Réf. : Cass. crim., 23 mai 2024, n° 23-80.088, F-B N° Lexbase : A85975CE
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par Pauline Le Guen
le 29 Mai 2024
► La Chambre criminelle casse l’arrêt qui, pour prononcer la confiscation d’immeubles appartenant à un condamné, statue par des motifs dont il ne ressort pas que l’intéressé ait été invité, au cours de la procédure, à s’expliquer sur les biens dont la confiscation était envisagée, ni à en justifier l’origine.
Rappel des faits et de la procédure. Le tribunal correctionnel a condamné un individu des chefs de fraude fiscale à, d’une part, dix-huit mois d’emprisonnement avec sursis et une confiscation et, dans un second jugement, à douze mois d’emprisonnement avec sursis probatoire, une confiscation et une publication. L’homme a relevé appel de ces décisions et le ministère public a formé un appel incident.
En cause d’appel. La cour d’appel a condamné l’individu à trente-six mois d’emprisonnement avec sursis, cinq ans d’interdiction des droits civiques, civils et de famille, une confiscation et a ordonné la publication de la décision. L’intéressé s’est pourvu en cassation.
Moyens du pourvoi. Dans un premier moyen, il était fait grief à l’arrêt d’avoir ordonné la confiscation de plusieurs biens immobiliers appartenant au requérant, alors que la confiscation du patrimoine suppose que le propriétaire ait été mis en mesure de s’expliquer sur les biens et d’en justifier l’origine, ce qui n’aurait pas été le cas.
L’intéressé critiquait ensuite l’arrêt de l’avoir condamné à la peine de privation de ses droits civiques, civils et de famille pendant cinq ans sans motiver cette peine au regard de la gravité des faits, de sa personnalité et de sa situation personnelle.
Enfin, il était reproché à l’arrêt d’avoir ordonné la diffusion du dispositif dans un journal en tant que peine obligatoire et sans la motiver, alors que c’est une peine facultative qui doit donc être motivée.
Décision. La Chambre criminelle casse et annule l’arrêt rendu par la cour d’appel et fait droit aux trois moyens. Dans un premier temps, elle indique que le requérant n’a jamais été invité au cours de la procédure à s’expliquer sur les biens dont la confiscation était envisagée, ni à en justifier l’origine, en méconnaissance de l’alinéa 5 de l’article 131-21 du Code pénal N° Lexbase : L7984MBC. Dès lors, la peine de confiscation ne pouvait être prononcée.
Par ailleurs, elle remarque que l’intéressé a été condamné à la privation de ses droits civiques, civils et de familles pour une durée de cinq ans au titre de peine complémentaire. Pourtant, étant une peine facultative, elle devait être motivée en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de l’auteur et de sa situation personnelle, ce qui n’a pas été le cas. Ainsi, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision.
Enfin, la Haute juridiction souligne que la peine complémentaire de publication, réprimant le délit de fraude fiscale, n’est plus une peine obligatoire depuis l’abrogation de l’article par le Conseil constitutionnel (Cons. const., décision n° 2010-72/75/82 QPC, du 10 décembre 2010 N° Lexbase : A7111GMC), de sorte qu’elle est facultative. Ainsi, la cour d’appel ne pouvait indiquer que la peine était obligatoire et se devait de la justifier.
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