La lettre juridique n°428 du 17 février 2011 : Fiscalité des entreprises

[Jurisprudence] Les lois de validation asymétriques sont contraires à la Constitution : à propos de la loi limitant les effets de l'abandon de la règle de l'intangibilité du bilan d'ouverture

Réf. : Décision n° 2010-78 QPC du 10 décembre 2010 (N° Lexbase : A7113GME)

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N4861BRH

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[Jurisprudence] Les lois de validation asymétriques sont contraires à la Constitution : à propos de la loi limitant les effets de l'abandon de la règle de l'intangibilité du bilan d'ouverture. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/3900697-jurisprudence-les-lois-de-validation-asymetriques-sont-contraires-a-la-constitution-a-propos-de-la-l
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par Frédéric Dieu, Maître des requêtes au Conseil d'Etat

le 18 Février 2011

Dans l'affaire soumise au Conseil constitutionnel était en cause la conformité à la garantie des droits protégée par l'article 16 de la Déclaration de 1789 (N° Lexbase : L1363A9D) du paragraphe IV de l'article 43 de la loi de finances rectificative pour 2004 (N° Lexbase : L5204GUB) ayant pour objet de rétroactivement empêcher les contribuables de bénéficier de l'abandon partiel par le Conseil d'Etat de la règle de l'intangibilité du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit, abandon consacré par la décision d'Assemblée "SARL Ghesquière Equipement", du 7 juillet 2004 (CE Contentieux, 7 juillet 2004, n° 230169 N° Lexbase : A0698DD9, RJF, 10/04, n° 1019). Après avoir rappelé son considérant de principe en matière de loi rétroactive, le Conseil constitutionnel a conclu à la non-conformité à la garantie des droits de cette loi de validation au motif que "la validation contestée a pour effet de priver à titre rétroactif le seul contribuable du bénéfice de la jurisprudence précitée", ce dont il résulte une atteinte à "l'équilibre des droits des parties" contraire aux "exigences de l'article 16 de la Déclaration de 1789". Cette censure a été prononcée en raison du caractère "asymétrique" de la validation, asymétrie liée à ce que seuls les contribuables, et non l'administration fiscale, se sont vus rétroactivement interdits de se prévaloir de la jurisprudence "SARL Ghesquière Equipement". La solution retenue par le Conseil constitutionnel, qui manifeste, implicitement mais nécessairement, que la loi en cause ne répondait pas à un but d'intérêt général, est de grande portée, notamment en ce qu'elle acclimate au contentieux et au droit fiscal un principe jusqu'alors spécifique au contentieux et au droit pénal.
I - La loi de validation destinée à limiter la portée de l'abandon de la jurisprudence "SARL Ghesquière Equipement" est contraire au principe constitutionnel d'équilibre des droits

A - La limitation législative de l'abandon partiel de la jurisprudence "SARL Ghesquière Equipement"

Par une décision d'Assemblée du 31 octobre 1973 (CE Contentieux, 31 octobre 1973, n° 88207 N° Lexbase : A7634AYE, recueil Lebon, p. 609), le Conseil d'Etat avait institué la règle de l'intangibilité du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit. Cette règle constituait la limite au principe, lui-même prétorien, de la correction symétrique des bilans. Selon cette règle d'intangibilité, les erreurs qui affectaient le bilan ne pouvaient être corrigées que dans les bilans de clôture et d'ouverture des exercices non prescrits, mais pas dans le premier bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit. Cette règle reposait sur l'idée que ce bilan n'était que la reproduction du bilan de clôture de l'exercice précédent, lequel était couvert par la prescription.

Par la décision d'Assemblée précitée du 7 juillet 2004, le Conseil d'Etat a partiellement abandonné cette règle en jugeant d'une part que "lorsque les bénéfices imposables d'un contribuable ont été déterminés en application de ces dispositions, les erreurs ou omissions qui entachent les écritures comptables retracées au bilan de clôture d'un exercice ou d'une année d'imposition et entraînent une sous-estimation ou une surestimation de l'actif net de l'entreprise peuvent, à l'initiative du contribuable qui les a involontairement commises, ou à celle de l'administration exerçant son droit de reprise, être réparées dans ce bilan" et, d'autre part, que "les mêmes erreurs ou omissions, s'il est établi qu'elles se retrouvent dans les écritures de bilan d'autres exercices, doivent y être symétriquement corrigées, dès lors qu'elles ne revêtent pas, pour le contribuable qui les invoque, un caractère délibéré et alors même que tout ou partie de ces exercices seraient couverts par la prescription prévue, notamment, aux articles L. 168 (N° Lexbase : L8487AE3) et L. 169 (N° Lexbase : L0499IP8) du Livre des procédures fiscales".

La décision "SARL Ghesquière Equipement" a, ainsi, permis à l'administration fiscale de corriger toute écriture comptable entachée d'une inexactitude matérielle (une erreur de fait) ou toute écriture qui méconnaîtrait les règles comptables ou fiscales (une erreur de droit). Quant au contribuable, il pouvait demander la correction des erreurs de fait ou de droit dont la commission n'a pas revêtu de sa part un caractère délibéré.

L'article 43 de la loi du 30 décembre 2004, de finances rectificative pour l'année 2004, après avoir limité, en principe, l'abandon partiel de la règle de l'intangibilité du bilan d'ouverture (1), a tenté, par son paragraphe IV, de limiter, dans le temps, la portée de cet abandon. Aux termes de cet article 43-IV : "sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée et de l'application des dispositions des deuxième, troisième et quatrième alinéas du 4 bis de l'article 38 du Code général des impôts (N° Lexbase : L0044IKT), les impositions établies avant le 1er janvier 2005 ou les décisions prises sur les réclamations contentieuses présentées sur le fondement du deuxième alinéa de l'article L. 190 du Livre des procédures fiscales (N° Lexbase : L2974IAE) sont réputées régulières en tant qu'elles seraient contestées par le moyen tiré de ce que le contribuable avait la faculté de demander la correction des écritures du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit. Toutefois, ces impositions ne peuvent être assorties que des intérêts de retard".

B - Une validation jugée contraire au principe d'équilibre des droits qui en sanctionne implicitement l'absence d'intérêt général

On sait qu'aux termes de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen : "toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution". Sur le fondement de cette disposition, le Conseil constitutionnel a développé une importante jurisprudence destinée à encadrer l'examen de la constitutionnalité des lois rétroactives (2).

Selon le considérant de principe de cette jurisprudence, "si le législateur peut modifier rétroactivement une règle de droit ou valider un acte administratif ou de droit privé, c'est à la condition de poursuivre un but d'intérêt général suffisant et de respecter tant les décisions de justice ayant force de chose jugée que le principe de non-rétroactivité des peines et des sanctions ; [...] en outre, l'acte modifié ou validé ne doit méconnaître aucune règle, ni aucun principe de valeur constitutionnelle, sauf à ce que le but d'intérêt général visé soit lui-même de valeur constitutionnelle ; [...] enfin, la portée de la modification ou de la validation doit être strictement définie".

La déclaration d'inconstitutionnalité est prononcée au motif que l'article 43-IV de la loi du 30 décembre 2004 méconnaît le principe constitutionnel d'équilibre des droits des parties, principe qui découle du droit au recours juridictionnel effectif garanti par l'article 16 de la Déclaration de 1789. Pour retenir cette solution, le Conseil constitutionnel a, implicitement mais nécessairement, admis que la contrariété de la loi à ce principe constitutionnel n'était pas justifiée par un but d'intérêt général à valeur constitutionnelle (cf. infra, § suivant).

Selon le Conseil constitutionnel, à la suite du revirement de jurisprudence du Conseil d'Etat (abandon partiel de la règle de l'intangibilité du bilan d'ouverture), il appartenait au législateur, s'il l'estimait opportun, de rétablir pour l'avenir la règle de l'intangibilité du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit, ce qu'il avait d'ailleurs fait, sous certaines conditions, en adoptant le paragraphe I de l'article 43 de la LFR pour 2004, en précisant aux paragraphes II et III que le rétablissement de la règle de l'intangibilité du bilan d'ouverture s'appliquait aux exercices clos à compter du 1er janvier 2005 et aux impositions établies à compter de cette date. A la différence de cette première validation, le paragraphe IV de l'article 43 a purement et simplement validé les impositions établies avant le 1er janvier 2005 ainsi que les décisions prises sur les réclamations en tant qu'elles seraient contestées sur ce point par le contribuable. En conséquence, cette seconde validation ne s'appliquait pas à l'Etat, lequel avait la faculté de se prévaloir, pour ces impositions, de la jurisprudence "SARL Ghesquière Equipement", si elle lui était favorable.

La solution retenue par le Conseil constitutionnel rejoint celle adoptée par le Conseil d'Etat dans sa décision du 13 février 2009 (CE 3° et 8° s-s-r., 13 février 2009, n° 296117 N° Lexbase : A1150EDX, RJF, 5/09, n° 480) : selon cette décision, "le contribuable ne pouvait utilement se prévaloir du principe de l'intangibilité de ce bilan d'ouverture sur le fondement des dispositions précitées du IV de l'article 43 de la loi du 30 décembre 2004, dès lors que celles-ci prévoient la validation rétroactive des impositions établies avant le 1er janvier 2005 en tant qu'elles seraient contestées par le moyen tiré de ce que le contribuable aurait pu demander la correction des écritures du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit et des exercices antérieurs et ne peuvent être invoquées que par l'administration fiscale qui a notifié au contribuable des redressements fondés sur l'intangibilité du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit". Dans ses conclusions sous cette décision du Conseil d'Etat (BDCF, 5/09, n° 61), le rapporteur public, Edouard Geffray, s'était référé aux travaux et débats parlementaires pour conclure que l'article 43-IV de la loi du 30 décembre 2004 procédait à une "validation asymétrique", dès lors que "seules étaient validées les impositions fondées sur l'application par l'administration du principe d'intangibilité".

Au total, le Conseil constitutionnel a donc sanctionné l'existence d'un traitement "asymétrique" du contribuable et de l'administration fiscale, cette dernière pouvant choisir entre l'application de la jurisprudence "SARL Ghesquière Equipement" et celle de la loi de validation. Il a, en conséquence, jugé que cette "validation asymétrique", parce qu'elle avait eu pour effet de priver à titre rétroactif le seul contribuable du bénéfice de cette jurisprudence, portait atteinte à l'équilibre des droits des parties et, par suite, méconnaissait les exigences de l'article 16 de la Déclaration de 1789.

Dans la décision commentée, le Conseil constitutionnel ne s'est pas interrogé sur l'existence d'un "but d'intérêt général [visé par le législateur] de valeur constitutionnelle", but qui aurait été de nature à justifier l'atteinte à ce principe constitutionnel. L'on peut en déduire qu'en l'espèce, un tel but d'intérêt général de valeur constitutionnelle était absent.

Dans ses conclusions sous la décision "Getecom", du 19 novembre 2008 (CE 3° et 8° s-s-r., 19 novembre 2008, n° 292948 N° Lexbase : A3127EBG), le rapporteur public, Nathalie Escaut, avait ainsi résumé les objectifs de cette loi de validation tels qu'ils ressortaient des travaux parlementaires : "restaurer la sécurité juridique troublée par [le] revirement de jurisprudence [du Conseil d'Etat issu de l'arrêt "SARL Ghesquière Equipement"], supprimer un effet d'aubaine qui aurait méconnu le principe d'égalité entre les contribuables, prévenir des dysfonctionnements des services publics fiscaux et juridictionnels résultant de multiples réclamations et recours et éviter un coût budgétaire évalué à 1,5 milliard d'euros par an et 4 milliards pour le passé". La décision n° 2010-78 QPC marque, ainsi, la volonté du Conseil constitutionnel d'encadrer et de limiter fortement les lois de validation en matière fiscale, nonobstant les conséquences financières, même comme en l'espèce manifestement assez élevées, que l'absence de loi de validation pourrait entraîner sur le budget de l'Etat.

A l'inverse, le juge constitutionnel a, dans une récente décision du 14 octobre 2010 (Cons. const., décision n° 2010-53 QPC, du 14 octobre 2010 N° Lexbase : A7697GBP ; lire N° Lexbase : N4249BQG), déclaré conforme à la Constitution une loi de validation dont l'objectif poursuivi par le législateur était notamment de "prévenir un contentieux lié à la détermination de [la] qualification [du prélèvement litigieux]" et d'"éviter que ne se développent, pour un motif tenant à la compétence du pouvoir réglementaire, des contestations dont l'aboutissement, eu égard aux montants financiers en jeu, aurait pu entraîner, pour l'Etat et les autres bénéficiaires des produits en cause, des conséquences gravement dommageables". Dans cette hypothèse, le vice couvert par la loi de validation tenait, toutefois, à la légalité externe et non interne du prélèvement.

Pour sa part, la Cour européenne des droits de l'Homme a refusé d'adopter un contrôle différencié selon le motif d'illégalité interne ou externe que la loi de validation a pour objet de neutraliser. La Cour a, dans l'arrêt "Joubert", du 23 juillet 2009 (CEDH, 23 juillet 2009, Req. 30345/05 N° Lexbase : A1212EK4, Dr. fisc., 2009, n° 38, comm. 474), jugé que constituait une atteinte au droit de propriété visé à l'article 1 du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme (N° Lexbase : L1625AZ9) une loi de validation des contrôles engagés en ce qu'ils étaient contestés sur le fondement d'un motif de pure légalité externe, l'incompétence territoriale des agents ayant effectué le contrôle.

II - Portée et effet de la décision du Conseil constitutionnel

A - L'application au contentieux fiscal d'un principe jusqu'alors spécifique au contentieux pénal

Jusqu'à présent, l'équilibre des droits des parties n'avait été reconnu qu'en matière de procédure pénale, le Conseil constitutionnel ayant, en particulier, jugé que, "si le législateur peut prévoir des règles de procédure différentes selon les faits, les situations et les personnes auxquelles elles s'appliquent, c'est à la condition que ces différences ne procèdent pas de distinctions injustifiées et que soient assurées aux justiciables des garanties égales, notamment quant au respect du principe des droits de la défense, qui implique en particulier l'existence d'une procédure juste et équitable garantissant l'équilibre des droits des parties" (3).

La décision n° 2010-78 QPC est donc d'autant plus intéressante que le principe constitutionnel auquel elle estime que la loi de validation porte atteinte est celui de "l'équilibre des droits des parties dans un procès", lequel découle du droit au recours juridictionnel effectif garanti par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'Homme, principe qui n'avait été jusqu'à maintenant reconnu par la jurisprudence du Conseil constitutionnel qu'en matière de procédure pénale. Selon le Conseil constitutionnel, c'est précisément l'asymétrie de la loi de validation, qui ne remettait en cause les effets du revirement de jurisprudence de la décision "SARL Ghesquière Equipement" uniquement quand ils étaient défavorables à l'administration, qui porte atteinte à ce principe d'équilibre des droits des parties.

L'application du principe constitutionnel d'équilibre des droits des parties pourrait avoir d'importantes conséquences en matière de contentieux fiscal. En effet, toute loi fiscale rétroactive "asymétrique" sera probablement jugée inconstitutionnelle, quels que soient les motifs d'intérêt général que pourrait mettre en avant le législateur. En outre, la solution retenue par le Conseil constitutionnel pourrait remettre en cause certaines des dispositions du Livre de procédures fiscales comme les dispositions de l'article R. 200-18 (N° Lexbase : L4995AEQ) qui octroient au ministre un délai d'appel qui peut excéder celui dont le contribuable dispose (cf. CE 9° et 10° s-s-r., 23 décembre 2010, n° 306228 N° Lexbase : A6968GNE et Thierry Lambert, Chronique procédures fiscales - Février 2011, Lexbase Hebdo n° 427 du 10 février 2011 - édition fiscale N° Lexbase : N3504BR9). La conformité de ces dispositions au principe constitutionnel de l'équilibre des droits des parties n'est pas évidente dès lors que la jurisprudence du Conseil constitutionnel n'interdit pas seulement au législateur d'instituer des "distinctions injustifiées", mais encore lui impose d'assurer "aux justiciables des garanties égales, notamment quant au respect du principe des droits de la défense, qui implique en particulier l'existence d'une procédure juste et équitable garantissant l'équilibre des droits des parties" (4).

C'est d'ailleurs sur le terrain du principe d'équilibre des droits des parties que le Conseil constitutionnel a, notamment, censuré les dispositions de l'article 575 ancien du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3968AZY) qui interdisaient à la partie civile de se pourvoir contre un arrêt de non-lieu de la chambre de l'instruction en l'absence de pourvoi du ministère public, après avoir relevé que si "la partie civile n'est pas dans une situation identique à celle de la personne mise en examen ou à celle du ministère public", la disposition contestée avait pour effet, en l'absence de pourvoi du ministère public, de priver la partie civile de la possibilité de faire censurer les arrêts de la chambre de l'instruction et ainsi d'"une partie de l'exercice effectif des droits qui lui sont garantis par le Code de procédure pénale devant la juridiction d'instruction" (5).

B - L'effet de la décision n° 2010-78 QPC sur les impositions

Le Conseil constitutionnel n'a pas reporté dans le temps l'entrée en vigueur de la déclaration d'inconstitutionnalité : l'abrogation du paragraphe IV de l'article 43 de la loi de finances rectificative pour 2004 prend donc effet à compter de la publication de la décision. Cependant, afin de donner un effet utile à la procédure, le Conseil a précisé que la déclaration d'inconstitutionnalité pourrait être invoquée dans les instances qui sont en cours à la date de publication de sa décision et dont l'issue dépend de l'application de la disposition déclarée inconstitutionnelle.

Les contribuables qui n'auraient pas introduit une réclamation à la date du 10 décembre 2010 (car la réclamation préalable obligatoire auprès de l'administration fiscale est partie intégrante de l'instance dès lors qu'elle ressortit de la juridiction contentieuse et est assimilée à une instance devant le juge de l'impôt) (6) et auxquels auraient été notifiés des avis de mise en recouvrement fondés sur les dispositions déclarées inconstitutionnelles ne pourront donc utilement invoquer le bénéfice de la décision n° 2010-78 QPC. Il en ira de même des contribuables pour lesquels le délai de réclamation serait expiré, les dispositions combinées des troisième au cinquième alinéas de l'article L. 190 et du c) de l'article R. 196-1 (N° Lexbase : L6486AEX) ne pouvant trouver à s'appliquer en raison de la limitation de l'effet de la déclaration d'inconstitutionnalité aux instances en cours. S'agissant des contribuables qui n'auraient pas encore fait l'objet, à la date de la décision du Conseil constitutionnel, d'avis de mise en recouvrement faisant suite à des redressements d'ores et déjà notifiés, il serait logique, même si cela ne semble pas découler directement du dispositif de cette décision, que l'administration fiscale recommande à ses services de ne plus procéder à l'avenir à des redressements fondés sur les dispositions du IV de l'article 43 de la loi du 30 décembre 2004.

Enfin, plus difficile sera la situation des contribuables dont le litige avait été définitivement tranché à la date de la décision du Conseil constitutionnel (en dehors donc de ceux dont le litige est pendant devant le Conseil d'Etat) : ceux-ci ne pourront se prévaloir de la décision n° 2010-78 QPC, mais ils pourraient peut-être, ainsi que l'évoque Stéphane Austry (QPC et contentieux fiscal. Le jour se lèverait-il enfin aussi pour les contribuables, FR Francis Lefebvre, février 2011), tenter une action en responsabilité fondée sur l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'Homme, l'impossibilité pour eux d'invoquer l'inconstitutionnalité de la validation législative pouvant être regardée comme portant une atteinte au droit au respect de ses biens devant donner lieu à réparation.


(1) Le premier paragraphe de l'article 43 ajoute l'article 38-4 bis au CGI afin de remettre en vigueur la règle de l'intangibilité du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit. Il apporte, toutefois, deux exceptions qui rendent inapplicable cette règle : 1/ lorsque l'entreprise apporte la preuve que les omissions ou erreurs entachant l'actif net sont intervenues plus de sept ans avant l'ouverture du premier exercice non prescrit ; 2/ lorsque les omissions ou erreurs résultent de dotations aux amortissements excessives au regard des usages mentionnés au 2° du 1 de l'article 39 du CGI (N° Lexbase : L3894IAH) déduites au cours d'exercices prescrits ou de la déduction au cours d'exercices prescrits de charges qui auraient dû venir en augmentation de l'actif immobilisé. Dans ces deux situations, l'application du principe de correction symétrique conduit à rattacher les conséquences de la rectification de ces omissions ou erreurs à leur exercice d'origine qui, par définition, est prescrit. Dès lors, ces omissions ou erreurs, qu'elles soient constatées par l'administration ou le contribuable, n'entraînent aucune conséquence fiscale. Enfin, le dernier alinéa du 4 bis de l'article 38 du CGI prévoit, lorsque l'entreprise corrige ses écritures comptables des omissions ou erreurs visées par l'une de ces exceptions et affectant l'actif du bilan, que les conséquences fiscales de cette correction sont neutralisées pour la détermination du bénéfice imposable.
(2) Décision n° 2010-53 QPC du 14 octobre 2010, cons n° 4 (prélèvements sur le produit des jeux) ; décision n° 2010-29/37 QPC du 22 septembre 2010, cons n° 10 (instruction CNI et passeports N° Lexbase : A8926E9H) ; décision n° 2010-19/27 QPC du 30 juillet 2010, cons. n° 18 (perquisitions fiscales N° Lexbase : A4552E7Q) ; décision n° 2010-4/17 QPC du 22 juillet 2010, cons. n° 16 ((indemnité temporaire de retraite outre-mer N° Lexbase : A9190E47) ; décision n° 2010-2 QPC du 11 juin 2010, cons. n° 22 (loi dite "anti-Perruche" N° Lexbase : A8019EYN).
(3) Décision n° 2010-612 DC du 5 août 2010, loi portant adaptation du droit pénal à l'institution de la Cour pénale internationale, cons. n° 13 (N° Lexbase : A9239E7C) ; décision n° 2010-15/23 QPC du 23 juillet 2010, région Languedoc-Roussillon et autres (C. proc. pén., art. 575), cons. n° 4 (N° Lexbase : A9193E4A).
(4) Décision n° 2010-612 DC du 5 août 2010.
(5) Décision n° 2010-15/23 QPC du 23 juillet 2010.
(6) CE, Assemblée, 31 octobre 1975, n° 97234 ({"IOhtml_internalLink": {"_href": {"nodeid": 1278196, "corpus": "sources"}, "_target": "_blank", "_class": "color-sources", "_title": "CE Contentieux, 31-10-1975, n\u00b0 97234", "_name": null, "_innerText": "N\u00b0\u00a0Lexbase\u00a0: A1377B9U"}}), RJF, 1975, n° 578.

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