Réf. : Cass. civ. 2, 4 juillet 2024, n° 22-13.575, F-B N° Lexbase : A68385M9
Lecture: 5 min
N0133B3C
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Yannick Ratineau, Maître de conférences à l’Université Grenoble Alpes, Co-directeur de l’Institut d’Études Judiciaires de Grenoble, Co-directeur du BACAGe (Bulletin des arrêts de la cour d’appel de Grenoble), Centre de Recherches Juridiques – EA 1965
le 26 Juillet 2024
► En matière de recours en révision, il résulte des articles 424 et 600 du Code de procédure civile que le ministère public n'est pas partie principale, mais partie jointe, de sorte que les dispositions de l'article 978 du Code de procédure civile ne s'appliquant pas, la déchéance du pourvoi, faute de signification du mémoire ampliatif au procureur général de la cour d'appel, n'est pas encourue ;
La condition de recevabilité du recours en révision, tenant à l'existence d'un jugement passé en force de chose jugée, s'apprécie au jour de l'introduction de ce recours ;
Lorsqu'un recours en révision a été formé prématurément contre une décision rendue en matière familiale, objet d'un pourvoi suspensif en application des articles 1086 et 1087 du Code de procédure civile, ce texte n'interdit pas à son auteur de former un second recours en révision contre la même décision, après désistement de son pourvoi, sans que la partie ait à invoquer une nouvelle cause de révision tant que le premier recours en révision n'a pas été examiné ou déclaré irrecevable.
Faits et procédure. Par jugement du 3 juillet 2018, un juge aux affaires familiales a prononcé le divorce d’époux à leurs torts partagés, rejeté leurs demandes indemnitaires et condamné l’ex-époux à payer à son ex-épouse une prestation compensatoire d'un certain montant. Ce jugement a été confirmé par une cour d’appel dans un arrêt du 10 mars 2020, qui est attaqué par l’ex-épouse dans un pourvoi en cassation formé le 18 juin 2020 et un recours en révision en date du 31 août 2020. Par une ordonnance du 12 novembre 2020, la Cour de cassation constate que cette dernière se désiste de son pourvoi, mais le 28 décembre 2020, elle forme un second recours en révision contre l'arrêt du 10 mars 2020 au sein duquel elle sollicite les mêmes demandes. Les deux procédures sont jointes et l’ex-époux conclut à l'irrecevabilité des deux recours en révision. Par arrêt en date du 1er mars 2022, la cour d’appel de Paris déclare irrecevables les recours en révision formés les 31 août et 28 décembre 2020. L’ex-épouse se pourvoit en cassation.
Pourvoi. Dans son pourvoi, la demanderesse fait notamment grief à la cour d’appel d’avoir, d’une part, dit que la décision d'appel dont la révision était demandée n'était pas passée en force de chose jugée en raison du pourvoi interjeté le 18 juin 2020 à l'encontre de cette même décision par l'exposante, et d’autre part, que le second recours en révision identique au premier et ne se fondant sur aucune des causes énumérées à l'article 595 N° Lexbase : L6752H79 du Code de procédure civile survenue postérieurement au 31 août 2020, mais se limitant à invoquer les mêmes faits que dans le recours en révision du 31 août 2020, était également irrecevable. En outre, devant la Cour de cassation, l’ex-mari demande que la demanderesse soit déchue de son pourvoi, sur le fondement des articles 978 N° Lexbase : L7856I4Q et 615 N° Lexbase : L6773H7Y du même code, au motif que le mémoire ampliatif n'a pas été signifié au ministère public qui figurait dans l'instance en révision comme partie jointe et que l'objet du pourvoi étant indivisible, la déchéance du pourvoi en résultant est encourue à l'égard de toutes les parties.
Solution. La Haute juridiction rejette tout d’abord la demande formulée par l’ex-époux au visa des articles 424 N° Lexbase : L7262LEP et 600 N° Lexbase : L8424IUK du Code de procédure civile. Pour la Cour de cassation, en matière de recours en révision, le ministère public n'est pas partie principale, mais partie jointe, ce dont elle déduit que les dispositions de l'article 978 ne trouvent pas à s'appliquer quand le ministère public a la qualité de partie jointe devant la cour d'appel, et la déchéance du pourvoi, faute de signification du mémoire ampliatif au ministère public, n'est donc pas encourue. Elle rejette ensuite le premier moyen au pourvoi au motif que la cour d’appel a fait une exacte application de la loi en retenant que la condition de recevabilité du recours en révision, tenant à l'existence d'un jugement passé en force de chose jugée, s'apprécie au jour de l'introduction de ce recours. En revanche, au visa des articles 126 N° Lexbase : L1423H4H et 603 N° Lexbase : L6760H7I du Code de procédure civile, elle casse et annule l’arrêt d’appel du 1er mars 2022 au motif que, lorsqu'un recours en révision a été formé prématurément contre une décision rendue en matière familiale, objet d'un pourvoi suspensif en application des articles 1086 N° Lexbase : L1543H4W et 1087 N° Lexbase : L1548H44 du Code de procédure civile, ce texte n'interdit pas à son auteur de former un second recours en révision contre la même décision, après désistement de son pourvoi, sans que la partie ait à invoquer une nouvelle cause de révision tant que le premier recours en révision n'a pas été examiné ou déclaré irrecevable.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:490133