Le Quotidien du 18 décembre 2024 : Responsabilité

[Brèves] Le forfait hospitalier n’est pas une prestation permettant le recours subrogatoire en cas d’accident subi par un agent public

Réf. : Cass. civ. 2, 28 novembre 2024, n° 23-14.255, F-B N° Lexbase : A29436K9

Lecture: 5 min

N1200B3T

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

[Brèves] Le forfait hospitalier n’est pas une prestation permettant le recours subrogatoire en cas d’accident subi par un agent public. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/113893659-breves-le-forfait-hospitalier-nest-pas-une-prestation-permettant-le-recours-subrogatoire-en-cas-dacc
Copier

par Christophe Quézel-Ambrunaz, enseignant-chercheur à l’Université Savoie Mont Blanc

le 17 Décembre 2024

L’action subrogatoire d’une personne publique ne peut être exercée pour recouvrer les sommes versées au titre du forfait hospitalier ; la solution est affirmée pour les situations antérieures à la création du Code général de la fonction publique, elle est moins évidente aujourd’hui.

Le forfait hospitalier et le droit antérieur à la création du Code général de la fonction publique. Le forfait hospitalier est la somme que doit débourser un patient hospitalisé et qui représente sa participation financière aux frais d’hébergement et d’entretien. Son caractère indemnisable a été discuté dans la mesure où les frais qu’il compense sont susceptibles d’être exposés à domicile. Néanmoins, il est acquis aujourd’hui que le forfait hospitalier est bien un préjudice indemnisable, habituellement au titre des frais divers (Cass. civ. 2, 3 mai 2006, n° 05-12.617, FS-D N° Lexbase : A2567DPR). Des exonérations sont possibles, par exemple, en cas d’accident du travail.

S’est posée dans le passé la question de savoir si un organisme, qui a pris en charge le forfait hospitalier, pouvait recourir pour celui-ci contre le responsable de l’accident. La réponse de la Cour de cassation a été négative (Cass. civ. 2, 3 juillet 2014, n° 13-23.104, F-D N° Lexbase : A2740MTN ; Cass. civ. 2, 3 juillet 2014, n° 13-23.105, F-D N° Lexbase : A2614MTY). Le fondement aurait été le 3° de l’article 29 de la loi n° 85-677, du 5 juillet 1985 N° Lexbase : L7887AG9, à savoir « les sommes versées en remboursement des frais de traitement médical et de rééducation ». Le forfait hospitalier ne correspondant pas au coût des soins, il ne peut ouvrir droit à recours subrogatoire.

Dans l’arrêt commenté, la victime était militaire, et c’est l’agent judiciaire du Trésor qui exerce un recours. Cette spécificité est susceptible de changer l’étendue du recours, car alors le 2 de l’article 29 de la loi de 1985 s’applique, et il renvoie aux prestations énumérées au II de l'article 1er de l'ordonnance n° 59-76, du 7 janvier 1959, relative aux actions en réparation civile de l'État et de certaines autres personnes publiques N° Lexbase : L8221HIC.

Une telle formulation, avec l’épithète « énumérée », laisse entendre que la liste en question est limitative. Le forfait hospitalier n’entre pas dans la liste du texte, qui vise notamment les frais médicaux ; toutefois, cette liste, dans l’ordonnance, est introduite par l’adverbe « notamment », ce qu’a souligné l’arrêt d’appel.

La question qui se pose à la Cour de cassation est ainsi de savoir si la liste des prestations servies à l’agent public ouvrant droit au recours est limitative, ou non. La Cour de cassation en fait une liste limitative, estimant que l’arrêt d’appel a violé l’article 29 de la loi de 1985 en accordant le recours pour un débours absent de la liste.

Le forfait hospitalier et le droit actuel. L’ordonnance n° 2021-1574, du 24 novembre 2021 N° Lexbase : L8062L9H a créé la partie législative du Code de la fonction publique. Le II de l’article 1er de l’ordonnance susmentionnée a été supprimé, pour maintenant former l’article L. 825-4 du CGFP N° Lexbase : L7043MBH, et la liste est toujours introduite par l’adverbe « notamment ». La loi de 1985 n’a pas été modifiée en conséquence, de telle sorte qu’elle pointe vers un texte qui n’existe plus, ce qui est évidemment regrettable.  L’arrêt sous commentaire appliquant l’ancienne version de l’ordonnance, rationae tempori, la difficulté ne se posait pas, mais ces changements pourraient faire en sorte que cette décision ne soit finalement qu’un arrêt isolé.

En effet, l’article L. 825-1 du CGFP N° Lexbase : L6180MBI dispose que « L'État, les collectivités territoriales et les établissements publics à caractère administratif disposent de plein droit contre le tiers responsable du décès, de l'infirmité ou de la maladie d'un agent public, par subrogation aux droits de ce dernier ou de ses ayants droit, d'une action en remboursement de toutes les prestations versées ou maintenues à l'agent public ou à ses ayants droit et de toutes les charges qu'ils ont supportées à la suite du décès, de l'infirmité ou de la maladie ». Sa formule est très générale, alors que l’article 29 de la loi de 1985 annonce que l’absence de recours est le principe, et le recours l’exception : « Seules les prestations énumérées ci-après versées à la victime d'un dommage résultant des atteintes à sa personne ouvrent droit à un recours contre la personne tenue à réparation ou son assureur ». Cet équilibre pourrait être chamboulé : rappelons que la liste de l’article L. 825-4 du CGFP n’est pas limitative, et que, comme il n’y a plus d’arguments pour utiliser l’article 29 de la loi de 1985 plutôt que les articles L. 825-1 et suivants du CGFP, il se pourrait que les magistrats soient prochainement amenés à considérer que la liste étant ouverte, le forfait hospitalier réglé par une personne publique au bénéfice de l’agent public accidenté ouvre droit au recours.

newsid:491200

Cookies juridiques

Considérant en premier lieu que le site requiert le consentement de l'utilisateur pour l'usage des cookies; Considérant en second lieu qu'une navigation sans cookies, c'est comme naviguer sans boussole; Considérant enfin que lesdits cookies n'ont d'autre utilité que l'optimisation de votre expérience en ligne; Par ces motifs, la Cour vous invite à les autoriser pour votre propre confort en ligne.

En savoir plus