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N2354AKE
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par Daniel Faucher, Consultant au CRIDON de Paris
le 07 Octobre 2010
1 - Successions
Une décision du 8 novembre de la Cour de cassation est venue considérablement simplifier la preuve en matière de récompenses tant pour les héritiers que pour l'administration fiscale. Lorsque, par exemple, le conjoint survivant entendra déduire de l'actif de communauté une récompense à son profit, au motif que la communauté a encaissé le prix de vente d'un bien qui lui était propre, il ne sera plus nécessaire de démontrer que la communauté a profité effectivement de cet encaissement, ce dernier suffisant pour justifier de la déduction. En effet, parachevant un revirement opéré par la Chambre civile, la Chambre commerciale de la Haute juridiction a précisé que l'administration fiscale, lorsqu'elle fonde un redressement de droits de mutation par décès sur l'existence d'une récompense due à la succession par la communauté, doit établir que les deniers provenant du patrimoine propre du défunt ont profité à celle-ci et que, sauf preuve contraire, le profit résulte, notamment, de l'encaissement de deniers propres par la communauté, à défaut d'emploi ou de remploi.
La doctrine de l'administration, qui prévoyait que la cession de titres, pour lequel les héritiers avaient demandé à bénéficier du paiement différé prévu aux articles 397 et 404 B de l'annexe III au CGI, entraînait la déchéance du régime de faveur, quand bien même le produit de cession serait réinvesti dans d'autres valeurs, a été rapportée par une instruction du 7 février 2005. Ainsi, prenant en compte la particularité de la gestion d'un portefeuille démembré à la suite d'un décès, puisque le juge autorise l'usufruitier à le gérer seul, sans demander au préalable l'accord du nu-propriétaire, l'administration précise que la déchéance du bénéfice du paiement différé n'est susceptible d'être prononcée que s'il est formellement établi que le produit de cessions de valeurs n'a pas été affecté à l'acquisition de titres nouveaux. Cependant, cette liberté est une liberté "surveillée". Les héritiers nus-propriétaires sont invités, dans la lettre qui les informe de la décision du receveur de leur accorder le paiement différé, à fournir annuellement les relevés mensuels du portefeuille.
2 - Evaluation des immeubles
Pour contester la valeur retenue par les parties pour un bien transmis à titre gratuit, le service, qui a recours dans la plupart des cas à la méthode par comparaison, doit invoquer la cession de "biens intrinsèquement similaires". En effet, l'évaluateur dispose rarement d'éléments de comparaison qui portent sur la cession d'immeubles identiques, comme en cas de transmission à titre gratuit d'un appartement situé dans un grand ensemble immobilier. Le juge a, ainsi, précisé que l'exigence de pertinence des éléments de comparaison retenus par l'administration fiscale n'implique pas que les biens pris en considération soient strictement identiques à ceux qui constituent l'objet du litige. Cette pertinence des éléments de comparaison s'apprécie en tenant compte de la localisation, de la date de construction, du classement cadastral et de la surface habitable. Ainsi, un appartement de 197 m², situé dans un immeuble en pierre de taille, construit en 1906, peut, à juste titre, être évalué en retenant le prix de cessions d'appartements, d'une surface de 140, 217 et 232 m², situés dans le même secteur, dans des immeubles construits en 1880 et 1913 (CA Paris 1ère, B, 21 octobre 2005, n° 03/21809).
II - Impôt de solidarité sur la fortune
L'usufruit légal du conjoint survivant qui résulte de l'application de loi du 3 décembre 2001 (loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001 relative aux droits du conjoint survivant et des enfants adultérins et modernisant diverses dispositions de droit successoral N° Lexbase : L0288A33), concernant les décès intervenus à compter du 1er juillet 2002, relève du principe de la taxation de la pleine propriété, conformément aux dispositions de l'article 885 G du CGI . En raison d'une omission de référence du nouveau texte par l'article 885 G, l'administration met, ainsi, fin à l'imposition séparée, lorsque les droits du conjoint découlaient de certains articles du Code civil, visés, eux, en tant qu'exception au principe d'imposition de la pleine propriété par l'article 885 G. L'administration justifie ce durcissement par la circonstance que l'option du conjoint pour l'usufruit de la totalité de la succession, accordée désormais par la loi civile, n'est que la légalisation des conventions de donation au dernier vivant, qui se pratiquaient avant la loi nouvelle, et qui, elles, étaient exclues en matière d'ISF de toute possibilité d'imposition répartie.
La reconnaissance du caractère animateur de son groupe à une société holding n'impose pas de démontrer que cette dernière dispose de structures importantes pour réaliser l'animation du groupe. Telle est la solution retenue par la Cour de cassation dans un arrêt en date du 27 septembre 2005. Le rôle personnel et prépondérant du dirigeant de la holding peut suffire. Au cas particulier, ce dirigeant assurait pour les filiales des études concernant l'investissement, proposait des augmentations de capital, intervenait sur les contrats commerciaux importants, participait activement à leurs conseils d'administration et embauchait même certains cadres supérieurs. Selon le juge les conditions étaient, donc, remplies pour que la holding soit considérée comme participant activement à la conduite de la politique du groupe et au contrôle de ses filiales, ce qui permet de revendiquer, au regard de l'ISF, la qualité de biens professionnels.
Les titres de placement et les liquidités détenues par une société sont présumées constituer des biens professionnels. Cette présomption, qui s'applique dès lors que les liquidités découlent de l'activité sociale, est une présomption simple et le service des impôts peut, dans certains cas, démontrer que ces liquidités ne sont pas nécessaires à l'accomplissement de l'objet social. Cependant cette preuve apparaît quasi impossible à rapporter. En effet, dans une affaire ayant donné lieu à un arrêt du 18 mai 2005, la Haute Juridiction a considéré que la présomption ne pouvait être utilement combattue. Or, au cas particulier, après avoir cédé son fonds de commerce d'hôtel, la société détenait des liquidités pour un montant de 14,6 millions d'euros, lesquelles étaient restées inutilisées durant plus de quatre ans.
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