Réf. : Cass. civ. 3, 5 juin 2025, n° 23-20.913, F-D N° Lexbase : B2844AI8
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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J AVOCATS, Chargée d’enseignements à l’UPEC, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats
le 23 Juin 2025
L’entrepreneur, professionnel, est débiteur d’un devoir de conseil.
Ce devoir de conseil persiste même si le maître d’ouvrage a connaissance de l’information en litige.
Le devoir de conseil du constructeur est une obligation de moyen qui nécessite une vigilance constante de la part du constructeur pour informer le maître de l'ouvrage des risques et des contraintes liés à la construction. Ce devoir est renforcé par la législation et la jurisprudence, qui imposent au constructeur de conseiller le maître de l'ouvrage sur les aspects techniques, réglementaires et financiers du projet. En cas de manquement à ce devoir, la responsabilité du constructeur peut être engagée.
L’arrêt rapporté est l’occasion d’y revenir. En l’espèce, une société propriétaire d’un fonds de commerce d’hôtellerie, a conclu un contrat portant sur l’aménagement d’un logement avec un constructeur. Reprochant un retard important dans la réalisation du projet, le maître d’ouvrage a mis en demeure l’entrepreneur d’intervenir, qui a refusé au motif qu’il se trouvait empêché du fait de la non-réalisation de la réfection de la toiture. Faute de parvenir à un accord, un contentieux a été initié.
Dans un arrêt rendu le 5 juin 2023 (CA Versailles, 5 juin 2023, n° 21/04850 N° Lexbase : A24869Z4), la Cour d’appel de Versailles a condamné le constructeur à réparer le préjudice subi par le maître d’ouvrage, consistant notamment en un préjudice de jouissance. Ce dernier a formé un pourvoi aux termes duquel il articule qu’aucune obligation de conseil ne pèserait sur l’entrepreneur relativement à des informations qui sont de la connaissance de son contractant. Il expose, encore, que nul ne peut prétendre à réparation d’un préjudice de jouissance dont il est à l’origine.
Le pourvoi est rejeté sur ce moyen. La Haute juridiction a relevé que les conseillers avaient constaté que si le maître d’ouvrage connaissait l’état de la toiture avant le démarrage des travaux, l’entrepreneur avait seulement mentionné, dans le descriptif, des ardoises à remplacer sans prendre en compte l’importance des travaux à réaliser en toiture.
Le constructeur, professionnel, a manqué à son devoir de conseil en démarrant les travaux sans que la toiture ne soit réparée et qu’il devait, par conséquent, indemniser l’entier préjudice en résultant.
La solution n’est pas étonnante et s’inscrit dans un courant jurisprudentiel établi (pour exemple, Cass. civ. 3, 15 avril 2021, n° 19-25.748 N° Lexbase : A80724PN).
Le devoir de conseil est protéiforme. Il comprend un devoir d’information ainsi qu’un devoir d’alerte. Il implique une obligation d'information et de mise en garde sur les risques liés à la construction, la conformité aux normes, et les éléments techniques, tout en tenant compte des validations effectuées par d'autres professionnels.
Tous les constructeurs y sont assujettis, dont le maître d’œuvre (pour exemple, Cass. civ. 3, 13 février 2025, n° 23-16.780 N° Lexbase : A25876WQ).
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