personnel afférente.

Cette dérogation, qui s'analyse comme une "prime à la mise à disposition", manifeste à nouveau la volonté de l'Etat de favoriser, par une subvention, la mise à disposition de ses agents auprès d'autres personnes publiques.

3 - Le cumul d'emplois publics à temps non complet

La loi du 3 août 2009 a introduit, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans dans les trois fonctions publiques, la possibilité pour les fonctionnaires, sous réserve de leur accord, de cumuler des emplois permanents à temps non complet relevant des trois fonctions publiques. Le fonctionnaire doit, cependant, exercer un service au moins égal au mi-temps dans l'emploi correspondant au grade du corps dont il relève, et le cumul doit lui assurer un service équivalent à un emploi à temps complet et une rémunération correspondante.

La mise en oeuvre de cette faculté pourra poser des difficultés. En effet, comment faut-il interpréter la règle selon laquelle le fonctionnaire doit bénéficier d'un service équivalent à un temps complet ? Faut-il comprendre qu'il est impossible de travailler plus alors que, dans la fonction publique territoriale, il est possible de dépasser de 15 % la durée totale d'un service normal ? Par ailleurs, le texte ne protège pas véritablement l'agent d'une suppression de l'un de ses emplois, à moins que l'on considère que l'employeur sera tenu de réaffecter le fonctionnaire sur un autre emploi à temps non complet, ce qui ne sera pas toujours possible.

II - Les nouvelles dispositions relatives au recrutement dans la fonction publique

A - Le recours à l'intérim et la reprise des contrats

1 - Le recours à l'intérim

Le recours à l'intérim par les personnes publiques a été l'une des mesures les plus contestées de la loi, tant par les syndicats que par l'opposition parlementaire. Il n'était jusqu'alors toléré qu'en cas de circonstances exceptionnelles. Il n'en demeure pas moins qu'il est à présent autorisé pour les trois fonctions publiques, qui peuvent faire appel à des salariés pour des tâches non durables exclusivement dans les cas suivants : remplacement momentané d'un agent, vacance temporaire d'un emploi, accroissement temporaire d'activité, besoin occasionnel ou saisonnier. La durée des missions et des contrats oscille, selon les cas, entre un et deux ans.

Les nouvelles dispositions inscrites dans le Code du travail, et, notamment, les articles L. 1251-60 (N° Lexbase : L6231IEI) et suivants, rappellent que les intérimaires travaillant au sein des personnes publiques sont soumis aux obligations des agents publics et bénéficient, en contrepartie, de la protection fonctionnelle. Si l'emploi du salarié se poursuit au-delà de sa mission sans qu'ait été conclu un nouveau contrat, le salarié est alors réputé lié à la personne morale de droit public par un contrat à durée déterminée de trois ans. L'ancienneté est appréciée de manière rétroactive à compter du premier jour de la mission. Le législateur a attribué au juge administratif les litiges qui opposeront les salariés à "la personne publique gérant un service public administratif".

Ce nouveau dispositif pourrait concurrencer le recrutement d'agents non titulaires et le rôle des centres de gestion dans la fonction publique territoriale. Toutefois, il n'est pas sûr qu'il y soit recouru, car étant plus onéreux que le recrutement de simples non titulaires. Ce dispositif pourrait, en fait, s'appliquer à la fonction publique hospitalière, afin, notamment, de recruter par voie d'intérim des infirmières.

2 - Le transfert d'activités et reprises des contrats

Le nouvel article 14 ter de la loi du 13 juillet 1983 (N° Lexbase : L6938AG3) dispose que "lorsque l'activité d'une personne morale de droit public employant des agents non titulaires de droit public est reprise par une autre personne publique dans le cadre d'un service public administratif, cette personne publique propose à ces agents un contrat de droit public, à durée déterminée ou indéterminée selon la nature du contrat dont ils sont titulaires". Classiquement, le contrat proposé doit reprendre les clauses substantielles du précédent contrat, notamment en matière de rémunération. L'ancienneté est, également, décomptée puisque les services accomplis chez l'ancien employeur comptent comme services accomplis au sein de la personne publique d'accueil. En cas de refus des agents d'accepter le contrat qui leur est proposé, ils seront licenciés conformément aux règles du licenciement des agents non titulaires de droit public. Cette mesure devrait faciliter la mise en oeuvre des "agences de service public" et les restructurations d'administrations.

Le législateur a, également, apporté des précisions lorsque l'activité d'une entité économique employant des salariés de droit privé est, par transfert de cette entité, reprise par une personne publique dans le cadre d'un service public administratif. Si les salariés refusent le contrat de droit public qui leur est proposé, le Code du travail précise, désormais, que leur contrat prend fin de plein droit et qu'ils sont licenciés conformément à ce code et aux stipulations de leur contrat.

La loi ajoute, enfin, un article L. 1224-3-1 au Code du travail (N° Lexbase : L6235IEN) et innove en prévoyant l'hypothèse de l'activité d'une personne publique employant des agents non-titulaires de droit public reprise par une personne morale de droit privé, ou par un organisme de droit public gérant un service public industriel et commercial. Ces derniers doivent proposer un contrat de droit privé reprenant les clauses substantielles du précédent contrat. En cas de refus des agents non titulaires, le licenciement se fait selon les règles prévues par le droit public.

B - La modification des règles relatives aux concours d'accès à la fonction publique

1 - L'ouverture des concours internes aux ressortissants communautaires

Après bien des réticences, l'accès des ressortissants communautaires ou d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen (Islande, Norvège, Liechtenstein) aux concours internes de la fonction publique a été autorisé par le législateur. Cette mesure est le fruit d'une lente évolution juridique dont la dernière étape datait de la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005, portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique (N° Lexbase : L7061HEA), qui avait généralisé le principe de l'accès des ressortissants communautaires aux concours externes de la fonction publique française, en modifiant l'article 5 bis de la loi du 13 juillet 1983. Toutefois, pour les concours externes comme pour les concours internes, il n'est, pour l'instant, pas possible d'accéder aux emplois dont les attributions, soit ne sont pas séparables de l'exercice de la souveraineté, soit comportent une participation directe ou indirecte à l'exercice de prérogatives de puissance publique.

La loi du 3 août 2009 exige, à l'égard des candidats, une durée de services accomplis dans une administration ou un organisme dont les missions sont comparables à celles des administrations françaises et établissements publics administratifs français. Il n'est donc pas nécessaire, pour un candidat d'origine communautaire au concours interne, d'être fonctionnaire ou agent public dans son pays. En revanche, cette qualité est encore indispensable aujourd'hui pour les candidats français. Ce cas de discrimination à rebours correspond à une volonté politique de ne pas ouvrir les concours internes à des candidats qui viendraient du secteur privé et dont les missions seraient comparables à celles du secteur public (cliniques, établissements d'enseignement privé), ces candidats pouvant évidemment se présenter aux concours externes.

2 - La suppression des limites d'âge

La politique de suppression des limites d'âge dans la fonction publique se poursuit. La loi n° 2005-846 du 26 juillet 2005, habilitant le Gouvernement à prendre, par voie d'ordonnance, des mesures d'urgence pour l'emploi (N° Lexbase : L8804G9X), avait permis aux pouvoirs publics d'édicter l'ordonnance n° 2005-901 du 2 août 2005, relative aux conditions d'âge dans la fonction publique et instituant un nouveau parcours d'accès aux carrières de la fonction publique territoriale, de la fonction publique hospitalière et de la fonction publique de l'Etat (N° Lexbase : L0755HBL), qui avait posé le principe de la suppression des limites d'âge dans la fonction publique. Néanmoins, le cinquième alinéa de l'article 6 de la loi du 13 juillet 1983 (N° Lexbase : L5233AHB) prévoyait toujours la possibilité de maintenir des conditions d'âge "pour le recrutement par voie de concours dans des corps, cadres d'emplois ou emplois, lorsque l'accès à ceux-ci est subordonné à l'accomplissement d'une période de scolarité préalable d'une durée au moins égale à deux ans". Cet alinéa de l'article 6 est donc, désormais, abrogé.

III - Les diverses dispositions dites "de simplification"

A - Entretien professionnel et déontologie

1 - Généralisation et évaluation de l'entretien professionnel de préférence à la notation

Le terme d'évaluation fait officiellement son entrée dans le statut général de la fonction publique de l'Etat, le chapitre VI de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat (N° Lexbase : L7077AG9), étant, désormais, intitulé "Evaluation, notation, avancement, mutation, reclassement". Le changement ne relève pas de la pure symbolique ou d'une simple modification terminologique mais correspond, également, à la généralisation de l'entretien professionnel annuel conduit par le supérieur hiérarchique direct, qui peut ne pas être le notateur (CE 1° et 6° s-s-r., 6 décembre 2006, n° 287453, Mme Titon N° Lexbase : A8511DSZ). La réforme de la notation avait été initiée dans la fonction publique de l'Etat par le décret n° 2002-682 du 29 avril 2002, relatif aux conditions générales d'évaluation, de notation et d'avancement des fonctionnaires de l'Etat (N° Lexbase : L0969G8E), qui avait fait de l'évaluation des agents l'un de ses points forts. La loi n° 2007-148 du 2 février 2007, de modernisation de la fonction publique (N° Lexbase : L2882HUB), avait, ensuite, ajouté un article 55 bis à la loi du 11 janvier 1984, autorisant l'expérimentation, par les administrations d'Etat, à se fonder sur un entretien professionnel pour les avancements d'échelon et de grade.

La loi du 3 août 2009 parachève ce processus en réécrivant l'article 55 de la loi du 11 janvier 1984, qui met fin à la notation, sauf dispositions contraires de statuts particuliers, et fonde l'appréciation de la valeur professionnelle des agents sur l'entretien professionnel annuel. La réforme doit entrer en vigueur au 1er janvier 2012, l'expérimentation étant reconduite jusqu'à cette date.

La même voie semble empruntée pour réformer, dans le même sens, la fonction publique hospitalière, l'expérimentation de l'entretien professionnel étant prolongé jusqu'en 2011 avec un bilan prévu pour 2012, dont nul ne doute qu'il sera favorable à l'instauration durable de l'évaluation et à la suppression de la notation.

La fonction publique territoriale n'est pas oubliée par ces évolutions. L'article 15 de la loi, curieusement situé en plein chapitre consacré au développement des mobilités, met en place pour les années 2008, 2009 et 2010 l'expérimentation de l'entretien professionnel, avec un bilan prévu pour le 31 juillet 2011.

2 - La déontologie des agents publics

L'article 25 de la loi du 13 juillet 1983, qui traite des questions de cumuls et de prises illégales d'intérêts dans la fonction publique est, une nouvelle fois, modifié alors qu'il avait déjà été réécrit par la loi du 2 février 2007. Les modifications vont dans le sens de l'assouplissement et s'inscrivent, finalement, dans l'esprit de la réforme conduite deux ans auparavant. Depuis 2007, il n'était plus interdit aux agents publics de cumuler leur emploi avec la création ou la reprise d'une entreprise. Ce dispositif a suscité un véritable engouement chez les agents publics, et la loi du 3 août 2009 fait donc passer à deux ans au lieu d'une année la durée pendant laquelle un agent peut cumuler ces deux activités, la prolongation d'une année supplémentaire demeurant possible. Au terme de ces trois années, l'agent devra choisir entre sa carrière dans la fonction publique ou son activité privée.

Par ailleurs, et toujours dans le sens de la loi de 2007, l'article 25 de la loi du 13 juillet 1983 a été modifié pour donner la possibilité aux fonctionnaires et agents non titulaires occupant un emploi représentant 70 % (et non plus 50 %) ou moins de la durée légale du travail des agents à temps complet, d'exercer une activité privée lucrative. Ce dispositif est censé s'adresser principalement aux agents travaillant dans les très petites communes.

Enfin, à la suite de "l'affaire Pérol" et de la démission de deux des membres de la Commission de déontologie, l'article 17 de la loi du 3 août 2009 a, d'une part, rendu obligatoire la saisine de la commission pour les collaborateurs du Président de la République et les membres d'un cabinet ministériel, et, d'autre part, donné au président de la Commission le pouvoir de s'autosaisir dans un délai de dix jours à compter de l'embauche de l'agent ou de la création de l'entreprise ou de l'organisme privé. En cas d'avis d'incompatibilité, le contrat de l'agent prend fin sans préavis ni indemnité de rupture. Cette modification de l'article 87 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993, relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques (N° Lexbase : L7152AHD), devrait permettre d'éviter les cas, que n'avaient pas su anticiper les réformes précédentes, où l'agent et l'administration ne veulent pas saisir la commission.

B - Les mesures relatives à la fonction publique territoriale

1 - La création de statuts d'emplois dans la fonction publique territoriale

L'article 36 de la loi du 3 août 2009 prévoit la création de statuts d'emplois dans la fonction publique territoriale pour certains emplois "comportant des responsabilités d'encadrement, de direction de services, de conseil ou d'expertise, ou de conduite de projet" (loi du 26 janvier 1984, art. 6-1 nouveau). Il s'agit d'emplois fonctionnels qui prendront place à côté des emplois fonctionnels déjà existants de direction. Ces statuts seront fixés par décrets en Conseil d'Etat et l'on pourra, alors, véritablement mesurer les différences séparant les uns des autres. La décision de créer de tels emplois, pourvus exclusivement par la voie du détachement, relèvera évidemment de l'assemblée délibérante de la collectivité ou de l'établissement public concerné. Il est dérogé à l'article 67 de la loi du 26 janvier 1984 (N° Lexbase : L6935AHC) puisqu'à l'expiration du détachement, "le fonctionnaire qui, avant sa nomination dans un de ces emplois, relevait de la même collectivité territoriale ou du même établissement public, est réaffecté dans un emploi correspondant à son grade dans cette collectivité ou cet établissement".

Cette création répond à ce qui a déjà été institué pour les administrations de l'Etat qui peuvent créer des emplois d'expert de haut niveau et de directeur de projet. Ces emplois sont occupés par voie de détachement par des fonctionnaires expérimentés et bénéficient d'une rémunération attractive allant de l'indice brut 901 jusqu'à la hors échelle C.

Nul ne doute que les collectivités territoriales aient de véritables besoins dans le domaine de l'expertise, de l'audit et de la direction de projet et que ces fonctions doivent être confiées à des cadres de haut niveau. Toutefois, en vertu de cette approche fonctionnelle de la fonction publique, la loi autorise la création d'emplois et non de cadres d'emplois qui pourront, en conséquence, être retirés à leurs bénéficiaires dans l'intérêt du service. Ces emplois pourront, d'ailleurs, être conçus sur mesure pour donner une solution transitoire à des hauts fonctionnaires dont la carrière est bloquée dans l'accès à de plus hautes fonctions. Au sein de la fonction publique de l'Etat, ce système peut permettre d'éviter qu'un haut fonctionnaire ayant enchaîné des postes de sous-directeur et auquel l'on confie une mission ne redevienne simple administrateur civil et subisse, ainsi, une "moins-value" sur le plan de la rémunération et du régime indemnitaire.

2 - La protection sociale des fonctionnaires territoriaux par leurs employeurs

L'article 38 de la loi du 3 août 2009 modifie la loi du 26 janvier 1984 et ajoute des articles supplémentaires relatifs au financement de la protection sociale complémentaire. L'article 39 de la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique avait ajouté un article 22 bis au statut général définissant le caractère social et l'étendue du champ de cette protection. Ce nouvel article dispose que les personnes publiques employeurs "peuvent contribuer au financement des garanties de protection sociale complémentaire auxquelles les agents qu'elles emploient souscrivent", et que "la participation des personnes publiques est réservée aux contrats ou règlements garantissant la mise en oeuvre de dispositifs de solidarité entre les bénéficiaires, actifs et retraités". Il prévoit que les modalités d'application de ce nouveau texte seront fixées par décret en Conseil d'Etat, ce qui a été fait pour la fonction publique de l'Etat.

La réforme de 2009 vient donner un cadre législatif plus précis au futur décret concernant la fonction publique territoriale qui, au nom du principe de libre administration et en considération du grand nombre d'employeurs territoriaux, ne pouvait se voir appliquer le même texte réglementaire qu'à l'Etat. La condition de solidarité sera donc attestée par un label ou vérifiée dans le cadre d'une procédure de mise en concurrence. Ces contrats en matière de santé ou de prévoyance pourront être proposés par les mutuelles, les institutions de prévoyance et les entreprises d'assurance. Les collectivités pourront, alors, conclure avec ces organismes dans le cadre d'une procédure de mise en concurrence transparente et non discriminatoire une convention de participation au titre d'un contrat ou règlement à adhésion individuelle et facultative réservée à leurs agents. Toutefois, seuls les agents et retraités ayant adhéré pourront bénéficier de cette aide de leur employeur. Les centres de gestion pourront conclure des conventions de participation pour le compte des collectivités.


(1) Cela concerne même les militaires, en vertu de l'article L. 4132-13 du Code de la défense (N° Lexbase : L6259IEK), l'accès des fonctionnaires civils aux corps militaires ne pouvant, cependant, s'effectuer que par la voie d'un détachement suivi, le cas échéant, d'une intégration et non par la voie d'une intégration directe.

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