Le Quotidien du 1 mai 2025 : Fiscal général

[Textes] Loi de finances pour 2025 : orientations du budget et mesures impactant les particuliers

Réf. : Loi n° 2025-127, du 14 février 2025, de finances pour 2025 N° Lexbase : L4133MSU

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N1981B3R

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par Jean-Claude Zarka, Maître de conférences (HDR) à l’université Toulouse 1 Capitole

le 30 Avril 2025

Mots-clés :  loi de finances • budget • PIB • particuliers

La loi n° 2025-127, du 14 février 2025, de finances pour 2025, qui vise à ramener le déficit public à 5,4 % du PIB en 2025, prévoit des augmentations d’impôts et des baisses des dépenses de l’État et de ses opérateurs. Elle entend faire participer les plus grandes entreprises et les foyers aux revenus les plus élevés au redressement des comptes publics. Dans sa décision n° 2025-874 DC, du 13 février 2025, le Conseil constitutionnel a validé l’essentiel de la loi de finances et a jugé qu’elle a été adoptée selon une procédure conforme au texte constitutionnel de 1958.


 

Le 31 janvier 2025, les députés et les sénateurs, réunis en commission mixte paritaire, sont parvenus à un compromis sur ce texte budgétaire qui a connu un parcours législatif inédit. Présenté au conseil des ministres du 10 octobre 2024, il a été définitivement adopté par le Parlement, le 6 février 2025, par un vote ultime du Sénat. En effet, au lendemain du rejet à l’Assemblée nationale de la motion de censure déposée en application de l'article 49, alinéa 2 de la Constitution, le Sénat a voté en faveur du projet de loi de finances pour 2025 conduisant à son adoption.

Dans sa décision n° 2025-874 DC, du 13 février 2025, le Conseil constitutionnel, qui avait été saisi par deux recours émanant chacun de plus de soixante députés, a validé l’essentiel du budget 2025 [1]. Si le Conseil a jugé dix des dispositions contestées conformes à la Constitution, il a cependant censuré dix articles pour des motifs de procédure.

La loi de finances pour 2025, qui a été  a été publiée au Journal officiel du 15 février 2025, doit permettre de contenir le déficit public, qui a atteint 6,1 % du PIB  en 2024 , à 5,4 % du PIB en 2025 .La réduction du déficit public repose essentiellement sur une réduction importante des dépenses de l’État et sur une hausse des prélèvements obligatoires. Le ministre de l'Économie Éric Lombard a salué au Sénat, le 6 février 2025, l'adoption d'un « texte de redressement financier » avec « un effort jamais fait » de 30 milliards d'euros (Md €)  d'économies, et 20 Md € « de hausse d'impôt  proportionnel aux capacités contributives de chacun ».

Le texte budgétaire reprend en y apportant des modifications de nombreuses mesures fiscales qui étaient déjà prévues dans le projet de loi de finances présenté à l'automne 2024.Il augmente plusieurs prélèvements sur les entreprises et les particuliers et vient créer de nouveaux impôts. Ce faisant, il vient marquer une rupture par rapport aux budgets précédents qui ont été caractérisés par une baisse continue de la pression fiscale. La politique de l’offre, qui a été engagée à partir de 2017, a notamment consisté en une baisse massive d’impôts pour les entreprises.

S’agissant des entreprises, on retiendra en particulier le relèvement du taux nominal de la taxe sur les transactions financières ainsi que l’instauration d’une contribution sur les bénéfices des plus grandes entreprises et d’une taxe sur les rachats d’actions. S’agissant des particuliers, on relèvera notamment la création d'une contribution différentielle sur les hauts revenus, l’augmentation de la taxe de solidarité sur les billets d'avion et le renforcement de l'écotaxe sur les véhicules polluants .

Nous examinerons successivement les conditions d’adoption du budget 2025 (I), ses grandes orientations (II), ainsi que les principales mesures fiscales concernant les particuliers (III).

I. La procédure d’adoption du budget 2025

La loi de finances pour 2025 a connu un parcours parlementaire chaotique lié à un contexte politique inédit marqué par la dissolution de l’Assemblée nationale le 9 juin 2024 et la démission du gouvernement de Gabriel Attal, puis la nomination du gouvernement de Michel Barnier le 21 septembre 2024. Ce dernier, qui a présenté le projet de loi de finances pour 2025 le 10 octobre 2024, avec 10 jours de retard sur la date-butoir légale, a été censuré par les députés le 4 décembre 2024. Le vote de la motion de censure déposée dans le cadre de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, a entraîné la démission du gouvernement Barnier et le rejet du projet de loi de finances .C’est la raison pour laquelle une loi de finances spéciale a dû être promulguée le 20 décembre 2024 pour assurer la continuité de la vie nationale et le fonctionnement régulier des services publics en 2025, dans l'attente de l'adoption définitive  de la loi de finances de l'année [2].En l’absence de saisine du Conseil constitutionnel, cette loi de  finances spéciale ,qui est la seconde loi de ce type  à avoir été  adoptée sous la Ve République après celle de décembre 1979,  est entrée en vigueur le 1er janvier 2025.

Après sa nomination par le président Emmanuel Macron, le Premier ministre François Bayrou a souhaité repartir du projet de loi de finances adopté en Conseil de ministres le 10 octobre 2024 et déposé le même jour sur le bureau de l'Assemblée nationale. Afin d'adopter au plus vite un budget de l’État pour 2025, il a fait le choix de reprendre les débats parlementaires là où ils s’étaient arrêtés au Sénat après la censure du gouvernement de Michel Barnier le 4 décembre 2024. Le 23 janvier 2025, le Sénat a adopté avec modifications, en première lecture, le projet de loi de finances.

Après l’accord trouvé par la Commission mixte paritaire (CMP) le 31 janvier 2025 sur une version finale du texte budgétaire , l'Assemblée nationale a adopté sans vote cette version finale du projet de loi de finances ;la motion de censure déposée le 3 février 2025, en réponse à la décision du Premier ministre d'engager la responsabilité du gouvernement devant l'Assemblée nationale en recourant  l'article 49 alinéa 3 de la Constitution ,  ayant été rejetée .Le 6 février 2025, le Sénat a voté en faveur du  texte  issu de la CMP, conduisant à son adoption définitive.

Dans sa décision n° 2025-874 DC, du 13 février 2025, le Conseil constitutionnel a considéré que les exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire n’ont pas été méconnues et a jugé que la procédure d'adoption de la loi de finances a bien été respectée. Il n’a pas suivi les députés requérants qui reprochaient notamment au gouvernement d’avoir méconnu les délais impartis pour la présentation d’un rapport prévu par le paragraphe I de l’article 48 de la loi n° 2001-692, du 1er août 2001, relative aux lois de finances (LOLF) N° Lexbase : L1295AXA et pour le dépôt du projet de loi de finances de l’année. Il a relevé que, s’il ressort des travaux préparatoires que le rapport précité et le projet de loi de finances n’ont pas été transmis au Parlement dans les délais requis, « il n’en est pas résulté, compte tenu des circonstances exceptionnelles ayant conduit à la formation tardive du gouvernement, de la date de dépôt effective du projet de loi de finances et de ses conditions d’examen, d’atteinte substantielle aux exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire ».

Le Conseil constitutionnel a également  estimé  que si les députés requérants ont soutenu que certains documents budgétaires n’auraient pas été fournis au président et au rapporteur général de la commission chargée des finances de l’Assemblée nationale , en méconnaissance de l’article 57 de la loi n° 2001-692, du 1er  août 2001, « ils n’établissent pas que, pour très regrettable qu’elle ait été, cette circonstance aurait porté une atteinte substantielle aux exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire » .

II. Les grandes orientations du budget 2025
Nous présenterons successivement les chiffres clés du budget 2025 (A), la réduction des dépenses publiques (B) et l’avis du Haut conseil des finances publiques (HCFP) qui a estimé que le scénario macroéconomique retenu par le gouvernement pour 2025 est « un peu optimiste » (C).

A. Les principales hypothèses du budget 2025

Le budget de l’État s’appuie sur une prévision de croissance de l’activité de 0,9 % contre 1,1 % dans la version initiale du texte budgétaire.

La loi de finances vise un déficit public de 5,4 % du PIB en 2025 alors que le projet de loi de finances initial de Michel Barnier avait l’ambition de ramener, en un an, le déficit public à 5 % du PIB (art. liminaire).

Afin de respecter les règles du Pacte de stabilité et de croissance (PSC), le gouvernement de François Bayrou a maintenu l’objectif de réduire le déficit en dessous des 3 % du PIB à l’horizon 2029.

On rappellera à ce propos que le 26 juillet 2024, le Conseil a approuvé la recommandation de la Commission européenne d’ouvrir une procédure pour déficit public excessif contre la France en raison du non-respect des règles relatives au déficit pour l’année 2023 [3].

La dette publique devrait dépasser, en 2025, le « point haut » de 115 points de PIB observé en 2020 lors de la crise sanitaire.

La charge de la dette devrait elle aussi augmenter et passer de 58,8 Md€ en 2024 à 67,1 Md€ en 2025.

Les dépenses publiques devraient progresser de 43 Md € et s’élever 1 695 Md € en 2025.

Le taux de prélèvements obligatoires devrait lui passer de 42,8 % du PIB en 2024 à 43,6 % du PIB en 2025 du fait de 26,2 Md€ de mesures fiscales nouvelles par rapport à 2024. La loi de finances fixe, pour 2025, le déficit budgétaire de l’État à 139 Md€.

L’effort financier demandé aux collectivités territoriales pour réduire le déficit public a été fixé à 2,2 Md€ en 2025, contre 5 Md€ prévus initialement. Dans son discours de politique générale prononcé à l’Assemblée nationale, le 14 janvier 2025, le Premier ministre François Bayrou a déclaré qu’il avait « tout à fait confiance dans la capacité des élus à mener cet effort ».

B. La réduction des dépenses publiques

Le législateur a prévu de diminuer de 2,6 % les crédits des différents ministères. Si les budgets des ministères régaliens (Armées, Intérieur et Justice) sont préservés, plusieurs budgets ministériels (Recherche et Enseignement supérieur, Écologie, Aide publique au développement, Travail et emploi, Sport….) enregistrent une nette baisse. Le budget du ministère du Travail, qui passe de 23,7 Md€ en 2024 à 19,7 Md€ en 2025, est celui qui baisse le plus en raison en particulier d’une diminution importante des aides à l'apprentissage. L’enveloppe dédiée à l’aide publique au développement diminue de 1,2 Md€ par rapport à 2024. Les crédits du plan « France 2030 », qui vise à développer la compétitivité industrielle et les technologies d’avenir, baissent de 32 %.

C. L’avis du Haut conseil des finances publiques

Dans son avis [4] rendu le 29 janvier 2025, le HCFP a estimé que « la prévision de croissance du PIB pour 2025 (+ 0,9 %), supérieure à celle du consensus des économistes (+ 0,7 %), est atteignable mais un peu optimiste au vu des indicateurs conjoncturels les plus récents ». Il a également jugé que « la prévision d’inflation (+ 1,4 %) paraît un peu élevée au vu des tendances récentes et de l’atonie de la demande ». Il en va de même pour la prévision de masse salariale des branches marchandes (+ 2,5 %), en raison  du ralentissement de l’activité et de la baisse de l’inflation anticipés en 2025.

Selon le HCFP, le texte budgétaire « amorcerait l’indispensable trajectoire de réduction du déficit mais offre peu de marges de sécurité ». Il a notamment relevé que la prévision de déficit public pour 2025 (5,4 %) repose « sur des hypothèses macroéconomiques un peu optimistes, sur un net ralentissement des dépenses des collectivités locales et une forte maîtrise des dépenses d’assurance-maladie qui doivent être étayées par des mesures plus efficaces que celles qui ont été déployées jusqu’à présent, ainsi que sur une gestion stricte des crédits de l’État ».

La « cible d’évolution des dépenses publiques prévue pour 2025 » est jugée « ambitieuse ». Elle suppose « un net ralentissement des dépenses des collectivités locales et une forte maîtrise des dépenses d’assurance-maladie, qui ne sont pas acquises, ainsi qu’une baisse des dépenses de l’État qui ne lui laisse que très peu de marges pour financer des dépenses imprévues en cours d’année ».

Le HCFP a observé que « c’est la hausse du taux de prélèvements obligatoires qui explique […] la quasi-totalité de l’ajustement structurel de 0,7 point de PIB en 2025 ». Il a noté que « l’effort structurel repose [...] principalement sur des mesures de hausse de prélèvements obligatoires (un peu moins de + 0,9 point de PIB) et faiblement d’un effort en dépenses (un peu moins de + 0,1 point de PIB) ».

S’agissant de la dette publique qui devrait s’élever à 115,4 % du PIB en 2025, le HCFP a rappelé que celle-ci s'est accrue fortement ces dernières années, faisant de la France le troisième État le plus endetté de la zone euro, derrière la Grèce et l’Italie.

Enfin, « compte tenu de l’urgence à réduire le déficit, le gouvernement doit être prêt à prendre les dispositions nécessaires en cas de moins-values de recettes ou de dérapage de certaines dépenses en cours d’année », ajoute le HCFP.

III. Les principales mesures fiscales intéressant les particuliers

S’agissant de l’impôt sur le revenu, le texte budgétaire actualise le barème de l’impôt, permet la défiscalisation des pourboires et vient pérenniser le dispositif « Coluche » de défiscalisation des dons (A). Il instaure une contribution différentielle applicable à certains particuliers titulaires de hauts revenus qui sera codifiée à l’article 224 du CGI N° Lexbase : L5583M8B (B). Il permet de sécuriser les modalités d’imposition applicables aux personnes non-résidentes de France (C). Il comporte des mesures relatives à l’immobilier qui concernent les particuliers (D). Il augmente  la taxe de solidarité sur les billets d'avion dite « taxe Chirac » (E). Il détermine de nouvelles modalités d'établissement de la liste des bénéficiaires du chèque énergie (F). Il renforce la taxe malus (ou écotaxe) sur les véhicules polluants (G).

A. Les dispositions concernant l’impôt sur le revenu

L’indexation sur l’inflation du barème de l’impôt sur le revenu pour les revenus de 2024. Afin de préserver le pouvoir d’achat des Français, la loi de finances vient indexer le barème de l'impôt sur le revenu sur l'inflation (art. 2). Elle prévoit une indexation du barème de 1,8 %, contre 2 % dans la version initiale du texte budgétaire, et cela conformément à la prévision d’inflation publiée par l’Insee au début de l’année 2025. Sans cette indexation, 18 millions de personnes auraient vu leur imposition augmenter. Les nouvelles tranches du barème commencent désormais à partir de 11497 euros pour la première (au lieu de 11294 euros), et vont jusqu'à 180 294 euros (au lieu de 177 106 euros) pour la cinquième. Elles seront appliquées pour les déclarations de revenus de l’année 2025.

La défiscalisation des pourboires. La loi de finances prolonge l’exonération fiscale et sociale sur les pourboires pour l’année 2025 (art. 7). Les pourboires versés par les clients pour le service seront exonérés d'impôt sur le revenu. Cette disposition a été introduite par l’article 5 de la loi n° 2021-1900, du 30 décembre 2021, de finances pour 2022 N° Lexbase : L6569MS4.

Le dispositif Coluche de défiscalisation des dons. Le texte budgétaire vient pérenniser le dispositif dit « Coluche » qui prévoit une réduction d’impôt de 75 % pour les dons faits à des organismes d’aide aux personnes en difficulté dans la limite de 1000 euros (art. 6). Cette réduction d’impôt sera également applicable aux dons effectués au profit des associations qui accompagnent les victimes de violence domestique (art. 5).

B. L’instauration d'une contribution différentielle sur les hauts revenus

L’article 10 de la loi de finances vient créer une contribution temporaire et exceptionnelle permettant d’assurer une imposition minimale de 20 % des plus hauts revenus. Ce mécanisme anti-optimisation fiscale concernera les contribuables assujettis à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR) [5], à savoir ceux dont le revenu fiscal de référence dépasse 250 000 euros pour un célibataire et 500 000 euros pour un couple. Selon l’exposé des motifs du projet de loi de finances, elle ne concernera « que quelques dizaines de milliers de foyers aux revenus les plus élevés » et n’affectera « aucun foyer non imposable ».

La contribution différentielle sur les hauts revenus (CDHR) sera égale à la différence, lorsqu’elle est positive, entre le montant résultant de l’application d’un taux de 20 % au revenu fiscal de référence et le montant résultant de la somme de l’impôt sur le revenu et de la CEHR, ainsi que des prélèvements libératoires de l’impôt sur le revenu, majoré de 1 500 euros par personne à charge et de 12 500 euros pour les contribuables soumis à imposition commune.

Afin d’atténuer l’effet de seuil lié à l’entrée dans le champ de cette contribution exceptionnelle, un mécanisme de décote est prévu pour les contribuables dont le revenu fiscal de référence est inférieur ou égal à 330 000 euros pour un célibataire et à 660 000 euros pour les couples soumis à imposition commune.

La CDHR, dont le rendement est estimé à 2 Md€, ne s'appliquera qu’aux revenus de l’année 2025.Dans la version initiale du projet de loi de finances, elle devait s’appliquer pour l'imposition des revenus de 2024 et jusqu’à l’imposition des revenus de l’année 2026.

La commission mixte paritaire a prévu que la CDHR donnera lieu au versement d’un acompte entre le 1er décembre 2025 et le 15 décembre 2025. Cet acompte obligatoire sera égal à 95% du montant de la contribution estimé par le contribuable.

Une pénalité prenant la forme d'une majoration de 20 % s'appliquera en cas de défaut de paiement de l’acompte, de retard de paiement ou lorsque le montant de l’acompte versé s’avère inférieur de plus de 20 % à 95 % du montant de la contribution.

Selon le député David Amiel, rapporteur pour l’Assemblée nationale, « ce dispositif vise les contribuables dont une part très importante des revenus est liée au capital et qui sont taxés au titre du prélèvement forfaitaire unique (PFU). Par nature, ces revenus sont plus volatils que ceux du travail et davantage soumis à des erreurs d’estimation » [6].

C. La sécurisation des modalités d’imposition applicables aux personnes non-résidentes de France

La définition du domicile fiscal en France prévue à l’article 4 B du Code général des impôts N° Lexbase : L5561M8H est précisée à la suite de l’arrêt du 5 février 2024 du Conseil d’État [7]. Dans cette décision, le juge administratif avait considéré que la condition de domiciliation fiscale hors de France entraînant l’application de la retenue à la source sur les traitements, salaires, pensions et rentes viagères prévue à l’article 182 A du CGI N° Lexbase : L5204MMP devait s’apprécier au regard des dispositions de droit interne prévues à l’article 4 B du CGI, indépendamment de la « résidence fiscale » au sens des conventions fiscales internationales [8].

Cependant, par un communiqué de presse du 29 avril 2024, l’administration fiscale avait exposé son désaccord avec cette jurisprudence qu’elle avait considérée comme étant susceptible de « rendre complexes les modalités d’imposition des revenus de source française des contribuables concernés et d’introduire de l’insécurité juridique pour les débiteurs des sommes versées » [9]. Elle avait également tenu à réaffirmer que « la primauté de la notion de résident en droit conventionnel sur celle de domicile fiscal en droit interne [restait]en vigueur ainsi que ses conséquences sur les modalités d’imposition, tel qu’exposé dans la documentation administrative (BOI-INT-DG-20-10-10, 12 septembre 2012) ».

Le gouvernement a donc souhaité clarifier les modalités d’imposition applicables aux personnes non-résidentes de France. L’article 4 B du CGI précisera désormais que les personnes qui ne sont pas résidentes fiscales de France, par application des conventions internationales, ne peuvent pas être considérées comme ayant leur domicile fiscal en France (art. 83). Ce faisant, le texte budgétaire vient contredire la jurisprudence du Conseil d’État et légaliser la doctrine administrative selon laquelle la notion de résident en droit conventionnel doit l’emporter sur celle de domicile fiscal au sens du droit interne pour l’application des dispositions du CGI.

D . Les dispositions concernant l’immobilier

L’élargissement du prêt à taux zéro. Le dispositif de prêt à taux zéro (PTZ), qui constitue le principal dispositif de soutien aux primo-accédants à la propriété, était jusqu’ici seulement accessible aux logements neufs collectifs, en zone tendue. Il sera désormais étendu à tout le territoire français, sans distinction, pour l’achat dans le neuf, qu'il s'agisse d'une construction individuelle ou collective (art. 90). Les conditions d'achat dans l’ancien ne sont pas modifiées. L'achat d'un logement ancien par le biais du PTZ sera possible si des travaux de rénovation énergétique sont réalisés dans le bien acheté.

La prorogation du dispositif fiscal Loc'Avantages. Il est prolongé jusqu'au 31 décembre 2027 (art. 88). Codifié à l’article 199 tricies du CGI N° Lexbase : L5572M8U, il prévoit une réduction d’impôt au profit des propriétaires bailleurs qui mettent leur logement en location dans le cadre d’une convention conclue avec l'Agence nationale de l'habitat (Anah), sous condition de plafond de loyer.

Le relèvement du plafond du taux des droits de mutation à titre onéreux fixé par les départements. Les conseils départementaux auront la faculté de relever le plafond du taux des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) de 4,5 % à 5 % pendant une période provisoire de trois ans (art. 116) .Cette mesure, qui vient  répondre aux difficultés financières que connaissent les  départements , avait été annoncée par le Premier ministre Michel Barnier à Angers aux Assises des Départements, le 15 novembre 2024. Il est à noter que les primo-accédants seront exonérés d’une éventuelle hausse des « frais de notaires ».

Le nouveau régime fiscal de la location meublée non professionnelle (LMNP). Le gouvernement a voulu « corriger une spécificité du régime fiscal de la location meublée non professionnelle (LMNP) qui contribue aux tensions sur le marché locatif » [10]. Jusqu’à présent, les contribuables relevant du régime de la LMNP avaient la possibilité, sous certaines conditions, de déduire de leurs recettes locatives imposables les amortissements afférents au logement loué sans que ceux-ci ne soient pris en compte dans le calcul de la plus-value lors de la cession dudit logement .Afin de garantir une plus grande égalité de traitement entre les loueurs professionnels et les loueurs non professionnels, l’article 84 de la loi de finances prévoit que les amortissements déduits pendant la période de location d’un bien seront désormais  pris en compte lors de sa cession pour le calcul de la plus-value immobilière afférente. Cette nouvelle règle ne concernera pas les amortissements correspondant à des « dépenses de construction, de reconstruction, d’agrandissement ou d’amélioration », conformément à l’article 150 VB, II, 4° du CGI N° Lexbase : L5566M8N.

Le législateur  a souhaité  prévoir « un traitement particulier pour l’investissement dans certains types de logements qui concourent au développement de l’offre locative en faveur de certaines populations dont les besoins présentent des enjeux particuliers »[11].C’est la raison pour laquelle la loi de finances reprend un amendement présenté par le Gouvernement  et adopté  par le Sénat  qui vient exclure du champ d’application de l’article 84 les résidences de services étudiantes et seniors ainsi que certains établissements pour personnes âgées ou handicapées. Enfin, ces dispositions s’appliqueront aux cessions réalisées à compter du lendemain de la promulgation de la loi de finances pour 2025.

E. L’augmentation de la taxe de solidarité sur les billets d'avion (TSBA)

Le texte issu de la commission mixte paritaire vient modifier le barème de la TSBA, une taxe instituée par la loi n° 2005-1720, du 30 décembre 2005, de finances rectificative pour 2005 N° Lexbase : L6430HEU et cela conformément aux souhaits du Président Jacques Chirac (art. 30).

Cette modification avait été introduite par le Sénat, lequel avait adopté un amendement gouvernemental ayant pour objet « de faire contribuer les passagers aériens à l’effort de rétablissement des comptes publics ».

Pour les billets en classe économique, le tarif de la TSBA passe de 2,63 euros à 7,40 euros pour les destinations européennes. Cette hausse a été présentée par la commission mixte paritaire comme « une position intermédiaire entre la position du gouvernement et celle du Sénat ». Le tarif de TSBA sera fixé à 15 euros (au lieu de 7,51 euros) pour les destinations intermédiaires et à 40 euros (au lieu de 7,51 euros) pour les destinations lointaines.

Pour les billets en classe affaires, la taxe passe de 20,27 euros à 30 euros pour un vol en Europe ou assimilé, de 63,07 euros à 80 euros pour les destinations intermédiaires et de 63,07 euros à 120 euros pour les destinations au-delà de 5500 km.

S’agissant des billets associés à l’aviation d’affaires, la hausse des tarifs est très importante. Selon le type d’appareil utilisé, la taxe s’élèvera à 210 ou 420 euros pour les destinations européennes, à 675 ou 1015 euros pour les destinations intermédiaires, et jusqu’à 2 100 euros pour les destinations lointaines.

La hausse de la TSBA, prélevée sur les seuls vols au départ de la France, qui a été qualifiée de « mesure de justice fiscale et écologique » par la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, devrait rapporter environ 800 à 850 millions d'euros (M€) à l’État. 

F. La réforme du chèque énergie

Elle a fait l'objet d'un amendement gouvernemental adopté par le Sénat.  Le chèque énergie sera envoyé automatiquement aux foyers éligibles (art. 173). L’Agence de services et de paiement, qui gère le dispositif du chèque énergie, pourra bénéficier du croisement des données relatives aux revenus et à la composition du foyer fiscal, transmises par l’administration fiscale, et des données relatives au point de livraison permettant d’identifier le logement principal du foyer fiscal, transmises par les fournisseurs d’électricité. La liste des bénéficiaires du chèque énergie est plus difficile à déterminer depuis que la taxe d’habitation sur les résidences principales a été supprimée le 1er janvier 2023 pour tous les contribuables.

Par ailleurs, la possibilité d’utiliser le chèque travaux pour les dépenses de rénovation énergétique des logements est supprimée. Le gouvernement a fait valoir que «  ce dispositif est très peu utilisé […] et qu’il y a d’autres dispositifs plus efficaces pour accompagner les ménages précaires dans la rénovation énergétique de leur logement comme Ma Prime Rénov’ ou les CEE précarité » [12].

G. Le renforcement du malus sur les véhicules polluants

La loi de finances poursuit le renforcement de la taxe sur les émissions de dioxyde de carbone des véhicules de tourisme (« malus CO2 ») qui a pour objectif d’encourager les consommateurs à s’orienter vers les véhicules les moins émetteurs de CO2 (art. 27). Elle prévoit un abaissement du seuil de déclenchement du malus CO2 de 5 g/CO2/km chaque année jusqu’en 2027. De plus, pour cibler les véhicules les plus émetteurs de CO2, le tarif maximum du malus CO2 est renforcé de 10 000 euros par an pour atteindre 90 000 euros en 2027 sur ces véhicules. Dans sa décision du 13 février 2025, le Conseil constitutionnel a validé ces nouvelles règles et a écarté le grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant les charges publiques. Il a jugé que « cette taxe portant uniquement sur l'achat de certains véhicules de tourisme par des particuliers en toute connaissance de cause, il ne saurait être utilement soutenu qu'elle revêtirait un caractère confiscatoire ou qu'elle ferait peser sur une catégorie de contribuables une charge excessive ».

La loi de finances a aussi permis le renforcement de la taxe sur la masse en ordre de marche des véhicules de tourisme (dite « malus masse ») dès 2026, en abaissant son seuil de déclenchement de 1 600 à 1 500 kg.

 

[1] Le Conseil constitutionnel ne s'est pas prononcé sur les mesures phares du projet de loi de finances, qu'il s'agisse de la contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises ou de la contribution différentielle sur les hauts revenus. Ces dispositions ne figuraient pas dans les lettres de saisine parlementaire adressées au Conseil constitutionnel contre la loi de finances pour 2025.

[2] Loi n° 2024-1188, du 20 décembre 2024, spéciale prévue par l'article 45 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances N° Lexbase : L6264MSS.

[3] Décision 2024/0169, du Conseil sur l’existence d’un déficit excessif en France.

[4] Avis n° HCFP -  2025 – 1 relatif à l’amendement des projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l’année 2025, 29 janvier 2025.

[5] La CEHR, qui a été créée par l'article 2 de la loi n° 2011-1977, du 28 décembre 2011, de finances pour 2012 N° Lexbase : L6269MSY, fonctionne comme une tranche additionnelle du barème de l’impôt sur le revenu. Elle est codifiée à l'article 223 sexies du CGI N° Lexbase : L9339LHD.

[6] V. CMP, rapp. nos 873 et 296, 31 janvier 2025, p. 21.

[7] CE 3° et 8° ch.-r., 5 février 2024, n° 469771, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A53902KT.

[8] V. MINEFI, communiqué de presse, 29 avril 2024, n° 1809 [en ligne].

[9] V. MINEFI, communiqué de presse, 29 avril 2024, n° 1809.

[10] AN, projet de loi de finances pour 2025, n° 324, 10 octobre 2024, p .119.

[11] V. l’amendement n° I-2104 sur le projet de loi de finances pour 2025 déposé le 22 novembre 2024 par le gouvernement [en ligne].

[12] V. l’amendement n° II-1673 sur le projet de loi de finances pour 2025 déposé le 3 décembre 2024 par le gouvernement [en ligne].

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