Le Quotidien du 31 juillet 2025 : Energie

[Questions à...] Les avancées de la loi « DDADUE » en matière de droit de l’énergie et de l’environnement – Questions à Olivier Fazio et Sibylle Weiler, Avocats, Bird & Bird

Réf. : Loi n° 2025-391 du 30 avril 2025, portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes N° Lexbase : L4775M9Q

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[Questions à...] Les avancées de la loi « DDADUE » en matière de droit de l’énergie et de l’environnement – Questions à Olivier Fazio et Sibylle Weiler, Avocats, Bird & Bird. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/121975273-questions-a-les-avancees-de-la-loi-ddadue-en-matiere-de-droit-de-lenergie-et-de-lenvironnement-quest
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le 24 Juillet 2025

Mots clés : énergie • environnement • renouvelables • espèces protégées • électricité

La loi n° 2025-391 du 30 avril 2025, portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes, dite loi « DDADUE », contient des dispositions très variées, apporte plusieurs ajustements notables, notamment en matière de droit de l’énergie et de droit de l’environnement. Lexbase a interrogé à ce sujet Olivier Fazio et Sibylle Weiler, Avocats, Bird & Bird*.


 

Lexbase : Quels étaient les objectifs affichés de ce texte en matière de droit de l’énergie et de l’environnement ?

Olivier Fazio et Sibylle Weiler : La loi « DDADUE » – quatrième du nom - est une loi qui touche à des domaines très variés : elle a pour objet de transposer différentes directives européennes et ainsi d’adapter le droit français à plusieurs textes européens récents dans différents domaines et notamment en droit de l’énergie et en droit de l’environnement.

Les principales évolutions en la matière seront exposées ci-après.

Lexbase : Quelles sont les dispositions principales en matière d'énergies renouvelables ?

Olivier Fazio et Sibylle Weiler : Plusieurs dispositions concernent spécifiquement les énergies renouvelables. Parmi les plus marquantes, on en retiendra quatre.

La cartographie des zones propices au développement des ENR : l’autorité administrative est chargée d’établir une cartographie nationale des zones propices au développement des installations de production d’énergies renouvelables, de leurs ouvrages de raccordement, et des infrastructures de stockage. Cette cartographie s’appuiera sur la cartographie des zones d’accélération des énergies renouvelables au niveau national (mesure issue de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023, relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables N° Lexbase : L6591MSW, dite loi « Aper ») et sur les cartographies des énergies renouvelables maritimes. Ce dispositif a vocation à devenir un outil de planification de référence à chaque révision de la Programmation pluriannuelle de l’énergie « PPE », ces zones étant « proportionnées à l'atteinte des objectifs mentionnés » dans les différents textes, notamment celui de porter la part des énergies renouvelables à 33 % de la consommation finale brute d'énergie en 2030.

L’harmonisation des règles de végétalisation et de solarisation des parkings extérieurs qui,  jusqu’ici étaient dispersées entre plusieurs textes (loi n° 2021-1104, du 22 août 2021, portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets N° Lexbase : L6065L7R, loi « APER », Code de la construction et de l’habitation et Code de l’urbanisme). La loi unifie notamment les seuils de surface concernés (à partir de 500 m² ou 1 500 m² selon les cas), réorganise la répartition des responsabilités (en transférant certaines obligations du gestionnaire au propriétaire du parking) et adapte les sanctions en évitant tout cumul. La possibilité de déroger temporairement aux obligations pour installer des panneaux solaires de « seconde génération » est étendue afin de favoriser l’équipement en panneaux photovoltaïques performants. Enfin, la loi supprime la faculté de reporter l’obligation de couvrir les toitures des bâtiments sur les parkings, pour mieux distinguer les règles qui s’appliquent aux bâtiments de celles destinées aux aires de stationnement.

On notera que le calendrier de mise en œuvre de ces obligations est assoupli : est repoussée au 1er juillet 2026 (au lieu de 2025) l’obligation pour les parcs dont la superficie est égale ou supérieure à 10 000 m² et au 1er juillet 2028 pour ceux dont la superficie est inférieure à 10 000 m² et supérieure à 1 500 m².

Les règles de partage des coûts de raccordement des installations d'énergies renouvelables : afin d'inciter les collectivités territoriales à soutenir le déploiement des énergies renouvelables, l'article 29 de la loi « APER » a supprimé la prise en charge par la collectivité en charge de l'urbanisme de la part de contribution correspondant à l'extension du réseau électrique située en dehors du terrain d'assiette de l'opération. La contribution a été reportée sur le demandeur du raccordement. L’article 24 adapte le code de l'urbanisme avec le nouveau régime de financement du raccordement des projets d'énergie renouvelable. Les bénéficiaires d'autorisations de construire sont désormais tenus de verser la contribution aux coûts de raccordement au réseau public d'électricité (C. urb., art. L. 332-6 N° Lexbase : L5088M9C). Ces dispositions s'appliquent aux opérations pour lesquelles le permis de construire, le permis d'aménager ou la décision de non-opposition à une déclaration préalable ont été délivrés à partir du 10 septembre 2023.

La dérogation « espèces protégées » (article 23) : la dispense d’obtenir une telle dérogation, jusqu’ici réservée aux seuls projets d’installations d’énergies renouvelables ou au stockage d’énergie dans le système électrique – est élargie à tous les porteurs de projets dès lors que ces derniers présentent des mesures d’évitement et de réduction ainsi qu’un dispositif de suivi garantissant leur absence d’incidence négative importante sur le maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées.

Au-delà des énergies renouvelables, la loi « DADUE » précise également les obligations en matière d’efficacité et de rénovation énergétiques, notamment des personnes publiques : en appliquant aux organismes publics des objectifs annuels de réduction de la consommation, de 1,9 %, et de rénovation des bâtiments, de 3% et également à destination des opérateurs de data centers, notamment, via une obligation de valorisation de la chaleur fatale pour les centres de données de plus de 1 mégawatt, avec possibilité de dérogations définies par décret.

Lexbase : Qu'en est-il de l'organisation du marché intérieur de l'électricité ?

Olivier Fazio et Sibylle Weiler : L’article 17 de la loi « DADUE » vise, par un ensemble de dispositions, à rendre conforme le code de l’énergie français à la Directive du 5 juin 2019 relative au marché intérieur de l’électricité [LXB=], suite à un rappel à l’ordre de la France par la Commission Européenne fin 2024.

Ainsi, par exemple, un nouveau chapitre relatif à l’agrégation et aux services d’électricité est introduit dans le Code de l’énergie (à son article L. 338-1 N° Lexbase : L5170M9D). Sont également introduites les définitions du « marché de l’électricité », des « entreprises d’électricité » et des « acteurs du marché de l’électricité » (nouvel article L. 300-1 du Code de l’énergie N° Lexbase : L5160M9Y).  Ces définitions sont celles de la Directive ce qui permet une harmonisation du droit européen et national de l’énergie.

S’agissant du mécanisme d’ajustement, on rappellera qu’en France, le gestionnaire du réseau de transport est chargé de veiller à tout instant à l’équilibre entre l’offre et la demande d’électricité. Pour cela, il dispose du mécanisme d’ajustement qui permet à RTE, en cas de déséquilibre sur les réseaux à court terme, de solliciter les producteurs (à la hausse ou à la baisse) et les consommateurs (à la baisse) pour garantir l’équilibre. Cet ajustement peut être obligatoire ou volontaire, selon le type d’installation. Jusqu’à présent, seules les installations de production raccordées au réseau public de transport (RTE) devaient y participer. L’article 18 de la loi « DADUE » impose à l'ensemble des installations de production dont la puissance installée est supérieure à un seuil de 10 mégawatts une obligation de participation au mécanisme d'ajustement. Cette obligation, qui devrait être applicable à compter du 31 décembre 2025, concerne les nouvelles installations comme les installations existantes.

En parallèle, la de la loi « DADUE » donne à la Commission de régulation de l’énergie (CRE) un pouvoir de surveillance des marchés de gros de l’énergie (article 19). Le Code de l'énergie prend donc désormais en compte les dernières modifications du Règlement « REMIT » (Règlement (UE) n° 1227/2011 du Parlement européen et du Conseil, 25 octobre 2011, concernant l'intégrité et la transparence du marché de gros de l'énergie N° Lexbase : L8552IR8), afin de conforter les contrôles et les sanctions de la Commission de régulation de l'énergie (CRE) et de son comité de règlement des différends et des sanctions (CoRDiS) sur le marché de l'énergie.

Lexbase : La loi contient-elle selon vous des avancées réellement significatives dans les domaines concernés ?

Olivier Fazio et Sibylle Weiler : Encore une fois, il s’agit d’une loi de transposition, donc elle vient entériner dans le droit français des principes et des mécanismes déjà existants en droit communautaire. Cela étant, plusieurs éléments positifs sont à souligner : la disposition concernant la dérogation « espèces protégées » va dans la bonne direction en ce sens que les projets d’énergies renouvelables ne sont plus les seuls à bénéficier de cet assouplissement mais l’ensemble des projets. En revanche, on peut regretter que le législateur ait ajouté une condition supplémentaire par rapport à ce qu’exige le Conseil d’État, à savoir, la mise en place d’un dispositif de suivi permettant d'évaluer l'efficacité des mesures voire de prendre des mesures supplémentaires.

Concernant les ajouts des définitions dans le Code de l’énergie, on peut se réjouir de l’harmonisation des notions au niveau communautaire.

Du point de vue du développement de la solarisation/végétalisation des aires de stationnement les assouplissements qui sont proposés ne sont en revanche pas un signal positif pour le développement et le financement de ces installations : pour les acteurs concernés, ceci n’apporte pas la visibilité requise et sont de nature à freiner l’essor du développement de ce type d’installations qui permettent pourtant de valoriser un foncier déjà artificialisé.

*Propos recueillis par Yann Le Foll, Rédacteur en chef de Lexbase Public

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