Dans un arrêt rendu le 26 septembre 2013, la CEDH a estimé que l'Etat français n'avait pas outrepassé sa marge d'appréciation en considérant que l'intérêt supérieur de l'enfant commandait le prononcé d'une adoption plénière (CEDH, 26 septembre 2013, Req. 4962/11
N° Lexbase : A6553KLB). L'affaire concerne la naissance d'un enfant né hors mariage et dont la mère demanda le secret de la naissance. Le tribunal constata le désintérêt de la requérante à l'égard de l'enfant et consentit à ce que ce dernier soit admis en qualité de pupille de l'Etat. Il délégua l'autorité parentale sur l'enfant au service d'Aide sociale à l'enfance. Un an plus tard, le tribunal prononça l'adoption plénière de l'enfant. La requérante, qui avait présenté quelques mois après la naissance des troubles psychologiques qui conduisirent à plusieurs mesures d'hospitalisation ainsi qu'à son placement temporaire sous curatelle, fit appel de ces décisions. Selon la CEDH, le processus décisionnel pris dans son ensemble a permis à la requérante d'exercer un rôle assez grand pour faire valoir ses intérêts et arguments et avoir accès aux informations sur lesquelles les autorités internes se sont appuyées pour prendre leurs décisions. En ce qui concerne l'équilibre entre l'intérêt supérieur de l'enfant et l'intérêt de la requérante, la Cour constate que l'enfant avait, du fait de la carence de la mère, bénéficié depuis sa naissance d'une prise en charge en pouponnière puis en famille d'accueil. La mère n'avait pas investi de lien de filiation de manière significative et la famille élargie n'avait pas manifesté plus d'intérêt pour l'enfant, s'étant abstenue de lui rendre visite. La Cour estime que les autorités locales ont pu estimer que la déclaration d'abandon était une mesure correspondant à l'intérêt supérieur de l'enfant et proportionnée au but légitime poursuivi. En ce qui concerne l'adoption plénière, la Cour rappelle que l'écoulement du temps peut avoir des conséquences importantes sur le développement des mineurs protégés. Il ne fait pas de doute qu'une fois la déclaration d'abandon prononcée, l'intérêt supérieur de l'enfant était de voir sa situation personnelle stabilisée et sécurisée par l'établissement d'un lien légalement reconnu et garanti avec sa famille nourricière. L'adoption plénière est la suite logique de la déclaration d'abandon et le délai d'un an qui s'est écoulé ne paraît pas de soi contraire aux exigences de l'article 8 (
N° Lexbase : L4798AQR). La Cour observe que les éléments de fait relatifs à l'absence de manifestation d'intérêt de la part de la requérante jouent dans l'affaire un rôle déterminant. Les autorités locales ont pu estimer qu'il était déraisonnable du point de vue de l'intérêt de l'enfant de conserver la situation d'abandon et de prise en charge provisoire dans l'attente d'un hypothétique retour de la mère à de meilleurs sentiments à l'égard de l'enfant.
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