Réf. : Cass. civ. 2, 28 mars 2024, n° 22-127.97, FS-B N° Lexbase : A23962XZ
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par Guillaume Fricker, Avocat au barreau de St Malo – Dinan, Administrateur de l’Association des avocats praticiens des procédures et de l’exécution (AAPPE)
le 10 Avril 2024
► La faculté pour la commission de surendettement de saisir le juge des contentieux de la protection à fin d'annulation de la mesure, ne fait pas obstacle au droit du débiteur de contester une mesure conservatoire devant le juge de l'exécution ;
Plus encore, et outre la suspension et l’interdiction des procédures d’exécution à l’encontre des biens du débiteur, la Cour fait interdiction au créancier de prendre toute garantie ou sûreté sur les biens du débiteur une fois sa recevabilité au surendettement.
Par un arrêt du 28 mars 2024, la deuxième chambre civile connaît une nouvelle fois de la difficile articulation entre les effets de la recevabilité d’un débiteur au bénéfice du surendettement et la recherche de mise en œuvre de voies d’exécution par un créancier.
Par une décision du 19 juin 2019, une commission de surendettement a déclaré recevable la demande d’un débiteur au traitement de de sa situation financière et son bénéfice des dispositions du surendettement des particuliers.
S’ensuit une inscription d’hypothèque judiciaire provisoire, autorisée par ordonnance d’un juge de l’exécution, sur les biens des débiteurs.
Saisi d’une demande d’annulation de cette sûreté, le juge de l’exécution en confirme la régularité, tout en la cantonnant.
On sait que la recevabilité au surendettement interdit la mise en œuvre de toute voie d’exécution. La question se pose par contre de savoir si une mesure conservatoire, et plus particulièrement l’inscription d’une sûreté, en l’occurrence une hypothèque sur un bien du débiteur, est admissible.
La cour d’appel de Poitiers, dans un arrêt n° 19/03715, du 8 septembre 2020 N° Lexbase : A09973T4, de préciser qu’en l’absence de précision particulière, la suspension et l’interdiction prévues par l’article L. 742-7 du Code de la consommation N° Lexbase : L0687K7L ne concernaient que les procédures d’exécution au sens strict. De fait, les mesures conservatoires prévues au livre V du Code des procédures civiles d’exécution ne sont pas concernées par cette interdiction.
Cette solution était ainsi emprunte de bon sens en ce que les mesures conservatoires n’ont pour effet que de garantir le paiement d’une créance, sans pour autant réduire le patrimoine du débiteur, à la différence d’une voie d’exécution.
Dans l’arrêt du 28 mars 2024 ici commenté, la deuxième chambre civile rappelle la suspension et l’interdiction des procédures d’exécution à compter de la recevabilité par application de l’article L. 722-2 du Code de la consommation N° Lexbase : L0752K7Y.
Cependant, au visa de l’article L. 722-5, alinéa 1er du Code de la consommation N° Lexbase : L4237LSQ, la deuxième chambre d’ajouter que les dispositions précitées interdisent également la mise en œuvre de toute garantie ou sureté.
Ainsi, la combinaison des articles L. 722-2 et L. 722-5, alinéa 1er du Code de la consommation emporte, dès la recevabilité du débiteur au bénéfice du surendettement des particuliers, la suspension et l’interdiction de toute voie d’exécution, mais également la mise en œuvre de toute mesure conservatoire, en ce compris l’hypothèque judicaire.
Cette solution est surprenante, s’agissant de la mise en œuvre d’une hypothèque dont on doit rappeler qu’elle n’entraîne aucune dépossession du débiteur et donc aucune réduction du gage des créanciers, pas plus qu’une quelconque aggravation de sa situation.
Ce qu’il faut en retenir : En cas de signes de défaillance du débiteur, être proactif et mettre en œuvre une mesure conservatoire, et plus particulièrement l’inscription d’une hypothèque judiciaire, sans délai dès lors que les conditions de l’article L. 511-1 et suivants du Code des procédures civiles d’exécution N° Lexbase : L5913IRG sont réunies.
Pour aller plus loin : A. Martinez-Ohayon, Inscription d’hypothèque judiciaire provisoire versus redressement personnel du débiteur, Lexbase Droit privé, septembre 2020, n° 836 N° Lexbase : N4534BYL. |
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