La lettre juridique n°728 du 25 janvier 2018

La lettre juridique - Édition n°728

Baux commerciaux

[Brèves] Sur l'obligation de délivrance du bailleur à l'égard du preneur qui a conclu un contrat de promotion immobilière en vue de la réhabilitation des lieux loués

Réf. : Cass. civ. 3, 18 janvier 2018, n° 16-26.011, F-P+B+I (N° Lexbase : A5270XAG)

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N2373BX8

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par Julien Prigent

Le 25 Janvier 2018

Les obligations pesant sur le promoteur immobilier envers le preneur, au titre des travaux de réhabilitation d'un immeuble loué, n'exonèrent pas le bailleur, tenu d'une obligation de délivrance, de la prise en charge des travaux nécessaires à l'activité stipulée au bail, sauf clause expresse contraire. Tel est l'enseignement d'un arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation le 18 janvier 2018 (Cass. civ. 3, 18 janvier 2018, n° 16-26.011, F-P+B+I N° Lexbase : A5270XAG).

En l'espèce, une association avait pris à bail commercial un immeuble destiné à usage de crèche. Elle avait préalablement conclu un contrat de promotion immobilière pour la conception et la réhabilitation de l'immeuble. Ayant découvert la présence, sur la toiture du bâtiment, de plaques de fibrociment contenant de l'amiante, le promoteur avait réalisé des travaux de retrait d'amiante non prévus dans son contrat. L'association a assigné le bailleur en paiement de la somme correspondant au prix des travaux de désamiantage et en réparation du préjudice financier entraîné par le retard de la livraison de l'immeuble.

Ces demandes ont été rejetées par les juges du fond (CA Versailles, 20 septembre 2016, n° 15/01490 N° Lexbase : A4422R38) au motif qu'en vertu du contrat de promotion immobilière, le promoteur était tenu à une obligation de résultat qui comprenait celle d'identifier et de contrôler la conformité de l'immeuble et son opération de réhabilitation aux règles de sécurité, d'hygiène et d'urbanisme en vigueur, y compris, par conséquent, celle relatives à la présence de matériaux ou de produits en amiante. Ils avaient également retenu que le projet de promotion immobilière comprenant la description technique et l'offre financière était annexé au bail, de sorte que l'association ne pouvait, ni se prévaloir de son ignorance quant à la présence de matériaux en amiante, ni reprocher au bailleur de ne pas l'avoir dénoncée, ni lui réclamer de répondre de l'obligation d'enlever les matériaux ou de supporter le coût de leur retrait, ni a fortiori, lui demander de l'indemniser des retards dans la livraison de l'immeuble.

Enonçant la solution précitée, cette décision est censurée par la Cour de cassation au visa de l'article 1719 du Code civil (N° Lexbase : L8079IDL ; cf. l’Ouvrage "baux commerciaux" N° Lexbase : E3489ERN).

newsid:462373

Concurrence

[Brèves] Aides d'Etat : EDF contraint de rembourser 1,37 milliard d'euros à l'Etat français

Réf. : TPIUE, 16 janvier 2018, aff. T-747/15 (N° Lexbase : A4115XAN)

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N2339BXW

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par Vincent Téchené

Le 25 Janvier 2018

Doit être confirmée la décision de la Commission ordonnant à la France de récupérer 1,37 milliard d'euros dans le cadre d'une aide d'Etat accordée à EDF. Tel est la solution d'un arrêt rendu par le Tribunal de l'Union européenne le 16 janvier 2018 (TPIUE, 16 janvier 2018, aff. T-747/15 N° Lexbase : A4115XAN).

La Commission européenne a déclaré l'abandon d'une créance fiscale de l'Etat français sur EDF incompatible avec le marché intérieur et exigé la récupération de cette aide augmentée des intérêts. EDF, soutenue par la France, a saisi le Tribunal pour en obtenir l'annulation.

Le Tribunal a examiné pour l'essentiel si c'est à bon droit que la Commission a conclu que le critère de l'investisseur privé n'était pas applicable. A cet égard, tout d'abord le Tribunal rappelle que l'applicabilité du critère de l'investisseur privé dépend de ce que l'Etat accorde en sa qualité d'actionnaire, et non en sa qualité de puissance publique, un avantage économique à une entreprise lui appartenant. Le Tribunal estime que la mesure litigieuse est non pas une mesure de recapitalisation d'EDF, mais la renonciation à percevoir l'impôt lors du reclassement des droits du concédant en capital. Par ailleurs, il rappelle qu'il incombait à l'Etat français d'établir sans équivoque et sur la base d'éléments objectifs et vérifiables que la mesure mise en oeuvre ressortait à sa qualité d'actionnaire, ces éléments devant faire apparaître clairement qu'il avait pris, préalablement ou simultanément à l'octroi de l'avantage, la décision de procéder à un investissement dans EDF. Selon le Tribunal, la Commission a procédé à une appréciation de l'ensemble des éléments mis à sa disposition par EDF et la France afin de déterminer si la mesure litigieuse ressortait à la qualité d'actionnaire ou à celle de puissance publique de l'Etat français et n'a ainsi pas commis d'erreur de droit. Les documents fournis par EDF et l'Etat français ne témoignent pas d'une analyse distincte et autonome des considérations de l'Etat en sa qualité d'actionnaire, pas plus qu'ils n'établissent l'absence d'enchevêtrement des considérations liées à l'impôt et de celles liées à la rémunération de l'Etat. Le Tribunal observe également, à l'instar de la Commission, que les différents documents fournis par EDF et l'Etat français ne constituent ni ne comportent d'évaluations économiques comparables à celles qu'un investisseur privé aurait fait établir avant de procéder à la mise en oeuvre de la mesure litigieuse aux fins de déterminer sa rentabilité future. La Commission n'a donc pas commis d'erreur de droit en considérant qu'une telle absence d'études, de références ou d'analyses spécifiques constituait une difficulté pour isoler les effets de l'investissement allégué dans les informations transmises par l'Etat français ou par EDF. Le Tribunal conclut que c'est à bon droit que la Commission a écarté l'applicabilité du critère de l'investisseur privé.

newsid:462339

Concurrence

[Brèves] Compétence juridictionnelle pour statuer sur la demande de mesures d'instruction in futurum fondée sur des pratiques anticoncurrentielles

Réf. : Cass. com., 17 janvier 2018, n° 17-10.360, FS-P+B+I (N° Lexbase : A4137XAH)

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N2337BXT

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par Vincent Téchené

Le 25 Janvier 2018

La partie qui demande une mesure sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1497H49) en se prévalant dans sa requête de pratiques méconnaissant l'article L. 442-6, I, 2° du Code de commerce (N° Lexbase : L7575LB8) doit saisir l'une des juridictions du premier degré spécialement désignées par les articles D. 442-3 (N° Lexbase : L9159IEX) et R. 420-3 (N° Lexbase : L0639HZP) du Code de commerce ; à défaut, la cour d'appel du ressort de la juridiction non spécialement désignée saisie est compétente et elle doit constater que cette dernière n'avait pas le pouvoir juridictionnel de statuer sur un tel litige et, en conséquence, rétracter l'ordonnance. Tel est le sens d'un arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 17 janvier 2018 (Cass. com., 17 janvier 2018, n° 17-10.360, FS-P+B+I N° Lexbase : A4137XAH).

La Cour rappelle, d'une part, que les recours formés contre les décisions rendues par des juridictions non spécialement désignées par l'article D. 442-3 du Code de commerce, quand bien même elles auraient statué dans un litige relatif à l'application de l'article L. 442-6 du même code, sont, conformément à l'article R. 311-3 du Code de l'organisation judiciaire (N° Lexbase : L1959H4C), portés devant la cour d'appel dans le ressort de laquelle elles sont situées, tandis que seuls les recours formés contre les décisions rendues par des juridictions spécialisées sont portés devant la cour d'appel de Paris. Elle rappelle, également d'autre part, que seules les juridictions du premier degré spécialement désignées par les articles D. 442-3 et R. 420-3 du Code de commerce sont investies du pouvoir de statuer sur les litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 ou dans lesquels les dispositions de l'article L. 420-1 du même code (N° Lexbase : L6583AIN) sont invoquées.

La Cour ajoute que, si la partie qui demande une mesure sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile dispose du choix de saisir soit le président du tribunal appelé à connaître du litige, soit celui du tribunal du lieu de l'exécution de la mesure d'instruction, le président saisi ne peut toutefois ordonner une telle mesure que dans les limites du pouvoir juridictionnel de ce tribunal. En l'espèce, un franchisé avait saisi le juge du tribunal de commerce d'une requête visant à pratiquer diverses mesures d'investigation au siège d'un membre du même réseau, afin de recueillir des pièces en lien avec les relations nouées entre ce franchisé et la tête du réseau. Ainsi, le demandeur se prévalant, dans cette requête, de pratiques méconnaissant l'article L. 442-6, I, 2° du Code de commerce et le tribunal de commerce de Grenoble, dans le ressort duquel la mesure d'investigation devait être exécutée, n'ayant pas le pouvoir juridictionnel de statuer sur un tel litige, la cour d'appel a, à bon droit, rétractée l'ordonnance ayant ordonné la mesure, peu important que la requête ait pu invoquer, en outre, un fondement de droit commun.

newsid:462337

Contrat de travail

[Brèves] Impossibilité de minorer le montant de la contrepartie financière à une clause de non-concurrence en fonction des circonstances de la rupture

Réf. : Cass. soc., 18 janvier 2018, n° 15-24.002, FS-P+B (N° Lexbase : A8855XA9)

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N2374BX9

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par Blanche Chaumet

Le 25 Janvier 2018

Le montant de la contrepartie financière à une clause de non-concurrence ne pouvant être minoré en fonction des circonstances de la rupture, il en résulte que la contrepartie prévue par la convention collective en cas de licenciement est applicable en présence d'une rupture conventionnelle du contrat de travail. Telle est la solution dégagée par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 18 janvier 2018 (Cass. soc., 18 janvier 2018, n° 15-24.002, FS-P+B N° Lexbase : A8855XA9).

En l'espèce, une salariée a été engagée par la société X, le 1er avril 2008, en qualité d'assistante juridique. Le contrat de travail était régi par la Convention collective nationale des experts comptables et commissaires aux comptes (N° Lexbase : X0587AEH). Le 7 janvier 2011, un protocole de rupture conventionnelle a été signé entre les parties et le contrat de travail a pris fin le 22 février 2011. La salariée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes.

Pour dire que la clause de respect de la clientèle s'assimile à une clause de non-concurrence illicite et condamner l'employeur à payer à la salariée une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi, la cour d'appel (CA Rennes, 19 juin 2015, n° 13/00987 N° Lexbase : A5650NLT) retient que l'article 8-5-1 de la Convention collective des experts-comptables qui s'applique aux parties, s'il prévoit des modalités relativement à la contrepartie financière des clauses de non-concurrence, n'envisage que les hypothèses de licenciement et de la démission et non de rupture conventionnelle en sorte que la salariée ne peut se prévaloir de ses dispositions. A la suite de cette décision, la salariée s'est pourvue en cassation.

En énonçant la règle susvisée, la Haute juridiction casse l'arrêt d'appel au visa de l'article 8-5-1 de la Convention collective des cabinets d'experts-comptables et de commissaires aux comptes, dans sa rédaction alors applicable, ensemble le principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle et l'article L. 1121-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0670H9P), dans sa rédaction alors applicable (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E8710ESE).

newsid:462374

Copropriété

[Brèves] La division d'un lot peut-elle avoir pour effet de donner naissance à un nouveau syndicat de copropriétaires ?

Réf. : Cass. civ. 3, 18 janvier 2018, n° 16-26.072, FS-P+B+I (N° Lexbase : A5271XAH)

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N2341BXY

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 25 Janvier 2018

La division d'un lot de copropriété ne peut avoir pour effet de donner naissance à un nouveau syndicat des copropriétaires. Tel est l'enseignement délivré par la première chambre civile de la Cour de cassation, aux termes d'un arrêt rendu le 18 janvier 2018 (Cass. civ. 3, 18 janvier 2018, n° 16-26.072, FS-P+B+I N° Lexbase : A5271XAH).

En l'espèce, par acte du 31 mai 1983, un immeuble composé de deux lots avait été placé sous le régime de la copropriété. Par acte du 30 mai 1984, le lot n° 2 avait été divisé et remplacé par les lots n° 3 à 12. Une assemblée générale du 21 juin 2011 avait, en sa résolution n° 5, décidé de contester la légalité du modificatif de l'état descriptif de division du 30 mai 1984. M. X, propriétaire des lots n° 3, 8 et 9, avait assigné le syndicat des copropriétaires et la SCI propriétaire du lot n° 1, en annulation de la résolution du 21 juin 2011. Pour accueillir la demande, la cour d'appel avait retenu que l'existence de "copropriétés verticales autonomes", dont la création ne dépendait pas de l'accord de la "copropriété horizontale", mais de la seule volonté des propriétaires concernés, était consacrée par le règlement de copropriété du 31 mai 1983 et que l'acte du 30 mai 1984, qui était un modificatif de l'état descriptif de division, créait une copropriété verticale soumise au statut de la loi du 10 juillet 1965, que la naissance de cette copropriété verticale impliquait nécessairement la mise en place d'un syndicat des copropriétaires autonome par rapport au syndicat de la copropriété horizontale, improprement intitulé "secondaire", alors que sa création ne relevait pas des dispositions de l'article 27 de la loi du 10 juillet 1965 (N° Lexbase : L4829AHC), et que la copropriété ainsi créée n'était pas une copropriété secondaire, mais une copropriété autonome et distincte.

A tort, selon la Cour régulatrice qui, après avoir énoncé la règle précitée, censure la décision pour violation de l'article 1er de la loi du 10 juillet 1965 (N° Lexbase : L4818AHW) (cf. l’Ouvrage "Droit de la copropriété" N° Lexbase : E5820ETQ).

newsid:462341

Droit du sport

[Brèves] CEDH : conformité à la Convention de l'obligation de localisation imposée aux sportifs au nom de la lutte contre le dopage

Réf. : CEDH, 18 janvier 2018, Req. 48151/11 (N° Lexbase : A4175XAU)

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N2342BXZ

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par June Perot

Le 25 Janvier 2018

Les obligations de localisation des sportifs dans le cadre de la lutte antidopage, dans la mesure où elles sont justifiées par des motifs d'intérêt général les rendant nécessaires, sont conformes à la Convention européenne des droits de l'Homme et au droit au respect de la vie privée.

En effet, la réduction ou la suppression de ces obligations conduirait à accroître les dangers du dopage pour la santé des sportifs et celle de toute la communauté sportive et irait à l'encontre de la communauté de vue européenne et internationale sur la nécessité d'opérer des contrôles inopinés pour conduire la lutte antidopage. Telle est la position adoptée par la Cour européenne des droits de l'Homme dans un arrêt rendu le 18 janvier 2018 (CEDH, 18 janvier 2018, Req. 48151/11 N° Lexbase : A4175XAU).

Dans cette affaire, une ordonnance relative à la santé des sportifs et à la mise en conformité du Code du sport avec les principes du Code mondial antidopage avait été prise. Certaines dispositions prévoyaient une obligation pour les sportifs relevant d'un "groupe cible" désignés par l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), de transmettre des informations propres à permettre la localisation, en vue de réaliser des contrôles antidopage inopinés.

Plusieurs associations, syndicats et fédérations professionnels de sportifs, ainsi qu'une coureuse cycliste française, dénoncèrent un système de contrôle "particulièrement intrusif" qui permettait de réaliser des contrôles hors des manifestations sportives et des périodes d'entraînement. Ils invoquaient une atteinte à leur liberté d'aller et de venir, à leur droit à une vie familiale normale et à leur vie privée, ainsi qu'une atteinte au principe d'égalité, l'obligation de localisation en vue de contrôles antidopage étant réservée aux sportifs appartenant au "groupe cible". Le Conseil d'Etat avait rejeté leur requête (CE 2° et 7° s-s-r., 9 juillet 2014, n° 373304, Inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A3159MUK).

La coureuse requérante avait attaqué devant le Conseil d'Etat les délibérations de l'AFLD l'ayant inscrite dans un groupe cible. Elle avait également demandé la soumission d'une QPC relative à cette obligation de localisation, que le Conseil avait refusé de renvoyer (CE 2° et 7° s-s-r., 29 mai 2013, n° 364839, Inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A3747KEI). Par une délibération du 9 avril 2015, l'AFLD radia toutefois la coureuse de la liste des sportifs du "groupe cible". Les requérants ont saisi la CEDH sur le fondement de l'article 8 de la Convention (N° Lexbase : L4798AQR). Enonçant la solution précitée et tenant compte de la contrainte que représente ces obligations (fournir à une autorité publique des informations précises et détaillées sur leurs lieux de résidence et leurs déplacements quotidiens sept jours sur sept), la Cour conclut à l'absence de violation de l'article 8.

newsid:462342

Entreprises en difficulté

[Chronique] Chronique de droit des entreprises en difficulté - Janvier 2018

Réf. : Cass. com., 10 janvier 2018, n° 15-15.897, F-D (N° Lexbase : A1927XAM) ; Cass. com., 10 janvier 2018, n° 16-10.824, FS-D (N° Lexbase : A1879XAT)

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N2347BX9

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par Pierre-Michel Le Corre, Professeur à l'Université Nice Côte d'Azur, Directeur du Master 2 Droit des entreprises en difficulté de la Faculté de droit de Nice, Membre CERDP (EA 1201), Avocat au barreau de Nice

Le 25 Janvier 2018

Lexbase Hebdo - édition affaires vous propose de retrouver, cette semaine, la chronique de Pierre-Michel Le Corre, Professeur à l'Université Nice Côte d'Azur, Directeur du Master 2 Droit des entreprises en difficulté de la Faculté de droit de Nice, Membre CERDP (EA 1201), Avocat au barreau de Nice. L'auteur a sélectionné deux arrêts rendus par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 10 janvier 2018 : dans le premier, elle retient l'absence d'autorité de chose jugée du rejet d'une demande de condamnation d'une caution fondée sur la suspension des actions pendant la période d'observation (Cass. com., 10 janvier 2018, n° 15-15.897, F-D) ; dans le second, elle vient, pour la première fois, condamner un créancier sur le fondement de l'article L. 650-1 du Code de commerce, en retenant son immixtion caractérisée dans le cadre d'un crédit ruineux (Cass. com., 10 janvier 2018, n° 16-10.824, FS-D).
  • Absence d'autorité de chose jugée du rejet d'une demande de condamnation d'une caution fondée sur la suspension des actions pendant la période d'observation (Cass. com., 10 janvier 2018, n° 15-15.897, F-D N° Lexbase : A1927XAM ; cf. l’Ouvrage "Entreprises en difficulté" N° Lexbase : E3825EXX)

L'article L. 622-28, alinéa 2, du Code de commerce (N° Lexbase : L1072KZQ) prévoit que "le jugement d'ouverture suspend jusqu'au jugement arrêtant le plan ou prononçant la liquidation toute action contre les personnes physiques coobligées ou ayant consenti un cautionnement ou une garantie autonome. Le tribunal peut ensuite leur accorder des délais ou un différé de paiement dans la limite de deux ans". Ce texte, qui régit la procédure de sauvegarde, est applicable en redressement judiciaire (C. com., art. L. 631-14, I, devenu C. com., art. L. 631-14, al. 1er, N° Lexbase : L7317IZZ, réd. ord. 18 décembre 2008 N° Lexbase : L2777ICT). Il y a ainsi une suspension des actions pendant la période d'observation de la procédure de sauvegarde et de redressement judiciaire.

La jurisprudence l'a analysée, non en une exception de procédure, mais en une fin de non-recevoir. La Cour de cassation a considéré que la règle de la suspension des poursuites individuelles contre les cautions est édictée aux seules fins de protection des cautions, ne peut donc être soulevée pour la première fois devant la Cour de cassation, et ne peut être soulevée d'office (1). Il ne s'agit donc pas d'une fin de non-recevoir d'ordre public.

La disposition ici analysée suspend "toutes actions". L'action entamée avant jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire sera suspendue pendant toute la durée de la période d'observation et pourra être poursuivie après arrêté du plan ou prononcé de la liquidation judiciaire (2).

En bonne logique, le tribunal ne devrait pas rejeter la demande introduite avant le jugement d'ouverture. Il devrait décider un renvoi du dossier au rôle d'attente de la juridiction jusqu'à ce que la suspension ait pris fin. Le créancier, après adoption du plan ou conversion en liquidation judiciaire peut alors faire sortir l'affaire du rôle d'attente et reprendre l'instance pour obtenir la condamnation de la caution.

Telle n'est pas la solution qu'avait cru pouvoir adopter en l'espèce les juges du fond (3). Plus radicalement, se fondant sur la suspension des actions contre les cautions personnes physiques pendant la période d'observation, ils avaient décidé de rejeter la demande formée par le créancier.

Forte de cette décision, la caution entendait ensuite, dans le cadre d'une nouvelle instance initiée contre elle par le créancier après adoption du plan, se réfugier derrière l'autorité de chose jugée attachée au rejet de la demande initialement formée contre elle pour faire déclarer irrecevable la seconde assignation.

C'était sans doute faire étendre quelque peu l'autorité de la chose jugée et, logiquement, la Cour de cassation va censurer une cour d'appel qui avait cru devoir accéder à la demande d'irrecevabilité formulée par la caution.

Deux arguments sont retenus par la Cour de cassation pour refuser, ici, le jeu de l'autorité de la chose jugée.

Tout d'abord, la Cour de cassation prend le soin de relever que les motifs du jugement rejetant la demande du créancier, éclairant la portée du dispositif, étaient exclusivement fondés sur la règle de la suspension des actions exercées contre la caution pendant la période d'observation du débiteur principal édictée par l'article L. 622-28 du Code de commerce. Il s'agissait donc de motifs provisoires qui n'avaient plus vocation à jouer s'il advenait qu'une demande nouvelle soit formulée après la fin de la période d'observation, à une date à laquelle la suspension n'existe plus.

Ensuite, et surtout, l'autorité de la chose jugée ne peut jouer que sur ce qui a fait l'objet de la décision de justice sur laquelle on la fonde pour en tirer un argument d'irrecevabilité d'une demande ultérieure. Cela emporte cette conséquence bien connue en procédure civile que tout élément nouveau, postérieur au rejet de la demande initiale, ne peut par hypothèse être couvert par l'autorité de la chose jugée.

En l'espèce, la demande initiale a été rejetée au motif de la suspension des actions contre les cautions personnes physiques pendant la période d'observation du débiteur principal. Sitôt la période d'observation terminée soit par l'adoption d'un plan, soit par la conversion de la procédure de sauvegarde en une procédure de liquidation judiciaire, et la suspension cesse. En l'espèce, la demande contre la caution a été rejetée pendant la période d'observation du débiteur principal. L'élément nouveau par rapport à cette décision tient à l'adoption du plan qui rend recevable l'action contre la caution. La demande formée à cette date ne peut donc être atteinte par l'autorité de la chose jugée attachée à la décision de rejet, laquelle était antérieure à l'adoption du plan. C'est ce que dit la Cour de cassation en énonçant que "l'arrêté du plan de redressement de la société débitrice postérieurement au jugement du 16 décembre 2009 [jugement rejetant la demande contre la caution] avait modifié la situation jugée par ce jugement dès lors que, selon l'article L. 631-20 même code (N° Lexbase : L3508ICW) la caution peut de nouveau être poursuivie après l'adoption d'un tel plan, de sorte que l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 16 décembre 2009 ne s'opposait pas à l'action engagée par la banque contre les cautions après l'arrêté de ce plan".

Il est heureux que l'erreur commise par le premier juge n'ait pas été fatale au créancier.

Par un arrêt non publié au Bulletin, la Cour de cassation vient, pour la première fois, condamner un créancier sur le fondement de l'article L. 650-1 du Code de commerce (N° Lexbase : L3503ICQ), en retenant son immixtion caractérisée dans le cadre d'un crédit ruineux.

Les conditions du jeu de l'article L. 650-1 du Code de commerce sont aujourd'hui bien connues. Un créancier, qui sera ou non un établissement de crédit, doit avoir consenti un concours fautif à un débiteur qui sera placé sous procédure collective. Ce concours fautif est cependant insuffisant pour engager sa responsabilité. Il doit être doublé soit d'une fraude, soit d'une prise de garantie disproportionnée, soit enfin d'une immixtion caractérisée dans la gestion.

La Cour de cassation affirme que lorsqu'une procédure collective est ouverte, "les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis, sauf les cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou de disproportion des garanties prises, que si les concours consentis sont en eux-mêmes fautifs" (4). Ainsi que nous l'avions pensé, le qualificatif "fautifs" doit être sous-entendu après le mot "concours", dans le texte de l'article L. 650-1 du Code de commerce. La faute ne réside pas dans l'une des trois hypothèses visées à l'article L. 650-1 du Code de commerce. La Cour de cassation a ainsi considéré que l'immixtion caractérisée dans la gestion ne permettait pas, à elle seule, d'engager la responsabilité du banquier (5). La même solution est posée lorsqu'il est reproché une prise de garanties disproportionnées (6). Le banquier, sans octroi d'argent facile ou trop cher, ne sera pas responsable. Mais, par principe, le banquier qui octroie de l'argent facile ou trop cher ne sera pas davantage responsable. Il ne le sera que si, outre l'octroi d'argent facile ou trop cher, il a eu un comportement frauduleux, s'est immiscé, de façon caractérisée, dans la gestion du débiteur ou a pris des garanties disproportionnées par rapport aux concours consentis.

En l'espèce, un fournisseur était créancier au titre d'un compte courant fournisseur. Devant l'importance de la dette, il décide d'accorder quatre crédits de restructuration prévoyant des taux d'intérêt s'échelonnant entre 5 % et 7 % l'an, à une époque de faible inflation. La cour d'appel (7) avait retenu que ces quatre crédits fournisseurs avaient aggravé l'endettement, du fait d'échéances courtes de remboursement avec des taux d'intérêt assez élevés, excédant les facultés de l'exploitant au regard de ses résultats d'exploitation. La cour d'appel avait donc caractérisé ce que l'on dénomme le crédit ruineux.

On sait que les concours fautifs, au sens où l'entend l'article L. 650-1 du Code de commerce, sont soit des concours accordés à une entreprise en situation irrémédiablement compromise et en connaissance de celle-ci, soit des concours ruineux. L'article L. 650-1 du Code de commerce n'a en effet pas remis en cause les conditions premières d'engagement de la responsabilité des fournisseurs de crédit lorsque, ultérieurement, l'emprunteur fera l'objet d'une procédure collective. En revanche, ces conditions nécessaires ne sont plus aujourd'hui suffisantes, puisque l'article L. 650-1 du Code de commerce énonce un principe d'irresponsabilité du créancier pour concours fautif, sauf les trois cas visés à ce même article qui constituent ainsi des causes de déchéance du principe d'irresponsabilité. Parmi ces trois cas, figure l'immixtion caractérisée dans la gestion.

En l'espèce, la cour d'appel avait caractérisé l'immixtion dans la gestion en relevant les clauses des actes de prêts stipulant que les sommes dues seraient exigibles de plein droit et par anticipation en cas d'arrêt des approvisionnements total ou partiel exclusif du débiteur auprès du fournisseur créancier. Il en résultait donc que le débiteur ne pouvait avoir le choix de ses partenaires contractuels et la maîtrise de ses coûts financiers.

La Cour de cassation va confirmer la décision de la cour d'appel d'Amiens, particulièrement bien motivée, qui avait vu un crédit ruineux dans le fait de transformer des encours en quatre prêts à intérêts, remboursables sur trois ans moyennant un intérêt variant de 5 % à 7 % et garantis par une hypothèque de premier rang sur les terrains et bâtiments d'élevage ainsi que par un warrant agricole sur le cheptel. Pour chacun des crédits, la charge de remboursement annuel, en capital et intérêts, excédait les facultés de paiement du débiteur au regard de ses résultats d'exploitation. Elle relève aussi que le fournisseur connaissait ces résultats ayant pu disposer des résultats comptables de l'entreprise.

On se souvient que, juste avant la loi de sauvegarde des entreprises (loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 N° Lexbase : L5150HGT), la Cour de cassation avait posé de manière claire les cas d'engagement de la responsabilité du créancier pour octroi fautif de crédit. La condamnation du banquier, sur le terrain de la responsabilité délictuelle, intervient pour soutien abusif dans deux séries d'hypothèses. Soit l'établissement de crédit a pratiqué une politique de crédit ruineux pour l'entreprise devant nécessairement provoquer une croissance continue et insurmontable de ses charges financières, soit il a apporté un soutien artificiel à une entreprise dont il connaissait ou aurait dû connaître, s'il s'était informé, la situation irrémédiablement compromise (8).

Devant la Cour de cassation, la question de l'immixtion caractérisée n'avait pas été débattue de sorte que le créancier semblait admettre son principe, ayant centré le premier moyen de son pourvoi sur l'absence de crédit ruineux.

On indiquera, que s'appuyant sur les dispositions de l'article L. 650-1, alinéa 2, du Code de commerce, selon lequel "les garanties prises en contrepartie de ses concours [fautifs] sont nulles", la juridiction du fond avait annulé l'hypothèque, ainsi que le warrant agricole, en ordonnant, pour celui-ci, sous astreinte la mainlevée.

La Cour de cassation va néanmoins casser la décision rendue par la cour d'appel d'Amiens qui avait condamné le créancier fournisseur au montant de la créance déclarée par ce dernier au passif de la procédure collective. C'était en effet méconnaître les principes applicables en la matière. En effet, de longue date, sur le terrain de la responsabilité pour soutien abusif ou pour crédit ruineux, la Cour de cassation a posé la règle selon laquelle le créancier n'était tenu que de réparer l'aggravation de l'insuffisance d'actif et non pas l'intégralité du passif ou le montant qu'il a déclaré au passif. Ainsi a-t-elle pu juger que "l'obligation de réparation du créancier fautif est limitée à la seule aggravation de l'insuffisance d'actif que l'établissement de crédit ou les établissements de crédit, en cas de responsabilité in solidum, ont contribué à créer par leur faute, laquelle a conduit à retarder l'ouverture de la procédure collective" (9).

Cet arrêt va redonner espoir aux mandataires de justice, assez désabusés il est vrai depuis l'entrée en vigueur de l'article L. 650-1 du Code de commerce, qui pensaient infranchissables les obstacles posés par ce texte à l'engagement de la responsabilité des créanciers et notamment des banquiers. C'est vrai : c'est infiniment plus difficile qu'avant, car par principe, le crédit fautif n'est plus source de responsabilité ; mais ce n'est pas impossible. Le risque d'engagement de la responsabilité du créancier, dès lors qu'il est bien mis en évidence par une analyse juridique élaborée, peut en outre constituer un outil de négociation dans les mandats ad hoc ou les conciliations. Les banquiers, quant à eux, devront être vigilants quant aux clauses des actes figurant dans leurs contrats de prêt, notamment les clauses d'exigibilité anticipée qui seraient en lien avec la gestion, et notamment avec des seuils ou des ratios, comme cela est souvent le cas dans les montages en LBO.


(1) Cass. mixte, 16 novembre 2007, n° 03-14.409, P+B+R+I (N° Lexbase : A6101DZY), Bull. ch. mixte, n° 11 ; D., 2007, AJ 3009, obs. A. Lienhard ; Act. proc. coll., 2008, n° 20, note N. Fricero ; RD banc. fin., 2008, 39, n° 11, obs. D. Legeais ; JCP éd. E, 2008, Chron. 1432, n° 4, obs. M. Cabrillac ; Procédures, 2008, n° 17, note B. Rolland ; Rev. proc. coll., 2008, n° 128, note F. Macorig-Venier ; Dr. et patr., 2008, n° 172, note F. Macorig-Venier et M.-H. Monsérié-Bon ; Rev. proc. coll., 2009. Etude 89, note N. Patureau et C. Pérot-Reboul ; nos obs., in Chron., Lexbase, éd. priv., 2008, n° 290 (N° Lexbase : N8490BDS).
(2) Cass. com., 24 mai 2005, n° 00-19.721, FS-P+B (N° Lexbase : A4117DIC), Bull. civ. IV, n° 117 ; D., 2005, Somm. 2084, obs. P. Crocq ; Dr. et proc., 2005. 282, note P. Crocq ; Act. proc. coll., 2005, n° 132, note J. Vallansan ; JCP éd. E, 2005, Chron. 1860, n° 3, obs. Ph. Delebecque et Ph. Simler ; RD banc. fin., 2005, n° 141, obs. S. Piedelièvre ; Defrénois, 2005, 1937, Chron., 38287, n° 12, note D. Gibirila ; Gaz. proc. coll., 2005/3, p. 49, nos obs..
(3) CA Aix-en-Provence, 5 février 2015, n° 12/20685 (N° Lexbase : A8217PAL).
(4) Cass. com., 27 mars 2012, n° 10-20.077, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A5916IG9), Bull. civ. IV, n° 68 ; D., 2012, Actu. 870, obs. A. Lienhard ; D., 2012., Etude 1455, obs. R. Dammann et A. Rapp., ; D., 2012, Etude 2034, obs. P. Hoang ; D., 2012, Pan. 1576, obs. P. Crocq ; D., 2012, Pan. 2204, nos obs. ; Gaz. Pal., entr. en diff., 3 août 2012, n° 216, p. 16, note R. Routier ; JCP éd. E, 2012, n° 1274, note D. Legeais ; Bull. Joly Entrep. en diff., 2012, 176, note Th. Favario ; Act. proc. coll., 2012, n° 125, note R. Routier ; Rev. sociétés, 2012, 398, note Ph. Roussel Galle ; Rev. proc. coll., 2012, Etude 25, note D. Demeyère ; RTDCom., 2012, 584, n° 7, obs. D. Legeais ; LPA, 24 juillet 2012, n° 147, p. 18, note E. Garaud ; JCP éd. E, 2012, Chron. 1508, n° 9, obs. Ph. Pétel ; Gaz. Pal., 2012, Jur. 1568, note S. Reifegerste ; Dr. et patr., septembre 2012, 104, note C. Saint-Alary-Houin ; Bull. Joly, 2012, n° 256, note Ph. Pétel ; Rev. proc. coll., 2012, n° 215, note A. Martin-Serf ; Rev. sociétés, 2013, 93, note I. Riassetto, E. Le Corre-Broly, in Chron., Lexbase, éd. aff., 2012, n° 293 (N° Lexbase : N1549BTK). Adde, Cass. com., 11 décembre 2012, n° 11-25.795, F-D (N° Lexbase : A1108IZ3), Gaz. Pal., 1er mai 2013, n° 121, p. 37, note R. Routier ; Cass. com., 28 janvier 2014, n° 12-26.156, F-D (N° Lexbase : A4310MDY) ; Gaz. Pal., 19 mars 2014, n° 78, p. 17, note M. Dumont-Lefrand ; Cass. com., 11 février 2014, n° 12-26.683, F-D (N° Lexbase : A3785MEW) ; Cass. com., 16 décembre 2014, n° 13-23.748, F-D (N° Lexbase : A2918M8L) ; CA Paris, Pôle 5, 8ème ch., 11 février 2014, n° 13/00107 (N° Lexbase : A9746MDC), RTDCom., 2014, 690, n° 3, note A. Martin-Serf.
(5) Cass. com., 27 mars 2012, n° 10-20.077, préc.. Adde, Cass. com., 16 décembre 2014, no 13-23.748, F-D, préc., Rev. proc. coll. 2015, comm. 74, note A. Martin-Serf ; Cass. com. 22 mars 2017, n° 15-13.290, F-D (N° Lexbase : A7822ULB), Gaz. Pal., 27 juin 2017, n° 24, p. 66, note J. Lasserre-Capdeville ; CA Paris, Pôle 5, 8ème ch., 11 février 2014, n° 13/00107, préc., Rev. proc. coll., 2015, comm. 74, note A. Martin-Serf.
(6) Cass. com., 11 décembre 2012, n° 11-25.795, F-D (N° Lexbase : A1108IZ3), Gaz. Pal., 1er mai 2013, n° 121, p. 37, note R. Routier ; Cass. com., 20 septembre 2017, n° 16-12.939, F-D (N° Lexbase : A7668WSS).
(7) CA Amiens, 26 novembre 2015, n° 13/06233 (N° Lexbase : A0889PA8).
(8) Cass. com., 22 mars 2005, n° 03-12.922, FS-P+B (N° Lexbase : A4127DHC), Bull. civ. IV, n° 67.
(9) Cass. com., 22 mars 2005, n° 03-12.922, préc..

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Fiscalité internationale

[Brèves] Non-application de l'article 155 A du CGI au contribuable ayant transféré son domicile fiscal et créé une société en Suisse

Réf. : CE 3° et 8° ch.-r., 22 janvier 2018, n° 406888, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A0778XBG)

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par Marie-Claire Sgarra

Le 02 Février 2018

Un contribuable ayant transféré son domicile fiscal en Suisse et créé une société de prestation de services dans cet Etat n'est pas soumis aux dispositions de l'article 155 A du Code général des impôts (N° Lexbase : L2518HLT). Telle est la solution dégagée par le Conseil d'Etat dans un arrêt du 22 janvier 2018 (CE 3° et 8° ch.-r., 22 janvier 2018, n° 406888, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A0778XBG).

L'article 155 A du Code général des impôts permet à l'administration fiscale française de lutter contre les montages consistant pour une personne rendant des prestations en France à localiser au sein d'une société écran étrangère le revenu qu'elle tire de cette prestation.

En l'espèce, à l'occasion de la vérification de comptabilité d'une société française, détenue à 100 % par M. et Mme A, résidents suisses depuis 2007, l'administration a relevé que la société a conclu, le 1er septembre 2007, avec une société de droit suisse, également détenue par le couple, un contrat d'assistance, à raison duquel elle a notamment versé en 2008 et 2009 des honoraires au titre des prestations réalisées. L'administration a ainsi rapporté les sommes en cause au revenu imposable du foyer fiscal des années 2008 et 2009 conformément aux dispositions de l'article 155 A du Code général des impôts.

Le tribunal administratif de Montreuil rejette la demande des époux tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires. La cour administrative d'appel de Versailles confirme ce jugement.

Le Conseil d'Etat pour donner droit à la demande des requérants relève que "la seule circonstance que ces prestations correspondaient à une activité qui était jusqu'alors assumée par les requérants au sein de la société française n'est pas de nature à établir qu'elles continuaient à être rendues en France" (cf. le BoFip - Impôts annoté N° Lexbase : X8305AL8).

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Fiscalité internationale

[Jurisprudence] De l'Imprimerie nationale et de l'établissement stable

Réf. : CAA de Paris, 14 décembre 2017, n° 15PA02628 (N° Lexbase : A0925W97)

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N2345BX7

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par Franck Laffaille, Professeur de droit public, Faculté de droit (CERAP) - Université de Paris XIII (Sorbonne/Paris/Cité), Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition fiscale

Le 26 Janvier 2018

La vente (par l'Etat) et le rachat (par l'Etat) de l'immeuble de l'Imprimerie nationale... La cour administrative d'appel de Paris s'est prononcée dans un arrêt du 14 décembre 2017 (N° Lexbase : A0925W97), sur une histoire qui, depuis plusieurs années, est au centre d'un litige politique/financier/juridique/fiscal. La société Cerep Imprimerie Sarl -qui a acheté en janvier 2006, à l'Etat, l'immeuble de l'Imprimerie nationale pour un prix de 103 000 000 d'euros- l'a revendu en juin 2007, à l'Etat, pour un prix de 325 000 000 d'euros. Cette jolie et rapide plus-value est-elle imposable en France ? Dit autrement, la société Cerep Imprimerie Sarl disposait-elle d'un établissement stable au sens de l'article 4 de la Convention fiscale franco-luxembourgeoise de 1958 (N° Lexbase : L6716BH9? La réponse est négative selon la cour administrative d'appel de Paris.

L'interrogation est ancienne : le mercredi 17 octobre 2007, Jean Arthuis (président de la Commission des Finances du Sénat) évoquait cette hypothèse, alors même qu'étaient auditionnés l'ancien PDG de l'Imprimerie nationale et le président du fonds Carlyle Real Estate pour l'Europe. Jean Arthuis estimait alors que la plus-value réalisée "devrait faire, en principe, l'objet d'une imposition, à hauteur de 33,33 %". A cela, M. Philippe Dumas -inspecteur général des finances- répondit "qu'il s'agissait, du point de vue juridique, d'une question d'appréciation de la matérialité des faits". Difficile de contredire une telle assertion, bien des choses en droit dépendant de l'appréciation -par le juge- de la matérialité des faits.

Le juge précisément ; dans sa décision, la cour administrative d'appel s'arrête tout d'abord -rapidement- sur un élément de procédure, à savoir le lien entre recours, temps et non présence sur le territoire. Via une lecture combinée des articles R. 811-2 (N° Lexbase : L7542IUU), R. 811-5 (N° Lexbase : L3507ICU), R. 421-7 (N° Lexbase : L7278KHZ), R. 431-1 (N° Lexbase : L3028ALQ), R. 751-3 (N° Lexbase : L9955LAX) du Code de justice administrative se posait la question du délai d'appel. Selon le ministre, la requête -enregistrée le 3 juillet 2015- méritait d'être frappée d'irrecevabilité, le jugement datant du 15 mars 2015. Non point dit le juge. Car le jugement attaqué a été notifié seulement le 1er juillet 2015 au siège de la société au Luxembourg. A raison du "délai de distance", la société disposait d'un délai expirant le 2 novembre 2015.

Passons à la matière fiscale objet du contentieux. Une fois la plus-value réalisée, la société Cerep Imprimerie Sarl -constituée dans le cadre de l'acquisition de l'immeuble de l'Imprimerie nationale et dont le siège est au Luxembourg- fait l'objet d'une vérification de comptabilité. A l'issue de celle-ci, l'administration fiscale estime que cette société disposait d'un établissement stable en France : lui sont notifiées une cotisation d'IS, des contributions sociales et une cotisation minimale de TP. Les droits ainsi mis à sa charge sont assortis des intérêts de retard et de la majorité de 80 % pour activité occulte (1) ; lui est encore appliquée la retenue à la source prévue par le 2 de l'article 119 bis du Code général des impôts (2). Pour le service, la société Cerep Imprimerie Sarl avait réuni -aux fins de réaliser l'opération de promotion immobilière- des moyens révélant sa nature d'établissement stable : moyens humains, financiers/juridiques/techniques. Cela serait confirmé -toujours selon l'administration- par l'utilisation des locaux et du personnel de la société Créa France. Saisi, le tribunal administratif de Paris ne fait pas droit aux prétentions des requérants (TA Paris, 25 mars 2015, n° 1220429/1-1 ; n° 1417575/1-1). Appel est interjeté.

La cour administrative d'appel fait logique lecture de la Convention signée en 1958 entre la France et le Luxembourg et de son fameux article 4 : " les revenus des entreprises [...] commerciales [...] ne sont imposables que dans l'Etat sur le territoire duquel se trouve un établissement stable". Par établissement stable, il faut entendre une installation fixe d'affaires dans laquelle l'entreprise exerce tout ou partie de son activité (succursales, bureaux...). Quand bien même une société -ayant son domicile fiscal dans l'un des Etats contractants- contrôle une société (ou est contrôlée par une société) ayant son domicile dans l'autre Etat (ou fait du commerce ou des affaires dans cet autre Etat, via un établissement stable ou non), cela ne suffit pas à faire de l'une de ces sociétés un établissement stable de l'autre.

Puis, la cour administrative d'appel se livre -dans un substantiel considérant 6- à une méticuleuse opération de décryptage des faits. Plus exactement, le juge se penche sur la structure et la stratégie des investisseurs. La gérante de droit de la société Cerep Imprimerie Sarl est une société luxembourgeoise (la société Cerep Sarl) détenue par un fonds d'investissement immobilier étranger (Cerep LP) dont la vocation est de réaliser des investissements en Europe. Cette activité d'investissements se fait par le truchement de "filiales intégralement détenues par elle et dédiées à un unique investissement immobilier". Intégralement détenues par une autre société, réalisant un unique investissement immobilier, ces sociétés présentent d'autres caractéristiques importantes : elles ne disposent d'aucun personnel et ont recours aux ressources matérielles, humaines et financières de leur gérante. L'objectif d'une telle stratégie est clair : cantonner les risques propres à chaque investissement immobilier et obtenir plus aisément des crédits bancaires.

Quid alors de la société Cerep Imprimerie Sarl ? D'établissement stable il n'y a pas présentement constate la cour administrative d'appel tant au regard de l'activisme de la société Cerep Imprimerie Sarl que de celui de sa gérante. En 2003, il revient à la société Cerep Sarl d'approuver le projet visant à acquérir l'immeuble de l'Imprimerie nationale par le biais de cette filiale spécialisée. Quand la société Cerep Imprimerie Sarl obtient un financement, c'est via des instruments de fonds propres et quasi-fonds propres créés hors de France grâce aux ressources des investisseurs du fond Cerep LP. La convention de crédit -132,5 millions d'euros obtenus pour acquérir l'immeuble et réaliser les travaux jugés nécessaires- a été approuvée par la société Cerep Sarl (et non la société Cerep Imprimerie Sarl) qui agissait au titre de gérante de cette dernière. La société Cerep Sarl (et non la société Cerep Imprimerie Sarl) a participé à la négociation de la convention de crédit, notamment par l'intermédiaire de M. B. qui n'exerce son office qu'à l'étranger. Le conseil de gérance de la société Cerep Sarl "s'est prononcé à chaque étape de l'opération" ; le personnel salarié de cette société a effectué certaines opérations permettant la réalisation de l'investissement (contrat de services conclu en juillet 2004). Toujours en sa qualité de gérante de la société Cerep Imprimerie Sarl, la société Cerep Sarl a approuvé le contrat de vente du bien immobilier à l'Etat, tout en participant à la négociation (cf. une lettre de M. A. en date de décembre 2006).

Quant à la société Cerep Imprimerie Sarl, elle n'est pas restée inactive, ce qui n'emporte pas reconnaissance obligatoire et automatique de la qualité d'établissement stable. Certes, la société Cerep Imprimerie Sarl a conclu un contrat de prestation de services avec la Sarl Créa France (activité de conseil pour les affaires et la gestion). La société Cerep Imprimerie Sarl a-t-elle pour autant disposé en France, dans les locaux de la société Créa France, d'un établissement stable (au sens de la Convention de 1958) ? Cette société -la Sarl Créa France- avait pour tâche de trouver un investisseur potentiel, négocier l'acquisition de l'immeuble, organiser/gérer/suivre les travaux, commercialiser le bien reconstruit. La Sarl Créa France a été rémunérée dans le cadre du contrat signé avec la société Cerep Imprimerie Sarl ; elle ne possédait pas, d'évidence, les moyens financiers pour réaliser une opération immobilière telle que celle au coeur du litige ; elle n'a pas excédé les termes de ce contrat. La société Cerep Imprimerie Sarl a pleinement assumé sa tâche de promoteur immobilier... "depuis son siège au Luxembourg". Elle a notamment assuré le rassemblement de capitaux hors de France auprès de différents investisseurs étrangers, ce qui impliqua une "importante prise de risque, essentiel pour la conception et la réalisation de l'opération". Assumant son activité de promoteur immobilier ("depuis son siège au Luxembourg"), la société Cerep Imprimerie Sarl a pris les décisions relatives à l'acquisition de l'immeuble et à son financement, a surveillé la mise en oeuvre de l'actif en sa qualité de maître de l'ouvrage (avec attribution de la plupart des prérogatives à un maître de l'ouvrage délégué, la société Artequation). C'est encore elle -la société Cerep Imprimerie Sarl- qui a conservé l'entier contrôle du financement des opérations de construction et a décidé la cession de l'immeuble, une fois celui-ci reconstruit. Ainsi, à la question -la société Cerep Imprimerie Sarl a-t-elle disposé en France, dans les locaux de la société Créa France, d'un établissement stable ?- la réponse est négative. Point d'établissement stable au sens de la Convention fiscale conclue entre la France et le Luxembourg ; et point d'établissement stable -ajoute le juge- au sens "du droit interne" ! En aucun cas, l'administration ne peut invoquer l'existence d'un établissement stable (distinct de la société Créa France) auquel seraient imputables des activités différentes de celles ayant été confiées, à titre onéreux, à des agents économiques indépendants, ou ayant été exécutées par le siège luxembourgeois de la société. De la distinction et de l'indépendance : faute d'indépendance reconnue à des agents économiques, on ne saurait inférer l'existence d'un établissement stable distinct. Par conséquence, les bénéfices dégagés à l'occasion de l'opération de promotion immobilière ne peuvent faire l'objet d'une quelconque imposition. N'étant pas réputée avoir réalisé un bénéfice en France, la requérante ne peut pas davantage subir une retenue à la source (au sens du 2 de l'article 119 bis du Code général des impôts). La question de la soumission à la TP n'avait, dès lors, plus grand intérêt, dépourvue d'établissement stable en France, la société Cerep Imprimerie Sarl ne peut être regardée comme ayant, en notre beau pays, exercé -à titre habituel- une activité non salariée. Ladite société n'entre pas dans le champ d'application de la TP et n'est pas concernée par la cotisation prévue par l'article 1647 E du Code général des impôts (3).

Le droit fiscal étant matière éminemment politique -au sens le plus noble du terme, détermination des valeurs de la polis- il est difficile de ne pas rappeler combien l'histoire de la vente-rachat de l'immeuble de l'Imprimerie nationale est emblématique : emblématique de la gestion -pathétique- par l'Etat de son patrimoine. Il n'est guère étonnant que l'une des personnes auditionnées par la Commission des finances du Sénat appelle à "systématiser l'insertion, dans les contrats de cession immobilière de l'Etat, de clauses de prix en cas de retour à meilleure fortune". Il n'est guère étonnant d'être interpellé par le décalage entre les évaluations de biens immobiliers par des cabinets privés et le prix du marché, nonobstant la spécificité connue du marché parisien. Et, in fine, si la revente à l'Etat de l'immeuble a été conclue "en état de futur achèvement" (suivant l'usage pour les cessions d'immeubles professionnels), il est étonnant de voir l'Etat incapable d'avancer une estimation ferme quant au coût des travaux (4).


(1) CGI, art. 1728, 1, c (N° Lexbase : L9389LH9) : "1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de :
a. 10 % en l'absence de mise en demeure ou en cas de dépôt de la déclaration ou de l'acte dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ;
b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ;
c. 80 % en cas de découverte d'une activité occulte".
(2) CGI, art. 119 bis, 2 (N° Lexbase : L9363LHA) : "2. Les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à l'application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par l'article 187 lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France, autres que des organismes de placement collectif constitués sur le fondement d'un droit étranger situés dans un Etat membre de l'Union européenne ou dans un autre Etat ou territoire ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales et qui satisfont aux deux conditions suivantes :
1° Lever des capitaux auprès d'un certain nombre d'investisseurs en vue de les investir, conformément à une politique d'investissement définie, dans l'intérêt de ces investisseurs ;
2° Présenter des caractéristiques similaires à celles d'organismes de placement collectif de droit français relevant de la section 1, des paragraphes 1,2,3,5 et 6 de la sous-section 2, de la sous-section 3, ou de la sous-section 4 de la section 2 du chapitre IV du titre Ier du livre II du code monétaire et financier.
Les stipulations de la convention d'assistance administrative mentionnée au premier alinéa du présent 2 et leur mise en oeuvre doivent effectivement permettre à l'administration des impôts d'obtenir des autorités de l'Etat dans lequel l'organisme de placement collectif constitué sur le fondement d'un droit étranger mentionné au même alinéa est situé les informations nécessaires à la vérification du respect par cet organisme des conditions prévues aux 1° et 2°.
La retenue à la source s'applique également lorsque ces produits sont payés hors de France dans un Etat ou territoire non coopératif au sens de l'article 238-0 A du présent code".
(3) CGI, art. 1647 (N° Lexbase : L8846LH4) : "I.-La cotisation de taxe professionnelle des entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 7 600 000 euros est au moins égale à 1,5 % de la valeur ajoutée produite par l'entreprise, telle que définie au II de l'article 1647 B sexies. Le chiffre d'affaires et la valeur ajoutée à prendre en compte sont ceux de l'exercice de douze mois clos pendant l'année d'imposition ou, à défaut d'un tel exercice, ceux de l'année d'imposition.
II.-Les entreprises mentionnées au I sont soumises à une cotisation minimale de taxe professionnelle. Cette cotisation est égale à la différence entre l'imposition minimale résultant du I et la cotisation de taxe professionnelle déterminée selon les règles définies au III.
La cotisation minimale de taxe professionnelle est une recette du budget général de l'Etat.
III. Pour l'application du II, la cotisation de taxe professionnelle est déterminée conformément aux dispositions du I bis de l'article 1647 B sexies. Elle est majorée du montant de cotisation prévu à l'article 1647 D. Elle est également augmentée du montant de cotisation correspondant aux exonérations temporaires appliquées à l'entreprise ainsi que de celui correspondant aux abattements et exonérations permanents accordés à l'entreprise sur délibération des collectivités locales.
IV. Le montant et les éléments de calcul de la valeur ajoutée définie au I, le montant des cotisations de taxe professionnelle de l'entreprise déterminées conformément au III et la liquidation de la cotisation minimale de taxe professionnelle définie au II font l'objet d'une déclaration par le redevable auprès du comptable des impôts dont relève son principal établissement l'année suivant celle au titre de laquelle les cotisations de taxe professionnelle visées au III sont dues jusqu'à une date fixée par décret et au plus tard le deuxième jour ouvré suivant le 1er mai".
(4) Voir la Question orale sans débat n°0036C de Mme Borvo Cohen-Seat, JO Sénat, 20 septembre 2007, p.1639. Et la réponse du Secrétaire d'Etat chargé de la consommation et du tourisme, JO Sénat, 24 octobre 2007, p.4022.

newsid:462345

Institutions

[Brèves] Loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 : pas d'atteinte à la libre administration des collectivités territoriales

Réf. : Cons. const., décision n° 2017-760 DC du 18 janvier 2018 (N° Lexbase : A8638XA8)

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N2351BXD

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par Yann Le Foll

Le 25 Janvier 2018

L'article 29 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 instituant un mécanisme d'encadrement des dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales n'a pas porté à la libre administration des collectivités territoriales une atteinte d'une gravité telle que seraient méconnus les articles 72 (N° Lexbase : L1342A9L) et 72-2 (N° Lexbase : L8824HBG) de la Constitution. Telle est la solution d'un arrêt rendu par les Sages le 18 janvier 2018 (Cons. const., décision n° 2017-760 DC du 18 janvier 2018 N° Lexbase : A8638XA8).

Ils indiquent que le mécanisme contesté par les requérants est adapté pour tenir compte des contraintes particulières pesant sur certaines collectivités. Il peut ainsi être tenu compte de l'évolution de la population, du nombre de logements, ainsi que du potentiel fiscal par habitant de la collectivité. Chaque collectivité peut demander la conclusion d'un avenant, qui est susceptible de permettre la prise en compte des conséquences des évolutions législatives ou règlementaires affectant le niveau de ses dépenses de fonctionnement.

Le mécanisme de reprise financière, dont le montant est plafonné à 2 % des recettes de fonctionnement de la collectivité, ne s'applique qu'à l'issue d'une procédure contradictoire avec le représentant de l'Etat, qui est tenu de prendre en compte, sous le contrôle éventuel du juge administratif, plusieurs éléments susceptibles d'affecter la comparaison du niveau des dépenses de fonctionnement de l'année en cause avec celui des exercices précédents.

Il en résulte la solution précitée.

newsid:462351

Institutions

[Brèves] Conformité à la Constitution de la résolution pérennisant et adaptant la procédure de législation en commission au Sénat

Réf. : Cons. const., décision n° 2017-757 DC du 16 janvier 2018 (N° Lexbase : A3446XAU)

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N2332BXN

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par Yann Le Foll

Le 25 Janvier 2018

La résolution pérennisant et adaptant la procédure de législation en commission au Sénat est conforme à la Constitution. Telle est la solution d'une décision rendue par le Conseil constitutionnel le 16 janvier 2018 (Cons. const., décision n° 2017-757 DC du 16 janvier 2018 N° Lexbase : A3446XAU).

Cette résolution vise à instaurer une procédure de législation en commission, qui permet à la Conférence des présidents, à la demande du président du Sénat, du président de la commission saisie au fond, du président d'un groupe ou du Gouvernement, de décider que le droit d'amendement des sénateurs et du Gouvernement sur tout ou partie d'un projet de loi ou d'une proposition de loi ou de résolution s'exerce uniquement en commission.

Le Gouvernement, le président de la commission saisie au fond ou un président de groupe peuvent s'opposer à la mise en oeuvre de cette procédure de législation en commission ou exiger le retour à la procédure normale d'examen du texte, le cas échéant seulement sur certains articles. Lors de la séance publique, les débats sont restreints sur les articles faisant l'objet de cette procédure et aucun amendement n'est recevable, à l'exception de ceux visant à assurer le respect de la Constitution, à opérer une coordination ou à procéder à la correction d'une erreur matérielle.

Par la décision de ce jour, le Conseil constitutionnel admet la conformité à la Constitution de cette résolution.

newsid:462332

Rel. collectives de travail

[Brèves] Conformité à la Constitution, mais sous réserve, des dispositions relatives à la proportion d'hommes et de femmes sur les listes de candidats aux élections du comité d'entreprise

Réf. : Cons. const., décision n° 2017-686 QPC du 19 janvier 2018 (N° Lexbase : A8637XA7)

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N2355BXI

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par Blanche Chaumet

Le 25 Janvier 2018

Sous réserve que l'application de la règle d'arrondi de l'article L. 2324-22-1 du Code du travail (N° Lexbase : L5409KGG) ne fasse obstacle à ce que les listes de candidats puissent comporter un candidat du sexe sous-représenté dans le collège électoral, les deuxième à quatrième alinéas de l'article L. 2324-22-1 du Code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015, relative au dialogue social et à l'emploi (N° Lexbase : L2618KG3), portant sur la proportion d'hommes et de femmes sur les listes de candidats aux élections du comité d'entreprise, sont conformes à la Constitution. Telle est la solution dégagée par le Conseil constitutionnel dans un arrêt rendu le 19 janvier 2018 (Cons. const., décision n° 2017-686 QPC du 19 janvier 2018 N° Lexbase : A8637XA7).

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 19 octobre 2017 par la Cour de cassation (Cass. soc., 18 octobre 2017, n° 17-40.053, FS-P+B N° Lexbase : A4520WWC) d'une QPC portant sur les alinéas 2 à 4 de l'article L. 2324-22-1 du Code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015. Pour rappel, ces dispositions fixent une règle d'arrondi arithmétique lorsque la proportion de femmes et d'hommes au sein du corps électoral ne permet pas d'aboutir à un nombre entier de candidats à désigner pour chaque sexe.

Les requérants estimaient que ces dispositions faisaient obstacle, lorsque la proportion d'hommes et de femmes dans le collège électoral est très déséquilibrée, à ce qu'un salarié du sexe sous-représenté soit candidat au mandat de représentant du personnel au comité d'entreprise. Il en résulterait une méconnaissance du principe de participation des travailleurs énoncé à l'alinéa 8 du Préambule de la Constitution de 1946 (N° Lexbase : L1356A94), ainsi qu'une différence de traitement injustifiée entre les hommes et les femmes, contraire au principe d'égalité devant la loi. En outre, ces dispositions seraient entachées d'incompétence négative dans des conditions affectant la liberté syndicale ainsi que le principe d'égalité devant le suffrage.

En énonçant la règle susvisée, les Sages déclarent les dispositions contestées conforment à la Constitution.

newsid:462355

Rupture du contrat de travail

[Focus] La rupture conventionnelle collective, présentation et enjeux

Lecture: 19 min

N2377BXC

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par Jérémie Paubel, avocat associé et Kévin Bouleau, avocat collaborateur - Cabinet Baker McKenzie

Le 25 Janvier 2018

L'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, relative à la prévisibilité et à la sécurisation des relations de travail (N° Lexbase : L5827LA3) a introduit dans le Code du travail un nouveau mode de rupture du contrat de travail, la rupture conventionnelle collective. Mesure phare des ordonnances "Macron", cette "RCC" ou "R2C" est un dispositif déjà à l'étude, voire mis en place dans plusieurs entreprises.

Alors que la majorité des dirigeants d'entreprises (84,1 %) jugeait la sécurisation des ruptures du contrat de travail comme une réforme prioritaire (1), ce dispositif "flexisécuritaire" de la rupture conventionnelle collective s'inscrit comme une réponse du Gouvernement à cette attente.

Résultant des articles 10 à 14 de l'ordonnance n° 2017-1387, ce nouveau dispositif est intégré au sein du Chapitre VII du Titre II du Livre II de la Première partie du Code du travail, portant sur les "Autres cas de rupture", dans une nouvelle section 4 dénommée "Rupture d'un commun accord dans le cadre d'accords collectifs". L'objectif est donc de permettre des suppressions d'emplois via un mode autonome de rupture du contrat de travail qui ne soient pas justifiées par une motivation économique.

Ce nouveau dispositif de rupture conventionnelle collective a pour ambition de clarifier le régime des départs volontaires, développé depuis maintenant plusieurs années (2), et de les inscrire dans un cadre indépendant de toute motivation économique (et donc, in fine, de la procédure applicable aux licenciements économiques). Ce dispositif est entré en vigueur le 22 décembre 2017, à la suite de la parution de deux décrets venant fixer les modalités de sa mise en oeuvre (3).

Nous traiterons ci-après de la mise en place du dispositif de rupture conventionnelle collective (I), de sa mise en oeuvre (II), et des questions pratiques posées par ce dispositif (III). I - La mise en place du dispositif de rupture conventionnelle collective

Même si ce dispositif de départ volontaire se veut différent des plans de départs volontaires "classiques" (A), sa mise en oeuvre doit obéir à certaines règles et doit à ce titre impérativement passer par le "double verrou" de la signature d'un accord collectif (B) et du contrôle de l'autorité administrative (C).

A - Du plan de départ volontaire à la rupture conventionnelle collective

Dans un premier temps présenté sous le nom d'"accord collectif portant plan de départ volontaire", lors de la publication du projet d'ordonnance publié à la fin de l'été 2017 (4), c'est finalement la dénomination "d'accord portant rupture conventionnelle collective" qui a été retenue, afin de différencier encore davantage ce dispositif des techniques déjà existantes.

La rupture conventionnelle collective et les dispositifs déjà existants. La rupture conventionnelle collective doit être distinguée des deux types de plans de départs volontaires déjà existants : le plan de départs volontaires dit "autonome" et le plan de départs volontaires intégré à un plan de licenciements (parfois appelé plan de départs volontaires "multifonctions"), dont il constitue un volet préalable. Ces deux types de plan de départs volontaires, dès lors qu'ils impliquent au moins dix suppressions de postes dans une entreprise d'au moins cinquante salariés, imposent la mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi. Néanmoins, alors que le premier, reposant sur le volontariat, est exclusif de tout licenciement pour atteindre les objectifs de réduction des effectifs voulus par l'employeur et ne nécessite pas la mise en place d'un plan de reclassement interne (5), le second s'inscrit dans une mesure globale de réduction des effectifs dont il ne constitue qu'une mesure préalable, afin de limiter le nombre de licenciements économiques (6).

Un régime proche de celui existant dans les plans de départs "autonomes". A première vue, le dispositif de rupture conventionnelle collective s'inspire fortement des plans de départs volontaires "autonomes", c'est-à-dire dans lesquels aucun licenciement n'est envisagé si les objectifs de suppressions de postes ne sont pas atteints en raison d'un nombre insuffisant de volontaires. En effet, comme ce dernier, le dispositif de rupture conventionnelle collective exclut "tout licenciement pour atteindre les objectifs qui lui sont assignés en termes de suppression d'emplois" (7). Dans la mise en oeuvre du dispositif de rupture conventionnelle collective, le choix est donc laissé au salarié, sans qu'il n'ait à craindre un licenciement dans l'hypothèse où il ne se porterait pas volontaire. De plus, et comme dans le cadre du plan de départs volontaires "autonome", le dispositif de rupture conventionnelle collective n'implique aucune obligation de reclassement interne, se limitant seulement aux "mesures visant à faciliter le reclassement externe des salariés" (8).

Une addition plutôt qu'une substitution. En réalité, le dispositif de rupture conventionnelle collective semble venir s'additionner plutôt que se substituer aux dispositifs déjà existants, car contrairement à ces derniers, il peut être mis en oeuvre indépendamment de toute justification économique, et sans qu'il soit donc nécessaire de respecter la procédure applicable en matière de licenciements économiques (imposant en premier lieu la consultation des instances représentatives du personnel). Le législateur a d'ailleurs modifié l'article L. 1233-3 du Code du travail (N° Lexbase : L7299LHS), relatif au licenciement pour motif économique, qui précise désormais que "les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute rupture du contrat de travail résultant de l'une des causes énoncées au présent article, à l'exclusion de la rupture conventionnelle visée aux articles L. 1237-11 (N° Lexbase : L8512IAI) et suivants et de la rupture d'un commun accord dans le cadre d'un accord collectif visée aux articles L. 1237-17 (N° Lexbase : L7971LGC) et suivants". De même, le rapport remis au Président de la République indique que les plans de départs volontaires "multifonctions" (intégrés à un plan de licenciements) ne sont pas remis en cause, "dans la mesure où cela permet de limiter le nombre de licenciements contraints et d'encourager les projets professionnels et personnels des salariés" (9). Enfin, et afin d'éviter toute confusion, la loi précise également que les dispositions relatives à la rupture conventionnelle individuelle ne sont pas applicables aux ruptures de contrats de travail résultant des accords collectifs portant rupture conventionnelle collective (10).

Ce nouveau type de départ volontaire s'ajoute donc à la palette des dispositifs déjà mis à la disposition des employeurs.

B - La nécessité d'un accord collectif

La loi impose la signature d'un accord collectif assorti d'un certain nombre de garanties afin de sécuriser la mise en oeuvre du dispositif de rupture conventionnelle collective.

L'information de l'autorité administrative. Dès lors que l'employeur envisage une rupture conventionnelle collective, il doit informer sans délai l'autorité administrative de l'ouverture des négociations en vue de la conclusion d'un accord collectif (11). Il est précisé que l'autorité administrative compétente est "celle du lieu où l'entreprise ou l'établissement concerné par le projet de plan de départ volontaire est établi. Si le projet d'accord portant rupture conventionnelle collective porte sur des établissements relevant de la compétence d'autorités différentes, le ministre chargé de l'Emploi désigne l'autorité compétente" (12). Cette information doit se faire par voie dématérialisée, comme ce qui se pratique déjà actuellement dans le cadre des procédures avec plan de sauvegarde de l'emploi (13).

L'information du comité social et économique (CSE). Il est prévu que l'accord collectif fixe "les modalités et conditions d'information du comité social et économique" (14). Dans l'attente de la mise en place du comité social et économique, les attributions de cette instance sont exercées par le comité d'entreprise ou, le cas échéant, les délégués du personnel (15). Alors que le comité social et économique doit être consulté en cas de projet de restructuration et de compression des effectifs, l'instance doit ici être simplement informée, sans qu'un avis n'ait à être rendu. En effet, l'article L. 2312-39 du Code du travail (N° Lexbase : L8272LGH) prévoit que la consultation relative aux projets de restructuration et de compression des effectifs ne s'applique pas dans le cadre d'un accord collectif portant rupture conventionnelle collective. La question pourrait toutefois se poser d'une possible consultation du comité social et économique sur le fondement de l'article L. 2312-8 du Code du travail (N° Lexbase : L8460LGG), imposant une telle consultation en cas de question intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise, et ce d'autant plus si l'employeur envisage de supprimer un nombre important de postes via la rupture conventionnelle collective.

Par ailleurs, si le comité social et économique n'est pas consulté au stade de la négociation de l'accord de rupture conventionnelle collective, il doit l'être de manière régulière et détaillée s'agissant du suivi de la mise en oeuvre de l'accord. Les avis du comité social et économique devront être transmis à l'autorité administrative, de même qu'un bilan de la mise en oeuvre (16). Ce bilan (dont le contenu doit être fixé par arrêté) devra être transmis dans un délai d'un mois à compter de la date de fin de la mise en oeuvre de la rupture conventionnelle collective (17).

Contenu de l'accord. A l'instar des plans de départs volontaires "classiques", la rupture conventionnelle collective n'aura pas à être justifiée par un motif économique. Néanmoins, il pourrait être utile, en pratique, de préciser dans le préambule de l'accord le contexte dans lequel ce dernier est conclu, en indiquant les raisons (non liées à des justifications économiques, mais par exemple à la stratégie de l'entreprise) aboutissant à la suppression de postes dans l'entreprise par le biais de départs volontaires. Cela permettrait de marquer encore davantage la frontière entre la rupture conventionnelle collective et les plans de départs volontaires liés à des justifications économiques.

Concernant le contenu de l'accord, selon l'article L. 1237-19-1 du Code du travail (N° Lexbase : L7979LGM), il doit notamment déterminer :

"Les modalités et conditions d'information du comité social et économique" (18).

"Le nombre maximal de départs envisagés, de suppressions d'emplois associées, et la durée de mise en oeuvre de la rupture conventionnelle collective." Sur ce point, on peut se demander si, dans le cadre de la négociation de l'accord, et même si cela n'est pas prévu par les textes, il serait également possible de prévoir, en plus du nombre maximal de départs souhaités, un nombre minimal de départs en deçà duquel l'employeur pourrait renoncer à mettre en oeuvre cet accord de rupture conventionnelle collective. Concernant le ciblage des postes dont la suppression est envisagée, il semble possible de se limiter à un établissement, un département ou encore à un métier, laissant une plus grande latitude à l'employeur par rapport à la notion de catégories professionnelles devant être utilisée dans les plans de départs volontaires "classiques". L'accord collectif instaurant la rupture conventionnelle collective devra également prévoir les durées des différentes phases (période pour postuler, période d'examen des candidatures, date des départs).

"Les conditions que doit remplir le salarié pour être volontaire et les critères de départage entre les candidats au départ." Sur ce point, l'employeur pourra, s'il le souhaite, se référer aux critères pour fixer l'ordre des licenciements pour motifs économiques, ou à certains d'entre eux (19), ou vouloir utiliser d'autres critères définis librement. Néanmoins, l'administration devra veiller à ce que les critères retenus ne soient pas discriminatoires.

"Les modalités de calcul des indemnités de rupture garanties au salarié, qui ne peuvent être inférieures aux indemnités légales dues en cas de licenciement". La loi de finances pour 2018 (20) prévoit que ces indemnités seraient exonérées d'impôt sur le revenu, sans limitation de montant. Ce régime fiscal de faveur serait ainsi aligné sur celui actuellement applicable aux indemnités de licenciement ou de départ volontaire versées dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi. De plus, ces indemnités seraient exonérées de cotisations de Sécurité sociale dans la limite de deux fois le plafond annuel de la Sécurité sociale (soit 79 464 euros en 2018) et exonérées de CSG et de CRDS pour la fraction exonérée de cotisations de Sécurité sociale. Toutefois, si les indemnités de rupture versées sont supérieures à dix fois la valeur du plafond annuel de la Sécurité sociale (soit 397 320 euros en 2018), elles devraient être assujetties, dès le premier euro, à l'ensemble des cotisations de Sécurité sociale ainsi qu'à la CSG et à la CRDS.

"Les modalités de présentation et d'examen des candidatures au départ des salariés, comprenant les conditions de transmission de l'accord écrit du salarié au dispositif prévu par l'accord collectif". Le projet de loi ratifiant les ordonnances portant réforme du droit du travail du 22 septembre 2017 (21) précise que l'accord devrait prévoir les modalités de conclusion d'une convention individuelle de rupture entre l'employeur et le salarié, et également l'exercice d'un droit de rétractation au profit du salarié. Il faut noter que ce droit de rétractation n'est pas imposé dans le cadre des plans de départs volontaires "classiques" (mais qu'il existe néanmoins pour la rupture conventionnelle individuelle).

"Des mesures visant à faciliter le reclassement externe des salariés sur des emplois équivalents, telles que des actions de formation, de validation des acquis de l'expérience ou de reconversion ou des actions de soutien à la création d'activités nouvelles ou à la reprise d'activités existantes par les salariés". L'article L. 1237-19-1 du Code du travail donne des exemples de mesures pouvant être proposées, mais l'employeur reste libre de prévoir d'autres actions afin de faciliter ce reclassement externe (bilan d'orientation, coaching par un cabinet d'outplacement, etc.). Le projet de loi ratifiant les ordonnances portant réforme du droit du travail du 22 septembre 2017 (22) prévoirait la possibilité d'ouvrir à ces salariés le bénéfice du congé de mobilité.

"Les modalités de suivi de la mise en oeuvre effective de l'accord portant rupture conventionnelle collective (23)". L'accord portant rupture conventionnelle collective doit comporter une clause de suivi.

Ces mentions qui, pour la plupart, empruntent au contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, sont obligatoires et constituent des minimas que l'employeur devra respecter afin de ne pas se voir opposer un refus de validation de l'accord par l'administration. Il pourra, cependant, prévoir des mesures supplémentaires, ce qui s'avèrera d'ailleurs, en pratique, très certainement nécessaire afin de convaincre les organisations syndicales de signer l'accord collectif relatif à la rupture conventionnelle collective.

Règles de signature de l'accord. L'article 40 de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, relative à la prévisibilité et à la sécurisation des relations de travail prévoit que "les règles de validité des accords visées à l'article L. 2232-12 du Code du travail (N° Lexbase : L8604LGR) sont applicables aux accords collectifs portant rupture conventionnelle collective prévus aux dispositions de l'article 10 de la présente ordonnance à la date d'entrée en vigueur de ces dispositions". En conséquence, pour être valable, l'accord portant rupture conventionnelle collective devra être signé par une ou plusieurs organisations syndicales majoritaires. Lorsque l'accord a été signé par des syndicats ayant recueilli plus de 30 %, mais n'ayant pas atteint les 50 %, l'employeur peut le soumettre pour validation au référendum des salariés. Rien n'est précisé s'agissant de la possibilité de négocier un tel accord en l'absence de délégué syndical dans l'entreprise, mais cela semble admis sur la base des dispositions générales relatives à la négociation collective avec les représentants élus du personnel (24).

C - Le contrôle administratif de l'accord

A la suite de la conclusion de l'accord collectif, ce dernier est transmis à l'autorité administrative. Le contrôle opéré par l'administration s'inspire grandement de celui existant dans le cadre des procédures de licenciements collectifs avec mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi.

Procédure de transmission et administration compétente. L'accord collectif est transmis à l'autorité administrative pour validation (25). La demande de validation de l'accord doit être adressée à l'administration par voie dématérialisée et doit comprendre l'accord collectif ainsi que les informations permettant de vérifier la régularité des conditions dans lesquelles il a été conclu (et notamment la bonne information du comité social et économique) (26). L'administration compétente est la Direccte dont relève l'entreprise ou l'établissement concerné par le projet d'accord portant rupture conventionnelle collective, et en cas d'absence d'établissement distinct, ou lorsque le projet d'accord collectif portant rupture conventionnelle collective inclut des établissements relevant de la compétence de plusieurs Direcctes, le Directeur de la Direccte qui a été saisi lors de l'ouverture des négociations procède à la désignation du Directeur régional compétent dans une décision communiquée à l'entreprise dans un délai de dix jours à compter de la réception de l'information par l'employeur du projet. A défaut de décision expresse, la Direccte compétente est celle dans le ressort duquel se situe le siège de l'entreprise (27).

Contrôle. La Direccte compétente contrôle l'accord collectif, s'assure que celui-ci exclut tout licenciement, qu'il prévoit bien toutes les mesures nécessaires et que le comité social et économique (ou le comité d'entreprise ou, le cas échéant, les délégués du personnel) a bien été informé (28). Le projet de loi ratifiant les ordonnances portant réforme du droit du travail du 22 septembre 2017 (29) préciserait que la Direccte appréciera, au regard de l'importance du projet, si les mesures de reclassement externe et d'accompagnement sont précises et concrètes et si elles sont, prises dans leur ensemble, propres à satisfaire à l'objectif d'accompagnement et de reclassement externe des salariés. Le rapport au Président de la République précise que les Direcctes devront être "attentives, dans le cadre de l'homologation, au fait que la mesure ne soit pas détournée de son objet en faisant peser sur les comptes publics et l'assurance chômage des charges supplémentaires du fait d'un ciblage inapproprié sur les personnes seniors" (30).

Notification de la décision et information des salariés. A compter de la réception de l'accord, la Direccte dispose d'un délai de quinze jours pour notifier sa décision à l'employeur, à l'instance représentative du personnel et aux organisations syndicales signataires de l'accord. Le silence gardé par la Direccte à l'issue de ce délai de quinze jours vaut décision de validation. Dans ce cas, l'employeur doit transmettre une copie de la demande de validation, accompagnée de son accusé de réception par l'administration à l'instance représentative du personnel et aux organisations syndicales signataires (31).

Accord invalidé. En cas de décision de refus de validation de l'accord, l'employeur, "s'il souhaite reprendre son projet, présente une nouvelle demande après y avoir apporté les modifications nécessaires et informé le comité social et économique" (32). Il serait donc, dans ce cas, nécessaire de renégocier un accord collectif en prenant en compte la décision motivée de l'administration. Il n'est pas légalement requis d'informer les salariés en cas de refus de validation de l'accord mais, en pratique, une telle information apparaît souhaitable.

Contestation de l'accord. Le contenu de l'accord portant rupture conventionnelle collective et la régularité de la procédure précédant la décision de l'autorité administrative ne peuvent faire l'objet d'un litige distinct de celui relatif à la décision de validation (33). Ces litiges relèvent de la compétence, en premier ressort, du tribunal administratif, à l'exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux.

Ce contrôle de l'administration se rapproche donc de la procédure de validation de l'accord collectif relatif au plan de sauvegarde de l'emploi (pouvant intégrer un plan de départs volontaires), s'agissant aussi bien de la procédure applicable que du contrôle restreint opéré par l'administration ou encore des recours contentieux possibles.

II - La mise en oeuvre du dispositif

La mise en oeuvre de l'accord de rupture conventionnelle collective débutera par l'acception des candidatures puis les ruptures des contrats de travail (A), mais concerne aussi les obligations mises à la charge de l'employeur, aussi bien dans le cadre du suivi de la mise en oeuvre que d'une potentielle revitalisation du bassin d'emploi (B).

A - De l'acceptation des candidatures aux ruptures d'un commun accord

Examen des candidatures. A la suite de la validation de l'accord, les salariés pourront se porter candidats au départ dans les conditions définies par l'accord. Il conviendra, en pratique, de prévoir une candidature notifiée par écrit, afin de limiter tout contentieux sur ce point. L'acceptation par l'employeur de la candidature du salarié dans le cadre de la rupture conventionnelle collective emporte rupture de son contrat de travail d'un commun accord des parties (34). En pratique, un courrier devrait être envoyé au salarié afin de l'informer que sa candidature est acceptée ou refusée. L'employeur devra veiller à ne pas refuser de manière discrétionnaire ou discriminatoire une candidature au départ et se baser sur les critères de départage objectifs prévus par l'accord collectif. Les règles posées par la jurisprudence concernant les refus de candidatures dans le cadre des plans de départs volontaires "classiques" auraient vocation à s'appliquer ici. Idéalement, il conviendrait d'indiquer précisément au salarié, par écrit, les raisons objectives qui s'opposent à son départ, en se basant sur les critères prévus dans l'accord collectif. Un refus du départ par l'employeur, alors que le salarié remplit toutes les conditions posées par l'accord collectif, pourrait ouvrir la voie d'une action contentieuse initiée par le salarié à l'encontre de l'employeur.

Ruptures d'un commun accord. Contrairement à la rupture conventionnelle individuelle, l'administration ne contrôle pas la convention de rupture mais seulement l'accord collectif, comme dans le cadre d'un plan de départ volontaire "classique". Alors qu'aucun formalisme particulier n'était initialement imposé, le projet de loi ratifiant les ordonnances portant réforme du droit du travail du 22 septembre 2017 (35) prévoirait que l'accord collectif devrait préciser les modalités de conclusion d'une convention individuelle. En pratique, la convention de rupture individuelle devrait notamment prévoir la date de départ, les indemnités versées, le sort de la clause de non-concurrence le cas échéant, la portabilité en matière de prévoyance et de frais de santé, etc.). Par ailleurs, concernant les salariés protégés, l'autorisation préalable de l'inspecteur du travail sera, bien entendu, requise, et la rupture ne pourra intervenir qu'à compter du lendemain de ladite autorisation. Il faut, enfin, préciser que, tout comme les salariés licenciés, les volontaires pourront bénéficier de l'assurance-chômage (36).

Contestation de la rupture. Toute contestation portant sur la rupture du contrat de travail doit être formée, à peine d'irrecevabilité, avant l'expiration d'un délai de douze mois à compter de la date de la rupture du contrat (37). A défaut d'engagement d'une action prud'homale dans ce délai, l'action sera irrecevable. En pratique, le juge compétent serait le juge prud'homal pour les ex-salariés ainsi que le juge administratif pour les ex-salariés protégés. Les contentieux devraient être limités dans la mesure où le salarié a été volontaire au départ, et devraient essentiellement porter sur des cas de vices du consentement.

B - Les obligations de l'employeur au stade de la mise en oeuvre de l'accord

Le suivi de l'accord. L'accord doit prévoir les modalités de suivi de sa mise en oeuvre effective (38), et ce suivi doit faire l'objet d'une consultation régulière et détaillée du comité social et économique, dont les avis sont transmis à l'autorité administrative. L'autorité administrative est associée au suivi de ces mesures et reçoit un bilan, établi par l'employeur, de la mise en oeuvre de l'accord portant rupture conventionnelle collective (39). Le décret relatif à la mise en oeuvre des ruptures d'un commun accord dans le cadre d'un accord collectif prévoit que ce bilan est transmis à l'autorité administrative dans un délai d'un mois (40). Cette obligation, existant également dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi (41) est ici requise, alors même que les instances représentatives du personnel ne sont pas consultées en amont de la transmission de l'accord à l'autorité administrative.

La possible revitalisation du bassin d'emploi. Lorsque, par l'ampleur des suppressions d'emplois résultant de l'accord collectif, l'équilibre du ou des bassins d'emploi est affecté, certaines entreprises sont tenues de contribuer à la création d'activités et au développement des emplois, et d'atténuer les effets de l'accord sur les autres entreprises du bassin d'emploi (42). Les entreprises concernées sont les entreprises ou établissements d'au moins mille salariés, les groupes d'entreprises formés par une entreprise dominante ayant son siège social en France et les entreprises qu'elle contrôle, tenues de mettre en place un comité de groupe (conformément à l'article L. 2331-1 du Code du travail N° Lexbase : L9924H83), et les entreprises ou groupes d'entreprises de dimension communautaire visées aux articles L. 2341-1 (N° Lexbase : L6260ISN) et L. 2341-2 (N° Lexbase : L6270ISZ) du Code du travail, dès lors qu'elles emploient au moins 1 000 salariés. Ce même article précise que les entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire ne sont pas concernées. Afin de remplir cette obligation, une convention est signée avec l'administration dans les six mois suivant la validation de l'accord collectif portant rupture conventionnelle collective (43). Les modalités de cette obligation sont précisées par le Code du travail (44).

III - Un dispositif attractif mais dont l'application pratique peut sembler limitée

Ce dispositif attractif pourrait s'avérer difficile à mettre en oeuvre en pratique (A) et des zones d'ombres subsistent encore quant à l'application du dispositif (B).

A - Les difficultés pratiques de mise en oeuvre

Un dispositif attractif pour l'employeur... Pour l'employeur, et par rapport à un plan de départ volontaire "classique", le premier intérêt de ce dispositif réside dans la possibilité de prévoir des départs volontaires sans avoir à justifier de difficultés économiques. De plus, l'employeur est dispensé de consulter les représentants du personnel en amont de la négociation puis de la transmission de l'accord à l'autorité administrative. Enfin, tout comme dans le cadre de plans de départs volontaires "classiques", les contestations futures des ex-salariés devraient être limitées, dès lors que ces derniers ont choisi de quitter l'entreprise.

...mais limité pour les organisations syndicales. En pratique, pour les organisations syndicales, l'intérêt de signer un accord de rupture conventionnelle collective pourrait s'avérer limité, et l'employeur risque d'avoir souvent des difficultés à convaincre ces dernières. En effet, contrairement à ce qui est prévu dans le cadre d'un plan de départ volontaire "classique", les salariés quittant l'entreprise ne pourront pas bénéficier du congé de reclassement ou du contrat de sécurisation professionnelle, ni de la priorité de réembauchage. L'employeur devra donc trouver un dispositif attractif (par exemple, en prévoyant une indemnité de départ conséquente, ou des systèmes de pré-retraite "maison", des aides importantes pour la création ou la reprise d'entreprise ou des formations de longue durée, voire une renonciation à tout licenciement économique pendant une période déterminée à la suite de la mise en oeuvre de la rupture conventionnelle collective, etc.) avec les conséquences financières associées afin de convaincre les organisations syndicales de signer cet accord collectif.

En cas de blocage avec les organisations syndicales, l'employeur voulant mettre en place des départs volontaires devrait s'orienter vers le dispositif plus contraignant du plan de départ volontaire "classique", impliquant la consultation préalable des instances représentatives du personnel. Il faut également souligner que passer par le dispositif moins contraignant de la rupture conventionnelle collective pourrait, au final, allonger la réalisation des départs volontaires, car en cas d'échec des négociations de l'accord de rupture conventionnelle collective, l'employeur devrait alors s'orienter vers un plan de départ volontaire "classique", alors qu'un échec des négociations dans le cadre d'un plan de départ volontaire "classique" ne rallongerait pas la procédure, l'employeur pouvant s'orienter vers une mise en place unilatérale.

B - Les incertitudes liées au dispositif

Succession d'un accord portant rupture conventionnelle collective et d'un plan de sauvegarde de l'emploi. La question se pose de savoir quelle serait la conséquence de la signature d'un accord de rupture conventionnelle collective permettant le départ de salariés et de la mise en place subséquente d'un plan de sauvegarde de l'emploi, dans l'hypothèse où l'objectif du nombre de postes supprimés n'aurait pas été atteint via la rupture conventionnelle collective, ou encore en cas de dégradation rapide de la situation économique les mois suivants sa mise en oeuvre. Dans ce cadre, il n'est pas à exclure que des salariés agissent sur le fondement de l'inégalité de traitement, si les dispositions prévues dans le cadre de la rupture conventionnelle sont moins favorables que celles prévues dans le plan de sauvegarde de l'emploi. La question d'une possible action sur le fondement de la fraude à la loi pourrait également se poser, s'il peut être démontré que l'employeur savait, au moment de la mise en place de la rupture conventionnelle collective, qu'il procéderait ensuite à des licenciements économiques (la rupture conventionnelle collective lui permettant, notamment, de passer sous les seuils imposant la mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi). Ces risques liés à l'articulation d'une rupture conventionnelle collective et de procédures de licenciements collectifs sont aujourd'hui difficilement appréciables, et les juges ne manqueront sans doute pas d'apporter les éclaircissements nécessaires sur ce sujet.

Sanction de la décision de validation de l'accord collectif. Le dispositif prévu par l'ordonnance ne précise pas les conséquences d'une décision de justice venant invalider la décision de validation de l'accord collectif. La nullité des départs volontaires serait-elle encourue comme dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi intégrant un plan de départ volontaire (45) ? La question reste en suspens mais ne manquera pas de se poser pour les praticiens.

Il conviendra donc d'être attentif aux réactions de l'administration et du juge administratif dans les prochains mois afin d'apprécier quelles sont les véritables marges de manoeuvres laissées aux entreprises dans le cadre de ce dispositif.


(1) Réforme du droit du travail : les vraies attentes des dirigeants d'entreprise, Amplitude et Fidal, juin 2017. Voir le numéro spécial sur les ordonnances réformant le droit du travail, Lexbase, éd. soc., n° 712, 2017 : Ch. Radé, Ordonnances réformant le droit du travail : le droit de la négociation collective après l'ordonnance n° 4 relative au renforcement de la négociation collective (N° Lexbase : N0159BX8) ; S. Tournaux, Ordonnances réformant le droit du travail : règles générales relatives au licenciement et rupture d'un commun accord collective (N° Lexbase : N0176BXS), voir également du même auteur Ordonnances réformant le droit du travail : le licenciement pour motif économique (N° Lexbase : N0183BX3) ainsi que Ordonnances réformant le droit du travail : inaptitude et dispositions diverses (N° Lexbase : N0178BXU) ; Ch. Willmann, Ordonnances réformant le droit du travail : mesures liées aux conditions de travail et à la pénibilité (N° Lexbase : N0247BXG), voir également Ordonnances réformant le droit du travail : mesures liées à l'embauche et à la gestion des effectifs (N° Lexbase : N0248BXH) ; G. Auzero, Ordonnances réformant le droit du travail. L'avènement du comité social et économique : les attributions du CSE (N° Lexbase : N0148BXR), voir également Ordonnances réformant le droit du travail. L'avènement du comité social et économique : mise en place et suppression du CSE (N° Lexbase : N0149BXS) ainsi que Ordonnances réformant le droit du travail. L'avènement du comité social et économique : le fonctionnement du CSE (N° Lexbase : N0150BXT).
(2) Selon le rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail (N° Lexbase : L5827LA3), "les plans de départs volontaires qui inspirent la mesure représentent aujourd'hui environ 13 % des plans de sauvegarde de l'emploi".
(3) Décrets n° 2017-1723 du 10 mai 2017, relatif à l'autorité administrative compétente pour valider l'accord collectif portant rupture conventionnelle collective (N° Lexbase : L6731LHR) et n° 2017-1724 du 20 décembre 2017, relatif à la mise en oeuvre des ruptures d'un commun accord dans le cadre d'un accord collectif (N° Lexbase : L6730LHQ), JO du 22 décembre 2017.
(4) Projet d'ordonnance relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail du 31 août 2017.
(5) Cass. soc., 26 octobre 2010, n° 09-15.187, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A6142GCH ; cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E9317ESU et N° Lexbase : E9323ES4) : "si l'employeur qui, pour des raisons économiques, entend supprimer des emplois en concluant avec les salariés intéressés des accords de rupture amiable est tenu d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi lorsque les conditions prévues par l'article L. 1233-61 du Code du travail (N° Lexbase : L7291LHI) sont remplies, un plan de reclassement, qui ne s'adresse qu'aux salariés dont le licenciement ne peut être évité, n'est pas nécessaire dès lors que le plan de réduction des effectifs au moyen de départs volontaires exclut tout licenciement pour atteindre les objectifs qui lui sont assignés en termes de suppressions d'emplois".
(6) Cass. soc., 25 janvier 2012, n° 10-23.516, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A4422IBE ; cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E9317ESU, N° Lexbase : E9321ESZ et N° Lexbase : E9323ES4) : "si l'employeur qui entend supprimer des emplois pour des raisons économiques en concluant avec les salariés des accords de rupture amiable, n'est pas tenu d'établir un plan de reclassement interne lorsque le plan de réduction des effectifs au moyen de départs volontaires exclut tout licenciement pour atteindre des objectifs qui lui sont assignés en terme de suppression d'emplois, il en va autrement lorsque le projet de réduction d'effectifs de l'employeur implique la suppression de l'emploi de salariés qui ne veulent ou ne peuvent quitter l'entreprise dans le cadre du plan de départs volontaires ; que le maintien de ces salariés dans l'entreprise supposant nécessairement en ce cas un reclassement dans un autre emploi, un plan de reclassement interne doit alors être intégré au plan de sauvegarde de l'emploi".
(7) C. trav., art. L. 1237-19 (N° Lexbase : L7978LGL).
(8) C. trav., art. L. 1237-19-1 (N° Lexbase : L7979LGM).
(9) Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail.
(10) C. trav., art. L. 1237-16 (N° Lexbase : L7303LHX).
(11) C. trav., art. L. 1237-19.
(12) C. trav., art. L. 1237-19-5 (N° Lexbase : L7983LGR) ; décret n° 2017-1723, 20 décembre 2017, relatif à l'autorité administrative compétente pour valider l'accord collectif portant rupture conventionnelle collective (N° Lexbase : L6731LHR).
(13) C. trav., art. D. 1237-7 (N° Lexbase : L6861LHL).
(14) C. trav., art. L. 1237-19-1.
(15) Ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail, art. 40, III.
(16) C. trav., art. L. 1237-19-7 (N° Lexbase : L7985LGT).
(17) C. trav., art. D. 1237-12 (N° Lexbase : L6864LHP).
(18) Voir le paragraphe relatif à l'information du comité social et économique (I, B).
(19) C. trav., art. L. 1233-5 (N° Lexbase : L7297LHQ).
(20) Loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017, de finances pour 2018 (N° Lexbase : L7952LHY), art. 3, modifiant l'article 80 duodecies du Code général des impôts (N° Lexbase : L9290LHK).
(21) Ce projet de loi vise à ratifier cinq ordonnances prises sur le fondement de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017, d'habilitation à prendre les mesures pour le renforcement du dialogue social (N° Lexbase : L7244LGE) et publiées le 22 septembre 2017. Adopté le 28 novembre 2017 en première lecture dans le cadre de la procédure accélérée, le texte doit être présenté au Sénat à partir du 23 janvier 2018. Au stade de la rédaction de cet article, il ne s'agit encore que d'un projet de loi de ratification.
(22) Voir préc., note 21.
(23) Voir le paragraphe relatif au suivi de l'accord (II, B).
(24) C. trav., art. article L. 2232-21 (N° Lexbase : L7830LG4) et ss..
(25) C. trav., art. L. 1237-19-3 (N° Lexbase : L7981LGP).
(26) C. trav., art. D. 1237-9 (N° Lexbase : L6859LHI).
(27) C. trav., art. R. 1237-6 et R. 1237-6-1 (N° Lexbase : L6856LHE).
(28) C. trav., art. L. 1237-19-3.
(29) Voir préc., note 21.
(30) Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail.
(31) C. trav., art. L. 1237-19-4 (N° Lexbase : L7982LGQ).
(32) C. trav., art. L. 1237-19-6 (N° Lexbase : L7984LGS).
(33) C. trav., art. L. 1237-19-8 (N° Lexbase : L7986LGU).
(34) C. trav., art. L. 1237-19-2 (N° Lexbase : L7980LGN).
(35) Voir préc., note 21.
(36) C. trav., art. L. 5421-1 (N° Lexbase : L7360LH3).
(37) C. trav., art. L. 1237-19-8.
(38) C. trav., art. L. 1237-19-1.
(39) C. trav., art. L. 1237-19-7.
(40) C. trav., art. D. 1237-12 (N° Lexbase : L6864LHP).
(41) C. trav., art. L. 1233-63 (N° Lexbase : L8596LGH).
(42) C. trav., art. L. 1237-19-9 (N° Lexbase : L7987LGW).
(43) C. trav., art. L. 1237-19-10 (N° Lexbase : L7988LGX).
(44) C. trav., art. L. 1237-19-9 à L. 1237-19-14.
(45) Cass. soc., 15 mai 2013, n° 11-26.414, FS-P+B (N° Lexbase : A5018KD9).

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