Le Quotidien du 23 novembre 2020

Le Quotidien

Actes administratifs

[Brèves] Légalité de la modification rétroactive des conditions de rémunération des membres de la CNCCFP

Réf. : CE 5° et 6° ch.-r., 12 novembre 2020, n° 425340, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A390734H)

Lecture: 2 min

N5338BYD

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par Yann Le Foll

Le 18 Novembre 2020

► Le décret et l’arrêté modifiant les conditions de rémunération des membres de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) avec effet rétroactif à compter du 1er janvier de l'année budgétaire en cours sont légaux (CE 5° et 6° ch.-r., 12 novembre 2020, n° 425340, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A390734H).

Rappel. La loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 (N° Lexbase : L5685LCK), prise en application de la loi organique n° 2017-54 du 20 janvier 2017 (N° Lexbase : L5684LCI), réorganise les autorités administratives indépendantes en réduisant leur nombre et en renforçant et professionnalisant le fonctionnement de celles que le législateur estimait nécessaire de maintenir, notamment en les dotant d'un statut commun et en renforçant leurs structures. L’article 41 de la loi du 20 janvier 2017, modifiant l'article L. 52-14 du Code électoral (N° Lexbase : L6011LCM), prévoit que le président de la CNCCFP exerce désormais ses fonctions à temps plein.

Décision.  Il appartenait au pouvoir réglementaire de prendre les mesures d'application de la loi à laquelle le législateur a entendu donner un effet immédiat. Dès lors, le pouvoir réglementaire était habilité à modifier les conditions de rémunération des membres de la CNCCFP, la seule circonstance que ce changement intervenait en cours de mandat étant sans incidence sur la légalité de ses dispositions.

En outre, en prévoyant que ces dispositions prenaient effet à titre rétroactif, à compter du 1er janvier de l'année budgétaire en cours, le décret n° 2018-412 du 30 mai 2018 (N° Lexbase : L4882LKZ) et l'arrêté du même jour attaqués ont entendu tirer les conséquences des modifications législatives apportées aux conditions d'exercice des fonctions de président et, par voie de conséquence, de vice-président de la CNCCFP, afin que puisse être versée aux intéressés la rémunération à laquelle ils ont droit.

Le décret et l'arrêté attaqués ne méconnaissent donc pas la loi organique et la loi du 20 janvier 2017, ni le principe de non-rétroactivité des actes administratifs. Le Conseil d'État avait déjà confirmé la légalité d’un décret imposant de manière rétroactive aux professeurs de dessin ou d'éducation musicale et de chant choral un maximum hebdomadaire de service différent de celui des professeurs des disciplines littéraires et scientifiques (CE 4° et 1° s-s-r., 7 février 1979, n° 08003, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A4858B73).

newsid:475338

Avocats

[Evénement] « Gouvernance des entreprises : Les avancées récentes et les règles à respecter en matière de parité femmes/hommes » - Un webinar aura lieu le 9 décembre prochain

Lecture: 1 min

N5377BYS

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par La Rédaction Lexbase

Le 23 Novembre 2020

Thierry Aballéa et My Kim Yang Paya, co-présidents de la commission droit des sociétés de l’ACE, organisent avec l’Association Française des Femmes Juristes (AFFJ), Saskia Henninger et Marie Lhermite, une formation à destination des avocats en matière de gouvernance des entreprises.

  • Thématique 

Le thème retenu pour cette formation est : « Gouvernance des entreprises : Les avancées récentes et les règles à respecter en matière de parité femmes/hommes ». L’objectif est de faire un point d’étape sur la parité dans les sociétés et d’analyser le niveau d’efficacité des réglementations récentes à cet effet.                                       

  • Date

La formation aura lieu le 9 décembre de 12 heures à 14 heures en visioconférence.                                    

  • Inscription

L’inscription s'effectue sur le site de l'ACE :  https://www.avocats-conseils.org/fr.

Un lien d'accès à la visioconférence sera envoyé après l'inscription.

 

newsid:475377

Avocats/Institutions représentatives

[Brèves] Le Conseil national des barreaux est avant tout celui des avocats

Lecture: 4 min

N5382BYY

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par Stéphane Lallement, avocat à Nantes, est ancien président de la FNUJA, élu sortant du Conseil national des barreaux, candidat sur le collège ordinal pour la mandature 2021-2023.

Le 23 Novembre 2020

Il y a trois ans, un Bâtonnier récemment élu déclamait sur les réseaux sociaux : « Le CNB ne représente rien ni personne […] Delenda Carthago est ».

Aujourd’hui ces mêmes réseaux voient se multiplier les listes de candidats désireux de siéger au sein de l’institution jadis décriée.

Incontestablement, le Conseil national des barreaux a connu au cours de la dernière mandature un regain de popularité. Comment l’expliquer ?

D'abord parce qu'il s'est pleinement acquitté, durant ces trois années, des missions régaliennes que lui confère la loi :

  • plusieurs évolutions importantes ont été apportées au Règlement intérieur national (N° Lexbase : L4063IP8) : insertion du principe essentiel d'égalité et de non-discrimination (art. 1), modernisation des règles de communication et de publicité (art. 10), renforcement du statut de l'avocat collaborateur (art. 14)…
  • la formation initiale de l'avocat a été repensée afin d'offrir bientôt à nos futurs confrères un parcours plus dense et plus professionnalisant ;
  • de nombreux outils numériques ont été développés afin d’améliorer la visibilité numérique des avocats (plate-forme « avocat.fr ») et de faciliter leur exercice professionnel (e-barreau v2 en cours de déploiement).

Sous l'efficace impulsion de sa présidente, le CNB a parfaitement joué son rôle de représentant de la profession auprès des pouvoirs publics, portant la parole des avocats chaque fois que leurs intérêts ont été menacés.

Plusieurs enjeux majeurs ont ainsi amené la profession à se rassembler autour de son instance nationale : réforme des retraites, loi de programmation pour la justice, atteintes au secret professionnel…

Face à la crise sanitaire enfin, le CNB s’est mobilisé afin de soutenir les cabinets, et de leur apporter les informations permettant  d’affronter cette situation inédite.

Ces circonstances auront permis à l’évidence au CNB de progresser en notoriété auprès de nombreux confrères, lesquels s’accordent désormais à reconnaître son importance et son utilité.

La considération ainsi acquise reste toutefois fragile, et le scrutin du 24 novembre s’avère à cet égard déterminant.

L'élection du Conseil national des barreaux ne mobilise pas les avocats : lors du dernier scrutin en 2017, le taux de participation dans le collège général a péniblement atteint 24 % à Paris, et 40 % dans l’ensemble des autres barreaux.

A qui la faute ? En grande partie sans doute à un système électoral inutilement complexe, devenu au fil du temps totalement illisible.

Les modalités d’élection du CNB, imaginées lors de la fusion des professions d’avocat et de conseil juridique, visaient alors à préserver les institutions pré-existantes à la fusion en leur garantissant mécaniquement une place au sein de ce nouvel organisme.

Trente ans plus tard, le dispositif perdure et conduit à ce que la moitié des membres de l'institution soient élus par un collège de grands électeurs ne représentant que 3 % des 70 000 avocats français (décret du 27 novembre 1991, art. 22 N° Lexbase : L8168AID).

Cet archaïsme n'est plus compris.

Lors des États Généraux de l'Avenir de la Profession d'Avocat, qui se sont tenus en juin 2019, 75 % des confrères amenés à se prononcer à ce sujet ont appelé de leurs vœux l'élection de tous les membres du CNB au suffrage universel direct.

Dans les mêmes proportions quasiment, nos confrères ont également réclamé l’élection du président du CNB au suffrage universel direct.

Il est grand temps aujourd'hui d'adopter cette simplification et de consacrer le principe « un avocat = une voix », seule manière d'assurer l'exacte représentativité de l'institution.

La mandature à venir devra nécessairement se saisir de ce chantier, sous peine de voir nos confrères s'éloigner d'une institution qui a besoin de l'adhésion de tous pour travailler efficacement.

A ce titre, les électeurs ne doivent pas manquer le rendez-vous du 24 novembre.

Par leur participation massive, ils enverront un signal fort aux futurs élus, qui ne doivent jamais oublier que le Conseil national des barreaux est avant tout celui des avocats.

newsid:475382

Bancaire

[Brèves] Florilège de solutions intéressant le remboursement d’un crédit immobilier

Réf. : Cass. civ. 1, 12 novembre 2020, n° 19-16.964 FS-P+B (N° Lexbase : A5115349)

Lecture: 8 min

N5315BYI

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par Jérôme Lasserre Capdeville

Le 18 Novembre 2020

► D’une part, la sécurité juridique, invoquée sur le fondement du droit à un procès équitable pour contester l’application immédiate d’une solution nouvelle résultant d’une évolution de la jurisprudence, ne saurait consacrer un droit acquis à une jurisprudence figée ;

► D’autre part, le règlement des sommes correspondant au montant des échéances impayées d’un prêt ayant conduit la banque à prononcer la déchéance du terme, effectué postérieurement à celle-ci par l’assureur de l'emprunteur, ne peut, sauf stipulations contractuelles expresses, entraîner la caducité de cette déchéance ;

► Enfin, en l’absence d’un risque d'endettement excessif, la banque n’est pas tenue d’un devoir de mise en garde à l’égard des emprunteurs ; tel est le cas lorsque la charge de remboursement mensuel global était inférieure au taux d’endettement de 33 % communément admis comme permettant un remboursement sans risque particulier.

Faits et procédure. Le 6 juin 2007, la banque A. avait consenti à M. B. et Mme P. deux prêts destinés à financer l’acquisition d’un bien immobilier. À la suite du placement de M. B. en longue maladie, d’échéances demeurées impayées et d’un refus de garantie opposé par l’assureur couvrant les risques décès, invalidité, incapacité, la société C., agissant en qualité de mandataire de la banque, s’était prévalue de la déchéance du terme par acte du 10 juin 2013.

Mais l’affaire était loin d’être terminée. D’abord, par acte du 28 août 2013, la banque avait fait pratiquer une saisie-attribution contestée par les emprunteurs devant le juge de l’exécution. Ensuite, par actes des 27 et 28 août 2013, les emprunteurs avaient assigné la banque et le mandataire aux fins de voir constater la forclusion de l’action et avaient sollicité l’allocation de dommages-intérêts pour manquement de la banque à son devoir de mise en garde. Celle-ci avait sollicité reconventionnellement le remboursement du solde des prêts par conclusions du 18 août 2014. Enfin, le 4 octobre 2013, l’assureur avait finalement accepté de prendre en charge les échéances des prêts pour la période du 26 avril 2009 au 1er septembre 2012.

La cour d’appel de Dijon ne leur ayant pas donné raison dans sa décision du 21 mars 2019, les emprunteurs avaient formé un pourvoi en cassation. Trois moyens étaient invoqués par les intéressés. Ils sont tous les trois rejetés.

Décision. En premier lieu, M. B. et Mme P. reprochaient à la cour d’appel d’avoir rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription, à l'exception des échéances impayées du 1er décembre 2010 au 1er août 2011 afférentes à un des deux prêts et de les avoir condamnés à payer diverses sommes à la banque. Ils considéraient ainsi qu’en présence d’une dette payable par termes successifs, lorsque l'emprunteur a agi en justice avant le 11 février 2016 aux fins de voir constater la forclusion du prêteur et que le prêteur a lui-même formulé une demande reconventionnelle en paiement avant cette date, le principe de sécurité juridique et le droit à un procès équitable exigent que l’emprunteur puisse se prévaloir de la jurisprudence de la Cour de cassation antérieure à son revirement du 11 février 2016 (Cass. civ. 1, 11 février 2016, quatre arrêts, n° 14-28.383, F-P+B+R+I  N° Lexbase : A7326PKK ; n° 14-27.143, F-P+B+R+I N° Lexbase : A7325PKI ; n° 14-29.539, F-P+B+R+I N° Lexbase : A7327PKL et n° 14-22.938, F-P+B+R+I N° Lexbase : A7324PKH), en ce qu’elle décidait, sur le fondement de l’ancien article L. 137-2 du Code de la consommation (N° Lexbase : L7231IA3), que la prescription de l’action en paiement du capital restant dû courait à compter du premier incident de paiement non régularisé.

Or, ce moyen est jugé non fondé par la Haute juridiction. Pour cette dernière, la cour d’appel a exactement énoncé que la sécurité juridique, invoquée sur le fondement du droit à un procès équitable pour contester l’application immédiate d’une solution nouvelle résultant d’une évolution de la jurisprudence, ne saurait consacrer un droit acquis à une jurisprudence figée. Cette évolution relève de l’office du juge dans l'application du droit.

En second lieu, les emprunteurs faisaient grief à l’arrêt de les avoir condamnés solidairement à payer diverses sommes à la banque au titre des prêts, alors que le règlement par l’assureur, en vertu du contrat d'assurance adossé à un prêt immobilier, des échéances impayées par l’emprunteur ayant conduit la banque à prononcer la déchéance du terme, rend caduque la déchéance du terme. Dès lors, en jugeant que les versements effectués ultérieurement par la compagnie d'assurance n’avaient pas pu avoir pour effet de remettre en cause l’exigibilité résultant de la déchéance du terme prononcée le 10 juin 2013, la cour d’appel aurait violé l’article 1186 du Code civil (N° Lexbase : L1288ABC) dans sa rédaction applicable au litige.

Ici encore, le moyen n’est pas jugé fondé. Pour la Haute juridiction, « le règlement des sommes correspondant au montant des échéances impayées d’un prêt ayant conduit la banque à prononcer la déchéance du terme, effectué postérieurement à celle-ci par l’assureur de l'emprunteur, ne peut, sauf stipulations contractuelles expresses, entraîner la caducité de cette déchéance ». En outre, en ayant relevé que l’article 5 des conditions générales des prêts prévoyait que les régularisations postérieures à la déchéance du terme ne faisaient pas obstacle à l’exigibilité résultant de cette dernière, la cour d’appel en a déduit, à bon droit, que les versements effectués par l'assureur sur le compte des emprunteurs n'avaient pu avoir pour effet de remettre en cause l’exigibilité résultant de la déchéance du terme.

En dernier lieu, les emprunteurs faisaient grief à l'arrêt de la cour d’appel de Dijon d’avoir rejeté leur demande de dommages-intérêts. Dans leurs conclusions d'appel, ils avaient soutenu que la banque avait manqué à son devoir de mise en garde à leur égard, à raison de leurs capacités financières et des risques de l’endettement né de l’octroi des deux prêts immobiliers. À cet égard, ils faisaient valoir que concomitamment aux prêts immobiliers, la banque avait consenti aux emprunteurs deux crédits à la consommation, et que cette dernière n’apportait aucune explication sur ces crédits lesquels augmentaient pourtant le passif des emprunteurs. Dès lors, en écartant toute responsabilité de la banque au titre du devoir de mise en garde, sans répondre au moyen précité, la cour d’appel aurait violé l'article 455 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L6565H7B).

À nouveau, la Cour de cassation rejette le moyen. Elle observe que l’arrêt de la cour d’appel avait relevé que (i) dans la perspective de l’octroi des prêts litigieux, la banque avait établi une fiche de renseignements certifiés exacts par les emprunteurs le 21 avril 2007, sur le montant de leurs revenus, (ii) qu'à cette fiche avaient été joints divers justificatifs, (iii) que la fixation des échéances de remboursement des prêts litigieux avait pris en compte un crédit antérieur, (iv) que la charge de remboursement mensuel global restait sensiblement constante et, en tout état de cause, « toujours inférieure au taux d’endettement de 33 % communément admis comme permettant un remboursement sans risque particulier » (v) et que les mensualités des prêts avaient été régulièrement honorées jusqu’à ce que M. B. soit confronté à des problèmes de santé. Dès lors, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, la cour d’appel avait fait ressortir, pour la Haute juridiction, qu’en l’absence d’un risque d'endettement excessif, la banque n’était pas tenue d'un devoir de mise en garde à l’égard des emprunteurs.

Observations. Trois observations s’imposent à la vue de cette dernière solution.

D’abord, la jurisprudence considère, de longue date, que la banque n’est pas tenue d’un devoir de mise en garde envers l’emprunteur non averti, si le prêt accordé est adapté aux capacités financières de l’emprunteur et ne présente donc pas un risque d’endettement excessif (Cass. com., 18 février 2009, n° 08-11.221, F-P+B+I N° Lexbase : A2702EDG – Cass. com., 7 juillet 2009, n° 08-13.536, FS-P+B N° Lexbase : A7281EII – Cass. civ. 1, 10 septembre 2015, n° 14-18.851, F-P+B N° Lexbase : A9366NN9 – Cass. civ. 1, 12 septembre 2018, n° 17-17.650, FS-D N° Lexbase : A7737X4C).

Ensuite, la Cour de cassation a déjà pu estimer que le prêt dont les échéances ont été réglées pendant plusieurs années ne peut être jugé excessif (Cass. com., 16 septembre 2014, n° 13-20.093, F-D N° Lexbase : A8575MWI).

Enfin, la décision rappelle que, selon une règle non écrite, un crédit présentant un taux d’endettement inférieur ou égal à 33 % n’est pas considéré comme risqué.

newsid:475315

Contrats et obligations

[Brèves] Retour sur l’adage Quae temporalia… et le commencement d’exécution

Réf. : Cass. civ. 1, 12 novembre 2020, n° 19-19.481, FS-P+B (N° Lexbase : A517134B)

Lecture: 3 min

N5359BY7

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par Claire-Anne Michel, Maître de conférences, Université Grenoble-Alpes, Centre de recherches juridiques (CRJ)

Le 23 Novembre 2020

► La perpétuité de l’exception de nullité est tenue en échec par le commencement d’exécution du contrat, lequel s’apprécie indépendamment de la partie qui l’a effectué.

Accroche. Si le nouvel article 1185 du Code civil (N° Lexbase : L0893KZ4), issu de l’ordonnance du 10 février 2016, donne à l’adage Quae temporalia sunt ad agendum, perpetua sunt ad excipiendum un fondement textuel, en revanche, il ne lève pas les doutes relatifs à la notion de « commencement d’exécution ». Son importance est pourtant considérable car elle permet de faire échec à la perpétuité de l’exception de nullité. Ce faisant, aujourd’hui comme hier, c’est à la jurisprudence d’en cerner les contours et les précisions qu’apporte la Cour de cassation dans l’arrêt du 12 novembre 2020, rendu sous l’empire du droit antérieur, vaudront également pour l’application du nouvel article 1185 du Code civil. Or, l’arrêt révèle la tendance contemporaine de la jurisprudence à étendre la notion de commencement d’exécution et donc, corrélativement, à réduire le domaine de l’adage.

Faits. En l’espèce, la vente d’un terrain fut rendue possible grâce à l’intervention d’un agent immobilier lequel avait conclu, d’une part, un mandat de vente de ce terrain et d’autre part, un mandat de recherche en vue d’acquérir un terrain. A la suite de cette vente, l’agent immobilier assigna les vendeurs en paiement des commissions qui lui étaient dues ; ces derniers appelèrent les vendeurs à la cause. Les vendeurs et l’acheteur opposèrent la nullité des mandats de recherche. L’agent immobilier, quant à lui, invoqua une fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes en nullité.

Procédure. La cour d’appel de Bordeaux (CA Bordeaux, 30 avril 2019, n° 17/03801 N° Lexbase : A2178ZAW) déclara mal fondée la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes en nullité des mandats. Ainsi, elle accepta que l’exception de nullité soit mise en œuvre par les mandants, refusant d’admettre l’existence d’un commencement d’exécution. Pour cela, elle considéra que le mandant n’avait pas commencé à exécuter « ses obligations ». Le pourvoi quant à lui considérait que « le commencement d’exécution de l’acte s’apprécie indépendamment de la personne qui l’effectue et à l’égard de toute obligation contractée en vertu de l’acte argué de nullité ».

Solution. La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel au visa de l’ancien article 1304 du Code civil (N° Lexbase : L8527HWQ) (disposition traditionnellement visée en matière d’exception d’inexécution). Après avoir rappelé les principes traditionnels, à savoir qu’ « à compter de l’expiration du délai de prescription de l’action en nullité, l’exception de nullité n’est plus recevable si l’acte a reçu un commencement d’exécution par l’une des parties », la première chambre civile précise que « le commencement d’exécution du mandat devait être apprécié indépendamment de la partie qui l’avait effectué ». Ce faisant, la première chambre civile confirme que le commencement d’exécution du contrat, qui neutralise la perpétuité de l’exception d’inexécution, peut être l’œuvre de l’une ou l’autre des parties (v. déjà en ce sens, Cass. civ. 3, 9 mars 2017, n° 16-11.728 N° Lexbase : A6415TU7). Or, en l’espèce, le mandat avait fait l’objet d’un commencement d’exécution de la part de l’agent immobilier. Par conséquent, la voie de l’exception de nullité était exclue, peu importe que le mandant n’ait pas commencé à exécuter ses obligations.

newsid:475359

Électoral

[Brèves] Modification de diverses dispositions du Code électoral

Réf. : Décret n° 2020-1397, du 17 novembre 2020, pris pour l'application de la loi n° 2019-1269 du 2 décembre 2019 et visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral (N° Lexbase : L6933LYG)

Lecture: 2 min

N5373BYN

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par Yann Le Foll

Le 25 Novembre 2020

► Le décret n° 2020-1397 du 17 novembre 2020, pris pour l'application de la loi n° 2019-1269 du 2 décembre 2019 (N° Lexbase : L7261LT4), et visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral, apporte des modifications sur différents points du Code électoral : dates de la campagne électorale ; mentions autorisées sur le bulletin de vote ; procédure de dépôt des affiches non autorisées ; recueil de fonds en ligne pour le financement d'une campagne électorale. Il prévoit également d'autres mesures financières : modification du plafond autorisé pour les prêts contractés par les candidats à taux préférentiel.

Retrait des affiches électorales apposées illégalement. Dès constatation d'un affichage interdit au regard des dispositions de l'article L. 51 du Code électoral (N° Lexbase : L7608LTX), le maire peut procéder d'office à la dépose des affiches, après une mise en demeure adressée au candidat, au candidat tête de liste, ou à son représentant, à défaut d'exécution spontanée dans le délai fixé par l'arrêté de mise en demeure. Après une mise en demeure adressée au maire et restée sans résultat au-delà de 48 heures, le préfet peut se substituer au maire pour appliquer la procédure précitée. Lorsque l'affichage est effectué sur une propriété privée ou sur une dépendance du domaine public n'appartenant pas à la commune, l'exécution d'office est subordonnée à la demande ou à l'accord préalable du propriétaire ou du gestionnaire du domaine public.

Recueil de fonds en ligne pour le financement d'une campagne électorale. Lorsqu'il a recours, pour le recueil de fonds en ligne, à un prestataire de services de paiement, le mandataire s'assure, notamment, que le montant des fonds perçus est versé intégralement et sans délai sur le compte de dépôt qu'il a ouvert. La perception éventuelle de frais par le prestataire ne peut intervenir qu'après ce versement ; et qu'aucun remboursement n'ait été effectué par le prestataire sans son autorisation.

Dates de la campagne électorale. La campagne électorale est ouverte le deuxième lundi qui précède le scrutin et prend fin la veille du scrutin à zéro heure. 

Mentions autorisées sur le bulletin de vote. Les bulletins de vote ne peuvent comporter d'autres noms que celui du ou des candidats ou de leurs remplaçants éventuels ; la photographie ou la représentation de toute personne autre qu'un candidat ; ou la photographie ou la représentation d'un animal.

newsid:475373

Environnement

[Brèves] Limitation du droit à réparation au seul préjudice consistant en une atteinte non négligeable à l’environnement : la Chambre criminelle renvoie une QPC

Réf. : Cass. crim., 10 novembre 2020, n° 20-82.245, FS-D (N° Lexbase : A1541379)

Lecture: 2 min

N5378BYT

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par Adélaïde Léon

Le 20 Novembre 2020

► La limitation du droit à réparation au seul préjudice consistant en une atteinte non négligeable à l’environnement présente un caractère nouveau au sens que le Conseil constitutionnel donne à ce critère alternatif de saisine.

Rappel des faits. Des associations de défense de l’environnement et de défense des droits des malades de la thyroïde ont présenté une question prioritaire de constitutionnalité, à l’occasion des pourvois formés par eux contre un arrêt de cour d’appel qui, dans la procédure suivie contre la société électricité de France des chefs d’infractions au Code de l’environnement, a prononcé sur les intérêts civils.

Question prioritaire de constitutionnalité. La question porte sur la conformité de l’article 1247 du Code civil (N° Lexbase : L7608K9N), aux dispositions des articles 3 et 4 de la Charte de l’environnement (N° Lexbase : L0268G8G), laquelle a valeur constitutionnelle, et est ainsi rédigée :  « l’article 1247 du Code civil qui limite le préjudice écologique réparable à "l’atteinte non négligeable aux élément ou aux fonctions des écosystèmes ou aux bénéfices collectifs tirés par l’homme de l’environnement" est-il contraire aux articles 3 et 4 de la Charte de l’environnement à valeur constitutionnelle selon lesquels toute personne doit prévenir les atteintes qu’elle est susceptible de cause à l’environnement, en limiter les conséquences et contribuer à la réparation des dommages qu’elle cause à l’environnement, sans poser aucune limitation concernant la gravité du préjudice ? »

Décision de renvoi. Après avoir constaté que la disposition en cause est applicable à la procédure et n’a pas antérieurement été déclarée conforme à la Constitution, la Chambre criminelle décide de renvoyer la question au Conseil constitutionnel.

Elle relève que la limitation du droit à réparation au seul préjudice consistant en une atteinte non négligeable à l’environnement présente un caractère nouveau au sens que le Conseil constitutionnel donne à ce critère alternatif de saisine. La Cour précise qu’elle se prononce ainsi notamment au regard de la place croissante qu’occupent les questions relatives à l’environnement dans le débat public.

newsid:475378

Fiscalité immobilière

[Brèves] Seuls les contribuables qui remplissent leurs obligations déclaratives dans les délais peuvent être exonérés du paiement de la taxe de 3 %

Réf. : Cass. com., 4 novembre 2020, n° 18-11.771, F-D (N° Lexbase : A938233U)

Lecture: 4 min

N5278BY7

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par Sarah Bessedik

Le 18 Novembre 2020

Par un arrêt rendu le 4 novembre 2020, la Cour de cassation a eu l’occasion de rappeler que pour bénéficier de l’exonération de la taxe de 3 %, il est absolument nécessaire de remplir ses obligations déclaratives.

En l’espèce, une société de droit luxembourgeois Lupa détient des participations dans plusieurs sociétés civiles, propriétaires d'immeubles en France. 

La société Lupa n'ayant pas déposé la déclaration prévue à l'article 990 E du Code général des impôts (N° Lexbase : L1479IZS) précisant la situation, la consistance et la valeur des immeubles possédés au 1er janvier 2005, ainsi que l'identité et l'adresse de ses associés, l'administration fiscale lui a, le 6 septembre 2005, notifié une proposition de rectification portant sur la taxe de 3 % sur la valeur vénale de ces immeubles, prévue par ce texte. Après rejet implicite de sa réclamation, la société Lupa a assigné l'administration fiscale afin de contester le bien-fondé de la rectification.

L'administration fiscale fait grief à l'arrêt d'annuler sa décision de rejet implicite et de prononcer le dégrèvement de la taxe due. L’administration se fonde sur l'article 990 D du Code général des impôts (N° Lexbase : L5483H9X), applicable au moment des faits et qui dispose que « Les personnes morales qui, directement ou par personne interposée, possèdent un ou plusieurs immeubles situés en France ou sont titulaires de droits réels portant sur ces biens sont redevables d'une taxe annuelle égale à 3 % de la valeur vénale de ces immeubles ou droits.  Est réputée posséder des biens ou droits immobiliers en France par personne interposée, toute personne morale qui détient une participation, quelles qu'en soient la forme et la quotité, dans une personne morale qui est propriétaire de ces biens ou droits ou détentrice d'une participation dans une troisième personne morale, elle-même propriétaire des biens ou droits ou interposée dans la chaîne des participations. Cette disposition s'applique quel que soit le nombre des personnes morales interposées ».

De plus, selon l'article 990 E du même Code, « La taxe prévue à l'article 990 D n'est pas applicable : […] aux personnes morales qui, ayant leur siège dans un pays ou territoire ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales, déclarent chaque année, au plus tard le 15 mai, au lieu fixé par l'arrêté prévu à l'article 990 F, la situation, la consistance et la valeur des immeubles possédés au 1 janvier, l'identité et l'adresse de leurs associés à la même date ainsi que le nombre des actions ou parts détenues par chacun d'eux ».

La société Lupa, au 1er janvier de l'année 2005 avait son siège social au Luxembourg et détenait des participations dans plusieurs SCI de droit français qui étaient elles mêmes propriétaires de biens immobiliers situés en France. Elle n'a pas déposé sa déclaration n° 2746 précisant la situation, la consistance et la valeur des immeubles possédés, directement ou indirectement, en France au 1er janvier ainsi que l'identité, l'adresse et le nombre d'actions détenues par les associés dans le délai prévu à l'article 990 E 2 du Code général des impôts et alors qu'elle ne pouvait s'en dispenser au motif que sa situation n'avait pas évolué.

Par conséquent la société Lupa est assujettie à la taxe annuelle de 3 %, au titre de l'année 2005 puisqu’elle n’a pas accompli l'obligation déclarative pour en être exonérée.

Dès lors, la Cour de cassation répond que selon l'article 990 E 2 du Code général des impôts, la taxe  n'est pas applicable aux entités juridiques qui, ayant leur siège dans un pays ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscale, déclarent chaque année, au plus tard le 15 mai, la situation, la consistance et la valeur des immeubles possédés au 1er janvier, l'identité et l'adresse de leurs actionnaires ou associés à la même date, ainsi que le nombre des actions ou parts détenues par chacun d'eux.

Il résulte toutefois d’une réponse ministérielle du 13 mars 2000 que les contribuables qui remplissent leurs obligations déclaratives dans le délai de la mise en demeure de régulariser leur situation peuvent être exonérés du paiement de la taxe, cette mesure de tolérance ne s'appliquant qu'à la première demande de régularisation. Il en résulte que la société Lupa est redevable de la taxe de 3 %. Les juges de la Cour de cassation casse et annule l’arrêt rendu le 6 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris.

 

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Procédure civile

[Brèves] Conformité à la Constitution de la procédure sans audience

Réf. : Cons. const., décision n° 2020-866 QPC du 19 novembre 2020 (N° Lexbase : A944634M)

Lecture: 2 min

N5375BYQ

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par Alexandra Martinez-Ohayon

Le 25 Novembre 2020

Les mots « À l’exception des procédures en référé, des procédures accélérées au fond et des procédures dans lesquelles le juge doit statuer dans un délai déterminé » figurant à la première phrase du deuxième alinéa de l’article 8 de l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété  (N° Lexbase : L5722LWT), dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020 modifiant l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété (N° Lexbase : L1697LX7), sont conformes à la Constitution.

Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 24 septembre 2020, par la Cour de cassation (Cass. civ. 2, 24 septembre 2020, n° 20-40.056, FS-D N° Lexbase : A85243UA), d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l’article 8 de l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020. La question prioritaire de constitutionnalité portait sur les mots « À l'exception des procédures en référé, des procédures accélérées au fond et des procédures dans lesquelles le juge doit statuer dans un délai déterminé » figurant à la première phrase du deuxième alinéa de l'article 8 de l'ordonnance du 25 mars 2020 (Cf. A. Martinez-Ohayon, La procédure sans audience de l’État d’urgence sanitaire, prochainement examinée par le Conseil constitutionnel !, Lexbase Privé, octobre 2020, n° 838 (N° Lexbase : N4649BYT).

Les dispositions de l’article 8 de l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 sont jugées conformes à la Constitution.

Cette décision fera l'objet prochainement d'un commentaire, rédigé par Y.-J. Ratineau, Maître de conférences à l’Université Grenoble Alpes, dans la revue Lexbase Droit privé.

 

 

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Procédure pénale

[Brèves] Conditions de détention : n’est pas effectif le recours indemnitaire qui n’aboutit pas à une réparation suffisante

Réf. : CEDH, 19 novembre 2020, Req. 25338/16, Barbotin c/ France (N° Lexbase : A152037G)

Lecture: 4 min

N5374BYP

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par Adélaïde Léon

Le 16 Décembre 2020

► Le recours exercé devant le juge administratif, en raison de l’indignité des conditions de détention, est efficace dans son principe au regard de la portée du contrôle exercé par les juridictions internes et du droit à une indemnisation ;

Il est en revanche inopérant compte tenu du faible montant alloué et de la mise à la charge du détenu des frais d’expertise aux fins de constater l’état de ses cellules.

Rappel des faits. Lors de son second séjour à la maison d’arrêt de Caen, un détenu demande au juge des référés du tribunal administratif de Caen de désigner un expert afin qu’il constate l’état des cellules qu’il avait occupées au sein de l’établissement. L’expert désigné visite les six cellules occupées par le requérant et rend son rapport dans lequel il relève que, si quatre des six cellules étaient en bon état général et la cinquième entièrement rénovée, la sixième, quant à elle, était en mauvais état, vétuste, mal éclairée et offrait un volume d’air insuffisant pour les cinq adultes qui l’occupaient. Par ordonnance, le tribunal administratif évalue les frais d’expertise (773, 57 euros) et les met à la charge de l’État. Estimant l’expertise ordonnée inutile en raison de la préexistence d’un rapport sur la maison d’arrêt de Caen, la ministre de la Justice obtient, par le biais d’une tierce opposition puis d’un appel, l’annulation de l’ordonnance de désignation de l’expert.

Par la suite, l’ancien détenu forme un recours en responsabilité contre l’État aux fins d’obtenir réparation du préjudice résultant de ses conditions de détention. Le tribunal administratif estime que, durant quatre mois, sur les vingt-quatre mois passés par l’intéressé en détention, ses conditions de détention n’avaient pas été propres à assurer le respect de la dignité humaine. L’État est, à cette occasion, condamné à lui verser 500 euros en réparation de son préjudice moral. Le tribunal administratif met en revanche à la charge du requérant les frais de l’expertise précédemment déclarée non avenue. L’ancien détenu devient donc débiteur de l’État à hauteur de 273, 57 euros.

Saisi d’un pourvoi formé par l’intéressé et d’un pourvoi incident présenté par la ministre de la Justice, le Conseil d’État les rejette (CE, 26 janvier 2012, n° 349874 N° Lexbase : A4262IBH).

Griefs. Afin de dénoncer l’ineffectivité du recours indemnitaire entrepris, du fait de l’insuffisance de l’indemnisation et de la mise à sa charge des frais d’expertise le rendant débiteur de l’État, l’intéressé introduit une requête devant la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) invoquant les articles 13 (N° Lexbase : L4746AQT) et 3 (N° Lexbase : L4764AQI) de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme (CESDH), concernant respectivement le droit à un recours effectif et l’interdiction des traitements inhumains et dégradants.

Décision de la Cour. Après avoir étudié les critères sur lesquels les juridictions administratives s’étaient fondées, pour retenir que les conditions de détention indignes subies par le requérant relevaient d’une faute de l’État et avaient engendré un préjudice moral indemnisable, la Cour juge qu’elles ont statué en vertu de standards coïncidents avec les siens.

La Cour constate toutefois que, si le requérant a pu exercer un recours approprié lui permettant d’obtenir l’indemnisation de son préjudice, à l’issue de cette action, l’intéressé, sur qui le juge a fait peser un fardeau excessif en mettant à sa charge les frais de l’expertise, s’est retrouvé débiteur de l’État à hauteur de 273, 57 euros.

La Cour relève d’une part que la somme de 500 euros accordée initialement au requérant est bien en deçà de la réparation qu’elle aurait pu accorder dans des circonstances similaires et, d’autre part, que le résultat final de l’action de l’intéressé, laquelle aboutit à le rendre débiteur, prive le recours exercé de son effectivité.

La Cour conclut à la violation de l’article 13 de la Convention combiné avec l’article 3.

La Haute juridiction européenne note par ailleurs qu’elle ne perd pas de vue que le développement de la jurisprudence du juge administratif sur le recours indemnitaire s’inscrit dans un ensemble de réformes que la France doit mettre en place pour faire face au problème de la surpopulation carcérale (CEDH, 30 janvier 2020, Req. 9671/15, J.M.B. et autres c/ France N° Lexbase : A83763C9 : Y. carpentier, Mise en demeure de la CEDH à propos du surpeuplement carcéral en France, Lexbase pénal, mars 2020 N° Lexbase : N2631BY4) et pour résoudre les nombreuses affaires individuelles nées de ce problème.

Pour aller plus loin : M. Giacopelli, Le raz de marée du principe de dignité, Lexbase Pénal, novembre 2020 (N° Lexbase : N5183BYM) ; A. Morineau, Huit ans de bataille pour la dignité des personnes détenues, de la CEDH au Conseil constitutionnel, Lexbase Pénal, novembre 2020 (N° Lexbase : N5309BYB).

 

newsid:475374

Salariés protégés

[Brèves] Méthode à suivre pour déterminer si l'illégalité d'un refus d'autorisation de licenciement d’un salarié protégé pour vice de procédure a causé un préjudice à l'employeur

Réf. : CE, 1° et 4° ch.-r., 4 novembre 2020, n° 428198, mentionné au recueil Lebon (N° Lexbase : A5150337)

Lecture: 2 min

N5288BYI

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par Charlotte Moronval

Le 18 Novembre 2020

► Lorsqu'un employeur sollicite le versement d'une indemnité en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité d'un refus d'autorisation de licenciement d’un salarié protégé entaché d'un vice de procédure, il appartient au juge de rechercher, en forgeant sa conviction au vu de l'ensemble des pièces produites par les parties et, le cas échéant, en tenant compte du motif pour lequel le juge administratif a annulé cette décision, si la même décision aurait pu légalement être prise dans le cadre d'une procédure régulière.

Faits et procédure. Une société sollicite l'autorisation de licencier un salarié protégé, pour inaptitude physique. L'inspecteur du travail, puis le ministre du Travail, refusent de délivrer cette autorisation au motif que la société n'a pas satisfait à son obligation de recherche sérieuse de reclassement. Toutefois, le tribunal administratif annule ces décisions au motif qu'elles sont entachées d'un vice de procédure ayant privé la société d'une garantie. La société recherche alors la responsabilité de l'Etat afin d'obtenir réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de l'illégalité du refus d'autorisation de licenciement. Le tribunal administratif rejette sa demande. La société se pourvoit alors en cassation contre l'arrêt par lequel la cour administrative d'appel (CAA Douai, 20 décembre 2018, n° 16DA00371 N° Lexbase : A8673YW7) a rejeté son appel contre ce jugement.

La position du Conseil d’Etat. Enonçant la solution susvisée, la Haute juridiction annule l’arrêt de la cour administrative d’appel.

Pour rejeter les conclusions de la société tendant à la réparation du préjudice que celle-ci estime avoir subi du fait de l'illégalité du refus opposé à sa demande d'autorisation de licencier le salarié, la cour administrative d'appel s'est fondée sur l'absence de lien de causalité direct entre cette illégalité et le préjudice allégué, au motif que dans son jugement, le tribunal administratif ne s'est fondé, pour annuler le refus d'autorisation, que sur le vice de procédure qui l'entachait et ne s'est pas prononcé sur son bien-fondé. En statuant comme elle l’a fait, alors qu'il lui appartenait de rechercher si, en l'espèce, l'autorité administrative aurait pu légalement, en suivant une procédure régulière, rejeter la demande d'autorisation qui lui était soumise, la cour a commis une erreur de droit et, par suite, entaché son arrêt d'inexacte qualification juridique des faits.

V. également CE 9° et 10° s-s-r., 18 novembre 2015, n° 380461, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A5624NXL) s’agissant de l'illégalité d'une sanction pour vice de procédure.

 

newsid:475288

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