Synthèse : Le recours à l'instruction préparatoire

  • Synthèse : Le recours à l'instruction préparatoire

    Dernière modification le 26-04-2024

    • Introduction

      L’instruction préparatoire constitue une étape paradoxale de la procédure pénale. Les statistiques démontrent tout d’abord qu’il y est très faiblement recouru alors qu’elle est obligatoire en matière criminelle. Les Chiffres Clés de la justice 2019 indiquent ainsi que sur 610 475 poursuites exercées en 2018, 17 340 passèrent par le truchement de l’instruction, soit 2,84 % du contentieux. Dans le cadre de l’orientation globale des poursuites, soit 1 312 690 de réponses pénales, l’instruction ne concerne qu’1 % du contentieux. Nonobstant ce constat statistique confinant à la perdition, l’information judiciaire constitue encore aujourd’hui une sorte de laboratoire de la justice répressive tant en matière d’équilibre des droits (contre-tendance) que d’investigations dérogatoires (tendance). Il en résulte un ordonnancement juridique dense et complexe, certes justifié par l’importante instruction criminelle, mais qui peine à survivre face l’accroissement considérable des enquêtes et des prérogatives attribuées au parquet.

      De telle sorte que la lente agonie de l’information judiciaire et de son magistrat ad hoc, le juge d’instruction, attestent sans doute d’une volonté politique complexe : à la fois l’envie de mettre un terme à une aventure longue de deux siècles aux cours desquels ce juge a su prendre une autonomie considérable surtout à l’endroit de l’exécutif ; mais également le désir de ne pas rester dans l’histoire comme la formation politique ayant mis un terme au principe même d’investigations pénales menées par un juge indépendant. La stratégie de marginalisation semble être la suivante : dépouiller l’instruction de tous ses apparats, en les transférant progressivement mais sûrement au ministère public, pour in fine constater que l’instruction est à la fois coûteuse et longue (donc non rentable), et inutilisée (donc inutile). L’instruction sera affublée du pire vice qui soit en ce début de XXIème siècle : l’inefficacité. A terme, il conviendra évidemment de tirer toutes les conséquences de ces constatations : l’instruction étant concrètement « enterrée », il ne sera plus opportun de maintenir artificiellement en vie une institution en décalage évident avec la procédure pénale moderne i.e un décomplexé déséquilibre profitant à l’autorité de poursuite sous couvert de droits de l’Homme.

      En attendant que les faire-part soient adressés, l’information judiciaire demeure. Aussi, la présente étude s'intéresse aux principes directeurs, domaine, acteurs et parties à l’instruction préparatoire.

      Les principes directeurs de l’instruction

      Le caractère contradictoire de la procédure

      Caractère contre-tendanciel. La dynamique contradictoire de l’instruction préparatoire va presque sans dire. Nombreux sont les droits octroyés aux parties à l’information judiciaire. De l’accès au dossier, à la demande d’actes en passant par l’exercice de voies de recours, l’information judiciaire a semble-t-il à cœur de garantir une équité procédurale marquée par les droits de la défense et, voire surtout, l’égalité des armes. Les prérogatives octroyées aux mis en examen, plaignants et témoins assistés ne sont pas d’intensité égale à ceux conférés par la loi au ministère public.

      Alors que le parquet dispose d’un droit d’appel absolu (C. proc. pén., art. 185 N° Lexbase : L7480LPQ), les « autres » parties sont limitées, quant à l’exercice de voies de recours, à un inventaire dressé aux articles 186 (N° Lexbase : L2763KGG) et suivants du Code de procédure pénale. Cela ne doit étonner. Depuis la construction de la procédure pénale moderne, le ministère public a été désigné par le pouvoir comme le centre de gravité judiciaire de la répression. L’autorité de poursuite a ainsi toujours été perçue comme le centre névralgique du processus pénal, le parquet étant désigné comme un représentant du pouvoir et de l’ordre au sein de l’appareil judiciaire (v. ainsi Histoire du Parquet, dir. J. Carbasse, PUF 2000, coll. : Droit et justice : M. Foucault, Théories et institutions pénales, EHESS, Gallimard, Seul, 2015). Il n’y a dès lors rien de surprenant à ce que son rôle et ses attributions demeurent dérogatoires eût-il été dépouillé des investigations et de la mise en état de la procédure. Du reste, il est évident que les réformes successives amorcées avec la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité (N° Lexbase : L1768DP8) tendent à ramener la procédure pénale à un état ancien dans lequel le procureur maîtrise quasiment tout le contentieux. On ne compte plus les outils ou stratégies ayant pour objectif de contourner et de marginaliser l’instruction : des techniques spéciales d’enquête à la comparution à délai différé en passant par le nouvel article 86, alinéa 3, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7457LPU), tout est fait pour que l’instruction soit réduite à une véritable peau de chagrin. Cette tendance ne doit occulter le véritable retour en arrière qui s’en suit. Bien que les enquêtes soient moins unilatérales que par le passé (C. proc. pén., art. 77-2 N° Lexbase : L4940K8H et 393, al. 4 N° Lexbase : L7511LPU), il demeure difficile de soutenir que l’enquête est d’une quelconque manière contradictoire en ce premier quart de de XXIème siècle.

      L’impartialité du juge d’instruction

      Comme tout juge du siège, le magistrat instructeur est tenu à une obligation d’impartialité. Logiquement, la Cour européenne des droits de l’Homme a pu juger que l'impartialité objective fait défaut lorsqu'un juge d'instruction fait par la suite partie de la juridiction de jugement (CEDH, 22 février 1996, Req. 59/1994/506/588, Bulut c. Autriche N° Lexbase : A8386AWI). L’article 49 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L0481LTY) reprend cette exigence. Surtout, cette impartialité se double d’une exigence substantielle puisque l’article 81 du Code de procédure pénale lui impose de procéder, conformément à la loi, à tous les actes d'information qu'il juge utiles à la manifestation de la vérité. Il instruit à charge et à décharge (C. proc. pén., art. 81 N° Lexbase : L7468LPB).

      Le domaine de l’instruction

      La compétence territoriale

      Sont compétents le juge d'instruction du lieu de l'infraction, celui de la résidence de l'une des personnes soupçonnées d'avoir participé à l'infraction, celui du lieu d'arrestation d'une de ces personnes, même lorsque cette arrestation a été opérée pour une autre cause et celui du lieu de détention d'une de ces personnes, même lorsque cette détention est effectuée pour une autre cause (C. proc. pén., art. 52 N° Lexbase : L4919K8P). Ajoutons qu’en application de l’article 80 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L0001LQ4), le procureur de la République près le tribunal judiciaire au sein duquel il n'y a pas de pôle de l'instruction est compétent pour requérir l'ouverture d'une information devant les magistrats du pôle territorialement compétents pour les infractions relevant de sa compétence en application de l'article 43 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L0480LTX), y compris en faisant déférer devant eux les personnes concernées. On sait toutefois que la justice a amorcé depuis de nombreuses années un processus de spécialisation destinée à assurer un meilleur traitement des affaires complexes, et ce en réunissant au sein de juridictions des magistrats spécialement formés et assistants spécialisés.

      La compétence matérielle

      Le champ. L'instruction est obligatoire en matière de crime. Sauf dispositions spéciales, elle est facultative en matière de délit. Elle peut également avoir lieu en matière de contravention si le procureur le requiert en application de l'article 44 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L5355LCC) (C. proc. pén., art. 79 N° Lexbase : L7249A4A). L’article 49 du code de procédure pénale rappelle que le juge d'instruction est chargé de procéder aux informations, ainsi qu'il est dit au chapitre Ier du titre III (C. proc. pén., art. 49 N° Lexbase : L0481LTY).

      Saisine in rem. Aux termes de l’article 80 du Code de procédure pénale, le juge d'instruction ne peut informer qu'en vertu d'un réquisitoire du procureur de la République (C. proc. pén., art. 80 N° Lexbase : L0001LQ4). Surtout, le juge d'instruction ne peut informer que, sur les faits dont il est régulièrement saisi et, lorsqu'il acquiert la connaissance de faits nouveaux, doit communiquer le dossier au procureur de la République, le cas échéant après avoir procédé à des vérifications sommaires destinées à en apprécier la vraisemblance.

      La compétence personnelle

      Erga omnes. La compétence personnelle du juge d'instruction est générale à l'égard de toutes les personnes. En sorte que le magistrat instructeur est habilité à instruire, en principe, contre toute personne dès lors qu’il est matériellement et territorialement compétent. Au demeurant, l'instruction des délits reprochés à des mineurs peut être faite au choix soit par le juge des enfants, soit par un juge d'instruction spécialement chargé des mineurs. Néanmoins, l’article 5 de l’ordonnance de 1945 (N° Lexbase : L4662AGR) dispose que le recours au juge d’instruction est obligatoire en cas de faits ayant la reçu la qualification de crime. Ce dernier est seul compétent en matière de crime.

      Les acteurs de l’instruction

      Le juge d’instruction

      Il est vrai qu’un juge d'instruction ne peut informer qu'après avoir été saisi par un réquisitoire du procureur de la République ou par une plainte avec constitution de partie civile, dans les conditions prévues aux articles 80 (N° Lexbase : L0001LQ4) et 86 (N° Lexbase : L7457LPU) du Code de procédure pénale (C. proc. pén., art. 51 N° Lexbase : L7095A4K). Au demeurant cette saisine est virtuelle tant qu’un magistrat instructeur n’a pas été officiellement désigné pour informer. Une fois saisi, ce même juge peut être dessaisi dans les conditions prévues par le Code de procédure pénale.

      La désignation. En application de l’article 50 du Code procédure pénale (N° Lexbase : L0487LT9), le juge d'instruction, choisi parmi les juges du tribunal, est nommé dans les formes prévues pour la nomination des magistrats du siège. Conformément à l’article 83 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2976IZA), lorsqu'il existe dans un tribunal plusieurs juges d'instruction, le président du tribunal ou, en cas d'empêchement, le magistrat qui le remplace, désigne, pour chaque information, le juge qui en sera chargé. La loi précise expressément que ces désignations sont des mesures d'administration judiciaire non susceptibles de recours.

      Pôle de l’instruction. Pour mettre fin à la légendaire « solitude » du juge d'instruction, des « pôles de l'instruction » ; composés de plusieurs juges d'instruction, ont été créés par la loi n° 2007-291 du 5 mars 2007 tendant à renforcer l’équilibre de la procédure pénale (N° Lexbase : L5930HU8).

      La cosaisine. Depuis la loi du 5 mars 2007, l’article 83-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L0494LTH) autorise le président du tribunal où existe un pôle de l'instruction, si la gravité ou la complexité de l'affaire le justifie, ab initio, ou en cours d'instruction, d'office ou sur demande du procureur, de décider que l'information fera l'objet d'une cosaisine. Les parties peuvent également demander en cours d'instruction d’y avoir recours.

      Le dessaisissement. Aux termes de l'article 84 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2964IZS), le dessaisissement du juge d'instruction au profit d'un autre juge d'instruction peut être demandé au président du tribunal, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, par requête motivée du procureur de la République, agissant soit spontanément, soit à la demande des parties. Le président du tribunal doit alors statuer dans les huit jours par une ordonnance qui ne sera pas susceptible de voies de recours.

      Le ministère public

      Ouverture de l’instruction. Le procureur de la République déclenche l’action publique et saisit officiellement un magistrat instructeur en vertu d’un réquisitoire introductif. Acte d’une importance capitale, le réquisitoire introductif est soumis à un formalisme contraignant.

      En cas de plainte avec constitution de partie civile. En vertu de l’article 86 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7457LPU), une fois saisi d’une plainte avec constitution de partie civile, le juge d’instruction « ordonne communication de la plainte au procureur de la République pour que ce magistrat prenne ses réquisitions ». Depuis la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 (N° Lexbase : L6740LPC), le procureur de la République peut demander au juge d'instruction un délai supplémentaire de trois mois avant de faire connaître ses réquisitions. Ce délai doit permettre la poursuite des investigations. La décision du juge d'instruction, quelle qu’elle soit, constitue selon la loi une mesure d'administration judiciaire, elle est donc insusceptible de recours.

      Par la suite, la loi encadre sensiblement l’action du parquet. La loi du 23 mars 2019 a une nouvelle fois modifié l’article 86 du Code de procédure pénale afin de restreindre encore plus le recours à l’instruction. La situation est la suivante : une plainte avec constitution de partie civile a été déposée en matière délictuelle et les investigations réalisées au cours de l'enquête ont permis d'établir qu'une personne majeure pourrait faire l'objet de poursuites. Si l'action publique n'a pas été mise en mouvement par le procureur, celui-ci peut également requérir du juge d'instruction de rendre une ordonnance de refus d'informer, tout en invitant la partie civile à engager des poursuites par voie de citation directe. Enfin, il est évident que si le procureur estime opportun de suivre le plaignant, il a la possibilité de délivrer un réquisitoire contre personne dénommée ou non dénommée.

      Au cours de l'information : faits nouveaux et réquisitoire supplétif. Conformément à l’article 80 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L0001LQ4), lorsque des faits, non visés au réquisitoire, sont portés à la connaissance du juge d'instruction, celui-ci doit immédiatement communiquer au procureur de la République les plaintes ou les procès-verbaux qui les constatent. Le procureur peut, soit délivrer un réquisitoire supplétif, soit requérir l'ouverture d'une information distincte, soit saisir la juridiction de jugement, soit ordonner une enquête, soit classer sans suite ou recourir à une alternative aux poursuites.

      Demande d’actes. L’article 82 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L5912DYM) précise que, dans son réquisitoire introductif, et à toute époque de l'information par réquisitoire supplétif, le procureur peut requérir du magistrat instructeur tous actes lui paraissant utiles à la manifestation de la vérité et toutes mesures de sûreté. De même, il peut, en application toujours de l’article 80 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L0001LQ4), demander à assister à l'accomplissement des actes qu'il requiert.

      Les parties à l’instruction

       

      Le mis en examen

      Les conditions de la mise en examen. En vertu de l’article 80-1 du Code de procédure pénale, à peine de nullité, le juge d'instruction ne peut mettre en examen que les personnes à l'encontre desquelles il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elles aient pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission des infractions dont il est saisi (C. proc. pén., art. 80-1 N° Lexbase : L2962IZQ). Aux termes de l’article 105 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3438AZD), seules les personnes à l'encontre desquelles il existe des indices graves et concordants d'avoir participé aux faits dont le juge d'instruction est saisi doivent être mis en examen.

      La procédure de mise en examen : convocation. La loi permet au juge d'instruction de convoquer une personne par lettre recommandée pour qu'il soit procédé à sa première comparution dans les conditions prévues par l'article 116 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7479LPP) (C. proc. pén., art. 80-2 N° Lexbase : L7146A4G). Le juge d'instruction peut pareillement faire notifier cette convocation par un officier de police judiciaire.

      Déferrement. Toute personne ayant fait l'objet d'un défèrement à l'issue de sa garde à vue à la demande du procureur ou du juge de l'application des peines comparaît le jour même devant ce magistrat ou, en cas d'ouverture d'une information, devant le juge d'instruction saisi de la procédure (C. proc. pén., art. 803-2 N° Lexbase : L9884I3H). Toutefois, en cas de nécessité, la personne peut comparaître le jour suivant et être retenue dans les locaux de la juridiction spécialement aménagés. Si elle ne comparaît pas dans les 20 heures suivant la fin de la garde à vue, elle doit être remise en liberté en application de l’article 803-3 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L9883I3G).

      L’interrogatoire de première comparution : principes. Lorsque le juge d’instruction envisage de mettre en examen une personne qui n'a pas déjà été entendue comme témoin assisté, le juge d'instruction procède à sa première comparution selon les modalités prévues par l’article 116 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7479LPP). Ce texte contient ainsi l’intégralité de la marche à suivre en vue de mener à bien un interrogatoire de première comparution. Après l'avoir informée, s'il y a lieu, de son droit d'être assistée par un interprète, le juge d'instruction constate l'identité de la personne et lui fait connaître expressément, en précisant leur qualification juridique, chacun des faits dont il est saisi et pour lesquels la mise en examen est envisagée. Pareillement, l’article 116 du Code de procédure pénale impose d’informer la personne interrogée de son droit à la traduction des pièces essentielles du dossier.

      Le juge d'instruction informe ensuite la personne qu'elle a le droit soit de faire des déclarations, soit de répondre aux questions qui lui sont posées, soit de se taire. L'accord pour être interrogé ne peut être donné qu'en présence d'un avocat. L'avocat de la personne peut également présenter ses observations au juge d'instruction. Par la suite, le juge d'instruction recueille les déclarations ou procède à l'interrogatoire

      Enregistrement. En matière criminelle, les interrogatoires des personnes mises en examen réalisés dans le cabinet du juge d'instruction, y compris l'interrogatoire de première comparution et les confrontations, font l'objet d'un enregistrement audiovisuel en application de l’article 116-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L8171ISG).

      Issue de l’interrogatoire de première comparution. Après avoir recueilli les observations de l'avocat, le juge d'instruction peut notifier à la personne qu'elle n'est pas mise en examen, auquel cas elle bénéficie des droits du témoin assisté (C. proc. pén., art. 116). Le procès-verbal établi en application de l'article 116 du Code de procédure pénale indique que la personne a été avisée de son droit de demander l'assistance d'un avocat dès son interrogatoire de première comparution ou à tout moment au cours du déroulement de l'information.

      Il peut également décider de la mettre en examen, et dans ce cas, le juge d'instruction précise les faits et qualifications juridiques retenues si elles diffèrent de celles qui avaient été initialement envisagées (C. proc. pén., art. 116).

      En cas de mise en examen, le juge d'instruction avise la personne : de ses droits de formuler des demandes d'actes, du droit de former des requêtes en annulation, et du droit d'être informé du délai prévisible d'achèvement de la procédure. Elle est également informée du droit de demander la clôture de l'information à l'issue du délai indiqué par le juge, ou à l'expiration des délais maximum, en application des dispositions de l'article 175-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7476LPL).

      Nombreux sont donc les droits accordés au mis en examen. En contrepartie des nombreuses mesures de coercition qui peuvent être prises à son droit, et du risque d’être renvoyé devant une juridiction de jugement, le législateur a en effet offert à ce mis en cause pléthore de prérogatives pour se défendre.

      La partie civile

      La reconnaissance de la qualité de partie civile. Celui qui se prétend victime d’une infraction peut obtenir la qualité de partie civile au cours d’une information judiciaire soit en déclenchant les poursuites soit en se joignant à une instruction préalablement ouverte. Dans les deux situations, la qualité est obtenue par le truchement d’une plainte avec constitution de partie civile, ce qui a pour effet, dans un second temps, de conférer des droits au plaignant. Le Code de procédure pénale se montre dans l’ensemble assez peu formaliste à l'égard de la plainte avec constitution de partie civile, d'autant plus que, dans un souci de protection des victimes, le législateur en a assoupli les conditions de forme, en admettant par exemple la constitution de partie civile par télécopie.

      Recevabilité : plainte préalable. La loi du 5 mars 2007 (N° Lexbase : L5930HU8) a désiré limiter les plaintes avec constitution de partie civile en introduisant un (très mal nommé) filtre du parquet qui ne constitue en réalité qu’une suspension de la constitution. En vertu de l’article 85, alinéa 2, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7458LPW), la plainte avec constitution de partie civile n'est en effet recevable qu'à condition que la personne justifie soit que le procureur de la République lui a fait connaître, à la suite d'une plainte déposée devant lui ou un service de police judiciaire, qu'il n'engagera pas lui-même des poursuites, soit qu'un délai de trois mois s'est écoulé depuis qu'elle a déposé plainte devant ce magistrat, contre récépissé ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, ou depuis qu'elle a adressé, selon les mêmes modalités, copie à ce magistrat de sa plainte déposée devant un service de police judiciaire. La dernière phrase de l’alinéa deuxième dispose que cette condition de recevabilité liée au dépôt d’une plainte préalable n'est pas requise s'il s'agit d'un crime ou s'il s'agit d'un délit prévu par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse (N° Lexbase : L7589AIW) ou par les articles L. 86 (N° Lexbase : L8388DYC), L. 87 (N° Lexbase : L2807AA9), L. 91 (N° Lexbase : L8395DYL) à L. 100 (N° Lexbase : L2822AAR), L. 102 (N° Lexbase : L8402DYT) à L. 104 (N° Lexbase : L2826AAW), L. 106 (N° Lexbase : L8404DYW) à L. 108 (N° Lexbase : L8406DYY) et L. 113 (N° Lexbase : L3667LKZ) du Code électoral.

      Recevabilité et personne morale. Le dernier alinéa de l’article 85 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7458LPW) dispose que « lorsque la plainte avec constitution de partie civile est formée par une personne morale à but lucratif, elle n'est recevable qu'à condition que la personne morale justifie de ses ressources en joignant son bilan et son compte de résultat ».

      Electa una via (non). Depuis la loi du 23 mars 2019 (N° Lexbase : L6740LPC), et par dérogation à l'article 5 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L9883IQ4), la victime qui a exercé son action devant une juridiction civile pendant le délai prévu au deuxième alinéa peut se constituer partie civile devant le juge d'instruction après s'être désistée de l'instance civile.

      La consignation. Aux termes de l’article 88 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7160A4X), le juge d'instruction constate, par ordonnance, le dépôt de la plainte avec constitution de partie civile. En fonction des ressources de celle-ci, il fixe le montant de la consignation. Il peut également dispenser de consignation la partie civile. Selon l’article 88-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7161A4Y), cette consignation vise à garantir le paiement de l'amende civile susceptible d'être prononcée en application de l'article 177-2 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L4539AZ7).

      Les droits de la partie civile. Au visa de l’article 86 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7457LPU), la jurisprudence a dégagé une véritable obligation relative d’informer à la charge du juge d’instruction. Surtout, le plaignant reçu en sa constitution dispose du droit d’être assisté d’un avocat, d’accéder au dossier, de demander des actes.

      Il peut également recevoir une provision dans le cadre du cautionnement versé par le mis en examen.

      Le témoin assisté

      Statut… sans qualité de partie : le flacon sans l’ivresse. Créé par la loi du 15 juin 2000 (N° Lexbase : L0618AIQ) afin de créer un statut intermédiaire entre mis en examen et simple témoin, le régime du témoin assisté tend surtout à mettre la personne en bénéficiant à l’abri de l’infamie liée à feue l’inculpation. L’article 113-1 du Code de procédure pénale indique ainsi que toute personne nommément visée par un réquisitoire introductif ou par un réquisitoire supplétif et qui n'est pas mise en examen ne peut être entendue que comme témoin assisté (C. proc. pén., art. 113-1 N° Lexbase : L0928DYZ).

      Il est surtout essentiel de relever que ce statut intermédiaire n’est pas de nature, selon la Cour de cassation, à octroyer la qualité de partie à cet ersatz de mis en cause.

      Statut automatique. La loi prévoit de nombreux cas dans lesquels le statut de témoin assisté s’impose. Ainsi par exemple, il ressort de l’article 116 du Code de procédure pénale que, si le juge d'instruction, après avoir expressément fait savoir à une personne qu'il envisageait de la mettre en examen, y renonce par la suite, la personne bénéficie alors automatiquement des droits du témoin assisté (C. proc. pén., art. 116 N° Lexbase : L7479LPP).

      Les droits du témoin assisté : avocat et information. En vertu de l’article 113-3 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3174I3X), le témoin assisté bénéficie du droit d'être assisté par un avocat qui est avisé préalablement des auditions et a accès au dossier de la procédure, conformément aux dispositions des articles 114 (N° Lexbase : L2767KGL) et 114-1 (N° Lexbase : L3175I3Y) du Code de procédure pénale. Cet avocat est choisi par le témoin assisté ou désigné d'office par le bâtonnier si l'intéressé en fait la demande. Le texte de l’article 113-3 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3174I3X) poursuit en conférant deux autres droits au témoin assisté : il peut demander au juge d'instruction, selon les modalités prévues par l'article 82-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7151A4M), à être confronté avec la ou les personnes qui le mettent en cause, ou encore formuler des requêtes en annulation sur le fondement de l'article 173 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7455LPS).

      Impossible contrainte. Enfin, voire surtout, il ne peut, selon la lettre de l’article 113-5 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L9458IEZ), être placé sous contrôle judiciaire, sous assignation à résidence avec surveillance électronique ou en détention provisoire.

      Droit à la notification. Il s’infère des dispositions de l’article 167 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7461LPZ) que le juge d'instruction peut également notifier au témoin assisté les conclusions des expertises qui le concernent en lui fixant un délai pour présenter une demande de complément d'expertise ou de contre-expertise. Pareillement, l’article 183 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3558AZS) le rend destinataire des ordonnances de règlement même s'il ne peut faire l'objet d'un renvoi. L'avocat du témoin assisté peut ainsi intervenir devant la chambre de l'instruction lors de l'appel d'une ordonnance de non-lieu.

      Recours. L’article 173 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7455LPS) confère au témoin assisté le droit, s’il estime qu'une nullité a été commise, de saisir la chambre de l'instruction par requête motivée. Certains équilibres, bien trop instables, gagneraient à être remis à plat !

      La mise en examen du témoin assisté. Il résulte de l’article 113-8 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3169I3R) que si apparaissent en cours de procédures des indices graves ou concordants, le juge d'instruction peut mettre le témoin assisté en examen, soit au terme d'un interrogatoire, soit par lettre recommandée avec accusé de réception.

      La mise en examen peut également être accomplie par lettre recommandée précisant faits reprochés et leur qualification juridique, et informant du droit de demander des actes ou des requêtes en annulation, ainsi que du délai prévisible d'achèvement de la procédure (C. proc. pén., art. 113-8). Il est du reste acquis que cette lettre recommandée peut être adressée en même temps que l'avis de fin d'information prévu par l'article 175 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7482LPS). L’article 113-8, alinéa 3, du Code de procédure pénale précise alors que le délai pour les demandes d'actes et des requêtes en annulation est alors d'un mois si le mis en examen est détenue et de 3 mois dans les autres cas (C. proc. pén., art. 175 ; art. 113-8).

    Plan de l'étude

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